Canada - République Tchèque (13 mai 1999)

 

Deuxième manche de la demi-finale des Championnats du monde A 1999.

Les Tchèques doivent absolument gagner ce second match à Lillehammer pour pouvoir jouer des prolongations avec la finale au bout. Hnilicka, très bon en première manche, est confirmé dans les buts, mais il est rapidement victime de la mésentente de sa défense : tandis que trois Tchèques vont à la lutte pour le palet dans le coin, Whitney, démarqué, semble marquer. Mais, après visionnage de la vidéo, le but n'est finalement pas validé : le palet a heurté la transversale, puis le poteau, avant de rebondir juste devant la ligne ! Cette première alerte ne réveille pas les Tchèques, outrageusement dominés en début de match, Hnilicka s'interposant à plusieurs reprises face aux attaquants canadiens. En supériorité numérique, Stillman s'échappe sur la droite et effectue une passe en retrait devant le but, déviée du patin dans les filets tchèques. L'arbitre refuse d'abord le but, mais la décision est de nouveau changée grâce à ce juge de paix qu'est la vidéo : c'est en effet le patin du malheureux Hlavac qui avait touché ce palet.

Ce but encaissé sonne l'heure de la révolte tchèque : c'est d'abord Sýkora qui échoue à deux reprises à une minute d'intervalle à bout portant face à Tugnutt, avant que Pavel Kubina n'égalise en supériorité numérique. Hlavac fait feu de tout bois : tout d'abord il s'échappe au milieu de deux défenseurs canadiens, mais Graves intervient superbement en venant lui enlever le palet sans faire de faute. Ensuite, il chipe le palet à Stéphane Quintal et donne une passe en retrait à Výborný dont le tir est capté par Tugnutt. Les Canadiens réagissent, et Marleau trouve même le poteau, mais, sur la contre-attaque, Patera virevolte au milieu de la défense et vient glisser le palet entre les jambières de Tugnutt. Dvorak, seul face au but canadien, a même l'occasion de faire le trou en fin de période, mais il ne peut tromper le gardien.

En début de deuxième période, le Canada reprend les rênes de la partie : le jeune Patrick Marleau (19 ans) prend de la vitesse, s'enfonce dans la défense tchèque, et lève le palet au-dessus de Hnilicka, marquant son premier but du tournoi. Mais, peu à peu, ce sont les Tchèques qui se créent les plus grosses occasions. Finalement, Špacek récupère le palet à gauche le long de la bande et centre pour Martin Rucinský, dont la reprise trompe Tugnutt. Claude Lapointe montre le chemin à son équipe en débordant la défense tchèque, puis en réalisant une déviation devant le but, mais Hnilicka reste maître dans sa zone.

En début de troisième tiers-temps, les Tchèques reçoivent un véritable coup de massue sur la tête, sous la forme de deux buts en 20 secondes de Thornton et Graves. Ils se retrouvent ainsi relégués à deux buts de la qualification. Il leur faut une bonne dizaine de minutes pour reprendre leurs esprits et se relancer à l'attaque. Tugnutt laisse alors un rebond sur un tir de Hlavac et, alors qu'il est bousculé par Hlavac, il ne peut arrêter le tir en angle fermé de Dvorák. Le renversement de situation est une nouvelle fois total car Dvorák réalise le doublé moins de 30 secondes plus tard. À cinq minutes de la fin, ce même Dvorák se présente seul face à Tugnutt, mais manque à la fois le palet et le hat-trick. Dans les dernières minutes, les Canadiens font le siège des buts tchèques, mais en vain. Le goal-average n'ayant aucune incidence, Mike Johnston fait sortir son gardien, ce qui permet à Výborný de marquer dans la cage vide : la qualification se jouera donc bien en prolongation.

