Russie - Bélarus (6 mai 2009)

 

Quarts de finale des championnats du monde.

Kovalchuk sort la Russie du piège

C'est la dixième rencontre de l'histoire entre la Russie et le Bélarus, et ce dernier n'a pas forcément été ridicule jusqu'ici avec une victoire et un nul. Bien sûr, tout cela date un peu et les Russes sont redevenus forts aujourd'hui, mais même l'an dernier, ils avaient été poussés aux tirs au but. Ils ont donc toutes les raisons de se méfier d'un match piège face au système défensif mis en place par Glen Hanlon.

De plus, le Bélarus a récupéré ses trois principaux blessés Koltsov, Kalyuzhny et Salei. Dans le camp russe, Danis Zaripov, après un essai non concluant il y a quelques jours, a définitivement repris l'entraînement hier, mais le staff n'a pas voulu risquer de l'aligner dans un match présumé jouable sans lui.

C'est pourtant le Bélarus qui commence mieux et obtient la première supériorité numérique pour une faute de Mozyakin. Ce n'est cependant pas son exercice de prédilection. Avec 9,7%, il a les pires statistiques du tournoi. Et on comprend pourquoi en voyant deux de ses joueurs se percuter à la ligne bleue le long de la bande ! Il aurait pourtant pu ouvrir le score quand un lancer d'Andrei Antonov frappe le poteau.

L'activité dans le slot de Saprykin et de Radulov provoque la première pénalité de Demagin. Le jeu de puissance russe est, sans surprise, beaucoup plus convaincant, mais Sergei Mozyakin n'arrive pas à concrétiser trois occasions, un rebond et deux passes de derrière la cage de Tereshchenko. Cet avantage numérique a servi à réveiller la Russie qui était partie lentement : dorénavant, son jeu de passes est au point, elle monopolise le palet et multiplie les occasions, mais avec pas mal de déchet dans le dernier geste.

Tant qu'elle n'arrive pas à marquer ce premier but, la Russie ne peut pas être sereine. Son gardien Ilya Bryzgalov n'est pas totalement rassurant les rares fois où il est sollicité. Et il y a de quoi s'inquiéter quand Radulov quitte la glace et rentre aux vestiaires. Il revient cependant quelques minutes plus tard, pendant une infériorité numérique... où la meilleure occasion est pourtant pour Morozov et Tereshchenko en contre. Le Bélarus bute toujours sur son powerplay défaillant, et la Russie sur Mezin. Cela fait donc 0-0 à la première pause.

Tant va la cruche à l'eau... Gorovikov pense peut-être qu'il peut se permettre la troisième pénalité du match. Mais cette fois, après un lancer de Ruslan Salei, Mikhaïl Grabovsky prend le rebond et décale son capitaine Konstantin Koltsov qui marque le but qui peut tout changer (0-1).

La Russie est en train de se la jouer un peu facile, à l'instar d'Aleksei Tereshchenko qui fait une passe à l'adversaire en zone neutre, même s'il rattrape aussitôt son erreur en se couchant devant le tir puis en récupérant lui-même le contrôle du palet. Tereshchenko fait même mieux que ça, puisqu'il vient faire écran sur un tir anodin de Vitali Proshkin pour l'égalisation (1-1).

Lorsqu'Ugarov dégage le palet hors de l'aire de jeu, Nikulin gâche cette chance par une obstruction stupide sur Grabovsky derrière sa propre cage. Mais les Russes s'installent même à 4 contre 4, et Viktor Kostyuchenok, l'ancien défenseur des Albatros de Brest, accroche Kuryanov. Cette situation de 4 contre 3 est idéale pour les hommes de Bykov, mais Morozov, décalé côté droit, manque son slap. La défense biélorusse empêche ensuite la passe à Kovalchuk et ne laisse aucune autre solution à Proshkin que de prendre deux tirs, tous deux contrés par des défenseurs.

