France - Grande-Bretagne (13 février 2000)

 

Pré-qualification pour les Jeux olympiques, groupe 3, troisième journée.

La France n'a plus affronté la Grande-Bretagne depuis 1981, année où les Britanniques, derniers du classement mondial, avaient cessé de participer aux compétitions internationales et s'étaient enfermés sur leur île. Ils y sont revenus quelques années plus tard et ont progressé à la faveur d'une vague de naturalisations de Canadiens, devenus prépondérants dans une Superleague totalement ouverte aux étrangers. La France aborde ce match avec une marge puisqu'elle peut se permettre de perdre de deux buts, mais cette situation de faux confort est un piège qui a déjà failli coûter la qualification mondiale en novembre contre l'Italie, dans un match que Stéphane Sabourin a qualifié de "cauchemar d'Amiens" et qu'il ne veut pas voir se reproduire.

Les deux équipes ont perdu un attaquant : Zwikel est blessé alors que Merv Priest est rentré à Cardiff après avoir été averti que sa femme enceinte venait d'être admise à la maternité. Mais les Britanniques avaient une place libre dans l'effectif : pour remplacer l'attaquant absent, ils ont choisi de rappeler... un défenseur pour compléter des lignes arrières qui présentaient des faiblesses. Matt Coté, initialement forfait pour raisons personnelles, a accepté de faire le voyage jusqu'à Gdansk uniquement pour ce match. Face à cette Grande-Bretagne très expérimentée, Sabourin laisse sur le banc les jeunes Pihant et Mille et tourne à trois lignes.

Les Britanniques, qui n'avaient montré aucun remords quant à leur jeu très pénalisé vendredi, débutent sans surprise avec un hockey extrêmement physique. Mais même si Darren Durdle prend la première pénalité, les fautes suivantes sont commises par Denis Perez (une obstruction et un retenir). L'arbitre suédois Ulf Rådbjer tient les rênes mais autorise une certaine dose de rudesse, et les Français paraissent subir les chocs, en se désorganisant quand ils essaient de riposter. À la treizième minute, Paul Adey, ouvre le score en reprenant une passe de Durdle dans le cercle gauche : l'attaquant de Milan a marqué un but à chaque match dans ce tournoi après avoir été muet aux qualifications mondiales. L'équipe de France, qui a déjà perdu son défenseur Gérald Guennelon blessé au genou par une agression adverse, paraît en mauvaise posture.

Mais la reconstitution avant ce match du gros premier trio Bozon-Briand-Rozenthal, qui avait été décisif à l'automne, porte ses fruits : Maurice Rozenthal égalise deux minutes plus tard et ne laisse pas la France douter. Ce sont ces mêmes joueurs qui se montrent décisifs en début de deuxième période. Une obstruction de Steve Moria est sanctionnée après trente secondes et Arnaud Briand convertit l'avantage numérique. Le troisième homme de la première ligne, Philippe Bozon, marque à son tour dans la minute qui suit. La huitième pénalité mineure de Scott Young en trois matches (!) permet ensuite à Denis Perez de porter le score à 4-1. Six buts séparent alors la Grande-Bretagne de la qualification... mais c'est alors que les problèmes commencent.

Scott Young montre d'abord qu'il peut faire autre chose que cirer le banc de la prison en déviant dans le but un tir de la ligne bleue de Merv Harding. Pendant une pénalité de Pierre Allard, Woods a alors recours à une stratégie qui n'est pas inconnue dans la ligue britannique : il demande à l'arbitre de mesurer la crosse de Maurice Rozenthal... et obtient une pénalité pour équipement illégal. L'équipe de France doit jouer à 3 contre 5 pendant une minute et demie... mais la méthode la met tellement en rage qu'elle survit à cette séquence. Au contraire, quand Ashley Tait et David Longstaff prennent des pénalités inutiles parce qu'ils ont un temps de retard, Arnaud Briand transforme la double supériorité numérique (5-2).

Les ennuis ne sont pas encore terminés. Après une obstruction de Bachet, le powerplay britannique riposte par Darren Durdle qui a le dernier mot au rebond. 19 secondes plus tard, la lumière rouge s'allume sur une nouvelle mêlée devant le but de Huet. 5-4 ? Les Britanniques le croient, mais Philippe Bozon a eu la pommette lacérée à deux reprises par une crosse haute quelques secondes plus tôt. Le juge de ligne pointe la flaque de sang sur la glace : pas besoin d'appeler la police scientifique pour déjuger le but. Le Boz' finira la soirée à l'hôpital pour se faire recoudre.

Les Britanniques, qui avaient crié haro sur l'arbitrage sans manifester le moindre remords sur leurs actes face à la Pologne vendredi, ne hurlent plus au scandale. Ils ne contesteront pas la pénalité majeure infligée : ils mentionneront juste que le coupable désigné a posteriori par l'arbitre - Paul Adey - n'était pas le bon. L'indiscipline des Britanniques devient criante même pour leurs supporters les plus fervents au troisième tiers. Leurs petits tours se retournent contre eux quand ils demandent cette fois à mesurer la crosse de Huet... qui est parfaitement aux normes. L'absence d'autocritique lors du match précédent provoque aussi un retour de bâton : les quatre pénalités mineures de Rick Brebant vendredi n'étaient peut-être pas que la faute de l'arbitre, il aggrave encore son cas en contestant une pénalité et finit aux vestiaires avec deux méconduites. En fin de match, un accrochage de Dubois et un retard de jeu de Perez permettent à la Grande-Bretagne de clore le score à 5 contre 3 : le tir de Brebant frappe la transversale mais Steve Moria, le vétéran de 39 ans, prend le rebond.

