Épinal - Amiens (29 novembre 2005)

 

Match comptant pour la quinzième journée de la Ligue Magnus 2005/2006.

Si près, si loin...

Parfum des grands soirs avec l'accueil d'un ténor du championnat, Amiens. Tombés sur leur glace devant des Grenoblois décidément imprévisibles (4-5), les Gothiques, dauphins de l'ogre rouennais, se veulent forcément revanchards face à des Spinaliens pas toujours séduisants mais bien ancrés en milieu de tableau.

Vainqueurs chez la lanterne rouge gapençaise après avoir compté deux unités de retard au bout de vingt minutes, les coéquipiers de Luc Mazerolle, auteur d'un doublé samedi, ont à nouveau su renverser la vapeur pour créer l'égalité au retour de la pause avant de se détacher pour ramener les deux points des Hautes-Alpes. Seule la victoire était attendue de ce périple alpin - qui était l'occasion d'assister au retour en jeu du grand malchanceux du début de saison, le défenseur Radoslav Regenda - et les hommes de Joakim Nilsson ont respecté le contrat. Ces derniers doivent s'attendre à plus forte opposition avec la réception des double vainqueurs de le Coupe Magnus, les plus efficaces de Ligue Magnus en penalty-killing et non moins maladroits en powerplay (19,4%, deuxième derrière Dijon). Nourrissant toujours les ambitions d'être bien placés en vue des séries, les Dauphins pourraient faire un bon rapproché au général en cas de succès car les chocs entre adversaires directs ne manquent pas (Grenoble - Villard, Briançon - Angers et Morzine-Avoriaz - Anglet).

Décevants l'an passé et pas toujours dignes du titre acquis au printemps 2004, les Gothiques présentent un visage plus attrayant et surtout une bien meilleure consistance que la version précédente. Si le contingent est toujours fourni en internationaux, celui-ci présente de toutes autres garanties avec l'adjonction de vrais étrangers d'impact, au contraire du lymphatique Michal Vrábel, voire du roc finlandais Timo Willman, longtemps contesté par les partisans amiénois. Trois Slovaques d'expérience renforcent ainsi la troupe picarde : le relanceur Frantisek Pulscák (33 ans), venu de Tours et contacté à l'intersaison par Épinal, mais aussi Peter Janik (32 ans), un blueliner bien référencé arrivant en droite ligne du Dukla Trencín (Extraliga slovaque). Souffrant encore de maux de têtes et sonné samedi soir sur une charge grenobloise, Janik restait incertain jusqu'au bout mais tiendra finalement sa place. Sans oublier le stratège Miroslav Pazak qui fait présentement le bonheur des Gothiques après avoir fait la pluie et le beau temps à Dijon. Enfin, comment ne pas évoquer Antoine Mindjimba car s'il en est un qui ne laisse personne indifférent, c'est bien le controversé cerbère des Gothiques, rappelé à nouveau dans le groupe France depuis l'automne.

Gardien de talent au passé sulfureux, malin, parfois caractériel mais souvent présent dans les grands rendez-vous, Mindjimba a dû faire défaut à ses couleurs lors du match aller suite à une altercation l'ayant opposé au rugueux Grenoblois Craig Mills. Ce soir-là, ce fut sa doublure Jérôme Plumejeau qui défendit les cage picardes, encaissant trois buts dont un de Jan Plch en double infériorité numérique. Vainqueurs de ce match aller (5-3), les hommes de Denis Perez se souviennent sans aucun doute être tombés ici même en septembre 2004. Accroc en partie effacé lors des huitièmes de finale de Coupe de France où le succès gothique sur la même glace n'avait lors souffert d'aucune contestation face à des Spinaliens aux portes de la crise (2-4). Nul doute qu'un remake du premier scénario suffirait grandement au bonheur du public spinalien, mais ces Gothiques-là, privés de l'international Nicolas Pousset et restant sur deux revers de rang à domicile, comptent bien ne pas répéter leurs erreurs du passé !

