Épinal - Mont-Blanc (11 février 2006)

 

Match avancé de la vingt-quatrième journée de la Ligue Magnus 2005/2006.

Voyage au bout de l'ennui

Remis en selle par le succès glané sur les hautes cimes chamoniardes, Épinal a stoppé sa série de deux défaites consécutives, profitant du lessivage du Mont-Blanc sur ses terres (1-6 devant Grenoble) pour se donner un peu d'air au classement. Champion en titre de division 1, l'autre néo-promu haut-savoyard réalise un retour intéressant en élite et sera loin de venir en petit poucet sur la grande glace de Poissompré. Épinal part avec les faveurs des pronostics mais la troupe d'Ari Salo, l'esprit conquérant et avec l'envie de bien faire, a toutes les cartes en main pour contrarier un ensemble vosgien demeurant poussif et pas toujours séduisant dans ses prestations. On le sait bien, le jeu alpin, tout en mouvement et en patinage, ne favorise guère le style spinalien. À ce titre, la volée de bois vert administrée par le Mont-Blanc lors du match aller (5-1) sonne comme un sévère avertissement et Stanislav Petrik, contraint à céder sa place à son back-up Franck Constantin, doit encore en garder un souvenir mitigé. Mais pour se dresser devant l'offensive des Avalanches, la charge devrait encore être confiée au divin chauve qui reste, soulignons-le, sur une bonne sortie samedi dernier à Chamonix.

Deux minutes, puis le trou noir

Disposant d'une marge de manśuvre étroite en raison de l'absence d'Anthony Maurice et surtout du sobre mais efficace Lionel Simon, les Spinaliens s'introduisent d'entrée en zone offensive et ouvrent sans tarder le score sur un lancer flottant côté gauche de Peter Slovák. Le tir excentré du défenseur, dévié par Shawn Allard, prend à froid Arnaud Goetz (1-0 à 0'19"). Partis sur les meilleures bases possibles, les Spinaliens tentent d'enfoncer le clou. Sous l'impulsion d'un Ján Šimko plus véloce et percutant que jamais (0'37") ou d'un Guillaume Chassard comme toujours exemplaire, l'ICE tient Goetz en haleine, mais sur sa première véritable occasion, le Mont-Blanc va créer l'égalité. Stanislav Petrik est loin d'être blanc comme neige sur cette affaire, plaidant coupable d'avoir repoussé l'essai plein axe en entrée de zone de Prunet dans la palette d'un Subit n'ayant plus qu'à pousser la rondelle dans la cage vide pour ramener ses couleurs dans la partie (1-1 à 02'44"). Tout est à refaire à présent.

Visiblement désorienté par sa gaffe, Petrik met du temps à se remettre de ses émotions, accumulant les interventions douteuses et les rebonds au cours d'une première période bien délicate. Peu aidé il faut aussi le reconnaître par une défense bien fébrile, comme sur ce jaillissement à sa ligne bleue de Tracol qui subtilise le puck à Duda pour s'échapper sans pouvoir cadrer sa tentative (3'52"). Épinal n'est pas en reste, s'en remettant encore et toujours à Šimko qui, d'un débordement "simkonien" côté gauche, prend à revers la défensive alpine et vient s'empaler sur Goetz, poussant son palet dans la cage sans que le but ne soit validé (4'48"). Toutefois, l'entrain vosgien va decrescendo dans ce premier vingt, malgré la vivacité affichée par ce diable de Šimko, pris encore une fois en excès de vitesse dans le dos de la défense adverse (6'16"). Le spectacle proposé n'est guère emballant pour le millier de personnes présentes à Poissompré et les hésitations de Petrik sur des tentatives paraissant anodines font passer des sueurs froides dans le dos des partisans locaux. Peu sûr, le Slovaque parvient tout de même à conserver ce score de parité alors que seules quelques accélérations occasionnelles viennent prendre à défaut la défense du Mont-Blanc. Bref, pas grand-chose à se mettre sous la dent. La torpeur spinalienne entrevue dans ces vingt premières minutes n'est pas faite pour pousser à l'optimisme.

