Suisse - Suède (22 février 2006)

 

Quart de finale des Jeux Olympiques de Turin 2006.

Le dernier exploit helvète conte la Suède remonte aux championnats du monde de Munich en 1993 avec une victoire 6-4 contre une formation qui comptait entre autres Forsberg et Nylander et qui était parvenue en finale. Cette performance n'avait pas empêché les Suisses de connaître la relégation et la France de les battre. Avant ce quart de finale, les Suédois ont, quant à eux, surtout en mémoire leur échec retentissant et inattendu contre le Bélarus à ce même stade de la compétition il y a quatre ans à Salt Lake City.

Chez les Helvètes, Andres Ambühl a été rappelé pour remplacer Thomas Ziegler, victime d'une commotion cérébrale face à l'Italie.

À l'entame du match, Paterlini tente un envoi sur Lundqvist, sans sérieusement l'inquiéter toutefois. On observe immédiatement avec quelle facilité les Suédois parviennent à pénétrer dans la zone de défense adverse lors d'une première action de Mats Sundin et de ses coéquipiers, qui prennent le jeu à leur compte. Après soixante-six secondes, Niclas Hävelid trouve montant des buts défendus par un Martin Gerber battu en la circonstance. Tout se déroule très rapidement et l'on ne dispute pas encore la quatrième minute que Daniel Sedin passe en retrait à son frère jumeau Henrik qui frappe immédiatement le palet. Gerber est partiellement masqué par un défenseur qui se couche afin de bloquer l'envoi et c'est le but pour l'équipe aux trois couronnes (0-1 à 03'05"). Voilà les Helvètes contraints de courir après le score, ce qui est toujours ennuyeux pour une équipe supposée plus faible et encore plus contre la Suède.

Les protégés de Bengt-Åke Gustafsson ne comptent pas en rester là, car il est évident qu'il désirent se mettre à l'abri au plus vite et continuent d'imprimer un rythme d'enfer à leur contradicteurs, même si Wichser parvient à adresser un lancer sur Lundqvist. Blindenbacher commet une infraction dans un duel avec Mats Sundin. Mauvaise nouvelle pour les représentant à croix-blanche, puisque le jeu de puissance scandinave est composé de Sundin, Forsberg, Modin à l'attaque et de Lidström et Alfredsson derrière. Cela passe pour cette fois.

Après ce début tumultueux, les Suisses, qui n'ont rien à perdre dans l'aventure, s'enhardissent, et les débats s'équilibrent quelque peu. Le défenseur Mathias Seger, après un altruiste service en retrait de Paterlini, parvient même à inquiéter le portier suédois. Puis c'est Marcel Jenni qui bénéficie d'une chance à la suite d'une action mené conjointement avec Conne et Fischer. Cependant, les Suédois gagnent la plupart des mises au jeu et, à la suite de l'une d'elles, Mathias Öhlund peut inquiéter Gerber, mais sur le contre Martin Plüss adresse un envoi, Della Rossa a bien suivi et récupère son lancer pour servir Mark Streit qui, sans hésitation, fusille Lundqvist d'un lancer bas et précis au premier poteau. C'est l'égalisation par le patron (1-1 à 08'37"). Néanmoins, le bloc des Sedin pose également beaucoup de difficultés aux défenseurs suisses, et Daniel, à la lutte dans la bande, récupère le puck pour servir Henrik. Toutefois, cette action n'a pas de répercussion au score.

Une période un peu plus débridée s'ensuit avec un essai de Ambühl et également une combinaison intéressante entre Della Rossa, Plüss et Di Pietro. Le même Martin Plüss, bien lancé en profondeur, alors que les défenseurs suédois jouaient trop haut, parvient même en échappée seul face à Lundqvist, mais le dernier rempart des Rangers de New York (qui connaît par ailleurs une excellente saison à Mannhatan avec ses amis tchèques et Nylander) ne se laisse pas tromper entre les jambes.

Les Suédois reprennent le contrôle des opérations, car les Suisses continuent de perdre la plupart des engagements. Aussi, Daniel Sedin adresse un lancer dangereux, servi par Mikael Samuelsson. À la quatorzième minute, Paterlini accroche Daniel Tjärnqvist, ce qui donne un nouveau jeu de puissance aux Scandinaves. Les Suisses parviennent certes à se dégager, mais Peter Forsberg possède un sacré coup d'œil et sert Fredrik Modin d'une longue passe en l'air que l'attaquant de Tampa Bay parvient à contrôler du gant. Puis il rabat la rondelle sur le revers de sa palette pour marquer (1-2 à 13'49"). La Suède maintient une forte pression et la Suisse n'est plus capable d'apporter le danger dans le camp de défense adverse, comme en témoigne cet essai lointain presque en forme d'aveu d'impuissance de Martin Plüss, qui n'a pour seul danger d'être cadré.