Coups de sang

Ce à quoi s'emploient les hommes de Denis Perez, hormis une première alerte des complices Plch et Simko dans les premières secondes car la riposte de Pazak (0'41"), qui poussent et laissent augurer des premières minutes difficiles pour les Dauphins. Comme à l'accoutumée, l'ICE s'engourdit et subit une infructueuse pression picarde. Mais là où Briançonnais, Grenoblois et autres Chamoniards avaient tiré profit de l'apathie inaugurale de leurs hôtes, les Gothiques eux ne parviennent pas à faire la différence même lorsque Petrik évalue mal la situation en s'avançant beaucoup trop mais arrive quand même à repousser le lancer excentré de Loïc Sadoun (4'52"). Passé ce coup de chaud de cinq minutes, les Spinaliens, sous l'impulsion du feu follet Jussi Haapasaari décidément en grande forme ces derniers temps ou du remuant duo Simko-Plch, parviennent à relever la tête et le premier nommé, parti dans un beau numéro ligne de fond, s'en va buter sur Mindjimba (5'43"). Parti peu après affoler la défense avec ses collègues Kotásek et Mazerolle, le petit Finlandais est châtié contre la bande, maculant la glace de sang et se voyant contraint de quitter temporairement le jeu, touché au visage. Là-dessus et après moult tergiversations, interrogations et incompréhensions, le corps arbitral se décide à passer un bon coup de surfaceuse et éprouve toutes les peines du monde à gérer "correctement" cette première action chaude (7'16"). Sanctionnés de 2'+2', les Gothiques s'en sortent sans dommage devant des Spinaliens trop individualistes et manquant de cohésion. Privilégiant ainsi l'action individuelle, les Dauphins ont bien des soucis à passer la robuste arrière-garde amiénoise même si Loïc Sadoun se voit pris de vitesse par le patinage de Jan Simko contre la bande et contraint de l'accrocher (10'37"). Là aussi, le jeu de puissance peine à s'installer et Brice Chauvel en contre force Petrik à réaliser l'arrêt en deux temps (12'07").

Amiens tire donc profit du manque d'inspiration des Vosgiens dans le jeu offensif mais ne parvient pas à tirer son épingle du jeu. Si Mindjimba ne se laisse pas surprendre par un Trebaticky démarqué à sa gauche (14'04"), les actions ne sont pas légion et le jeu reste dans l'ensemble brouillon. On peut croire que la situation de quatre contre quatre découlant d'une légère brouille entre Mazerolle et Zwikel décantera un peu le jeu mais ce n'est pas le cas hormis une belle séquence d'Anthony Mortas et un essai trop appuyé de Simon Petit (17'39"). Rugueux et nerveux, les Amiénois se font à nouveau pénaliser en toute fin de période et connaissent un retour aux vestiaires agité. Le ton monte entre Antoine Mindjimba et certains spectateurs amassés sur les grilles surplombant l'entrée des vestiaires visiteurs (spectateurs huant avec virulence les joueurs picards et Mindjimba en particulier), et le bouillant portier d'Amiens conforte ses nombreux détracteurs en menaçant l'un d'entre eux avec sa crosse. Un peu d'agitation et un geste très limite pour clore un premier acte assez brouillon dont l'issue a bien failli partir en eau de boudin...

Nouvelles du front

Alors que Jussi Haapasaari fait son retour au début du tiers médian, Laurent Gras en infiltration (21'32") puis François Rozenthal (22'04") réouvrent les hostilités mais ce sont bien les Spinaliens qui vont se montrer le plus dangereux... à quatre contre cinq. Exploitant un moment de flottement de la défense gothique, Jan Plch gratte le palet contre la bande et lance en profondeur Jan Simko qui ne parvient pas à prendre le dessus sur Mindjimba (22'58"). Le match reste indécis mais Amiens enchaîne toujours les indisciplines. Les débats sont donc plus que jamais hachés mais l'ICE ne parvient pas à profiter de son avantage numérique, que ce soit par Regenda de la bleue (29'17"), Kotásek en angle fermé (poteau à 29'30") ou Duda (29'50"). Mindjimba tient la baraque devant Haapasaari (31'44") et peut s'estimer heureux de la maladresse spinalienne devant cette succession de cages vides (35'08"). Présent, le sulfureux gardien gothique l'est à nouveau sur cette échappée plein axe du dragster Jan Simko mais laisse un rebond coupable dans les patins du vieux renard Roman Trebaticky qui n'a plus qu'à tranquillement pousser le disque dans la cage grande ouverte pour ouvrir le score (1-0 à 39'04"). Voilà une heureuse conclusion pour des Spinaliens bien en place mais manquant grandement de réalisme. Gênés par le pressing vosgien et peinant à garder leurs nerfs, les Amiénois ont cumulé les infractions au cours d'un second tiers serré.