Les fantômes de Poissompré

Après une première période qui ne restera assurément pas dans les annales, on espère secrètement voir autre chose. Peine perdue car l'intensité ne sera toujours pas au rendez-vous de ce tiers médian. Maîtres du jeu et des occasions, les Avalanches sollicitent sans attendre Petrik. Sylvain Nicoud (21'53") puis une entrée de zone énergique de Lahtinen (23'19") remettent rapidement l'ancienne idole du public - de plus en plus contestée dans les gradins - à contribution alors que commencent à tomber les premières sanctions disciplinaires du deuxième tiers-temps. Le match, déjà guère palpitant, devient haché, et aucun des deux protagonistes n'a véritablement l'occasion d'installer son jeu de puissance. Les quatre-contre-quatre se succèdent comme les touristes en période de vacances scolaires. Une tentative à bout portant du remuant Pirkka Lahtinen (25'35"), ce slap de Lubomir Duda détourné de la botte par Goetz (27'04") ou encore cette présence d'Étienne Croz dans le slot vosgien (27'43") donnent un peu de dynamisme à un jeu rythmé par les coups de sifflets arbitraux. L'un deux va être le tournant de ce match. Le défenseur suédois Tobias Åblad se voit conduit au banc d'infamie pour un cinglage peu évident (27'56"), alors qu'une poignée de secondes auparavant, Šimko était victime d'un coup de crosse lui bien plus remarquable. Qu'importe, loisir est offert au Mont-Blanc d'installer le jeu de puissance. Les Avalanches, bénéficiant sur ce coup d'un double avantage numérique avec la précédente sanction purgée par Haapasaari (26'35"), font bien tourner la rondelle devant la cage de Petrik. Le puck finit par échoir dans l'enclave sur Peter Hrehorcak qui, d'un slap rageur, se charge d'ajuster la lucarne gauche (1-2 à 28'23"). C'était pourtant inévitable compte tenu de la domination des Avalanches...

Le but haut-savoyard annule la première pénalité d'Haapasaari, pas celle d'Åblad mais un cinglage appuyé de Fleutot qui brise net le bâton de Slovák (29'06") ramène les deux équipes à forces égales. Là encore, c'est le Mont-Blanc qui tire les marrons du feu avec deux slaps de Hrehorcak poussant Petrik à lâcher des rebonds (29'21" et 29'24"). Parti comme à son habitude dans une remontée fantastique, Ján Šimko, l'un des rares attaquants lorrains à secouer le cocotier, s'essaye du poignet devant Goetz (29'47") alors que Petrik doit garder la mitaine ferme pour maintenir ses partenaires dans la partie (29'57"). Même à cinq contre quatre, les Spinaliens n'arrivent pas à se montrer dangereux et subissent les contres adverses, comme ce deux-contre-un non concrétisé par les frères Nicoud (34'00"). Il faut un réflexe de Petrik sur sa ligne pour empêcher Sébastien Subit de reprendre victorieusement le centre au cordeau de son compère Étienne Croz (34'22"). Les débats se durcissent encore un peu plus, les sanctions tombent, et pour couronner le tout, une panne de lumière vient sceller temporairement les débats (37'37"). Les sempiternels problèmes de courant connus dans l'enceinte vieillissante de Poissompré auront eu raison de la fin de cette deuxième période et le trio arbitral décide ainsi de reporter les ultimes minutes sur le début du tiers suivant. Mais celles-ci, à l'image du match, n'apportent rien de bien intéressant...

Dans le brouillard

Deux salves de Radoslav Regenda (40'34") détournées par Arnaud Goetz inaugurent un tiers final à nouveau marqué du signe des indisciplines en tout genre et des décisions arbitrales parfois litigieuses. Jeté aux oubliettes pour un cinglage (41'29"), le Finlandais Pirkka Lahtinen laisse ses coéquipiers en infériorité numérique mais les nombreux rebonds concédés par Goetz ne sont pas exploités par les attaquants de l'ICE. Entre jeux de puissance manquant de spontanéité et passes dans le vent, le "collectif" spinalien fait même peine à voir. Modèle de statisme et d'incohérences, véritable appel aux remontées de puck solitaires et autres mouvements en soliste, le jeu proposé ce soir par les hommes de Joakim Nilsson est d'une pauvreté désespérante. Parfaite illustration avec cette passe en retrait à la bleue offensive filant sous le nez de Duda et récupérée par Fleutot qui lance Bastien Sangiorgio dont le break est bien bloqué par Petrik (48'35"). Une sortie de zone de Duda traversant les deux lignes bleues amène bien Chassard aux avant-postes (49'51") mais le jeu trop stéréotypé des Spinaliens ne contrarie guère un ensemble alpin se contentant fort logiquement de gérer son acquis. Quelques petites frayeurs comme ce slap d'Åblad capté de la mitaine par Goetz (52'54") donnent un léger sentiment de révolte des joueurs spinaliens mais une avalanche de pénalités s'abat sur eux. Altercations, cinglages, charge à la tête et autres méconduites en tout genre remplissent à vitesse grand V l'étroit cachot dévolu à l'ICE et offrent de nouvelles opportunités au Mont-Blanc de creuser l'écart. Mais face à eux se dresse un Stanislav Petrik qui, à défaut d'être totalement rassurant, fait obstacle au jeu de puissance adverse et se rachète de sa boulette initiale.