Les Russes sont de plus en plus frustrés, et au retour au complet, Bryzgalov prend un mauvais but en laissant passer sous son aisselle droite un tir d'Antonenko (1-2). Les rouges s'apprêtent à gamberger, mais utilisent encore la seule méthode qui vaille pour battre Mezin : mettre un joueur devant la cage, en l'occurrence Oleg Saprykin, pendant que Vitali Atyushov prend un tir en angle (2-2). Maintenant, ils sont libérés, Radulov revient de derrière la cage, et Aleksandr Frolov met le rebond au fond (3-2). En 23 secondes, la Russie est passé du gros doute à l'énorme soulagement.

Elle s'autorise alors une indiscipline coupable en fin de deuxième tiers : coup de crosse de Kovalchuk sur la main de Kalyuzhny, puis obstruction de Kalinin sur Grabovsky. À 3 contre 5, Bryzgalov ne voit pas partir le slap de Ruslan Salei après une passe le long de la bleue d'Antonenko (3-3). Le Bélarus est encore en avantage numérique et Bryzgalov laisse un dernier rebond face au revers d'Ugarov juste avant la seconde pause. Slava Bykov donne alors pour consigne à Aleksandr Eremenko de s'échauffer.

Bryzgalov cède donc sa place à Eremenko pour le dernier tiers-temps. Celui-ci a peu de travail car le Bélarus, qui a réduit ses lignes (Mikhalev, Stefanovich, Korobov sont laissés sur le banc), s'applique surtout à défendre. Sur une rare incursion des blancs, Antonenko est mis au sol et la Russie part à deux contre deux. Ilya Kovalchuk, qui a déjà pris une assistance plus tôt dans le match, se décale par rapport au défenseur Kostyuchenok et envoie un petit tir qui trompe Andrei Mezin entre les jambières (4-3). Mezin a craqué au pire instant, alors que Kovalchuk ne pouvait choisir son meilleur moment pour marquer son 41e point en championnat du monde et battre ainsi le record de Yashin (record post-URSS bien sûr). Sur sa lancée, Kovalchuk élimine Usenko et traverse devant la cage pour faire se coucher Mezin, mais il ne lève pas assez le palet qui échoue dans la jambière du gardien, solidement ancrée à son poteau.

Le Bélarus est obligé de faire le jeu et n'est pas à l'aise. Les problèmes de construction commencent dès les passes pour sortir de la zone. Les palets perdus ne causent pas trop de mal, et les blancs peuvent garder espoir jusqu'à la fin, jusqu'à un temps mort de Glen Hanlon à douze secondes de la fin pour une mise au jeu en zone offensive. Grabovsky gagne l'engagement devant Tereshchenko pour un dernier lancer, contré. C'est fini.

Glen Hanlon, ancien gardien, vient prendre dans ses bras Mezin. Il sait combien le héros de tant de victoires doit être désabusé par sa culpabilité sur ce but décisif et s'évertue à le réconforter.

La Russie s'est sortie du piège, et elle a peut-être passé aujourd'hui l'obstacle le plus difficile à aborder psychologiquement, pour la conservation de son titre. Elle attend maintenant sa demi-finale vendredi.

Vendredi, ce sera également le grand jour pour le Bélarus, mais pour une autre raison. C'est le jour où se décidera sur l'organisation du Mondial 2014, et le pas décisif vient sans doute d'être fait : tous les membres du congrès vont se voir distribuer une copie d'un document signé par son Ministre des Affaires Étrangères, Sergei Martynov, promettant que pendant trois semaines en mai 2014, on pourra entrer sans visa au Bélarus ! Tous les atouts auront alors été mis de son côté pour l'emporter lors du vote.

