République Tchèque - Allemagne (3 mai 2005)

 

Championnats du monde 2005, premier tour, groupe D.

La courte défaite du Kazakhstan contre la Suisse cet après-midi promet un duel germano-helvétique sur le fil de rasoir pour finir ce groupe. Ce sera non seulement pour les quarts de finale, mais aussi pour éviter la relégation. Les principaux supporters de l'Allemagne ce soir devraient être... les Suisses, car, paradoxalement, un bon résultat du grand rival leur garantirait d'éviter la poule de maintien (sauf exploit kazakh contre les Tchèques).

Greg Poss a choisi une approche bien plus défensive qu'à l'accoutumée face au talent tchèque, mais, comme contre le Kazakhstan, les Allemands se compliquent la tâche en prenant très tôt des prisons et en encaissant rapidement un premier but. La pénalité de Kreutzer est tuée, pas celle de Pyka. Un slap au ras de la glace de Pavel Kubina passe entre les bottes de Robert Müller (1-0 à 07'22"). Le gardien de Krefeld se rattrape avec une jambière solide sur quatre coups de boutoir de la crosse de Petr Cajanek, avant que sa défense n'arrive à la rescousse. Les Tchèques dominent de la tête et des épaules, et quand Slegr rudoie Martinec à l'excès en protégeant son gardien, le jeu de puissance allemand n'arrive même pas à s'installer. Le différentiel technique est considérable, à l'instar des belles entrées de zone tchèque en possession du palet ou encore de cette action de Martin Straka qui dribble tout le monde sur une mise au jeu en zone offensive. L'Allemagne par contre ne trouve aucune solution d'attaque. Quels que soient les schémas de prédilection de son sélectionneur, elle reste intrinsèquement une équipe plus disciplinée qu'imaginative.

Le deuxième tiers-temps est plus positif pour l'Allemagne avec une première véritable occasion. L'attaquant de Mannheim et habituellement de NHL Jochen Hecht, qui était incertain en raison d'une blessure au poignet et qui risque de repartir à tout moment si sa femme accouche, assume ses responsabilités de joueur théoriquement le plus doué. Il rentre en zone et déborde Jiri Fischer - qui s'est tourné dans le mauvais sens pour couvrir son joueur et a un peu glissé - mais son tir échoue sur Vokoun.

Les Allemands mettent maintenant leur patte sur ce match, qui prend alors une tournure plus agressive. Alexander Barta agrippe Varada qui est plaqué au sol et en perd son casque. "Retenir" est l'euphémisme qui figurera sur la feuille de match. Daniel Kreutzer cogne Tomas Kaberle qui s'approchait de son gardien, Prospal s'en mêle et des coups partent. L'ancien international finlandais M. Henriksson, comme hier, vérifie que ses juges de ligne séparent les belligérants mais tolère ces brassages (quand Felski ajoutera les coups de crosse aux coups de poing en fin de tiers, il se décidera quand même à donner des pénalités simultanées sur une altercation, sinon il estime que ça n'en vaut pas la peine). Et surtout, dans cette phase très rugueuse, Jaromir Jagr estrentré aux vestiaires après avoir eu le petit doigt cassé par un cinglage du jeune Stefan Schauer.

Alors que Hemsky vient de s'asseoir en prison, Martin Straka accroche Christian Ehrhoff près de la cage allemande. Une minute quarante à 5 contre 3 : c'est le moment ou jamais pour les hommes de Greg Poss d'égaliser. Quand on ne déborde pas d'idées offensivement, il est interdit de ne pas exploiter une telle occasion. Et pourtant... Ehrhoff rate un contrôle à la bleue, Hecht se fait prendre hors-jeu, et pour essayer d'empêcher le palet de ressortir une troisième et dernière fois de la zone offensive, Kreutzer accroche Vyborny dans un réflexe désespéré et part en prison. Poss a pourtant aligné ses joueurs les plus cotés (sa deuxième ligne), mais même eux, ceux qui devraient disposer des atouts offensifs suffisants, ne les ont pas montrés.

Les Allemands continuent quand même de travailler et de prendre des lancers. Tomas Vokoun ne montre pas de faille, jusqu'à ce tir de Daniel Kreutzer sur le poteau, après une mise au jeu en zone offensive où Marcel Goc a repoussé en force Vyborny pour laisser le palet à son ailier. On atteint la seconde pause sur le même score que la première, mais avec une différence de taille, c'est que l'Allemagne semble maintenant capable de marquer, à défaut de l'avoir fait.

Pas à leur avantage au deuxième tiers, où ils ont vraiment subi le jeu, les Tchèques accélèrent progressivement à la reprise. Et à six minutes de la fin, Petr Sykora ressort du coin. Stephan Retzer se couche pour lui barrer l'accès à la cage, mais, ce faisant, il gêne son propre gardien. Sykora continue son mouvement et son tir passe entre les jambes de Retzer avant de rentrer (2-0 à 53'51"). Remonter deux buts reviendrait pour la Mannschaft à effectuer l'ascension de l'Everest en tongs. Autant dire que le match est plié. Mais ne l'était-il pas dès le premier but ?

