Spartak Moscou - CSKA Moscou (28 février 2008)

 

Match comptant pour la cinquante-sixième journée de Superliga russe.

188e derby entre le Spartak et le CSKA ! Et la veille du match, le site internet du Spartak annonce qu'il n'y a plus un billet en vente ! La cause en est désormais connue, comme pour le Dynamo-Spartak de dimanche dernier, les supporters de foot, impatients d'en découdre, la saison débutant le 15 mars, sont venus en masse, rejouer l'éternelle rivalité entre les clubs moscovites.

Choqué par les débordements du dernier Dynamo-Spartak, venant après les échauffourées de SKA-Spartak plus tôt dans l'hiver, le petit monde du hockey espère que les hooligans du foot se tiendront bien.

Déjà, pas de banderoles agressives en vue, c'est déjà ça. Les fans du Spartak se contentent d'un slogan neutre "Toujours la victoire". On voit même de beaux "tifos", surtout du côté spartakiste avec des centaines de drapeaux rayés rouges et blancs agités en synchronisation. Du côté du CSKA, on a préféré (folie des grandeurs ?) confectionner des drapeaux beaucoup plus grands... mais moins nombreux !

Ah oui, j'oubliais, pour compléter votre connaissance des fans de foot moscovites, si je vous ai appris que les Dynamistes étaient des "ordures" et les Spartakistes "des cochons" ou des "tas de viande", les fans du CSKA s'appellent eux-mêmes les "chevaux", car à l'époque tsariste, le club, avait ses installations dans les écuries du Prince Ioussoupov (célèbre pour son implication dans le meurtre de Raspoutine).

Les autres supporters préfèrent mettre en avant l'aspect crottin de l'écurie, plutôt que le côté chevalin... Chacun ses goûts...

Le club du Spartak, lui, fait dans le conventionnel, avec de jeunes hockeyeurs du club qui déploient un drapeau du Spartak sur le rond d'engagement avant la rencontre.

Et ce sont les locaux qui partent les plus forts dans ce derby. L'indispensable Dimitri Pestounov place la première banderille, avant qu'Alexandre Iounkov ne s'échappe en solitaire, mais dans les deux cas, Tom Lawson, le canadien cerbère du CSKA, est parfait.

Le CSKA est plus discret. Pourtant, il va profiter de sa première occasion ! L'attaquant spartakiste, Kirill Kniazev étant en prison pour deux minutes (5e), le CSKA ouvre la marque d'une manière spectaculaire. Un tir de Sergueï Rozine est très habilement détourné dans la cage par Oleg Saprykine. Milos Riha, l'entraîneur tchèque du Spartak, affirme haut et fort que l'ancien attaquant des Calgary Flames et des Phoenix Coyotes a levé sa crosse plus haut que de raison sur ce but. L'arbitre va vérifier à la vidéo. Mais monsieur Boulanov revient bien vite au centre du terrain pour valider le but. Et effectivement, malgré la colère de Riha, Oleg Saprykine n'a pas été coupable de "crosse haute" (0-1).

Le Spartak repart donc de l'avant pour revenir au score. Il pense profiter des prisons, comme à la 11e lorsque Evgueni Artioukhine est sanctionné, mais le Spartakiste Léonid Kanareïkine est également arrêté par la patrouille quelques secondes plus tard. Le Spartak a une fois de plus une chance, à la 13e, lorsque Tom Lawson écope de deux minutes, mais comme l'ancien gardien de Lukko Rauma est vraiment très solide ce soir, rien ne passe. Si le Spartak ne parvient pas à franchir la défense militaire, même à cinq contre quatre, peut-être va-t-il y parvenir sur un tir de pénalité ? Pavel Vorbiev est déséquilibré par un défenseur lorsqu'il se présente devant Tom Lawson. Viatcheslav Boulanov siffle le pénalty (18e). Pavel Vorobiev s'élance pour ce faire justice lui-même. Le problème pour l'ancien joueur des Blackhawks de Chicago, c'est qu'il s'y prend vraiment mal. Il avance à deux à l'heure et trouve même le moyen de foirer son tir. Tom Lawson n'a donc aucun mal à bloquer la rondelle. Il lui suffit d'étendre la jambe pour bloquer ce tir de moustique...