Compte-rendu signé Marc Branchu / photos Francis Larrede

 

Commentaires d'après-match

Vyacheslav Bykov (entraîneur de la Russie) : "On a vu combien les Biélorusses voulaient aller en demi-finale. Nous avons eu un peu plus de réussite. Ce n'était pas le jour de Bryzgalov, et le reste de l'équipe était un peu nerveux. Pour ne pas qu'Ilya déraille, j'ai décidé de le remplacer par Eremenko, qui avait été excellent au dernier match. Je ne veux pas jeter la pierre à Ilya. Peut-être la tension des play-offs. Mais il jouera probablement la demi-finale, il est un des éléments importants du mécanisme. [...] Si j'ai pensé aux conséquences de la défaite ? C'est du hockey, quelles conséquences ? Est-ce qu'on vit à l'époque de Staline ? Bon, je sais ce que vous attendez : ça aurait pu être une tragédie, un drame. Mais les Biélorusses sont dans les huit, comme les autres. Et le fait que l'on soit revenu deux fois au score dit le haut niveau de notre équipe."

Glen Hanlon (entraîneur du Bélarus) : "Je suis fier de mes gars qui ont fait un excellent tournoi. Le hockey du Bélarus a fait un pas de géant en avant. Il y a trois ans à Riga, après la défaite en quart de finale, tous se tapaient dans les mains et se félicitaient du bon résultat. Aujourd'hui, les joueurs étaient assis dans les vestiaires, prostrés par l'échec. Aux prochains Mondiaux, nous nous battrons pour aller plus haut."

 

Russie - Bélarus 4-3 (0-0, 3-3, 1-0)

Mercredi 6 mai 2009 à 16h15 à Berne. 8337 spectateurs.

Arbitrage de Jyri Petteri Rönn (FIN) et Derek Zalaski (CAN) assistés d'Anton Semionov (RUS) et Felix Winnekens (ALL).

Pénalités : Russie 16' (4', 8', 4'), Bélarus 10' (2', 4', 4').

Tirs : Russie 32 (15, 11, 6), Bélarus 22 (6, 10, 6).

Évolution du score :

0-1 à 22'39" : Koltsov assisté de Grabovsky et Antonenko (sup. num.)

1-1 à 25'18" : Proshkin assisté de Kovalchuk et Tereshchenko

1-2 à 33'52" : Antonenko assisté de Grabovsky et Kalyuzhny

2-2 à 36'39" : Atyushov assisté de Radulov et Saprykin

3-2 à 37'02" : Frolov assisté de Radulov

3-3 à 39'22" : Salei assisté d'Antonenko et Grabovsky (double sup. num.)

4-3 à 47'22" : Kovalchuk assisté de Morozov

 

Russie

Gardien : Ilya Bryzgalov puis Aleksandr Eremenko à 40'00".

Défenseurs : Vitali Proshkin - Ilya Nikulin ; Vitali Vishnevsky - Oleg Tverdovsky (A) ; Dmitri Kalinin - Vitali Atyushov ; Denis Grebeshkov - Konstantin Korneev.

Attaquants : Ilya Kovalchuk (A) - Aleksei Tereshchenko - Aleksei Morozov (C) ; Aleksandr Frolov - Sergei Zinoviev - Nikolai Zherdev ; Oleg Saprykin - Konstantin Gorovikov - Aleksandr Radulov ; Sergei Mozyakin - Anton Kuryanov - Aleksandr Perezhogin.

Absents : Anton Volchenkov (jambe), Danis Zaripov (ménagé), Vassili Koshechkin (G).

Bélarus

Gardien : Andrei Mezin.

Défenseurs : Ruslan Salei (A) - Aleksandr Ryadinsky ; Dmitri Korobov - Vladimir Denisov ; Viktor Kostyuchenok - Ivan Usenko ; Andrei Antonov.

Attaquants : Konstantin Koltsov (C) - Andrei Stas - Sergei Demagin ; Aleksei Ugarov - Mikhaïl Grabovsky - Aleksei Kalyuzhny ; Mikhaïl Stefanovich - Andrei Mikhalev - Yaroslav Chuprys ; Oleg Antonenko (A) - Evgeni Kovyrshin - Aleksandr Kulakov.

Remplaçants : Vitali Koval (G), Andrei Bashko. Absents : Aleksandr Makritsky (épaule), Dmitri Meleshko (risque de commotion), Igor Brikun (G).

 

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