Grenoble - Amsterdam (14 octobre 2005)

 

Match comptant pour le deuxième tour de la Coupe Continentale, groupe D.

C'est le grand soir pour les Brûleurs de Loups de Grenoble. Ce 101e match européen peut apparaître comme un retour sur la scène continentale par une porte dérobée puisque l'organisation de ce tournoi avait été initialement dévolue à Mulhouse... avant que les Isérois, troisièmes du dernier championnat mais premiers parmi les clubs financièrement sains, ne la récupère. C'est un défi organisationnel, pour montrer son professionnalisme sous son meilleur jour face à des concurrents structurés, un test médiatique, puisque la Coupe Continentale est pour la première fois l'objet d'une diffusion télévisée, mais aussi un test sportif, car ce tournoi est très équilibré entre des équipes de valeur assez proche.

Amsterdam est sans doute celle qui paraît un peu inférieure, car un peu moins dense que par le passé. Elle ne bénéficie plus comme à ses débuts du soutien de la fédération qui y avait casé des doubles passeports à rendre éligibles pour la sélection nationale. Il y a eu une totale réorganisation du hockey professionnel dans la capitale néerlandaise cet été, mais même si on est reparti sur de nouvelles bases, il reste encore quelques éléments de la nouvelle génération de Néerlando-Canadiens comme Lamonte Polet ou Marcel Kars.

Peu importe l'adversaire, Grenoble sait que ce tournoi sera relevé et que c'est de lui-même dont dépendra son sort. Or les Brûleurs de Loups ne se présentent pas dans de meilleures conditions. Depuis le début de la préparation, les blessures s'accumulent et les cadres français semblent prendre successivement des tours de garde à l'infirmerie. Le cas le plus sérieux est quand même celui de Ludek Broz, le maître à jouer tchèque qui devait être la vedette du recrutement et qui n'a même pas pu jouer le moindre match officiel, car il a dû être opéré du genou. Son remplaçant Brett Draney n'a toujours pas son permis de travail, et les autres blessés sont les jeunes Hecquefeuille et Tartari... plus le gardien Cédric Dietrich forfait au cours de la semaine. En plus, les Grenoblois doutent depuis qu'ils ont été blanchis samedi dernier chez le dernier du championnat Caen. Mais s'ils ont perdu trois fois sur quatre à l'extérieur, ils ont jusqu'ici tenu leur rang à domicile. Le vrai révélateur de leur valeur à Pôle sud, c'est maintenant. Après tout, les équipes en face ont aussi leurs problèmes. Pour Amsterdam, c'est l'attaquant américain Anthony Blumer qui est rentré au pays la semaine dernière pour raisons personnelles et qui a signé dans une équipe d'UHL.

C'est une équipe en proie au doute qui entre sur la glace avec l'envie de se rassurer... et c'est raté. Le premier lancer du match, un tir du poignet en entrée de zone de Lamonte Polet, surprend Christophe Burnet (0-1 à 01'51"). Grenoble commence à camper en zone offensive et essaie de faire le jeu face à des Néerlandais très repliés. On pense au Rouen - Amsterdam (0-0) d'il y a deux ans ou au France - Pays-Bas (1-0) des derniers Mondiaux, et on se dit que ce but concédé d'entrée est décidément une très mauvaise affaire. Puis, à la huitième minute, un tir en feuille morte de Roger Jönsson depuis l'aile droite finit au fond des filets de Tomas Kalousek, masqué par Yven Sadoun (1-1 à 07'23"). Les Brûleurs de Loups se disent qu'ils ont fait le plus dur et baissent le pied dans les minutes suivantes, hormis sur une superbe séquence de patinage de Josef Podlaha qui réussit deux bons tirs durant son action, lui... C'est une mauvaise passe de Simon Bachelet atterrissant sur Polet qui réveille brièvement Amsterdam, emmené par son Monsieur Jesuispartout, le capitaine Tommie Hartogs, champion de France avec Grenoble en 1998. Malgré quelques contres épars à surveiller, l'impression de domination laissée par l'équipe locale donne plutôt confiance après ces vingt premières minutes, l'accroc initial ayant été réparé.

