Bâle - Lugano (6 mars 2008)

 

Play-out de LNA, premier tour, match 4.

Dolcissimo Lugano

Personne ne s'attendait, au sortir d'une saison régulière ayant fait office de chemin de croix (16 points grappillés en 50 matchs !), à ce que Bâle puisse inquiéter Lugano dans ce premier tour du play-out. Et pourtant, au sortir des trois premiers opus, les Rhénans ont arraché un succès et n'ont cédé, lundi soir, qu'en mort subite à la Resega (3-4)... L'enjeu est donc bien réel car le sort de la série, après l'improbable déroute bianconera ici même samedi dernier (3-5), est relancé.

Inutile de revenir sur les péripéties sportives qui auront émaillé l'automne-hiver luganais. Sa dynamique collective rompue par le départ de Jukka Hentunen vers les riches Ak Bars de Kazan (dès la mi-octobre) et tourmentée par les blessures, Lugano aura couru tout l'hiver après une stabilité perdue. Le premier fusible à sauter est bien souvent l'homme de banc, et Ivano Zanatta, malgré l'appui du vestiaire, dut quitter ses fonctions début décembre. Son successeur, le rigide Kent Ruhnke, ne tint toutefois qu'une trentaine de jours à la tête du HCL. Désavoué par les cadres de l'équipe et par des résultats encore plus calamiteux.

Le retard engendré au classement dès le mois d'octobre fut donc irrattrapable, par faute d'inconstance chronique et d'attaque poussive. Sandy Jeannin, le futur Fribourgeois, se sentit alors bien seul sur le front de l'offensive malgré l'arrivée (plus pompeuse que prolifique) du "rasta rocket" Anson Carter et celles, plus récentes, des Nordiques Jonas Höglund (ex-Davos) et Toni Häppollä. Sans parler du médiatique retour au pays d'un David Aebischer disgracié outre-Atlantique.

L'objectif du légendaire John Sletvoll, sorti de sa retraite pour succéder à Kent Ruhnke et raccrocher le bon wagon, n'a donc pas été atteint mais le "Mage" doit encore réussir un dernier pari. Éviter à tout prix un nouvel affront.

Comment qualifier autrement une défaite face à cet EHC Bâle-là ? Perclus de blessures et de défaites (quarante-six en cinquante parties), les hommes de Mike McParland ont attendu six mois pour que leur saison ne débute vraiment. Il faut croire qu'ils sont désormais prêts, dernièrement renforcés du Tchèque Radek Duda (ex-Langnau) pour compléter le plus faible contingent étranger du pays (qu'avait rejoint en hiver l'attaquant russe Maksim Spiridonov, viré de Novokuznetsk). Et si le vétéran Yves Sarault fut l'un des moteurs du dernier succès en date, il faudra un petit exploit pour que les Rhénans renouvellent une telle performance ce soir.

Et pourtant la "squadra", à peine instruite de sa mésaventure de samedi dernier, va passablement se compliquer la vie. En butant, tout d'abord, sur un Simon Züger impeccable devant une défense l'étant un peu moins, car allégée depuis de longues semaines de quelques-uns de ses cadres. C'est pareil me direz-vous du côté tessinois où le top-scoreur Sandy Jeannin réhausse des lignes arrières déplorant, elles, les blessures de Julien Vauclair et Steve Hirschi. Et l'absence d'un autre international, plus occasionnel celui-là, Timo Helbling. De quoi expliquer les soucis connus ce soir défensivement par les deux protagonistes, malgré la polyvalence et le savoir-faire de Sandy Jeannin...

Les Rhénans, eux, tentent comme ils peuvent de créer un soupçon de danger aux abords du slot luganais. Imprécis, ils ne constituent pas, en ces premiers instants, de réelles menaces malgré la hardiesse de Radek Duda. Le Tchèque est très vite soupçonné, aux côtés du centre canadien Justin Papineau et de l'ailier Stefan Voegele, d'être le seul à mettre en péril la garde d'Aebischer...

Mais l'ex-doublure de Patrick Roy peut encore dormir tranquille. Pour l'instant du moins, car l'essentiel du danger est dirigé contre un Simon Züger qui essuie sans broncher les hostilités de ses anciens coéquipiers. Ces derniers, bénéficiant d'un marquage très "large" des arrières bâlois, n'ont aucun mal à s'amener aux portes du fort défendu par Züger.

Les grandes manœuvres s'enchaînent et le stade supérieur est rapidement atteint. Victime de son explosivité, Duda forechecke en peu trop ardemment aux yeux de Roland Stalder (07'38"). Le head moustachu (et tatillon de surcroît), offre-là une première occasion d'expression au jeu de puissance visiteur en doublant la peine du tchèque (soit retenir et charge avec la crosse). Sandy Jeannin en pointe et sous la houlette du vif Marty Murray, le powerplay se place rapidement en faisant parler sa fluidité mais le puck, s'il circule vite et bien, vient rarement goûter à l'équipement de Simon Züger. Hormis quelques lancers éloignés et une déviation de Conne (10'05"), l'ex-cerbère luganais (expédié à Bâle pour, rappelons-le, faire de la place à David Aebischer) n'est finalement pas si inquiété que cela. Résultat le jeu de puissance, déjà guère brillant en saison régulière, ressort muet de sa première représentation !

