Épinal

Chapitre VI - Nouvelle politique, nouvelle donne

 

Chapitre précédent (Espoirs... et désespoirs)

Après le désastre de l'élite, une saison de transition se profile en 1997/98. Le premier symbole de cette rupture est l'abandon du vert, couleur originelle du club, reniée au grand dam des puristes. Adieu aussi ces "Renards" morts-nés, qui n'auront vécu que le temps d'un hiver de triste mémoire. Les Dauphins sont nés... en bleu-blanc-rouge. Un clin d'œil à l'histoire de France et, surtout, un vrai ravalement de façade puisque l'ICE s'engage dans un vœu pieux : celui de la formation...

Ce projet est conçu par le président Claude Maurice, qui entreprend dès lors de remettre le navire à flot. Pour ce faire, il lance un plan de redressement et mise sur les jeunes avec le lancement d'un "Pôle France" lui permettant d'encadrer ses joueurs du cru avec quelques espoirs tricolores. Aux côtés des Guillaume Papelier, Anthony Maurice et Guillaume Chassard, les défenseurs Aymeric Gillet (Meudon) et Benoît Guillemot (Français Volants) apparaissent comme les plus prometteurs. Sans parler d'un Julian Marcos (Amiens) déjà polyvalent. Ce fut plus délicat en revanche pour Rishi Ovide-Étienne et Thomas Appert (Courbevoie) ainsi que pour les arrières rémois Sylvain Cravero et Laurent Payraud.

Prendre de l'expérience, dans un apprentissage rendu difficile par une (ré)adaptation délicate à l'antichambre. C'est le lot de la jeunesse, pourrait-on dire. Une jeunesse imprévisible, capable de contrarier le futur champion caennais (2-3) et d'être en dessous de tout face aux faibles Français Volants (3-3). L'indiscipline chronique (péché mignon de cette "bleusaille") n'arrange rien et ces prisons récurrentes s'avèrent aussi rédhibitoire que l'absence d'un vrai finisseur. Loin de compenser les défauts de cette jeunesse, l'expérience de "Féfé" Marciano et Christian Bozon, promu entraîneur-joueur, n'est pas suffisante. Pas plus que le métier de Sergueï Gorbouchine, le vétéran russe, venu de Belfort tempérer la fougue des jeunes loups de l'ICE. Et ce n'est pas peu dire connaissant Julian Marcos, qui s'est "fait les dents" en s'engageant à fond dans les duels, quitte à s'exposer aux pénalités. Rémi Caillou, lui, est exposé tout court devant son filet. Le jeune Amiénois (qui fut international junior en compagnie de Chassard) en profite comme prévu pour s'aguerrir aux côtés d'Alexis Der Sarkissian, issu pour sa part de la pépinière castelviroise. L'ancien gardien Laurent Fournier est en effet parti en D3 rejoindre d'ambitieux Mulhousiens, rejoint par un certain Roman Trebaticky pour qui Bordeaux n'a pas manifesté d'attentions particulières à l'intersaison.

Malgré tout la poule basse était inévitable vu les points perdus en route face à Strasbourg et le promu Cholet, deux rivaux directs. C'est encore plus dur en poule de relégation avec les "sudistes" Megève, Saint-Gervais et Nice qui trusteront d'ailleurs les trois premières places. C'est dire si les Dauphins seront loin de démontrer tout leur potentiel même si, par chance, les Français Volants étaient encore moins bien lotis qu'eux ! C'est toute l'histoire d'une saison qui ne restera pas dans les annales, certes, mais posa la première pierre d'un nouvel édifice.

Audit sportif et assainissement financier

Tandis que Poissompré retrouvait l'élite par procuration, en accueillant des Flammes Bleues de Reims privées de glace, les Dauphins peinent à retrouver leur standing d'antan en Nationale 1 en 1998/99. Pourtant, les espoirs de playoffs étaient permis avec un recrutement assez consistant. Néanmoins cette équipe est branchée sur courant alternatif et lâche trop de points à domicile. Un manque d'expérience collective et de maturité malgré un potentiel certain. Celui des Maurice, Chassard et Papelier, sans parler des rescapés du Pôle France (Frédérick Brodin, Aymeric Gillet et Benoît Guillemot).