Le Spartak a raté le coche et dans cette fin de tiers, les rares actions chaudes sont pour les visiteurs. Le Spartak a dominé ce tiers, mais c'est le CSKA qui a eu les actions les plus dangereuses et qui a ouvert la marque.

Les rouge et bleu ont donc parfaitement les choses en crosses. Ils vont pourtant se tirer eux-mêmes une balle dans le pied. Première action du deuxième tiers, premier tir et... premier but pour le Spartak au bout de 23 secondes. Alexandre Drozdetski entre tout seul dans sa zone d'attaque, il n'est pas chargé et aucun défenseur n'est devant la cage de Lawson. Se doutant bien qu'une telle opportunité ne risque pas de se représenter de sitôt, l'ancien attaquant du SKA Saint-Pétersbourg n'hésite pas, il arme, tire et transperce Lawson pour l'égalisation à 1-1.

Habituellement flegmatique, Viatcheslav Bykov, l'entraîneur du CSKA, ne peut laisser passer cela et pousse une saine colère sur son banc contre ses défenseurs qui ne s'étaient pas aperçus que le match avait repris...

Et il y a de quoi être vert de rage pour les rouges et bleus, car ils avaient on ne peut plus la situation bien en crosses après le premier tiers. Certainement conscients qu'ils ont fait une grosse bêtise, les militaires se concentrent et cela fait mouche. Deux minutes plus tard, ils ont repris l'avantage. Une passe en retrait parfaite d'Oleg Saprykine, pour Piotr Stchastlivyï qui veille, et qui décalé, loge la rondelle dans la cage de Evgueni Lobanov (1-2). Le Spartak se retrouve bien vite à nouveau en "chasse-patate".

Alexandre Drozdetski, Spartakiste mais fils d'un ancien grand joueur du CSKA (Nikolaï Drozdetsky), se met une fois de plus en évidence en se présentant seul face à Tom Lawson, mais pour la seconde fois, le Canadien bloque un "breakaway" (31e).

Et c'est à la 33e que l'insupportable se produit à nouveau dans une patinoire russe à cause des hooligans du foot. Des spectateurs commencent à jeter des pièces de monnaie sur la glace. La partie est donc interrompue, le temps de ramasser les kopecks. C'est à ce moment précis qu'un énergumène trouve intelligent de jeter sur la glace un fumigène ! Sokolniki est noyé par la fumée. La milice intervient et vire toute une tribune de "supporters" du CSKA. Est-ce que cela signifie que le fumigène est parti de cet endroit ? Difficile à dire, car il a atterri au centre de la glace.

Quoi qu'il en soit, c'est à nouveau le scandale ! Un père de famille dégoûté, venu avec un petit enfant, préfère le prendre dans ses bras et quitter cette arène aux bêtes sauvages qu'est devenue ces derniers temps une patinoire russe. Les joueurs et les entraîneurs ont l'air totalement abattus et dépassés.

Difficile dans ces conditions de reprendre la partie. La fin du tiers est encore marquée par des arrêts spectaculaires de Tom Lawson, en particulier à la 39e, une fois de plus face à Pavel Vorobiev, bien malheureux ce soir. 1-2 à la fin de ce tiers et un goût de cendre dans la bouche. Mais qu'ils s'en aillent, ces hooligans, avec leur haine, leur nationalisme et leur violence...

En ce qui concerne le sport, le Spartak a au moins du cœur et de la constance. Les rouge et blanc poursuivent leur marche en avant. Le pressing est particulièrement fort à la 44e minute lorsque le Canadien Jame Pollock est en prison. Mais son compatriote Tom Lawson est vraiment dans un grand soir...