Plus ou moins livré à lui-même, Simon Züger retarde l'échéance mais reste bien aidé par la maladresse bianconera. Par deux fois Sannitz rate une cage grande ouverte (13e) alors que Murray, jaillissant au rebond de Wilson, constate à son tour la solidité du numéro quarante-sept (13'58").

Les "Züberboulettes" d'Abby

Bienheureux soit Züger car lui, au moins, est bel est bien dans le feu de l'action ! Au contraire d'un David Aebischer bien peu sollicité en raison des montées très éparses de Bâlois peu percutants. Enfin, pas tous, puisque ce diable de Radek Duda, toujours prompt à secouer le cocotier, surnage dans un secteur lui aussi décimé par les blessures (notamment de Thomas Nüssli). Sur une montée latérale rageuse, le Tchèque s'arrache dans le coin droit et adresse un petit lancer ligne de fond, qu'Aebischer laisse étonnement filer dans son dos (1-0 à 15'53").

Enhardis, les locaux appuient sur le champignons et obtiennent, dans la foulée, leur premier avantage numérique de la partie (16'41"). En fait, le pensum d'Andreas Hänni ne durera que six secondes, le temps que Radek Duda, encore lui, ne contourne la cage pour servir Justin Papineau au poteau gauche de David Aebischer. Et dans un angle très fermé, le top-scoreur rhénan logera la rondelle sous la barre (2-0 à 16'47").

Lugano a fait, en l'espace d'une minute, dans le "comique burlesque" (pour paraphraser la TSR samedi dernier au terme de la première débâcle sur les rives du Rhin). Le toile bâloise se tissant doucement, les Suisses italiens sauront-ils s'en dépêtrer ?

Les pendules à l'heure

Un bon coup de gueule dans les vestiaires, ça aide à remettre le pendules à l'heure. Normal, me direz-vous, au pays de l'horloge. Mais pas au sein d'"Il Grande" Lugano ! Décidément, les bianconeri sont étonnants. Les frites frétillent encore sous la dent que Thierry Paterlini, lancé dans l'enclave par une passe flippé de Flavien Conne, s'en vient confondre du revers Simon Züger entre les jambières (2-1 à 20'51"). Landon Wilson, lui, passera la seconde couche en reprenant pleine lucarne un centre tendu de Marty Murray (2-2 à 21'13"). En deux coups de pattes bien sentis, ils effacent ainsi cette pathétique ardoise et repartent du bon pied. Du moins le croit-on.

Car quelque chose paraît cassé avec ce Lugano-là. Comme une résurgence des tourments de l'automne, la continuité défensive et, pire encore, la motivation peine à suivre. Par chance, David Aebischer retrouve tout son aplomb en enrayant, notamment, une échappée d'un Yves Sarault toujours bon pied bon œil (24'41"). Et ce n'est pas forcément mieux aux avant-postes malgré une passe tendue de Wirz que laisse filer Näser vers un Jeannin coupant dans le slot, mais ratant le coche (31e).

Finie la démobilisation, la défense bâloise joue enfin son rôle en cet acte médian. Un placement plus rigoureux, couplé à des interventions décisives, freinent un processus luganais mis à mal par cette couverture. Bien sûr, la faible inspiration des bianconeri pèse lourdement dans ce constat et se traduit par un nouveau powerplay sans envergure. Et si Brett Hauer, en dégageant stupidement par-delà les plexis latéraux, se joint au banc d'infamie (34'23") sitôt celle de Daniel Rubin tuée (32'24"), le box-play rhénan s'en tire avec les honneurs.

De quoi favoriser davantage d'audace offensive au fil des minutes. Les récupérations, plus fréquentes, aboutissent parfois à quelques bons schémas, comme cette montée du vétéran Sarault non suivie par Schnyder, le lutin rhénan ratant le palet dans le slot (37'58"). Sans pour autant écarter un danger cultivé par un arbitrage contesté (méconduite de match et pénalité majeure contre Yves Sarault) et les internationaux bianconeri. Kévin Romy en tête (38'57"). La double peine, cumulant celle de Lukas Gerber (39'17"), rapproche sensiblement le couperet. Sur une temporisation de Sandy Jeannin, Marty Murray dégaine à bout portant au milieu d'une pluie de boulettes de papier, expression de la colère d'un public rhénan certes clairsemé, mais outré par l'expulsion de Sarault.