Avant le départ inopiné de son Américain en automne, la ligne Sébastien Messon - Jonathan Jett - Jaroslav Šikl s'affirmait comme une bonne garantie au pointage. La fuite de Jett fait toutefois remonter Bouhadouf, préalablement repositionné en défense, et s'ajoute au départ de Stéphane Baills, pointé du doigt après deux prestations en demi-teinte. Ce 1-8 encaissé à Strasbourg entraîne d'ailleurs une remise en cause générale. Christian Bozon est déchargé du coaching au profit de Dusan Ilic et Stéphane Baills rejoint Grenoble. Le Poitevin Philippe Ranger, qui s'était égaré dans la jungle des ligues mineures américaines (WPHL) et est donc sans club, lui succède devant le filet avec un certain succès. Il y est même irréprochable... ce qui n'est pas le cas de tout le monde. Malgré le jeune Peter Slovák et la pige du Rouennais Thomas Duménil, l'arrière-garde encaisse une moyenne de buts élevée. Dès lors, il n'est pas étonnant que les points s'égarent à la maison (8-8 devant Tours, 5-7 devant Nantes et 6-10 en clôture face à Cholet), ce qui condamne l'ICE à la poule basse.

Pourtant, le potentiel est bien présent comme en témoigne cette belle victoire à domicile sur le leader strasbourgeois (6-2). Mais un autre derby haut en couleur surpasse bientôt la rivalité avec l'Étoile Noire. L'ascension rapide des Scorpions de Mulhouse, couplée à la présence d'anciens Spinaliens dans les rangs alsaciens (Piquemal, Trebaticky et ces Cyrille David et Patrick Pommier que l'on aime détester), donne naissance à une sacrée rivalité. Deux nets revers face aux Mulhousiens (3-7 à Poissompré, 4-11 à l'Illberg) lancent une série noire que les coéquipiers de Raphaël Marciano mettront plus de deux ans à briser...

En sollicitant l'ex-entraîneur national Kjell Larsson pour un audit interne, le président Maurice compte bien sonder les raisons de cette inconstance chronique. Sans succès, les données restant inchangées en poule de maintien avec quelques bons coups réalisés à Tours (6-2, avec un quadruplé de Bouhadouf), devant Megève (4-2), la "bête-noire" choletaise (5-4) et... et quelques couacs devant Toulouse (3-4), Cergy-Pontoise (2-6) et Tours (1-6). L'entraîneur-joueur Christian Bozon a beau retourner le problème dans tous les sens, ses troupes ne changent pas d'un iota. Le président Maurice, lui, n'y va pas par quatre chemins, prenant La Liberté de l'Est à témoin: " En fait ce sont des joueurs qui manquent de maturité et, à partir de constat, vous avez des résultats comme celui qu'on vient d'enregistrer face à Cergy et, en plus, devant nos sponsors". C'est sûr qu'il y a mieux comme publicité...

Les joueurs ont donc tout intérêt à terminer dans le trio de tête de cette N1 B, sous peine de décevoir leur président. L'objectif est rempli, ex æquo avec Saint-Gervais et derrière Megève et Toulouse. Mais l'essentiel est ailleurs. Les comptes, mis à mal ces dernières années, retrouvent du poil de la bête. La dette s'éponge lentement mais sûrement, et l'ICE version Claude Maurice sera dès lors citée comme un très bon élève en matière de gestion.

Les temps changent

La saison 1999/2000 est aussi celui du renouveau. Après trois ans de frustrations, l'ICE subit une première mutation en ayant recours à sa première vague d'immigration massive. Les joueurs français devenant "trop exigeants" aux dires du président Maurice, ce dernier plébiscite dès lors l'intéressant rapport qualité/prix de ces filières (venues de l'est principalement). C'est d'autant plus vrai que la formation bat de l'aile et qu'Épinal ne dispose plus d'une relève digne de ce nom, même si le club reste dans ce domaine l'un des tous meilleurs de la Ligue de l'Est.