Le Spartak n'y arrive pas et se retrouve même en double infériorité numérique peu de temps après. Une fois cette double prison terminée, il reprend son offensive, mais ni Akifeiev ni le persévérant Drozdetski ne trouvent la solution au problème Lawson.

Et au contraire, c'est le CSKA, sur l'une de ses rares occasions, qui trouve la solution face à Lobanov. Une passe en retrait du capitaine Vadim Epantchintsev pour Denis Parchine, ce dernier glisse, mais le palet parvient quand même à Anton Belov. Le défenseur du CSKA inscrit ainsi son premier but de la saison. Le CSKA mène donc 3-1 et il ne reste que sept minutes à jouer.

Autant le dire personne ne miserait un kopeck, même jeté sur la glace au tiers précédent, sur un retour du Spartak. Il a trop vendangé d'actions pour y parvenir, surtout face à un tel Lawson. Et pourtant, le miracle va avoir lieu !

Certes dans un premier temps, tout est normal. Drozdetski échoue sur Lawson. Sauf que le CSKA va faire, une fois de plus une grosse bêtise. Konstantin Kornéïev et Jame Pollock concèdent une double infériorité à quatre minutes de la fin. Le Spartak ne pouvait quand même pas laisser passer ça !

C'est tout d'abord Alexandre Drozdetski qui est enfin récompensé de ses efforts, avec un tir en coin qui trompe Lawson (3-2, 57'36) et c'est ensuite un but bizarre, trois secondes après la fin de la dernière prison du CSKA. Un tir anodin sous la barre d'Aleksei Akifiev trompe un Lawson en complet déséquilibre qui tombe à la renverse dans sa cage. Finalement, le CSKA et son gardien auront craqué au moment où l'on pensait qu'ils n'avaient plus rien à craindre.

3-3, il faut donc jouer la prolongation. Le tournant de cette mort subite intervient lorsque le vigoureux Bélarussien Dzimitri Malechka percute le capitaine du CSKA Vadim Epantchintsev au milieu de la glace (60'50). Mais les militaires n'en profitent pas et voilà les tirs au but !

C'est le Spartakiste Alexeï Bondarev qui s'élance le premier, mais il échoue sur Tom Lawson. La réplique du CSKA est cinglante avec la réussite de Sergueï Chirokov (0-1).

Mais Dzimitri Malechka se reprend de sa pénalité de la prolongation et égalise (1-1). S'ensuit une série crispante d'échecs (ou de réussites des gardiens) avec Piotr Stchastlivyï (CSKA), Ilia Dokchine (Spartak), Alexeï Simakov (CSKA) et Dimitri Oupper (Spartak).

C'est finalement Sergueï Chirokov qui délivre son équipe en inscrivant son deuxième pénalty. Le CSKA s'impose donc aux tirs au but deux fois de suite (les militaires s'étaient déjà imposés de la sorte contre le Vitiaz). Chirikov s'impose quant à lui comme le meilleur spécialiste du pays, avec 8 réussites en 9 tentatives cette saison.

Mais les rouge et bleu auraient pu empocher les trois points de la victoire, sans cet étrange et coupable relâchement de fin de match.

Quant au Spartak, il a mérité son surnom d'équipe populaire, de par son cœur et sa volonté.

Quant aux nouveaux débordements... Pff... Que dire à part vivement le foot...

Désignés joueurs du match : Oleg Saprykine (CSKA), Alexandre Drozdetski (Spartak).

Étoiles du match Sport-Express et Soviet Sport : *** Sergueï Chirokov (CSKA), ** Alexandre Drozdetski (Spartak), * Oleg Saprykine (CSKA).

Compte-rendu signé Bruno Cadene

 

Commentaires d'après-match

Vyacheslav Bykov (entraîneur du CSKA) : "Nous voulions gagner dans le temps réglementaire, mais une personne nous a tués. C'est incorrect de la part du meilleur arbitre du pays de parler aux joueurs de façon maternelle." [Riha lui demande pourquoi Shirokov a provoqué les supporters du Spartak, alors Bykov se lève et quitte la conférence de presse énervé en promettant de régler ce linge sale en privé...]

