Lettonie - Ukraine (7 mai 2005)

 

Championnats du monde 2005, deuxième tour, groupe F.

Ceci est un défi. Un pari un peu fou. Faire le résumé d'un match que je n'ai pas (vraiment) vu ! Ben quoi, comme si jamais quelqu'un ne parlait de ce qu'il ne connaît pas...

Alors voilà, autant vous le dire tout de suite, la Lettonie a battu l'Ukraine 3-0 en match de qualification du groupe F des championnats du monde de hockey sur glace a Innsbruck en Autriche. Voilà, c'est fait ! Dans ce cas, si je n'ai pas vu grand-chose du match, qu'est-ce qui me donne le droit de parler de cette rencontre ? Ben, je suis à Riga ! Ça suffit comme excuse ? Bon, c'est parti !

Alors tout d'abord, quelques explications sur le fait que je n'ai entraperçu que quelques images du match. Je suis dans la capitale lettone pour couvrir la visite de George W. Bush à Riga. Confiné dans le centre de presse, situé dans le palais des congres, au cśur d'un parc du centre ville à deux pas du monument de la Liberté pour ceux (nombreux évidemment surtout depuis une semaine qu'il y a enfin une liaison aérienne directe Paris-Riga par Air Baltic) qui connaissent Riga, je ne peux me rendre dans un des bars qui diffusent le match sur écran géant. J'ai trop de boulot pour cela. En plus la ville est bloquée, fermée, contrôlée pour des raisons de sécurité.

Le match débute au même moment que la déclaration de Bush dans la vieille ville de Riga. L'écran géant diffuse donc le discours du président américain (on est quand même là pour bosser, faut pas dec...). Donc pas question de suivre le premier tiers.

Mais c'est ensuite que cela se gâte. Les autorités lettones n'ont pas débranché la première chaîne publique LTV du grand écran. Au secours, il faut subir une infâme émission de variétoche présentée par deux animateurs engoncés et survivants des années 70 (Leonids Breznevs revient !). Entre un blondinet peroxydé et certainement perruqué qui se dandine près d'un piano blanc et un insupportable joueur de clarinette, l'impatience me gagne... Heureusement, entre deux papiers envoyés à Paris, j'entends soudainement une clameur venant du fond d'un couloir ! Ouh la, me dis-je en moi-même, cela sent les petits malins qui ont dégoté un poste pour mater le match tranquilou. N'écoutant que mon courage et ma vocation de reporter, je suis mon instinct et mon ouïe pour me diriger vers l'endroit d'où la clameur semblait venir. Effectivement, élémentaire mon cher Watsons (la version lettone de ce cher Watson) : une bande de filous suit le match dans un coin. Il y a toujours 0-0. Heureusement, rien de raté de bien grave ; si ça se trouve, il y a eu un clonage durant la nuit, Peteris Vorobijevs est devenu entraîneur letton (il a bien été au Dynamo Riga...) et Petro Vorobiovtchouk a été nomme à la tête de l'équipe nationale ukrainienne.

Le temps d'aller enregistrer un papier et je reviens dans la "planque". Oh mince, fais-je, il y a eu un but. J'arrive sur le ralenti pour voir Leonids Tambijevs lever les bras au ciel, je suppose qu'il a marqué (33'38"). Cette fois-ci, ça suffit, il faut réagir. Je demande à un journaliste letton d'aller changer cette maudite chaîne sur le grand écran pour suivre un peu ce match.

Et miracle, ça marche ! À la fin du deuxième tiers, ça fait pschriittt en direction du grand écran, les visages se tournent, ils viennent de changer de chaîne. Apparaît alors une blonde comac, comme disaient les tontons flingueurs, qui commente un sondage. D'après 47% des téléspectateurs (c'est un plébiscite), Arturs Irbe est élu le meilleur Letton du match, pour l'instant. Mais comme il suffit que l'icône mette un patin sur la glace pour que la Lettonie entière se prosterne... les autres se contentent de quelques maigres pourcentages. À mon avis, il peut faire de la politique après sa carrière, il finira président de la République. Déjà que le premier ministre, Aigars Kalvitis, est un ancien dirigeant de la fédération de hockey lettone !

Une petite parenthèse (de toute façon, vu que je n'ai rien à raconter sur le match...) pour vous rassurer : les Lettons sont toujours aussi fous de hockey. Déjà dans l'avion, comme l'année dernière à la même époque, le magazine de la compagnie aérienne lettone Air Baltic pond son reportage habituel sur la migration des supporters lettons aux championnats du monde. Cette année, ils sont quatre mille en Autriche. Arturs Irbe leur a rendu hommage en déclarant qu'ils étaient les meilleurs supporters du monde, en se déplaçant toujours en masse, alors que la Lettonie, malgré son explosion économique actuelle, est encore le pays le plus pauvre de l'Union européenne. C'est d'ailleurs impressionnant de se promener aux alentours de Riga. À perte de vue : des grues ! La capitale lettone n'est qu'un immense chantier. Centres commerciaux, bureaux, concessionnaires et... patinoire ! Mais je n'ai pas eu le loisir d'aller voir les travaux de la future patoche des Mondiaux 2006. Je me contenterai de l'évolution des travaux sur internet sur www.hockey.lv grâce à la célèbre webcam...