Chiesa les tire du mauvais pas

Certains (courageux) partisans de la St.Jakob-Arena diront que bien mal acquis ne profite jamais. Le jeu de puissance tourné en bourrique malgré le fameux duo Jeannin-Murray, Lugano peut enrager de ne trouver la clé du coffre "zügerien". Mais parfois, il suffit d'un petit rien, un centre dévié par le patin d'un défenseur rhénan par exemple, pour que la serrure se déverrouille. Simon Züger, pris à contre-pied, en fait l'amère expérience. Alessandro Chiesa, parti déborder côté gauche, peut jubiler (2-3 à 51'38").

Assurément regrettable vu la physionomie plus qu'indécise d'un dernier acte suspendu à l'indiscipline tessinoise. Avant ce coup du sort, Bâle, toujours porté par l'abattage d'un Radek Duda intenable, s'échinait à faire fructifier son travail de sape. Payée en cachots sonnant et trébuchants, cette activité se heurte non seulement à un Sandy Jeannin impressionnant dans son costume défensif, mais aussi et surtout à un David Aebischer autrement plus solide. Le Fribourgeois joue de la botte pour inlassablement repousser les lancers adverses.

Peine perdue pour Bâle, qui jettera ses dernières forces dans la bataille sans arracher une égalisation aucunement imméritée. Jusqu'au bout, la lanterne rouge de la saison régulière pressera, encore et encore, mais ne parviendra jamais à ses fins. L'offensif Brett Hauer passe entre les mailles du filet et sert Radek Duda mais l'ex-SCL Tiger ne cadre pas (55'49"). Idem sur une entrée de zone de l'Américain, relayée par Papineau mais non convertie par Della Rossa à bout portant. Pilier de la Nati version Ralph Krueger, Patric Della Rossa déviera ensuite un poil trop à droite (57e) alors qu'une charge dans le dos d'Andreas Hänni sur Stefan Voegele autorisera une toute dernière opportunité (59'23"). Le siège est soutenu mais l'EHC Basel aura laissé passer sa chance...

Lugano, vainqueur ronronnant d'un match qui n'aura jamais atteint les sommets, autant dans l'intensité qu'en terme de passion, s'est rapproché de son maintien officiel en LNA. Les joueurs du Tessin, à un match des vacances, ont chichement gagné devant un adversaire limité et diminué. Mais pas encore enterré à quelques encablures des barrages...

Désignés joueurs du match : Radek Duda pour Bâle et Landon Wilson pour Lugano.

Compte-rendu signé Jérémie Dubief

 

Bâle - Lugano 2-3 (2-0, 0-2, 0-1)

Jeudi 6 mars 2008 à 19h45 à la St.Jakob-Arena. 2563 spectateurs.

Arbitrage de Roland Stalder assisté de Julien Dumoulin et Nicolas Fluri.

Pénalités : Bâle 37', Lugano 20'.

Tirs : Bâle 22 (6, 9, 7), Lugano 39 (15, 12, 12).

Évolution du score

1-0 à 15'54" : Duda

2-0 à 16'47" : Papineau assisté de Duda et Voegele (sup.num.)

2-1 à 20'51" : Paterlini assisté de Conne

2-2 à 21'13" : Wilson assisté de Murray et Höglund

2-3 à 51'38" : Chiesa assisté de Conne

 

Bâle

Gardien : Simon Züger [sorti de sa cage de 59'23" à 60'00"].

Défenseurs : Brett Hauer (C) - Franco Collenberg ; Patrick Bloch - Ralph Stalder ; Lukas Gerber - Gian-Andrea Randegger ; Markus Wüthrich.

Attaquants : Radek Duda - Justin Papineau - Stefan Voegele ; Daniel Rubin - Yves Sarault - Stefan Schnyder ; Patric Della Rossa (A) - Andreas Camenzind - Julian Walker ; Daniel Boss - Sandro Tschuor - Roger Rieder ; Stefan Tschannen.

Remplaçant : Reto Schürch (G). Absents : Stanislav Hudec, Ralf Bundi, Thomas Nüssli et Adrien Plavsic (tous blessés), Maksim Spiridonov (étranger surnuméraire), Régis Fuchs, Michele Zanatta, Nicolas Studer et Jakub Horak (choix de l'entraîneur).

Lugano

Gardien : David Aebischer.

Défenseurs : Yannick Tremblay [sorti à 20' après un coup à l'épaule] - Alessandro Chiesa ; Andreas Hänni - Sandy Jeannin (C) ; Matteo Nodari - Krister Cantoni.

Attaquants : Landon Wilson - Marty Murray - Jonas Höglund ; Thierry Paterlini - Flavien Conne - Andy Näser (A) ; Mike Knöpfli - Kévin Romy - Dario Kostovic ; Valentin Wirz - Raffaelle Sannitz - Tristan Vauclair.

Remplaçant : Raffael Walter (G). Absents : Julien Vauclair, Fabrizio Conte et Steve Hirschi (tous blessés), Anson Carter et Toni Häppolä (étrangers surnuméraires), Timo Helbling.

 

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