Amiens reprend sa domination à l'entame des vingt dernières minutes mais bute encore et toujours sur un bloc défensif étanche où Peter Slovák, décidément transfiguré depuis son retour dans les Vosges, fait merveille. Appliqués et généreux dans l'effort, les Spinaliens bénéficient d'une nouvelle pénalité amiénoise mais frisent la correctionnelle sur un contre du capitaine Anthony Mortas qui subtilise à sa bleue le palet à Lubomir Duda pour prendre la clé des champs. Heureusement pour eux, le capitaine picard lance au-dessus (44'31"). Se retrouvant à leur tour amputés d'un élément, les Spinaliens résistent et se battent sur tous les palets à l'instar d'un Simko bataillant en zone neutre pour s'extirper plein axe et s'offrir un face à face avec le gardien adverse. Lancé à grande vitesse, le Slovaque, en déséquilibre, ne rate pas l'occasion de loger la rondelle dans la lucarne gauche de Mindjimba (2-0 à 46'31").

Crève-cœur !

Ce but est le personnification d'une troupe spinalienne conquérante et opiniâtre, désormais en pleine confiance alors qu'Amiens semble avoir pris un bon coup derrière les oreilles. Une succession de pénalités va conduire Denis Perez à sortir Antoine Mindjimba pour ainsi s'offrir un double avantage numérique en vue des dernières minutes, Tobias Åblad -éphémère Gothique lors de la saison 2000/01 - étant appelé à rejoindre la geôle pour une crosse haute (57'08"). C'est la dernière chance des Gothiques et ceux-ci établissent leur siège en zone offensive. Sous le feu ennemi, Stanislav Petrik multiplie les prouesses et se retrouve pleinement après quelques petits moments d'errances connus pendant ce match mais le roseau, pliant depuis de longues secondes, cède une première fois quand Laurent Gras bonifie un palet traînant à proximité de la cage pour regonfler le moral des siens (2-1 à 58'29"). Dans la foulée, l'enchanteur Miroslav Pazak jette un froid glacial dans l'enceinte de Poissompré en faisant disparaître ses adversaires et en expédiant la rondelle dans la lucarne gauche de Petrik (2-2 à 58'53"). Amiens peut s'estimer béni des dieux avec cette fin de match rocambolesque conduisant à une cinquième prolongation de suite pour Épinal devant son public... Crève-cœur !

Présentant une fiche à la maison de deux gains, un nul et une défaite dans cet exercice, les Spinaliens se montrent les plus entreprenants et bousculent les Gothiques. L'intenable Jussi Haapasaari doit être stoppé illicitement par le défenseur international Vincent Bachet (63'31") et sur la supériorité qui en découle, Milan Sejna, bien servi dans l'axe par Plch, adresse un puissant lancer sur le cerbère international (64'20"). Hésitants à prendre leur chance, comme c'est le cas avec un Martin Kotásek pourtant très bien placé en zone offensive, les Dauphins poursuivent tout au long de ces dix minutes leur domination stérile. Un Mindjimba autoritaire sur la déviation d'Haapasaari dans le slot (66'39"), un dernier essai de Plch (67'50"), Épinal a tout tenté mais a finalement laissé passé sa chance, celle de décrocher, un an après, le scalp d'Amiens. À une minute et sept secondes près...