Si la Suède a globalement maîtrisé le débat et qu'elle mène logiquement au score après ce premier vingt, elle a aussi connu quelques blackouts après s'être trop compromise offensivement et, avec juste une unité d'avance, elle ne reste pas à l'abri d'une mauvaise surprise. C'est donc bien décidée à faire le trou et afin d'effacer toute réminiscence, même lointaine, du quart d'il y a quatre ans contre le Bélarus que la troupe de Gustafsson (par ailleurs ancien coach-assistant de l'équipe adverse et vieille connaissance de Krueger depuis l'époque glorieuse de Feldkirch en Coupe d'Europe) revient sur la glace. Bien lui en prend, car elle étouffe littéralement l'équipe de Suisse et se montre supérieure tant en force qu'en patinage. Elle se remet d'abord rapidement du coup du sort qui frappe l'excellent défenseur Mathias Öhlund, blessé aux côtes en heurtant la balustrade après avoir été déséquilibré lors d'un contact avec Della Rossa seulement quelques secondes après la reprise.

Samuelsson puis Modin se trouvent dans une position favorable. La Tre Kronor contrôle toute les facettes du jeu et tourbillonne dans la défense helvète. Puis, ce qui devait arriver arriva : Henrik Zetterberg prend de vitesse tout le monde, Gerber y compris, et parvient à loger le disque en contournant la cage. L'écart se creuse (1-3 à 22'17"). L'attaquant de Detroit est même à deux doigts de récidiver peu de temps après en adressant un missile en l'air en se retournant, mais l'on ne sait trop comment la rondelle n'a pas franchi la ligne.

Les Helvètes courent après l'adversaire et le puck en ce début de tiers médian, et la différence de niveau se révèle flagrante. Flavien Conne se voit ensuite pénalisé par Dan Marouelli. Cependant, il ne reste pas longtemps au banc : en moins de temps qu'il ne faut pour l'écrire, Mats Sundin gagne l'engagement à la droite de la cage de Gerber, Modin parvient à remettre à Alfredsson à la bleue qui transmet à Lidström, lequel sert sur un plateau le capitaine des Maple Leafs qui tire sur réception. Et bang ! c'est quine. Gerber ne peut que constater les dégâts : la Suède s'échappe (1-4 à 29'07").

La Suisse est au bord d'exploser. Krueger doit-il demander un temps mort, tant la domination suédoise est patente, voire outrageuse ? Seul un éclair de Vauclair, suite à un service de Jenni, vient troubler l'horizon jaune et bleu. Mais le premier bloc fait vraiment la pluie et le beau temps dans la zone des Confédérés, et Forsberg trouve Sundin d'une lumineuse passe du revers. Tout le monde est ébloui (1-5 à 32'52"). L'affaire semble classée, surtout que Lundqvist dispose d'une bonne protection et ne chauffe pas trop, bien à l'abri de la moindre mésaventure. On pourrait presque lui tendre une chaise longue à ce moment-là.

Un constat s'impose : la Suède est simplement plus forte et l'on ne voit pas comment elle pourrait être inquiétée, à moins d'un relâchement coupable, tant sa maîtrise paraît totale. Le 3-0 de la période est un salaire minimum et le gala de Gerber avait déjà eu lieu samedi contre le Canada, même si le dernier rempart originaire de Burgdorf n'a pas grand-chose à se reprocher sur les réussites adverses.

Cependant, les Suisses ont le mérite d'y croire et de ne pas abdiquer : dès l'entame du troisième tiers, tant Di Pietro que Streit mettent Lundqvist à l'épreuve. Romano Lemm, servi de manière optimale par Ivo Rüthemann, redonne même un espoir ténu à sa formation (2-5 à 40'49"). Le sursaut d'orgueil helvète n'est pas terminé avec une action de Paterlini, puis Jeannin et Jenni contraignent Lundqvist à tendre la botte.

Sont-ce les Suisses qui se montrent plus entreprenants ou les Suédois qui se relâchent et accordent plus de marge de manœuvre ? Certainement un peu des deux, difficile à savoir en quel pourcentage cependant. Quelque peu attentistes, les Suédois n'adressent un tir sur la cage helvétique que pour la première fois après sept minutes.

Même si Streit bénéficie d'une chance et adresse un bon tir à la quarante-huitième minute, les Suédois sortent régulièrement vainqueurs dans les duels dans la bande et se remettent à travailler davantage, si bien que Påhlsson finit par trouver Daniel Alfredsson. Le capitaine des Sénateurs d'Ottawa fait mouche d'un maître lancer. Ainsi, il dissipe les derniers doutes quant à l'issue de la rencontre (2-6 à 48'36"). On signalera encore des tentatives de Wichser, que Bezina avait bien repéré, et aussi de Julien Vauclair, servi par Streit, mais à chaque fois le gardien veille.

