Suisse - France (25 avril 2004)

 

Championnats du monde 2004, premier tour, groupe D.

Les Suisses, qui ont assisté à la déroute française hier contre l'Autriche, n'auront-ils plus qu'à ramasser les miettes face à des Bleus décomposés ? Ou leur vieux complexe face au voisin resurgira-t-il pour permettre une réaction d'orgueil tricolore ?

La pression physique helvétique met rapidement à l'épreuve les Français qui mettent un peu plus d'engagement qu'hier et évitent ainsi l'hémorragie initiale. La première occasion est pour Luca Cereda qui prend un gros rebond seul face à Huet, resté parfaitement en place (8'59"). Alors que Vauclair est en prison, Thierry Paterlini est pénalisé pour une crosse au visage de Pouget. La France se retrouve alors pendant 1'11" à cinq contre trois, une situation de jeu qui avait été catastrophique dans les matches amicaux contre le Kazakhstan... et qui est encore pire aujourd'hui avec un engagement perdu, une glissade en zone neutre d'Arnaud Briand en tentant de dribbler le tellement plus agile Martin Plüss, et une circulation du palet déficiente. Même en supériorité, les Français paraissent vulnérables aux contre-attaques. Mais heureusement pour les Bleus, les Suisses (qui jouent maintenant sans Steinegger qui se plaint de douleurs au dos), malgré un jeu créatif et ambitieux, ne font que des tirs peu dangereux. Olivier Coqueux, qui n'a pas l'impact attendu et ne parvient pas à prendre les rebonds, arrive par contre à "oublier" de freiner et tamponne Gerber à deux minutes de la fin de la période. La France termine donc ce premier tiers-temps en infériorité, mais elle résiste et y fait meilleure figure qu'en jeu de puissance.

Mais il y a quand même des limites à l'accumulation des pénalités. Trois en moins de six minutes pour commencer la deuxième période, c'est par exemple trop. Celle contre Pousset d'entrée n'est qu'un simple avertissement, car sur un centre d'Ambühl, Ivo Rüthemann, laissé trop libre par Vincent Bachet au second poteau, tire à l'extérieur de la cage ouverte. Par contre, dès qu'une charge avec un peu d'élan de François Rozenthal sur Plüss est sanctionnée, Seger tire et deux Suisses - Ziegler et Rüthemann - se ruent sur le gardien protégé par un seul défenseur français, Karl Dewolf. L'acharnement de l'attaquant de Berne sur Huet, qui n'avait pas bloqué la rondelle, amène le premier but (1-0 à 24'52"). Ensuite, Briand accroche Wirz, les Suisses font tourner le palet pour écarter la défense, et Beat Forster, complètement seul dans l'enclave entre Olivier Coqueux et François Rozenthal, double la mise (2-0 à 27'48").

Les Français sont sortis du match, ils n'ont plus de vigilance défensive, plus aucune agressivité, et ne patinent plus. Peu après la mi-match, le capitaine Arnaud Briand part lui aussi en prison pour une charge dans le dos de Keller à la relance derrière la cage suisse. Cristobal Huet, couché, ne peut que regarder Thomas Ziegler récupérer le palet dans l'enclave et marquer le troisième but (3-0 à 30'43"). À quatre contre quatre (accrochage entre les deux pensionnaires de l'Elitserien suédoise, Marcel Jenni et Maurice Rozenthal), les boulevards s'ouvrent pour les Suisses, mais Huet arrête le breakaway de Wichser. Une minute de répit avant la suite de l'avalanche. Un lancer d'Olivier Keller frappe le fond du haut du filet et ressort, le but étant logiquement accordé après un appel bien long à la vidéo (4-0 à 34'07"). Évènement après une obstruction de Bordeleau sur son coéquipier bernois Ziegler : enfin une pénalité de tuée, ça faisait longtemps...

L'enchaînement systématique pénalités-buts reprend avec une belle régularité au troisième tiers-temps. Une crosse haute de Maurice Rozenthal sur Forster, et un tir de Rüthemann trompe Huet qui avait la vue totalement bouchée par Ziegler (5-0 à 44'08"). Bordeleau qui charge Keller contre la bande, et sur un lancer de Seger repoussé latéralement, le jeune Andres Ambühl prend le rebond dans le dos de Huet (6-0 à 46'11"). Cristo, qui avait déclaré dans L'Équipe de ce matin qu'il n'est "pas du genre à demander à sortir", se force pourtant et va lui-même au banc français, à bout. Le changement de gardien aurait certainement dû intervenir plus tôt pour ne pas lui infliger ça et le ménager un tant soit peu. Fabrice Lhenry aura peu de travail pour sa part, car les Suisses gèrent tranquillement la fin de match.

Olivier Coqueux, qui n'a pas d'autre arme que le coup de poing pour s'imposer devant la cage adverse, prend une pénalité dans la dernière minute, et la France termine donc à quatre, parfait résumé du match. Les infériorités numériques cataclysmiques l'ont fait complètement sombrer après les espoirs nés au premier tiers-temps. Quant au jeu de puissance tricolore, il est toujours désastreux, à l'image des deux palets que Pouget a laissé échapper à la bleue quand ses coéquipiers s'étaient par miracle installés. Après deux 0-6 dans la musette, il va falloir brûler des cierges avant d'affronter les vedettes canadiennes...

