États-Unis - Suisse (11 février 2006)

 

Jeux Olympiques 2006, tournoi féminin, groupe B.

Devant 2900 spectateurs, dont la femme de leur président Laura Bush (arrivée dans le courant du deuxième tiers), les Américaines, championnes du monde en titre, débutent leur tournoi face à la Suisse avec une équipe composée pour moitié de novices à ce niveau. Pour beaucoup d'observateurs, le tournoi n'est qu'un tour de chauffe, le Canada et les États-Unis étant à nouveau programmées pour un affrontement en finale, comme d'habitude, tant le niveau du hockey féminin est jugé inégal. L'actualité est donc plutôt la fin officielle de l'ère Cammi Granato chez les Américaines. Capitaine de l'équipe pendant des années et notamment lors des deux derniers JO, elle s'est finalement retrouvée écartée au camp d'été au profit de joueuses plus jeunes, à la surprise générale. La Suisse en revanche ne compte que 800 licenciées, contre 55 000 pour les États-Unis... Autant dire que l'écart est important. C'est la première participation suisse au tournoi olympique féminin, obtenue à Pékin aux dépens de Chinoises grâce à un but décisif dans les dernières secondes de Claudia Riechsteiner. Celle-ci est un peu la "Granato suisse" puisque, malgré sa contribution à la qualification, elle n'a pas été sélectionnée, la faute en partie à un caractère jugé difficile.

Les Américaines ouvrent le score dès la troisième minute à quatre contre quatre. Jenny Potter, seule joueuse américaine maman (d'une petite Madison âgée de 5 ans) se place derrière la cage pour servir l'expérimentée Katie King, dont la reprise de volée devant l'enclave est imparable. Pourtant, les favorites se heurtent à une brillante performance de la gardienne helvétique, Patricia Elsmore-Sautter, qui vit d'ailleurs habituellement dans le Minnesota (elle s'y est mariée à un Américain et y est entraîneur-adjointe d'une équipe de jeunes), même si pour l'occasion elle est revenue en Suisse sans son mari pour tout l'hiver. Elle écœure toutes les attaquantes adverses dans le premier tiers, ne laissant aucun rebond et rendant le score intéressant malgré la forte domination américaine. Les attaquantes s'interrogent, doutent et cherchent un vain la solution, commençant à s'inquiéter...

Elsmore-Sautter ne voit pas son rythme interrompu par la pause et repart de plus belle en deuxième période. Il faut attendre le milieu de tiers (juste après l'arrivée de Laura Bush et de sa fille Barbara) pour voir les championnes du monde doubler la mise sur une action assez rare. Après avoir encaissé trois pénalités coup sur coup (Resor, Wall et Ruggiero), les troupes de Ben Smith se retrouvent à trois contre cinq, faute de pouvoir jouer à deux. Tricia Dunn-Luoma, pour ses troisièmes Jeux, bloque alors un tir un peu mou et sans regarder de Monika Leuenberger, et part en échappée pour marquer en double désavantage numérique, feintant pour tirer entre les jambières. C'est le véritable tournant du match. Après cela, Chanda Gunn ne sera plus guère inquiétée (9 arrêts au total)...

Angela Ruggiero est à l'origine du troisième but. L'expérimentée arrière, qui s'était distinguée par le passé en jouant des matchs masculins dans les ligues mineures américaines, sert la capitaine Krissy Wendell qui dévie en lucarne. Trois minutes plus tard Natalie Darwitz donne un avantage de quatre buts en bonifiant son propre rebond à bout portant, servie par la benjamine de l'équipe, Sarah Parsons (18 ans). L'avalanche se poursuit et les Suisses explosent. Wendell transperce la défense et sert Potter pour une cage ouverte et le 5-0. Potter, intenable, se fend d'un doublé dans les dernières secondes en supériorité numérique, dans un chef d'œuvre de patience avant de loger la rondelle sous la lucarne de son ancienne coéquipière à Minnesota-Duluth, Elsmore-Sautter, qui termine pour sa part la partie avec cinquante arrêts complètement épuisée.

Au final, une victoire logique mais des points d'interrogation côté américain. Le manque de réalisme a été flagrant malgré la performance de la gardienne suisse. L'indiscipline a manqué de coûter cher par moments, et les changements de lignes ont souvent été hasardeux. La Suisse pour sa part a pris confiance avant le match contre la Finlande où elle pourrait lancer dans le grand bain la jeune et prometteuse Florence Schelling (16 ans) dans les cages.