Combatifs, solidaires mais aussi parfois empruntés offensivement (surtout en début de partie), les Spinaliens peuvent nourrir de bien légitimes regrets à l'issue d'un match qu'ils auraient mérité de gagner. Si les débats furent souvent rudes avec des Amiénois accrocheurs, les Spinaliens ont su rivaliser et même prendre l'ascendant sur leurs adversaires dès l'entame du dernier tiers-temps. S'attelant tout au long de la partie à user la défensive picarde, le vif Jan Plch aura fait passer une soirée bien difficile à ses gardes du corps. Le trio Mazerolle-Haapasaari-Kotásek, tranchant et actif dans les deux sens, mais aussi un Jan Simko décisif et percutant dans son rôle de passe-murailles, auront été d'autres facteurs déterminants. Véritable révélation de la saison spinalienne, l'étonnant Peter Slovák (est-ce le même joueur qui a porté l'uniforme bleu à deux reprises par le passé ?) n'en finit plus de surprendre, s'affirmant match après match comme une pièce maîtresse du dispositif de Joakim Nilsson aux côtés par exemple d'un Radoslav Regenda revenu à son meilleur niveau ou d'un Tobias Åblad superbe d'abnégation. La brigade défensive, intraitable, s'en tire avec les honneurs alors que Stanislav Petrik, intransigeant en fin de match, a de nouveau connu quelques soubresauts sans fâcheuse conséquence pour ses couleurs. Alors que l'équipe monte en régime et gagne en consistance, Petrik lui semble évoluer sur des montagnes russes, au gré des fluctuations de sa confiance... La talent est toujours là mais le mental suit-il toujours ?

Malgré une bonne entrée en matière, Amiens a paru quelque fois emprunté et a fini par tomber dans le piège de l'indiscipline. À l'image des internationaux François Rozenthal ou Jonathan Zwikel, les Gothiques se sont montrés bien peu transcendants mais leur défensive a fait le métier, bien emmenée par Vincent Bachet ou Peter Janik, semble t-il bien remis de son choc de samedi soir. Jamais prise à défaut en désavantage numérique, l'escouade défensive à bien tenu le choc et a pu se reposer sur un Antoine Mindjimba vigilant. Même si ce triste sire n'a pas donné une très belle image de sa personne, il a su tenir bon. Qu'importe, Amiens a réussi son coup de poker en égalisant in extremis. La prochaine réception du Mont-Blanc devrait être l'occasion de renouer avec son public après deux défaites consécutives.

Compte-rendu signé Jérémie Dubief

 

Épinal - Amiens 2-2 après prolongation (0-0, 1-0, 1-0, 0-0)

Mardi 29 novembre 2005 à 20h15 à la patinoire de Poissompré. 1088 spectateurs.

Arbitrage d'Alexandre Hauchart assisté de Benjamin Gremion et Savice Fabre.

Pénalités : Épinal 24' (2', 2', 10'+10', 0'), Amiens 26' (10', 6', 8', 2').

Tirs : Épinal 40 (13, 11, 10, 6), Amiens 44 (4, 10, 15, 5).

Évolution du score :

1-0 à 39'04" : Trebaticky assisté de Simko

2-0 à 46'41" : Simko assisté de Slovák (inf. num.)

2-1 à 58'29" : Gras assisté de J. Marcos (sup. num.)

2-2 à 58'53" : Pazak assisté de Zwikel

 

Épinal

Gardien : Stanislav Petrik.

Défenseurs : Lionel Simon - Tobias Åblad ; Lubomir Duda - Radoslav Regenda ; Peter Slovák - Milan Sejna.

Attaquants : Ján Simko - Roman Trebaticky (A) - Ján Plch; Luc Mazerolle - Jussi Haapasaari - Martin Kotásek ; Christophe Ribanelli - Anthony Maurice (A) - Guillaume Chassard (C) ; Guillaume Papelier.

Remplaçants : Franck Constantin (G), Gaëtan Gavoille, Borislav Ilic, Djamel Zitouni.

Amiens

Gardien : Antoine Mindjimba [sorti de sa cage de 57'08" à 58'53"].

Défenseurs : Thomas Roussel - Frantisek Pulscák ; Julian Marcos - Peter Janik; Vincent Bachet (A) - Sébastien Dermigny.

Attaquants : Simon Petit - Anthony Mortas (C) - Miroslav Pazak ; Loïc Sadoun - Laurent Gras (A) - Élie Marcos ; Brice Chauvel - Jonathan Zwikel - François Rozenthal ; Julien Lefranc - Lionel Wiotte - Arnaud Grossémy.

Remplaçants : Jérôme Plumejeau (G), Cyril Boubé. Absent : Nicolas Pousset (pouce cassé).

 

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