Si la désignation comme meilleur joueur suisse de Rüthemann, auteur de quatre points pour son premier match en championnat du monde, n'a pas dû être bien compliquée pour le jury, il a par contre été obligé de faire preuve de plus d'imagination qu'hier, du fait de la triste sortie de Huet, pour sortir un joueur du lot dans les rangs tricolores. C'est finalement Laurent Gras qui a été choisi, il a eu le temps de marquer les esprits en une ou deux actions d'éclat, mais comme pour les quelques débordements des Rozenthal ou les actions isolées de Brice Chauvel, ils ne se sont inscrits dans aucun projet de jeu collectif et n'ont pas été suivies. Les Français n'ont toujours pas aligné trois passes de suite, alors que les Suisses en comparaison avaient un mécanisme d'horlogerie de précision. Ils ont enfin pu exprimer leur jeu contre les Bleus.

Élus meilleurs joueurs du match : Ivo Rüthemann pour la Suisse et Laurent Gras pour la France.

Marc Branchu

Commentaires d'après-match :

Ralph Krüeger (entraîneur de la Suisse) : "Nous avons eu un début très difficile. La première période toute entière a été dure. Je suis content que mes joueurs se soient tenus à leur ligne de conduite et n'ont pas paniqué."

Andres Ambühl (attaquant de la Suisse) : "Toutes les pièces se sont assemblées pour moi. Je me suis senti aussi bien en tant que joueur de powerplay dans le slot que dans un autre rôle sur la ligne de Jenni et Wirz. Au prochain match contre l'Autriche, je jouerai sans doute plutôt plus sur ma formation habituelle qu'en powerplay avec Ivo [Rüthemann] und Thomas [Ziegler]."

Heikki Leime (entraîneur de la France) : "Ce n'est pas la peine de regarder le nombre de buts d'écart mais plutôt les différences entre les joueurs français et leurs adversaires. En fait, ce sont une multitude de petites choses, tout ce qui fait la substance du hockey, que l'on fait moins bien. Face à l'Autriche, on s'était sentis humiliés. Là, on a fait un bon tiers-temps. Mais on note qu'on n'est pas capable de faire plus de vingt ou trente minutes contre des équipes de ce niveau. Jouer contre le Canada reste une chance pour un hockeyeur français, mais ce sera surtout une session de travail en vue de la poule de relégation. On n'a joué que deux matches sur six et c'est donc loin d'être fini. Ce n'est pas le moment de se laisser aller à la frustration et au désespoir. Le plus important reste à jouer car l'objectif est le maintien. On n'est tout de même pas venu à Prague pour gagner la médaille d'or !"

 

Suisse - France 6-0 (0-0, 4-0, 2-0)

Dimanche 25 avril à 16h15 à la Sazka Arena de Prague. 8712 spectateurs.

Arbitrage d'Aleksandr Poliakov (RUS) assisté de Marco Coenen (HOL) et Pavel Makarov (RUS).

Pénalités : Suisse 16' (6', 4', 6'), France 24' (4', 12', 8').

Tirs : Suisse 42 (13, 23, 6) , France 20 (7, 5, 8).

Évolution du score :

1-0 à 24'52" : Rüthemann assisté de Seger et Ambühl (sup. num.)

2-0 à 27'48" : Forster assisté de Ziegler et Rüthemann (sup. num.)

3-0 à 30'43" : Ziegler assisté de Rüthemann (sup. num.)

4-0 à 34'07" : Keller assisté de Jenni

5-0 à 44'08" : Rüthemann assisté de Forster

6-0 à 46'11" : Ambühl assisté de Seger et Ziegler (sup. num.)

 

Suisse

Gardien : Martin Gerber.

Défenseurs : Martin Steinegger - Steve Hirschi ; Olivier Keller - Mark Streit ; Mathias Seger - Beat Forster ; Julien Vauclair.

Attaquants : Ivo Rüthemann - Thomas Ziegler - Thierry Paterlini ; Adrian Wichser - Martin Plüss - Patric Della Rossa ; Patrick Fischer - Luca Cereda - Goran Bezina ; Marcel Jenni - Anders Ambühl - Valentin Wirz ; Sandy Jeannin.

Remplaçant : Marco Bührer (G).

France

Gardien : Cristobal Huet puis Fabrice Lhenry à 46'11".

Défenseurs : Vincent Bachet - Christian Pouget ; Allan Carriou - Nicolas Pousset ; Baptiste Amar - Nicolas Favarin ; Lilian Prunet - Karl Dewolf.

Attaquants : Maurice Rozenthal - Sébastien Bordeleau - Olivier Coqueux ; Benoît Bachelet - Arnaud Briand - David Dostal ; Anthony Mortas - Jonathan Zwikel - François Rozenthal ; Xavier Daramy - Laurent Gras - Brice Chauvel.

 

Retour aux championnats du monde