Le Suédois sont déjà depuis un moment en demi-finale et économisent leurs forces en assurant le minimum syndical, Holmström écopant de la première pénalité infligée à son équipe de toute la rencontre à quatre minutes de la sirène.

Une dernière occasion échoit encore à Forsberg à quelques secondes de la fin, mais le score est déjà scellé et la Suède se qualifie pour la première fois pour une demi-finale olympique depuis son sacre de 1994 à Lillehammer, sans avoir été sérieusement inquiétée face à une équipe suisse qui n'a toutefois pas démérité.

Compte-rendu signé Stéphane Matthey

 

Commentaires d'après-match

Ralph Krueger (entraîneur de la Suisse) : "Je suis fier de ce que l'équipe a fait dans ce tournoi. Je suis évidemment déçu de la façon dont il s'est terminé, mais pour battre la Suède il aurait fallu jouer un match parfait, et ça n'a pas été le cas. La Suède est encore un adversaire trop fort pour notre niveau. Nous avons bien joué le premier et le dernier tiers, mais en deuxième période, quand ils ont marqué le but du 3-1, nous avons baissé d'un ton au moment où eux haussaient leur niveau de jeu. Avec les joueurs de talent dont dispose la Suède, il n'y avait rien à faire pour nous."

Goran Bezina (défenseur de la Suisse) : "À ce point, nous aurions dû pouvoir viser une médaille, mais nous n'avons pas travaillé assez ni assez bien. Au deuxième tiers-temps, nous n'avons pas assez joué avec le cœur. Non, nous n'étions pas fatigués : nous ne pouvions pas l'être après les deux prestations fournies contre l'Allemagne et l'Italie."

Julien Vauclair (défenseur de la Suisse) : "Les Suédois ont joué de manière plus intelligente contre nous que les Canadiens et les Tchèques. Ils ont bien occupé les voies latérales et nous ont contenu contre les bandes, ce qui nous a perturbés."

Bengt-Åke Gustafsson (entraîneur de la Suède) : "Nous sommes tombés sur la Suisse en quart de finale. C'est une équipe qui défend bien, mais j'ai tout de suite dû que c'est une équipe à battre absolument. Et nous l'avons fait."

 

Suisse - Suède 2-6 (1-2, 0-3, 1-1)

Mercredi 22 février 2006 à 16h35 au Palasport Olimpico de Turin. 2970 spectateurs.

Arbitrage de Dan Marouelli (CAN) assisté de Thor Eric Nelson (USA) et Sergei Shelyanin (RUS).

Pénalités : Suisse 8' (4', 4', 0'), Suède 2' (0', 0', 2').

Tirs : Suisse 29 (8, 7, 14), Suède 27 (12, 13, 2).

Évolution du score :

0-1 à 03'05" : H. Sedin assisté de D. Sedin et Lidström

1-1 à 08'37" : Streit assisté de Della Rossa et Plüss

1-2 à 13'49" : Modin assisté de Forsberg et Alfredsson (sup. num.)

1-3 à 22'17" : Zetterberg assisté de Holmström et K. Jönsson

1-4 à 29'07" : M. Sundin assisté de Lidström et Alfredsson (sup. num.)

1-5 à 32'52" : M. Sundin assisté de Forsberg et Tjärnqvist

2-5 à 40'49" : Lemm assisté de Rüthemann

2-6 à 48'36" : Påhlsson assisté d'Alfredsson et Axelsson

 

Suisse

Gardien : Martin Gerber.

Défenseurs : Mark Streit (C) - Olivier Keller ; Julien Vauclair - Steve Hirschi ; Goran Bezina - Severin Blindenbacher ; Beat Forster - Mathias Seger.

Attaquants : Patric Della Rossa - Martin Plüss - Paul Di Pietro ; Adrian Wichser - Romano Lemm - Andres Ambühl ; Marcel Jenni - Flavien Conne - Patrick Fischer ; Ivo Rüthemann - Sandy Jeannin - Thierry Paterlini.

Remplaçant : David Aebischer (G). Absent : Thomas Ziegler (commotion cérébrale, remplacé par Ambühl).

Suède

Gardien : Henrik Lundqvist.

Défenseurs : Mathias Öhlund - Nicklas Lidström ; Niclas Hävelid - Daniel Tjärnqvist ; Christian Bäckman - Kenny Jönsson ; Ronnie Sundin.

Attaquants : Peter Forsberg - Mats Sundin - Fredrik Modin ; Per-Johan Axelsson - Samuel Påhlsson - Daniel Alfredsson ; Tomas Holmström - Henrik Zetterberg - Jörgen Jönsson [puis Samuelsson] ; Daniel Sedin - Henrik Sedin - Mikael Samuelsson [puis J. Jönsson].

Remplaçants : Mikael Tellqvist (G), Mika Hannula.

 

Retour aux Jeux olympiques