Suède - États-Unis (8 mai 2004)

 

Demi-finale des championnats du monde 2004.

Est-ce le début d'une formidable aventure pour l'équipe américaine ? Pour la première fois, un match de championnat du monde sera diffusé aux États-Unis, en différé sur ESPN2, et avec une audience qui sera certainement bien inférieure à celles enregistrées ne serait-ce qu'au Canada (où plus de 10% de la population avait suivi la finale de l'an dernier), mais c'est déjà un premier pas.

L'état d'esprit collectif remarquable des Américains peut-il leur permettre de répéter l'exploit face à une équipe suédoise aussi talentueuse que les Tchèques avec l'arrivée de Forsberg et Lidström ? C'est le danger si la Tre Kronor se starifie un peu trop. Elle a demandé - et obtenu - une dérogation exceptionnelle pour que le n°21 puisse être attribué à Peter Forsberg alors qu'il était dévolu à Jörgen Jönsson jusqu'ici dans le tournoi. Le capitaine a accepté de prendre le n°72 à la place. Le manager de l'équipe suédoise a déclaré que le n°21 était aussi indissociable de Forsberg que le n°99 ne l'était de Wayne Gretzky, comparaison tout de même un peu audacieuse.

Peter Laviolette reste fidèle à son principe de l'alternance qu'il a énoncé à la fin du quart de finale, et c'est donc au tour de Mike Dunham de garder les cages américaines. Sur la première action, celui-ci se couche devant Påhlsson qui s'est arraché de derrière la cage avec le palet. Mais le gardien des New York Rangers tarde trop à se relever. Dick Tärnström récupère la rondelle le long de la bande et l'envoie dans la cage laissée vide (1-0 à 00'18"). La Suède fait un début de match tonitruant avec deux ou trois grosses occasions dans les deux premières minutes, mais les Américains montrent qu'ils seront là dans ce match avec les premières contre-attaques, fonçant vers le but à toute vitesse à la manière d'une charge de bisons déterminés.

Grier accroche Alfredsson, et on veut voir comment les Scandinaves vont se comporter en supériorité numérique, alors qu'ils ne devancent que les déplorables jeux de puissance de l'Allemagne et de la France jusqu'ici dans les stats du tournoi. Mais malgré les renforts de Forsberg et Lidström qui sont de très bons spécialistes, il n'y a pas d'amélioration sensible. Le second avantage numérique, pendant que Jillson est en prison, est nettement plus convaincant. La Tre Kronor s'installe très longtemps dans la zone même si cela ne donne toujours rien sur le plan comptable. Mais une crosse haute de Mike Grier atteint le visage d'Axelsson qui saigne au-dessus de la lèvre. Ce nouveau séjour en prison de Grier pour 2'+2' est crucial. Soit la Suède prend le large, soit les Américains auront le moral gonflé à bloc. Le tir de Tjärnqvist heurte la barre transversale et on s'approche de la seconde solution. Mais Jonas Höglund est oublié devant la cage dans le dos des défenseurs et Michael Nylander lui envoie un palet à dévier entre les jambières de Dunham (2-0 à 18'58").

Malgré leurs deux buts d'avance, les Suédois sont avertis. Ils ne peuvent se permettre le moindre relâchement sous peine de subir le même sort que les Tchèques. Surtout que l'on peut penser que Nicolas Dutil, sermonné à la sortie de la glace par Peter Laviolette, ne va pas tarder à faire jouer la compensation. Pour l'instant, cependant, on n'en est pas là. La Tre Kronor a la maîtrise totale du match et il ne lui manque que la finition, notamment sur une reprise d'Alfredsson qui passe à quelques centimètres du poteau alors que Dunham était battu. Le capitaine américain Chris Drury montre la voie. Il perce magnifiquement le bloc suédois en zone neutre, passe la bleue et donne le palet en position idéale à Jeff Hamilton, mais celui-ci conclut d'un piètre revers sur Lundqvist. C'est un indice. L'homogénéité apparente qui avait fait la force des Américains est remise en cause, et Drury paraît pour la première fois un peu seul.

Ah, voilà la première pénalité suédoise, une obstruction de Påhlsson sur Weinrich qui était engagé dans un duel acharné avec Salomonsson contre la balustrade. Mais ce n'est pas cela qui suffira à faire pencher la balance du côté américain, car les Suédois font une démonstration collective dans cette deuxième période avec d'impressionnantes séquences de passes de palette à palette en zone offensive. Des séquences dont la Tre Kronor nous gratifie depuis maintenant quatre ans... sans la moindre médaille d'or à la clé.