Les Tchèques, qui ont paru un peu déboussolés après avoir vu Jagr sortir, n'ont pas été brillants après une bonne première période, mais ils n'en ont pas eu besoin. Oui, l'Allemagne a réussi à faire la loi dans ce match durant un tiers-temps. Et peu d'équipes en seraient capables face à un adversaire de ce calibre. Il n'empêche qu'on ne voit pas comment cela pourrait se traduire en victoire. La hargne et l'acharnement de défenseurs anonymes comme Michael Bakos sont remarquables, mais dans cette équipe qui a conservé les vertus de combativité autrefois prônées par Zach, il n'y a toujours personne qui soit capable de faire la différence. Le répertoire offensif allemand a été extrêmement pauvre. Les joueurs les plus doués arrivaient à percer la bleue et à adresser des tirs assez excentrés. Et c'est tout. Comme il n'y a pas la moindre passe en zone offensive, le gardien adverse a la partie facile. Tomas Vokoun a compris qu'il lui suffisait de se placer sur ces tirs et de ne pas laisser de rebonds. Cette Allemagne, c'est en quelque sorte l'équivalent d'une équipe de football qui attend les coups de pieds arrêtés pour marquer. Le "coup de pied arrêté" en question, c'était cette mise au jeu parfaitement négociée par Goc et Kreutzer, au poteau près. Mais on n'a jamais vu une équipe de hockey gagner comme cela. Dans ce sport, la vraie tactique comparable, ce serait d'utiliser les supériorités numériques. Or, le jeu de puissance allemand piétine.

Élus meilleurs joueurs du match : Pavel Kubina pour la République Tchèque et Robert Müller pour l'Allemagne.

Compte-rendu signé Marc Branchu

 

Commentaires d'après-match

Petr Sykora (attaquant de la République Tchèque) : "La glace n'est pas très bonne, tout le monde le sait, et il fait très chaud. Alors on ne va pas voir beaucoup de beaux buts. L'Allemagne reste toujours en retrait et pratique un jeu dur contre nous en attendant les contres. Moi aussi j'ai reçu des coups de crosse sur mes mains, c'est le hockey moderne. Je pense que cela devrait être plus sanctionné, car les gens viennent aux championnats du monde pour voir Jagr et les meilleurs joueurs jouer, pas se blesser. Le point positif, c'est que notre jeu de puissance fonctionne et nous a permis deux fois d'inscrire le premier but, si important."

Stefan Schauer (défenseur de l'Allemagne) : "Je pense que tout le monde a pu voir que je tenais ma crosse d'une seule main. Je n'avais pas l'intention de blesser Jagr. Je suis désolé et je lui souhaite un bon rétablissement. [...] Nous avions moins de pression que contre le Kazakhstan. Nous avons effectué quelques ajustements à notre système, nous avons pris une approche plus défensive. Tout le monde a du potentiel dans cette équipe, et cela donne confiance avant d'affronter les Suisses. Nous aurions pu utiliser un ou deux rebonds chanceux. Mais nous ne pouvons nous en prendre qu'à nous-mêmes si nous ne concrétisons pas nos occasions. Nous devons continuer à travailler et la chance arrivera."

 

République Tchèque - Allemagne 2-0 (1-0, 0-0, 1-0)

Mardi 3 mai à 20h15 à la Stadthalle de Vienne. 8000 spectateurs.

Arbitrage de Hannu Henriksson (FIN) assisté d'Ales Lesnjak (SLO) et Sergueï Shelyanin (RUS).

Pénalités : République Tchèque 12' (2', 8', 2'), Allemagne 14' (4', 8', 2').

Tirs : République Tchèque 32 (12, 11, 9), Allemagne 18 (4, 7, 7).

Évolution du score :

1-0 à 07'22" : Kubina assisté de Jágr et Prospal (sup. num.)

2-0 à 53'51" : Petr Sýkora

 

République Tchèque

Gardien : Tomáš Vokoun.

Défenseurs : Jirí Fischer - Marek Zidlický ; Jaroslav Špacek - Pavel Kubina ; Tomáš Kaberle - Jirí Slegr ; Jan Hejda - František Kaberle.

Attaquants : Martin Straka - Václav Prospal - Jaromír Jágr ; Václav Varada - David Výborný - Petr Sýkora ; Martin Rucinský - Petr Cajánek - Radek Dvorák ; Petr Prucha - Josef Vašícek - Aleš Hemsky.

Remplaçant : Milan Hnilicka (G).

Allemagne

Gardien : Robert Müller.

Défenseurs : Michael Bakos - Andreas Renz ; Christian Erhoff - Stefan Schauer ; Lasse Kopitz - Stephan Retzer ; Nico Pyka.

Attaquants : Petr Fical - Alexander Barta - Tomas Martinec ; Daniel Kreutzer - Marcel Goc - Jochen Hecht ; Sven Felski - Jan Benda - Andreas Morczinietz ; Eduard Lewandowski - Tino Boos - Sebastian Furchner.

Remplaçant : Alexander Jung (G).

 

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