Les Bleus sont surtout contents de s'être sortis d'un guet-apens. Ces retrouvailles 19 ans après ne contribueront pas au réchauffement des relations franco-britanniques. La presse française évoquera une "violence de bas-fonds" ou un "traquenard". Face aux contestations perpétuelles et à l'esprit déplorable de l'équipe adverse, Stéphane Barin émettra le jugement le plus lapidaire : "nous avons rencontré des mange-merde". Bref, l'équipe de France a vu ce qu'était le jeu de la Grande-Bretagne... et elle n'est vraiment pas pressée de la rencontrer de nouveau !

Désignés joueurs du match : Arnaud Briand pour la France et Rick Strachan pour la Grande-Bretagne.

Commentaires d'après-match

Stéphane Sabourin (entraîneur de la France) : "Malgré les évènements, on a gagné le match, ça donne une idée du mental de cette équipe. Les deux premiers challenges de cette saison sont remplis. Maintenant, on va pouvoir travailler en vue des championnats du monde. C'est un beau troisième défi pour une équipe qui se fait, qui est en train de grandir."

Arnaud Briand (meilleur joueur de la France) : "Gagner trois matches en tournoi ne nous arrive pas si souvent. On tombe plus souvent dans les pièges, et c'en était un, qu'on ne réalise des exploits."

Peter Woods (entraîneur de la Grande-Bretagne) : "Nous avons marqué les trois buts dont nous avions besoin mais malheureusement nous avons encaissé cinq dans l'autre sens. Je pense que l'arbitre a fait un très bon travail tenant bien le match. Nous avons été nos pires ennemis. Nous sommes sortis de notre plan de jeu et nous nous sommes frustrés en essayant d'obtenir ces trois buts rapidement. La France est une équipe talentueuse et ils ont bien pris leurs chances. [À propos de la mesure de crosse] Des temps désespérés requièrent des mesures désespérées."

 

France - Grande-Bretagne 5-4 (1-1, 4-2, 0-1)
Dimanche 13 février 2000 à 15h00 à la Hala Oliwia de Gdansk (POL). 900 spectateurs.
Arbitres : Ulf Rådbjer (SUE) assisté de Przemyslaw Kepa (POL) et Milan Mašík (SVK).
Pénalités : France 14' (4', 6', 4'), Grande-Bretagne 87' (4', 10'+5'+20', 14'+10'+20').
Tirs : France 24 (6, 5, 13), Grande-Bretagne 21 (5, 10, 6).

Évolution du score :
0-1 à 03'59" : Adey assisté de Durdle
1-1 à 15'26" : M. Rozenthal assisté de Bozon et Briand
2-1 à 22'05" : Briand assisté de Barin (sup. num.)
3-1 à 22'55" : Bozon assisté de Briand et Dewolf
4-1 à 27'07" : Perez assisté de Barin et Ouellet (sup. num.)
4-2 à 30'17" : Young assisté de Harding
5-2 à 35'09" : Briand assisté de M. Rozenthal et Meunier (double sup. num.)
5-3 à 38'09" : Durdle assisté d'Adey et Brebant (sup. num.)
5-4 à 45'56" : Moria assisté de Strachan et Boe (double sup. num.)
 

France

Attaquants :
Philippe Bozon - Arnaud Briand - Maurice Rozenthal (2')
Stéphane Barin - Robert Ouellet - Richard Aimonetto
François Rozenthal - Laurent Meunier - Pierre Allard (2')
Anthony Mortas

Défenseurs :
Jean-Christophe Filippin - Vincent Bachet (2')
Karl Dewolf - Grégory Dubois (2')
Baptiste Amar - Denis Perez (C, 6')
Gérald Guennelon

Gardien :
Cristobal Huet

Remplaçants : Patrick Rolland (G), Matthieu Mille, Julien Pihant. En réserve : François Gravel (G), Jonathan Zwikel (cheville).

Grande-Bretagne (2' pour surnombre et 2' pour retard de jeu)

Attaquants :
Ashley Tait (2') - Rick Brebant (4'+10'+20') - Paul Adey (4'+5'+20')
Graham Garden (2') - Steve Moria (C, 2') - David Longstaff (2')
Mike Harding - Jeff Johnstone (2') - Darren Hurley (2')
Nicky Chinn, Brent Bobyck

Défenseurs :
Vince Boe - Scott Young (6')
Rick Strachan - Darren Durdle (2')
Matt Coté - André Malo
Neil Liddiard - Jason Kendall

Gardien :
Stevie Lyle

Remplaçant : Stephen Foster (G). Reparti : Merv Priest (accouchement de sa femme).

 

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