Le retour d'un certain Jan Reindl n'est pas étranger à tout cela, lui qui entretient savamment ses "filières" et en déniche quelques exemplaires. Vladimir Domin notamment, le solide Tchèque aperçu à Angers quelques années auparavant et qui deviendra très vite la clé de voûte de la défense aux côtés du Slovaque Jozef Drzik. Le plus significatif reste Tomás Mysicka. Formé à l'école du Sparta de Prague, le jeune ailier tchèque n'y avait guère d'avenir malgré quelques apparitions en EHL (ligue européenne). À Épinal, le "petit prince" devient sensationnel, signant un hat-trick dès la première journée face à l'ogre brestois (5-4). Explosif et talentueux, Myšicka est la grande vedette d'une attaque nettement enrichie à l'intersaison.

Frédéric Dehaëne, pour sa part, fait sa première infidélité à son club toujours, Amiens, dans le but avoué d'accroître ses responsabilités. Il pilote un trio très performant aux côtés d'un blondinet vif comme l'éclair (Jussi Haapasaari) et d'un "Féfé" Marciano retrouvant une seconde jeunesse. Cela faisait longtemps qu'Épinal n'avait pas eu autant de répondant en attaque...

Cette fois donc, les Vosgiens ont su aller chercher les points nécessaires à la qualification en playoffs. Avec un Philippe Ranger comme assurance tous risques devant le filet, un Benoît Guillemot qui s'aguerrit aux côtés de Vladimir Domin et deux Finlandais (Tommi Åkerlund et Rami Carlstedt) pour compléter les rotations, la défense démontre qu'elle peut elle aussi assurer quelques précieux points (2-1 à Nantes, 3-2 à Tours). Et ça, c'est nouveau à Épinal. En fait, seul Mulhouse (2-4) empêche l'ICE de faire carton plein à domicile.

Bien placés derrière les intouchables Brestois et Mulhousiens, les Dauphins retrouvent la poule haute. Et l'ivresse qui va avec, d'autant que les grandes soirées sont au rendez-vous. Le tenant du titre clermontois tombe début janvier (4-3), après un abordage réussi des Corsaires dunkerquois grâce à un hat-trick de l'inévitable Mysicka (6-2), les Albatros sont plumés à leur tour (5-3). Restent le syndrome des Scorpions pour doucher l'enthousiasme ambiant, avec une nouvelle dérouillée à l'Illberg (2-11). Les prémices d'une certaine usure mentale et physique pour les coéquipiers de Guillaume Chassard ?

Eh bien oui puisque les points laissés en route devant Saint-Gervais (4-4 et surtout ce 2-2 concédé à Poissompré) vont se payer à l'heure des comptes. Car les bénéfices d'une victoire à Dunkerque (4-3) s'estompent car les Vosgiens, blanchis par les Scorpions (0-6) et restés en rade à Brest (3-8), perdent gros devant Villard-de-Lans à domicile (2-4). Avant de laisser leurs dernières illusions dans la Cité Vauban (3-4). Briançon qui convoitait également l'ultime strapontin, profite alors d'un but décisif du vétéran Michel Leblanc pour se qualifier. Ce dénouement laisse d'amers regrets aux hommes de Jan Reindl, qui avaient assurément les moyens de voir plus haut et de goûter aux demi-finales.

Reindl s'en va...

Cette campagne posait toutefois les jalons d'une prometteuse saison 2000/01. Le champion Brest reparti... en D2 (!), Mulhouse endosse l'habit d'ogre et les Dauphins, sur leur lancée, celui d'outsiders de la poule nord. Logique puisque tous les cadres ont re-signé, excepté Philippe Ranger (Dijon) et Rami Carlstedt (Clermont). Les atermoiements de Jan Reindl sont en revanche plus ennuyeux. Le Tchèque est injoignable de longues semaines durant avant d'annoncer son retour au pays, évoquant via la Liberté de l'Est une "perte d'efficacité" et une certaine lassitude due à l'éloignement de ses proches. "Je ne suis peut-être pas très correct vis à vis de certaines personnes et notamment de l'équipe, mais, j'écoute mon cœur. La situation que je vivais ici a fini par me pourrir la vie. Chez moi, j'étais devenu un étranger... Je n'étais plus le père de famille. Cette famille unie que nous étions à l'époque où j'étais joueur à Épinal. Une ville qui est aussi ma ville, où j'ai passé des moments merveilleux, comme joueur, et en famille. Je retourne vivre à Prague..."