S'il n'y avait pas la venue de George Bush ("Il arrive" en titre sur une immense photo qui fait toute la une du principal journal letton), le Mondial serait sur toutes les lèvres. Les résultats de l'équipe nationale arrivent cependant en deuxième position dans les titres. La chaîne Kanal 3 qui retransmet les matches de l'équipe nationale a même transformé pour l'occasion sa page de pub avec un supporter letton qui tape sur un tambour pour annoncer les pubs !

Ça y est, le match reprend ! C'est le dernier tiers. Mais mon ordinateur n'est pas en face de l'écran géant. Et oui, ils ont trouve le moyen de mettre les tables en travers, il faut donc tourner la tête sur la gauche (à défaut d'être précis sur le match, autant l'être sur les autres détails...) pour apercevoir la rencontre. Mais comme je dois "pondre" des papiers et des reportages, je ne peux me planter devant l'écran. Alors, je suis le match "à l'oreille". Dès que j'entends des clameurs, je tourne la tête. C'est étrange, dès que les gens crient, c'est toujours un grenat qui a le palet ! Et ils sont où, et ils sont où, et ils sont où, les Ukrainiens ? Ben à Kyiv, c'est vrai, ils n'ont aucune raison d'être à Riga !

À un moment, la clameur est plus importante que d'habitude. Je me retourne : but ! Un magnifique tir balayé de Karlis Skrastins (45'15"), la star LNH du Riga 2000, donne de l'air aux grenats. Je me force à regarder de temps en temps le match, quand même, faut faire le résumé ! "Oh, c'est bien joué !", "Tiens, les Lettons dominent !", "Ah, un contre rapide des Ukrainiens !"... Ça vous va, c'est assez précis ? Ben quoi, vous voulez quoi de plus ? Les Lettons pressent, Olexandre Simtchouk, avec son beau casque qui représente la cathédrale Sainte-Sophie de Kyiv, s'en sort plus que bien, et ses coéquipiers sont dangereux en contre. Voilà ! Le temps passe, et à trois minutes de la fin, sur une belle entrée en zone, une passe précise de Leonids Tambijevs arrive dans la crosse d'Aleksandrs Semjonovs pour le 3-0 du KO.

À la fin du match, oubliant sa nécessaire neutralité journalistique (tu parles !), le centre de presse se met à applaudir à la victoire de l'équipe nationale. Vous aussi, car vous venez d'assister au résumé le plus baroque de l'histoire...

Élus meilleurs joueurs du match : Leonids Tambijevs pour la Lettonie et Konstantin Simchuk pour l'Ukraine.

Compte-rendu signé Bruno Cadène

 

Commentaires d'après-match

Leonids Berenevs (entraîneur de la Lettonie) : "Nous équipes se connaissent si bien qu'il y a eu peu de mouvement sur la glace car le jeu était bloqué. L'Ukraine est toujours un adversaire difficile à jouer."

Oleksandr Seukand (entraîneur de l'Ukraine) : "Nous étions très lents aujourd'hui. Quand on ne patine pas et qu'on ne crée pas quelque chose, on ne peut pas battre une équipe comme la Lettonie. J'ai eu des nouvelles rassurantes de Yuri Gunko [évacué sur une civière avec une minerve après avoir été heurté dans le dos par le genou d'un coéquipier]. Il peut bouger tous ses membres, les médecins ne sont plus inquiets à son sujet."

 

Lettonie - Ukraine 3-0 (0-0, 1-0, 2-0)

Samedi 7 mai 2005 à 16h15 à l'Olympiaeishalle d'Innsbruck. 4702 spectateurs.

Arbitrage de Brent Reiber (SUI/CAN) assisté de Dean Laschowski (CAN) et Stefan Fonselius (FIN).

Pénalités : Lettonie 4' (4', 0', 0'), Ukraine 12' (6', 2', 4').

Tirs : Lettonie 30 (8, 13, 9), Ukraine 17 (4, 4, 9).

Évolution du score :

1-0 à 33'38" : Tambijevs assisté de Nizivijs et Smejonovs

2-0 à 45'15" : Skrastinš assisté d'Ankipans et Cipulis

3-0 à 57'05" : Semjonovs assisté de Tambijevs

 

Lettonie

Gardien : Arturs Irbe

Défenseurs : Agris Saviels - Karlis Skrastins ; Olegs Sorokins - Atvars Tribuncovs ; Rodrigo Lavins - Viktors Ignatjevs ; Guntis Galvins.

Attaquants : Grigorjis Pantelejevs - Aigars Cipruss - Alekandrs Macijevskis ; Leonids Tambijevs - Aleksandrs Semjonovs - Aleksandrs Nizijivs ; Martins Cipulis - Janis Sprukts - Girts Ankipans ; Aleksejs Sirokovs - Herberts Vasiljevs - Mikelis Redlihs ; Maris Ziedins.

Remplaçant : Edgars Masalskis (G).

Ukraine

Gardien : Konstantin Simchuk.

Défenseurs : Sergueï Klimentiev - Dmitro Tolkunov ; Andreï Sryubko - Vyacheslav Zavalnyuk ; Yuri Gunko - Vitali Lyutkevich ; Denis Isaïenko - Vyacheslav Timchenko.

Attaquants : Roman Salnikov - Dmitro Tsyrul - Vitali Litvinenko ; Konstantin Kasyanchuk - Vadim Shakhraïchuk - Serhyi Varlamov ; Bogdan Savenko - Vasyl Bobrovnikov - Vitali Semenchenko ; Aleksandr Matvychuk - Artem Gnidenko.

Remplaçants : Oleksandr Fedorov (G), Oleg Timchenko.

  

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