Milos Riha (entraîneur du Spartak) : "Avant tout, je voudrais m'excuser devant les respectés journalistes pour le comportement de mon collègue. Nous pouvons aussi dire que les arbitres étaient contre nous. Il nous a semblé qu'il y avait crosse haute sur le premier but du CSKA. je pense qu'un arbitre de niveau international ne doit pas commettre d'erreurs. Je ne suis pas entraîneur de l'équipe nationale, et les arbitres ne nous aident pas. Je considère que les joueurs ne doivent pas provoquer les fans. Après la victoire, les joueurs du CSKA se sont moqués de nous. Il est clair qu'ils sont devant nous au classement, mais ce comportement n'est pas correct."

 

Spartak Moscou - CSKA Moscou 3-3 (0-1, 1-1, 2-1, 0-0) / 1-2 aux tirs au but

Jeudi 28 février 2008 à 19h00 au Palais des glaces Sokolniki, Moscou. 5600 spectateurs.

Arbitrage de Vyacheslav Bulanov (Moscou) assisté de Viktor Birin et Alekseï Medvedev (Moscou).

Pénalités : Spartak 12', CSKA 36' (dont 20' à l'entraîneur-adjoint Igor Zakharkin).

Tirs cadrés : Spartak 39 (15, 10, 9, 5), CSKA 26 (5, 12, 8, 2).

Évolution du score :

0-1 à 06'23" : Saprykin assisté de Rozin et Korneev (sup. num.)

1-1 à 20'23" : Drozdetsky assisté de Rybin

1-2 à 22'36" : Schastlivy assisté de Saprykin et Shefer

1-3 à 54'21" : Belov assisté d'Epanchintsev et Parshin

2-3 à 57'36" : Drozdetsky assisté de Rybin et Belov (double sup. num.)

3-3 à 58'16" : Akifiev assisté de Kanareïkin et Pestunov

Tirs au but :

Spartak : Bondarev (à côté), Mialeshka (réussi), Dokshin (arrêté), Upper (arrêté).

CSKA : Shirokov (réussi), Schastlivy (arrêté), Simakov (arrêté), Shirokov (réussi).

 

Spartak Moscou

Gardien : Evgeni Lobanov.

Défenseurs : Vyacheslav Belov - Alekseï Bondarev ; Nikolaï Semin (KAZ) - Leonid Kanareïkin ; Roman Kukhtinov - Evgeni Sapozhkov.

Attaquants : Maksim Rybin (c) - Dmitri Upper (KAZ) - Aleksandr Drozdetsky ; Alekseï Akifeiev - Dmitri Pestunov - Pavel Vorobiev ; Kirill Knyazev - Mikhaïl Yunkov - Aleksandr Yunkov ; Dmitri Meleshko (BLR) - Ilya Dokshin - Mikhaïl Ivanov.

Remplaçants : Aleksandr Polukeiev (G), Yuri Kuzin. Absents : Konstantin Simchuk (adducteurs), Jamie Rivers (étranger surnuméraire), Eduard Kudermetov.

CSKA Moscou

Gardien : Thomas Lawson (CAN).

Défenseurs : Sergei Rozin - Konstantin Korneiev ; Georgi Misharin - Denis Kulyash ; Jame Pollock (CAN) - Anton Belov ; Maksim Goncharov - Andreï Shefer.

Attaquants : Oleg Saprykin - Piotr Schastlivy - Aleksei Simakov ; Sergei Shirokov - Vadim Epantchintsev (c) - Denis Parshin ; Timofeï Shishkanov - Aleksandr Skugarev - Evgeni Artyukhin ; Ladislav Kohn (TCH) - Ilya Kablukov - Aleksandr Suglobov.

Remplaçant : Ivan Kasutin (G).

 

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