Il n'en faut pas davantage pour déstabiliser l'équipe. Raphaël Marciano est propulsé entraîneur-joueur au pied levé et les Dauphins sont déjà au pied du mur. Ils tombent de haut à Dijon (5-10) avant de perdre "comme d'habitude" devant Mulhouse (2-4). Quelques retouches s'imposent donc pour le club tienne son équilibre, et en cela, le dépôt de bilan lyonnais fut une aubaine pour toute la Nationale 1 qui récupère les joueurs libres. Pas en reste, les Lorrains mettent la main sur l'Estonien Mihhail Kozlov. À l'arrière, le choix se porte sur le Slovaque Radoslav Regenda, histoire renforcer une défense numériquement limitée malgré la sécurité apportée par le duo de gardiens Yvan Bock - Jérôme Calatrava. Ces deux-là cohabitent bien et Calatrava s'affirme même comme une vraie assurance tous risques derrière l'ex-Gapençais. Avec Kozlov et Regenda, l'ICE signe ainsi six succès de rangs et s'affirme en perspective des playoffs.

Déjà présent l'an passé, Jussi Haapasaari évoluait alors dans l'ombre de Tomás Mysicka. Cette année, le lutin finlandais lui vole tout simplement la vedette grâce à son influence grandissante au pointage. Non content de semer le trouble par sa vivacité, Haapasaari prend une nouvelle dimension et termine meilleur compteur de la première phase. Il est même considéré comme le "meilleur joueur de division 1" par Daniel Maric, le coach d'une formation dijonnaise ayant poussé l'ICE dans ses derniers retranchements en première phase (2-1).

L'homogénéité de l'attaque, avec les tauliers habituels, préserve l'ICE de toute mauvaise surprise avant des play-offs décrochés haut la main. De constitution robuste et pas maladroit pour deux sous, Kozlov apporte un plus indéniable aux côtés de Frédéric Dehäene et de l'opportuniste Mika Taurivuo, un solide "buteur venu du froid". Le duo Mysicka-Haapasaari, complété par Marciano, tourne lui à plein régime et Chassard prend une nouvelle dimension. Après une courte défaite d'entrée (2-3 à Nantes), Mysicka se remet d'un but injustement invalidé face à Briançon (4-4) et marquant, cette fois, le filet de la gagne à Dijon (3-2). Les rouages sont parfaitement huilés et une nouvelle dynamique victorieuse se dessine. Un nouveau statut aussi, même si trois buts encaissés dans les dernières minutes ruinent l'exploit qui se tramait à Villard-de-Lans (3-6). Le scénario s'inverse le mercredi suivant où les Dauphins sont au coude à coude avec les Scorpions. Poissompré s'enflamme lorsque Taurivuo, à cinq minutes du terme, trompe pour la troisième fois Neckár (5-4). Finie la disette, envolée cette frustration durant depuis huit matchs. Place à l'ivresse, celle de corriger les Alsaciens trois jours après, à l'Illberg de surcroît (5-3). Mulhouse sort alors d'une "crise" interne conclue par le départ de l'entraîneur suisse Pascal Ryser. Les Lorrains, eux, sont sur un petit nuage.

En embuscade à l'approche de demi-finales ne pouvant plus leur échapper, les Dauphins lâchent du lest en fin de parcours, notamment devant Clermont (3-5), mais régalent leur nombreux public d'un vrai match de gala face au leader villardien (5-5 avec un triplé de l'inévitable Haapasaari). Dans la course aux demis, Nantes sera le dindon de la farce puisque Saint-Gervais va se qualifier à la surprise générale pour y affronter Villard. Du coup, c'est Mulhouse qui est promis à Épinal. De chaudes retrouvailles... Sans Kozlov (appelé "sous les drapeaux" pour le Mondial B), les Vosgiens perdent bientôt Haapasaari, qui avait scoré deux fois avant d'être "achevé" par une charge de Piquemal. Le match aller tombe du côté alsacien (2-3).

Ces pertes sont rédhibitoires pour le match retour, dans un Poissompré chaud bouillant, mais vite éteint par le métier des Faith, Konstantinidis et autres Trebaticky (2-3). Le rêve était passé. Les Spinaliens, émoussés moralement et physiquement, ne sont pas dans le coup à Saint-Gervais (1-6) et plombent d'entrée leur "petite finale" puisque les Aigles tiennent le choc au retour (2-5) pour finir "bronzés". Triste épilogue pour "Féfé" Marciano, dont la carrière, commencée à Dijon trente ans plus tôt, s'achève après 800 points compilés en onze ans au club.