Le deuxième tiers-temps est moins convaincant. Il débute par la première pénalité du match, sifflée contre les visiteurs pour s'être présentés en retard à l'engagement. Néant en supériorité. Pour enflammer l'attaque grenobloise, c'est le défenseur Baptiste Amar qui s'y colle avec un petit pont sur Hartogs suivi d'une passe au poteau opposé sur Russell dont le tir longe la ligne. Les montées de plus en plus fréquentes des défenseurs vont d'ailleurs contribuer à changer la physionomie de cette deuxième période, plus ouverte. Une pénalité différée est sifflée contre Papa, et Chris Eimers vient alors percuter dans le dos Martin Millerioux qui était en marche arrière. Le plus touché des deux semble être le Néerlandais qui s'est fait mal tout seul, blessé au genou et porté pour quitter la glace. On ne verra plus aucun des deux hommes, puisque Millerioux est remplacé par Johann Morant, qui signalera sa présence par un coup d'éclat en remontant toute la glace avant de finir son action en chargeant son vis-à-vis. Il y a de l'envie chez les jeunes joueurs, mais il faudrait aussi de la rigueur qui est en train d'être oubliée. Sur un mauvais changement de ligne grenoblois, Marcel Kars se retrouve tout seul face au but mais échoue sur Burnet.

Le jeu s'emballe dans cette deuxième période avec beaucoup d'espaces de part et d'autre. On sent pas mal de flottement chez les Brûleurs de Loups, par exemple sur une sortie ric-rac de Burnet alors qu'Amsterdam se retrouvait, une fois de plus, à trois contre deux en zone offensive. Deux Grenoblois trébuchent sur des crosses adverses, et à la seconde bordée de sifflets descendue des tribunes, l'arbitre se décide à appeler une pénalité contre l'arrière canadien Scott Farrell, pas fameux. Ce deuxième jeu de puissance grenoblois est beaucoup plus convaincant, même s'il n'est pas concrétisé. Sur la meilleure position de tir, la reprise de Jönsson s'envole loin du cadre. Le match devient un peu fou, et Aaron van Leusen échappé oublie le palet à la bleue, se faisant siffler hors-jeu tout seul en venant le récupérer. Une relance de Nicolas Favarin est interceptée par Hartogs qui sert à deux contre un Polet... qui rate le tir. Il y a eu une ribambelle d'occasions pendant ces vingt minutes, quantité de belles cages ouvertes sur des rebonds, mais si peu de tirs cadrés...

Et avec si peu de précision dans leurs tirs, comme sur cette chance offerte à Mills en début de troisième période, on commence à douter que les Grenoblois arrivent à trouver la faille. La délivrance vient finalement d'une action similaire au premier but. Pascal Favarin envoie un palet vers la cage alors que des écrans perturbent le gardien. La crosse de Josef Podlaha dévie le palet au vol (2-1 à 47'56"). Les erreurs et les moments de panique sont maintenant l'apanage exclusif d'Amsterdam, qui n'est plus dangereux... jusqu'à ce qu'arrivent les cinq dernières minutes. Bonnard perd sa crosse, et la défense grenobloise est immédiatement en danger sur cette phase de jeu. Sur l'action suivante, l'ex-Bisontin Bohuslav Subr lance une contre-attaque et Podlaha commet une faute sur Van Leusen. L'engagement est gagné mais est suivi d'une mésentente dans la défense. Décidément, Grenoble est parti pour se faire peur jusqu'au bout. Quand Ron Berteling demande un temps mort à deux minutes de la fin, c'est moins pour donner des consignes que pour reposer ses joueurs d'expérience qui quittent rarement la glace. La pénalité est tuée et les Brûleurs de Loups se rassurent. On ne peut pas indéfiniment tirer sur la corde : que peut bien encore faire un Lamonte Polet qui a dû jouer entre trente-cinq et quarante minutes ce soir ? Tout simplement profiter du premier palet exploitable pour le glisser instantanément sous le défenseur et entre les jambières de Christophe Burnet (2-2 à 59'03"). Les Grenoblois se jettent sur les derniers palets avec l'énergie du désespoir, mais la victoire leur a échappé.