Compte-rendu signé Nicolas Leborgne

 

Commentaires d'après-match :

Ben Smith (entraîneur des États-Unis) : "Nous lancions au but encore et encore, et nous avions l'impression de mener largement, mais il n'y avait que 1-0. Tout à coup, on dégage le palet et quelque chose d'incroyable arrive et nous donne l'air dont nous avions besoin. Leur gardienne a été sensationnelle. Nous n'avons pas lancé à quelques reprises en bonne position, c'est frustrant. Mais je pense que leur gardienne a été sous pression jusqu'au bout. Sans rentrer dans les détails, nous avons clairement des petites choses à travailler. C'est le plus dur à ce niveau, convertir nos chances. Après le premier tiers mon assistant Mike Gilligan m'a dit qu'il faudrait leur rappeler de marquer... Je lui ai répondu qu'il n'y avait pas besoin de ça. Est-ce que Martin St. Louis [ancien joueur de l'université du Vermont dirigé à l'époque par Gilligan] avait besoin qu'on lui rappelle de marquer ? Vous devez insister et espérer que ça finisse par rentrer."

Katie King (attaquante des États-Unis) : "Je crois que nous avons réalisé le match d'ouverture que nous voulions. Bien sûr nous n'avons marqué beaucoup avant le troisième tiers, mais nous les avons bien contenues et nous avons gardé le palet en zone offensive quasiment tout le temps. Je pense que nous n'avons jamais été inquiétées. Tricia [Dunn-Luoma] a fait un super travail sur le but. Les Suisses commençaient à prendre confiance avec cinq ou six tirs et nous avions la moitié de l'équipe en prison, notamment nos spécialistes du jeu en infériorité. Un but comme ça nous a fait du bien. Je ne pense pas que nous avons douté, c'est juste un peu de stress. En ajoutant onze nouvelles joueuses, nous avons essayé de les préparer mais rien ne remplace un match. Le terminer positivement est un soulagement."

Patricia Elsmore-Sautter (gardienne de la Suisse) : "Il y a des grandes joueuses dans cette équipe, elles sont rapides et vous ne devez pas leur laisser d'espaces quand elles ont le palet. Je pense que j'ai bien joué. Nous réduisons vraiment l'écart avec les meilleures du monde. Jouer aux États-Unis a été une grande expérience. Je joue maintenant à Roseau dans une petite ligue masculine sans charges, mais gérée avec professionnalisme. Nous avons plus de mille spectateurs de moyenne. Je dois avouer que me réhabituer à la culture suisse n'a pas été évident. Pour couronner mon rêve olympique, je suis revenue m'entraîner à Illnau/Effretikon depuis début décembre. J'ai même été invitée à un entraînement du SC Berne, une expérience extraordinaire, mais ça allait si vite et les lancers étaient si puissants qu'il était presque impossible d'arrêter un palet. Mon mari [Steve Elsmore] m'a finalement rejoint vendredi, ça faisait une éternité que je ne l'avais pas vu."

 

États-Unis - Suisse 6-0 (1-0, 1-0, 4-0)

Samedi 11 février 2006 à 18h05 à Torino Esposizioni. 2900 spectateurs.

Arbitrage de Katerina Ivicova (TCH) assistée de Marina Konstantinova (RUS) et Kim Robichaud (CAN).

Pénalités : États-Unis 18' (2', 12', 4'), Suisse 14' (8', 2', 4').

Tirs : États-Unis 56 (22, 13, 21), Suisse 9 (3, 3, 3).

Évolution du score

1-0 à 02'38" : King assistée de Potter

2-0 à 32'27" : Dunn-Luoma (double inf. num.)

3-0 à 47'53" : Wendell assistée de Ruggiero et Potter

4-0 à 50'33" : Darwitz assistée de Parsons

5-0 à 52'40" : Wendell assistée de Potter

6-0 à 58'50" : Potter assistée de Ruggiero (sup. num.)

 

États-Unis

Gardienne : Chanda Gunn.

Arrières : Lindsay Wall - Angela Ruggiero ; Jamie Hagerman - Helen Resor ; Courtney Kennedy - Caitlin Cahow.

Attaquantes : Jenny Potter - Krissy Wendell - Kristin King ; Kelly Stephens - Natalie Darwitz - Sarah Parsons ; Katie King - Julie Chu - Kathleen Kauth ; Kim Insalaco - Tricia Dunn-Luoma.

Remplaçante : Pam Dreyer (G).

Suisse

Gardienne : Patricia Elsmore-Sautter.

Arrières : Ramona Fuhrer - Prisca Monimann ; Monika Leuenberger - Julia Marty ; Nicole Bullo - Rüth Künzle.

Attaquantes : Angela Frautschi - Tina Schumacher - Sandrine Ray ; Jeanette Marty - Stefanie Marty - Kathrin Lehmann ; Sandra Cattaneo - Christine Meier - Daniela Diaz ; Rachel Rochat - Laura Ruhnke - Silvia Bruggmann.

Remplaçante : Florence Schelling (G).

 

Retour aux Jeux Olympiques