Si les deux adversaires sont loin d'avoir livré une partition de qualité, que dire du trio arbitral, complètement dépassé par les événements comme sur cette simple demande de temps mort de l'entraîneur suédois des Dauphins. S'égosillant et s'agitant comme un beau diable derrière la balustrade, Nilsson doit attendre de longues secondes pour voir les zèbres accéder à sa requête (58'30"). Et pourtant, on ne pourra pas reprocher au Suédois, passablement excédé, de s'être fait entendre, et ce tout au long de la soirée... La sortie de Petrik n'y change plus rien malgré les ultimes tentatives en cage vide des champions de France en titre de division 1.

Le Mont-Blanc, vainqueur sans panache d'un match à oublier, s'adjuge la manche retour après avoir fait main basse sur la rencontre aller. Trop médiocres dans tous les secteurs du jeu, les Spinaliens peuvent regagner les vestiaires la tête bien basse.

Tristesse et désolation

Sans âme, sans collectif, sans solutions, Épinal a piétiné son hockey face à une formation alpine pourtant elle aussi brouillonne, mais qui a su faire la différence en deuxième période sur un avantage numérique généreusement accordé. Vraiment regrettable car l'ICE était rentrée idéalement dans la partie en ouvrant rapidement la marque mais cette - nouvelle - grossière erreur de Petrik sur l'égalisation de Subit a littéralement coupé les nageoires des Dauphins. Retombant dans leurs habituels travers, ceux-ci ont aussitôt laissé la direction des opérations aux Avalanches, s'enlisant inexorablement dans les limbes de la stérilité et de l'inconsistance et livrant-là une piètre prestation rappelant les pires heures de la saison passée... Bien qu'étant menés d'un seul petit but, les Dauphins n'ont ainsi jamais vraiment donné l'impression de pouvoir recoller au score, même si les rushs occasionnels de Šimko ou l'omniprésence et la vaillance du capitaine courage Guillaume Chassard ont souvent donné le tournis à la défense adverse. Rares éclaircies dans la grisaille vosgienne, les deux attaquants se sont montré les plus en vue même si l'explosivité de Ján Šimko sonne bien trop souvent comme un coup d'épée dans l'eau en raison du manque de réalisme de l'ex-Tourangeau dans le dernier geste.

Dans un match haché et ennuyeux, Épinal a payé cher son indiscipline (les deux buts furent concédés en désavantage numérique). Avec un fond de jeu indigne de Ligue Magnus, impossible d'espérer quoique ce soit dans les semaines à venir. Mais on l'a dit plus haut, l'ICE version 2005/06 est capable bien trop souvent du pire, mais aussi du meilleur. Une révolte est-elle encore possible où cette équipe finira-t-elle comme les autres ? En attendant, le Mont-Blanc revient à un petit point et les prochaines échéances prévues dans l'enfer des Diables Rouges de Briançon puis à domicile face à Angers seront décisives pour l'attribution de cette fameuse dixième place.

Compte-rendu signé Jérémie Dubief

 

Épinal - Mont-Blanc 1-2 (1-1, 0-1, 0-0)

Samedi 11 février 2006 à 20h15 à la patinoire de Poissompré. 1099 spectateurs.

Arbitrage d'Alexandre Hauchart assisté de Sébastien Moine et Damien Bliek.

Pénalités : Épinal 42' (6', 8', 8'+10'+10'), Mont-Blanc 16' (2', 10', 4').

Tirs : Épinal 25 (9, 7, 9), Mont-Blanc 37 (11, 14, 12).

Évolution du score :

1-0 à 00'19" : Allard assisté de Slovák

1-1 à 02'44" : Subit assisté de Fleutot (sup. num.)

1-2 à 28'23" : Hrehorcak assisté de Carry et Pouget (sup. num.)

 

Épinal

Gardien : Stanislav Petrik [sorti de sa cage à 59'09"].

Défenseurs : Peter Slovák - Milan Sejna ; Lubomir Duda - Radoslav Regenda ; Borislav Ilic - Tobias Åblad.

Attaquants : Shawn Allard - Guillaume Papelier - Guillaume Chassard (C) ; Luc Mazerolle - Jussi Haapasaari - Ján Plch ; Ján Šimko - Roman Trebaticky (A) - Martin Kotásek.

Remplaçants : Franck Constantin (G), Gaétan Gavoille, Djamel Zitouni. Absents : Anthony Maurice (suspendu), Christophe Ribanelli (blessé), Lionel Simon.

Mont-Blanc

Gardien : Arnaud Goetz.

Défenseurs : Lilian Prunet - Thomas Berruex ; Christian Pouget (A) - Peter Hrehorcak ; Stéphane Gachet - Pierre-Antoine Simmoneau.

Attaquants : Patrice Fleutot (C) - Étienne Croz - Sébastien Subit ; Jani Pollari - Romain Carry (A) - Pirkka Lahtinen ; Sylvain Nicoud - Thierry Nicoud - Bastien Sangiorgio ; Renaud Tracol.

Remplaçants : Johann Scanff (G), Florent Socquet. Absent : Guillaume Duclos.

 

Retour à la Ligue Magnus