... Trebaticky revient !

Toujours dans cette même continuité, les Spinaliens repartent en 2001/02 forts de nouvelles certitudes. Celles d'être à leur tour devenus favoris en l'absence de Mulhouse, parti découvrir la Ligue Élite. Les retours inattendus de Cyrille David et Roman Trebaticky, écartés des Scorpions par Christer Eriksson, s'ajoutent aux arrivées de l'Amiénois Christophe Ribanelli et du Tchèque Karel Kadlec. Ce petit gabarit plein de sang-froid s'en vient compléter le duo Mysicka-Haapasaari pour former une ligne détonante, l'une des plus explosives du circuit. Celle des vétérans n'avait toutefois rien à leur envier avec Frédéric Dehaëne, Cyrille David et surtout Roman Trebaticky, qui accuse doucement le poids des ans... mais n'a rien perdu de son talent !

Si l'attaque (et notamment la ligne de Haapasaari) a bien tourné tout l'hiver, Épinal n'avait pas l'étoffe d'un champion. Sauf sur le papier. La faute à une irrégularité dictée par un rendement défensif insuffisant malgré la carrure du Tchèque David Vorel, venu de Viry à l'été. Le départ en automne de Benoît Guillemot, qui a progressé au contact de Vladimir Domin, n'arrange rien. L'irrégularité notoire d'Yvan Bock non plus, alors que son collègue gardien Julien Labat ronge son frein sur le banc.

Quoiqu'il en soit, l'ICE avait une belle carte à jouer dans cette division passée à la poule unique... et dont les valeurs sont resserrées par l'arrivée massive des étrangers. Car les temps ont changé et les équipes (comme Tours ou Strasbourg) deviennent de plus en plus cosmopolites... et donc plus compétitives même si Villard-de-Lans survole encore et toujours le championnat devant Dijon. Les Spinaliens, eux, sont branchés sur courant alternatif. Les résultats ne sont pas toujours à la hauteur des attentes, même si de belles victoires face à Nantes (4-2), Dijon (5-3) et Strasbourg (corrigé 7-3 au Wacken) redorent leur blason.

Orphelins de Mulhouse, les Vosgiens ne tardent pas à se trouver un nouveau rival avec Besançon. Les Séquanes d'Alain Pivron, qui avaient survolé la division 2 l'année précédente, s'amenaient à l'étage supérieur avec appétit. Le casse-tête devient insoluble pour les hommes de Marciano, déjà branchés sur courant alternatif. Trois défaites nettes et sans bavures face à Besançon (dont une en Coupe de France) n'arrangeaient rien... d'autant que les playoffs réservaient de chaudes retrouvailles avec les Séquanes. Ceux-ci partent favoris, forts de l'avantage psychologique et d'un gardien dominant à ce niveau, le Canadien Stéphane Ménard. Mais rira bien qui rira le dernier. À trente seconde près, les Dauphins raflaient le match aller (5-5) mais perdent Cyrille David, sur un mauvais coup de crosse bisontin. Il faut dire que David joue sans visière, ce qui explique la gravité des lésions oculaires et le force à rendre les armes. Coup dur pour les Lorrains, qui perdent-là un véritable battant.

Au retour dans le Doubs, après avoir mené dès la mi-match, l'ICE craque trois fois en cinq minutes. Avant d'égaliser par Trebaticky et de s'imposer tout au bout d'une mort-subite épique, sur un rebond gagnant de Mysicka (4-3). La joie démonstrative du buteur tchèque est partagée par de nombreux supporters ayant fait le court déplacement.

D'un derby à l'autre, Épinal devait ensuite écarter Dijon pour rejoindre Villard-de-Lans en finale. Sauf que le maigre avantage de l'aller (4-3) allait être vite dilapidé en Bourgogne (1-5). Le rêve était passé. Le bronze aussi, d'autant que les partenaires de Frédéric Dehaëne ne manifestaient pas un enthousiasme débordant d'en découdre avec Tours. C'était pourtant bien parti à l'aller, avant un relâchement fatal (7-5) permettant aux Diables noirs de remonter ce déficit au match retour, en mort-subite, sur un contre de Kamil Stastný (2-5). Encore une médaille en chocolat et, surtout, beaucoup d'amertume au vu du potentiel des troupes...