Est-ce le retour de la malédiction de l'équipe de Hardy Nilsson ? Les Américains marquent en effet au moment où ils ne font plus rien, sur une passe du patin d'Adam Hall et un revers de Richard Park (2-1 à 31'06"). Park, célèbre pour être né en Corée du sud, mais qui est surtout, fait plus pertinent, le premier joueur formé en Californie à avoir accédé à la NHL, à une époque où cet état abritait déjà une franchise NHL - les Los Angeles Kings - mais n'avait produit aucun joueur de haut niveau. Le match est dès lors complètement relancé et les deux équipes font alors de belles choses. En fin de tiers-temps, Paul Mara est obligé d'accrocher un joueur suédois parti en breakaway. Pendant sa pénalité, Niklas Lidström contrôle un palet à la bleue et parvient à trouver une passe en profondeur, au milieu de deux Américains, vers Per-Johan Axelsson dans l'enclave qui inscrit le troisième but seulement seize secondes avant la rentrée aux vestiaires (3-1 à 39'44"). Le marabout serait-il enfin à court d'aiguilles ?

Les États-Unis gaspillent leurs dernières chances lors de deux avantages numériques en début de troisième période. Des passes souvent imprécises et parfois interceptées y font avorter toutes les actions. L'avance suédoise n'est donc pas contestée... jusqu'à la dernière minute. Dunham est sorti de ses cages, et à six contre cinq, Jeff Halpern récupère un rebond en angle fermé et redonne un bref espoir aux siens (3-2 à 59'24"). Mais les Suédois remportent les deux dernières mises au jeu en zone défensive face à Chris Drury et bataillent bien dans les duels lorsqu'on s'approche de leurs cages. Leur qualification en finale est donc acquise.

L'exploit n'était pas possible deux fois de suite pour les Américains. Ils sont trop limités techniquement pour cela, et les Suédois ne pouvaient pas être pris en faute d'arrogance ou d'individualisme ce soir. Une supériorité technique incontestable, un jeu collectif limpide, des passes merveilleuses, un jeu de puissance retrouvé, la Tre Kronor a tout ce qu'il faut pour se parer d'or. Mais ça fait plusieurs années que c'est le cas...

Compte-rendu signé Marc Branchu

 

Suède - États-Unis 3-2 (2-0, 1-1, 0-1)

Samedi 8 mai à 20h15 à la Sazka Arena de Prague. 17215 spectateurs.

Arbitrage de Nicolas Dutil (CAN) assisté de Petr Blümel (TCH) et Juha Kautto (FIN).

Pénalités : Suède 8' (0', 4', 4'), États-Unis 12' (8', 2', 2').

Tirs : Suède 28 (8, 12, 8), États-Unis 24 (7, 8, 9).

Évolution du score :

1-0 à 00'18" : Tärnström assisté de Påhlsson

2-0 à 18'58" : Höglund assisté de Nylander et Axelsson (sup. num.)

2-1 à 31'06" : Park assisté de Hall et Westrum

3-1 à 39'44" : Axelsson assisté de Lidström (sup. num.)

3-2 à 59'24" : Halpern assisté de Drury

 

Suède

Gardien : Henrik Lundqvist.

Défenseurs : Dick Tärnström - Niclas Hävelid ; Daniel Tjärnqvist - Christian Bäckman ; Niklas Lidström - Per Hållberg ; Ronnie Sundin.

Attaquants : Andreas Salomonsson - Samuel Påhlsson - Jonathan Hedström ; Peter Forsberg - Jörgen Jönsson - Daniel Alfredsson ; Jonas Höglund - Michael Nylander - Per-Johan Axelsson ; Niklas Andersson - Matthias Tjärnqvist - Andreas Johansson.

Remplaçants : Stefan Liv (G), Fredrik Sjöström.

États-Unis

Gardien : Ty Conklin.

Défenseurs : Paul Mara - Aaron Miller ; Hal Gill - Brett Hauer ; Andy Roach - Eric Weinrich ; Keith Ballard - Jeff Jillson.

Attaquants : Ryan Malone - Jeff Halpern - Chris Drury ; Bates Battaglia - Mike Grier - Erik Westrum ; Richard Park - Matt Cullen - Adam Hall ; Blake Sloan - Jeff Hamilton - Dustin Brown.

Remplaçant : Mike Dunham (G).

 

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