Russie - Canada (5 mai 2003)

 

Championnats du monde 2003, deuxième tour, groupe F.

La Russie veut absolument gagner aujourd'hui, d'une part pour retrouver confiance après deux défaites consécutives, d'autre part pour assurer sa place en quarts de finale sans devoir attendre avec anxiété les résultats de demain. Quant au Canada, l'enjeu pour lui est tout simplement de rester invaincu, et surtout de prendre la première place de son groupe, ce qui lui garantirait un quart de finale plus facile face à l'Allemagne.

Lorsque la première pénalité est sifflée contre Comrie, on est sceptique sur les conséquences qu'elle pourrait avoir. Que peut faire le catastrophique jeu de puissance russe, le plus mauvais du tournoi, face à une équipe canadienne invaincue en infériorité ? Pourtant, la Russie marque avec un peu de réussite dans les dernières secondes de la prison. Turkovski récupère un palet dégagé contre la bande et tire tout de suite. La trajectoire du palet, dévié au passage par la cuisse de Frolov, surprend Sean Burke. Mais Shane Doan égalise d'une reprise entre les jambières de Podomatsky, là aussi en avantage numérique.

Il faut dire que l'arbitrage n'est pas clément avec les Russes en cette première période. Au vu du jugement - teinté de mauvaise foi - porté par Plyushchev sur les zébrés lors des deux précédentes défaites russes, on n'ose penser ce qu'il dira ce soir, et il devra puiser dans ses réserves de vocabulaire. Alors que la moindre incartade russe est sanctionnée, Soïn se fait pénaliser pour avoir plongé sur une petite faute canadienne. Puis Novosoltsev prend la crosse de Reinprecht dans les gencives. Il reste sur la glace pour bien montrer qu'il saigne, mais l'arbitre américain Rick Looker n'a pas vu la faute. Il siffle donc une pénalité de compensation manifeste sur l'engagement quand Kovalchuk s'aide de la crosse de Cross (sic) pour se faire tomber.

Ces péripéties arbitrales, sans conséquence sur le match, contribuent-elles à détourner les Russes de leur plan de jeu ? En tout cas, on observe, déjà, le premier signe important de leur perte de lucidité. À une minute de la fin de la période, Igor Grigorenko se montre en effet beaucoup trop ambitieux en relançant le jeu lui-même depuis le dos de sa cage et en portant le palet dans sa propre enclave. Daniel Brière lui chipe la rondelle par derrière et il s'ensuit une très chaude alerte devant le but de Podomatsky.

Au deuxième tiers-temps, Kirk Maltby obtient le palet derrière les filets adverses, n'a pas trop de solutions de passes, et réussit alors le coup parfait avec un tir du revers qui tape l'épaule de Podomatsky pour atteindre la lucarne. Ce superbe tir extrêmement précis est un symbole de l'efficacité des Canadiens, alors que les Russes ont réussi vingt tirs cadrés contre six dans cette période. Mais, là où un Zinoviev manque le cadre alors que le cage lui est ouverte, un Brière, libre de tout marquage alors que Turkovski devrait être sur lui, vient dévier un lancer de la bleue de Bouwmeester juste devant le gardien russe.

Ce deuxième tiers se termine sur un coup de coude d'Anson Carter, mais la supériorité numérique ne réussit pas aux Russes. C'est au contraire Kirk Maltby qui part en contre et qui prend encore Podomatsky par surprise pour un doublé. La Russie a désormais tout faux. Elle perd son agressivité dans les duels, et se disperse dans des coups hors du jeu. Les pénalités superflues lui ôtent donc toute chance de revenir. Lors d'un très court passage à cinq contre trois, un centre de Bouwmeester est dévié involontairement par la jambière de Doan. L'honneur russe est sauvé par une superbe action individuelle d'Arkhipov qui rentre dans l'enclave et tire du poignet dans la lucarne. C'est cet éclair trop isolé du talent russe que l'on aurait aimé voir plus tôt.

Faute d'avoir su faire la différence quand elle avait la maîtrise du jeu, la jeune équipe russe s'est encore énervée et son jeu s'est effrité. Elle a été incapable de se montrer vraiment dangereuse et a laissé au contraire trop facilement les Canadiens s'approcher de sa cage. Surtout, ses nerfs ont été trop friables et sa créativité trop rare. L'impact de la première ligne russe a été nul. Il faut dire qu'elle a été parfaitement prise en charge par le bloc de Kris Draper, le spécialiste ès neutralisation, hormis dans le troisième tiers-temps où elle a pu par moments l'éviter de fait du passage à trois lignes. Si la Lettonie bat le Danemark et si la Suisse réussit l'exploit de prendre au moins un point contre la Suède, la Russie sera donc exclue des quarts de finale.