Caen n'était peut-être pas qu'un accident, car il y a dans cette équipe de Grenoble un manque effarant de lucidité dans le dernier geste. Cela fait deux ans que les problèmes offensifs persistent, mais même les recrues ne semblent rien y changer. Bobby Russell, le meilleur attaquant en début de saison, s'est ainsi déjà fondu dans le moule grenoblois. Il a appris comme ses camarades à être tétanisé à l'approche du but et à viser tout sauf la cage. Si les deux buts ont été inscrits sur des palets balancés vers le but pendant que des joueurs travaillaient dans le slot, c'est que les actions un peu plus construites ont toujours avorté par manque de finition. Grenoble ne peut quand même pas s'en remettre encore aux qualités de buteur de Podlaha, le seul qui paraisse capable d'efficacité. Un réalisme défaillant et quelques relâchements défensifs coupables, cela fait beaucoup de choses à corriger en deux jours. Mais tout le monde part sur le même plan, puisque les deux matches de la première journée se sont terminés sur le même score de 2-2... si l'on excepte les séances de tirs au but qui n'ont encore jamais servi une seule fois dans la compétition mais que Grenoble aurait mieux fait d'éviter de perdre (2-3). En fin de compte, Amsterdam n'était peut-être pas l'adversaire idéal pour commencer, car ces vieux grognards seront peut-être plus jouables en fin de tournoi quand ils seront un peu usés - surtout qu'ils ont maintenant un homme en moins. Tant pis. Grenoble voulait un challenge, il l'aura contre Herning. Et il risque de ne plus y avoir de demi-mesures.

Compte-rendu signé Marc Branchu

 

Commentaire d'après-match (au micro de Sport +)

Jean-François Bonnard (défenseur de Grenoble) : "On prend un but en début de match et un autre à la dernière minute, c'est dommage. Au moins, ça nous évitera de réfléchir : si on gagne les deux derniers matches, on se qualifie. On a énormément dominé. Dans ces cas-là, nous, défenseurs, avons tendance à nous porter à l'avant, donc forcément on laisse des contres à l'adversaire. Néanmoins ils n'ont dû prendre qu'une quinzaine de tirs."

 

Grenoble - Amsterdam 2-2 (1-1, 0-0, 1-1)

Vendredi 14 octobre à 20h00 à la patinoire Pôle Sud de Grenoble. 2722 spectateurs.

Arbitrage d'Igor Dremelj (SLO) assisté de Guillaume Gielly et Damien Bliek.

Pénalités : Grenoble 6' (0', 2', 4'), Amsterdam 6' (2', 2', 2').

Tirs : Grenoble 24 (8, 9, 7), Amsterdam 19 (7, 7, 5).

Évolution du score :

0-1 à 01'51" : Polet assisté de Subr

1-1 à 07'23" : Jönsson assisté de Sadoun et Russell

2-1 à 47'56" : Podlaha assisté de Favarin et Mills

2-2 à 59'03" : Polet assisté de Van der Thillart et De Groot

 

Grenoble

Gardien : Christophe Burnet.

Défenseurs : Nicolas Favarin - Viktor Wallin ; Baptiste Amar (A) - Simon Bachelet ; Martin Millerioux [puis Yohann Morant à 23'22"] - Jean-François Bonnard (A).

Attaquants : Craig Mills - Laurent Meunier - Josef Podlaha ; Bobby Russell - Roger Jönsson - Yven Sadoun ; Cyril Papa - Sacha Treille - Benoît Bachelet (C) ; Romain Bachelet.

Remplaçants : Andy Foliot (G), Teddy Trabichet. Absents : Kévin Hecquefeuille (os de la main cassé), Christophe Tartari (fracture du pied), Ludek Broz (opération du genou), Brett Draney (pas encore qualifié), Cédric Dietrich.

Amsterdam

Gardien : Tomas Kalousek.

Défenseurs : Scott Farrell - Alexander Schaafsma ; Leo van den Thillart - Maarten de Groot.

Attaquants : les trois paires d'ailiers Simon De Wit - Chris Eimers [blessé à 23'22"] ; Robert Jongbloed - Tommie Hartogs (parfois à l'arrière) et Bohuslav Subr - Aaron van Leusen alternent avec les deux centres Lamonte Polet et Marcel Kars.

Remplaçants : Jordan van Hoogee (G), Jan Jaap Natte, Mark Tanner. Absent : Anthony Blumer (reparti aux États-Unis).

 

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