Le Super 16 malgré les doutes

Dès lors, une page se tourne. L'Élite, lasse de tourner en petit comité, fait les yeux doux à son antichambre pour retrouver un peu de crédibilité. Un temps intéressé, le président Maurice renonce finalement à rejoindre le nouveau "Super 16". Le jeu n'en vaut pas encore la chandelle et l'amer souvenir d'une triste saison 1996-97 n'incite pas à l'optimisme.

Kadlec et Drzik recrutés par Besançon, Chassard expatrié à Mulhouse et Haapasaari parti à Dunkerque, autant de pertes inévitables lors d'une intersaison pas comme les autres. Car la division 1 2002/03, saignée de ses plus fidèles protagonistes, peaufine sa refonte en accueillant les mieux classés de division 2 (hormis Brest, promu directement en Super 16). Avec sa consonance francilienne et son derby lorrain (Amnéville), la poule nord s'apparente à une longue, très longue routine avant les playoffs. C'est dire toute l'importance des matchs de Strasbourg, attendus de pied ferme par un public spinalien nostalgique de "l'ancienne division 1". Et si la visite rendue par Bob Gainey, en novembre lors de la réception d'Asnières (7-4), met un peu de baume au cœur, Strasbourg trotte dans toutes les têtes. Sauf qu'Épinal, le moment venu, n'a pas su hausser son niveau de jeu, perdant un match houleux au Wacken (2-4) avant de sombrer, quelques semaines plus tard à Poissompré (1-6). Il faut dire qu'entre temps, les coéquipiers de Rémi Caillou ont assuré le minimum syndical. Quitte à parfois tomber dans la facilité.

Dans ce contexte, la Coupe de France devient une parenthèse salvatrice coupant la monotonie. Ainsi Épinal réalise "l'exploit" de battre (3-2) à Dunkerque des Corsaires en difficulté dans le nouveau Super 16 avant de tomber Dijon (7-4). Cette victoire sur les Ducs, acquise fin décembre (et après la première phase), sonnant comme un petit déclic pour un groupe qui enregistre, quelques semaines plus tard, l'apport d'un joker défensif slovaque; Zdenek Balog. Un de plus diront certains, sceptiques à l'embauche de cet énième "mercenaire" des pays de l'Est. Car hormis l'insaisissable Václav Lukes, un petit gabarit très remuant sur la ligne de Trebaticky et de Mysicka, le jeune contingent tchéco-slovaque n'a rien de bien transcendant.

L'un d'entre eux, le défenseur Jaroslav Farár, restera pourtant comme le buteur décisif d'un match crucial à Strasbourg (4-3). Imitant du coup son aîné Vladimir Domin à l'aller (4-3). Cette première victoire sur l'Étoile noire, en janvier, est le tournant de la saison car les Dauphins prennent enfin conscience de leur potentiel à l'image de leur gardien Rémi Caillou, qui fut à la hauteur sans connaître les défaillances de ses prédécesseurs. Hormis le faux pas chez l'outsider niçois (4-7), les Vosgiens sortent le grand jeu dans les Alpes, pour deux déplacement successifs à hauts risques, et frappent un grand coup à Chamonix (5-4) et, surtout, au Mont-Blanc (8-5). Après cette fameuse victoire à Strasbourg, Tomás Mysicka, à trente petites secondes du terme, sauve les siens à Cergy (8-7) et les Dauphins dominent ensuite Nice (4-2) avant de déjouer Chamonix (4-2).

Restait à gravir le Mont-Blanc, cette alliance entre Saint-Gervais et Megève qui faisait office de favorite quelques semaines auparavant. Avec une intensité rappelant celles de chaudes soirées de division 1, l'ICE surmonte l'Avalanche (5-3) et devient mathématiquement championne de la division. Du bel ouvrage pour un trophée tant convoité... et une accession devenue inévitable malgré les réticences initiales du président Maurice. Chat échaudé craignant l'eau froide, il n'a pas oublié les douloureux précédents qui sont à chaque fois (ou presque) soldés par un dépôt de bilan.

Chapitre suivant (Une montée mieux préparée)

 

 

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