Élus meilleurs joueurs du match : Vladimir Antipov pour la Russie et Shane Doan pour le Canada.

Compte-rendu signé Marc Branchu

 

Commentaires d'après-match

Andy Murray (entraîneur du Canada) : "Je voudrais remercier l'entraîneur russe pour la motivation additionnelle qu'il nous a apportée à cause des Sweden Hockey Games. Nous étions arrivés à Stockholm avec une jeune équipe, et monsieur Plyushchev a critiqué avec des mots très durs le style de jeu canadien et l'indiscipline de nos joueurs. Nous ne l'avons pas oublié, et nous sommes contents qu'aujourd'hui nos joueurs aient montré talent et discipline. Il ne faut jamais énerver les Canadiens... Nos défenseurs ont été excellents, ce qui est très important, puisque l'équipe avec la meilleure défense remportera la compétition."

Vladimir Plyushchev (entraîneur de la Russie) : "Je voudrais féliciter mon collègue car son équipe a été convaincante. Elle est bien différente de celle qui a disputé les Sweden Hockey Games, et, naturellement, les entraîneurs ne sont pas les mêmes non plus. Le contenu du jeu canadien est par conséquent différent. Malheureusement, il nous faut attendre le résultat des matchs restants. Je ne soutiendrai personne, il ne faut pas dépendre des autres, nous aurions dû avoir notre destin entre les mains. [...] Si nos joueurs ne travaillent pas activement dans l'enclave, c'est parce qu'ils seraient immédiatement pénalisés, puisque nous sommes traités différemment de nos adversaires."

 

Russie - Canada 2-5 (1-1, 0-2, 1-2)

Lundi 5 mai 2003 à 20h00 à l'Élysée Arena de Turku. 5464 spectateurs.

Arbitrage de Rick Looker (USA) assisté de Juha Kautto (FIN) et Petr Blumel (TCH).

Pénalités : Russie 18' (8', 0', 10'), Canada 16' (6', 4', 6').

Tirs : Russie 40 (11, 20, 9), Canada 34 (15, 6, 13).

Engagements : Russie 33, Canada 36.

Évolution du score :

1-0 à 04'46" : Frolov assisté de Gusev et Arkhipov (sup. num.)

1-1 à 07'56" : Doan assisté de Reinprecht et Heatley (sup. num.)

1-2 à 27'58" : Maltby assisté de Doan et Draper

1-3 à 35'56" : Brière assisté de Bouwmeester

1-4 à 40'34" : Maltby assisté de Staios (inf. num.)

1-5 à 52'51" : Doan assisté de Bouwmeester et Reinprecht (double sup. num.)

2-5 à 58'01" : Arkhipov

 

Russie

Gardien : Yegor Podomatsky.

Défenseurs : Dmitri Kalinin - Aleksandr Khavanov ; Vassili Turkovski - Sergueï Gusev ; Vitali Proshkin - Dmitri Yerofeïev ; Sergueï Vyshedkevich - Aleksandr Guskov.

Attaquants : Ilya Kovalchuk - Pavel Datsyuk - Igor Grigorenko ; Aleksandr Frolov - Denis Arkhipov - Igor Saprykin ; Aleksandr Suglobov - Sergueï Zinoviev - Vladimir Antipov ; Aleksandr Semin - Sergueï Soïn - Ivan Novoseltsev.

Remplaçant : Maksim Sokolov (G). Surnuméraires : Aleksandr Zhdan, Aleksei Kaigorodov.

Canada

Gardien : Sean Burke.

Défenseurs : Eric Brewer - Steve Staios ; Jay Bouwmeester - Craig Rivet ; Cory Cross - Jamie Heward ; Mathieu Dandenault.

Attaquants : Shane Doan - Kris Draper - Kirk Maltby ; Anson Carter - Mike Comrie - Ryan Smyth ; Dany Heatley - Daniel Brière - Patrick Marleau ; Kyle Calder - Steven Reinprecht - Shawn Horcoff ; Krys Kolanos.

Remplaçant : Martin Biron (G).

 

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