Malgré quelques palets traînants et quelques rebonds lâchés, notamment par Hnilicka, aucun but n'y est marqué ; le dénouement se fera donc aux tirs au but. Pour les Tchèques, cela évoque évidemment les souvenirs de la demi-finale de Nagano, mais, cette fois-ci, Hasek n'est plus là pour arrêter tous les tirs. Savage le prouve en marquant le premier but, et Procházka réplique aussitôt. Whitney et Rucinský les imitent. Coup de théâtre : Ivan Hlinka tente alors un coup de poker improvisé en remplaçant Milan Hlinicka, trop facilement battu sur les pénaltys, par Roman Cechmánek. Non échauffé, celui-ci s'incline face à Stillman, et on se dit que le pari de l'entraîneur tchèque était vraiment trop hasardeux... Mais Simicek remet les deux équipes à égalité, et c'est finalement Cechmánek qui est le premier à stopper un tir, en l'occurrence celui de Niedermayer. Tugnutt s'impose enfin lui aussi face à Sýkora, mais Friesen ne parvient pas à tromper le gardien tchèque. C'est alors que Špacek s'élance, marque entre les bottes du gardien des Ottawa Senators et offre une place en finale à la République Tchèque.

Désignés joueurs du match : Bryan McCabe pour le Canada et Pavel Kubina pour la République Tchèque.

Marc Branchu

Commentaires d'après-match

Ivan Hlinka (entraîneur de la République Tchèque) : "C'est une décision très difficile à prendre pour un coach. J'ai pensé qu'il était temps de changer de gardien après deux tirs au but encaissés. Ce n'était pas une décision contre Hnilicka, qui a très bien joué. Mais Cechmanek était frais, volontaire, et c'est un grand gardien. Il a fait une très bonne saison en championnat tchèque [avec Vsetín]. Je voulais relancer l'équipe en lui redonnant sa chance. J'avais dit avant le Mondial que j'avais une très bonne équipe, et elle l'a prouvé en allant en finale. Rien que pour ça, je remercie les joueurs."

Radek Dvorák (attaquant de la République Tchèque) : "Je ne suis pas un marqueur né. J'ai d'autres missions, tant en équipe nationale qu'en Floride. Mais dan ce match, c'est comme si j'étais libéré. Sur le premier but, le gardien était masqué, mais sur le score, mon tir était parfait en force et en précision. Même notre super-gardien Dominik Hasek ne l'aurait pas arrêté [rires]."

Milan Hnilicka (gardien de la République Tchèque) : "Au cours du match, je n'ai pas aidé l'équipe plusieurs fois, donc j'ai décidé que si je ne repoussais pas les deux premiers pénaltys, je demanderais immédiatement à être remplacé. Croyez-le ou non, c'est la première fois de ma carrière que je demande un changement. Habituellement les coaches le font eux-mêmes. Je suis content que mon ami Cechmanek ait finalement prouvé sa valeur en équipe nationale."

Roman Cechmanek (gardien de la République Tchèque) : "J'avais un peu peur. Et si je ne pouvais pas aider ? On ne se souviendrait plus de moi au pays que comme le gardien qui est devenu champion olympique (1998) et champion du monde (1996) sans jouer un match."

Mike Johnston (entraîneur du Canada) : "On contrôlait bien le match, on a eu quelques rebonds dont on n'a pas su profiter et ils ont marqué un but chanceux au pire moment. Perdre aux tirs au but, que dire de plus, c'est malheureusement la formule qui veut ça."

Bryan Savage (attaquant du Canada) : "Quand le coach m'a annonçé que je serais le premier à tirer, je me suis senti inquiet. Dans la finale olympique, ici même à Lillehammer, j'avais aussi commencé la série de pénaltys [Affres de la mémoire : il n'avait pas tiré en 1994]. Quand mon tir a battu Hnilicka, j'ai pensé que nous réussirions cette fois, parce que l'obus ne tombe pas deux fois au même endroit. Sauf à Lillehammer, un endroit très malheureux pour moi."

Ron Tugnutt (gardien du Canada) : "La possibilité de me retrouver aux tirs au but me hantait depuis cinq jours. Mon pire cauchemar s'est réalisé. Dave King m'a demandé avant la séance si je voulais que Tabaracci me remplace, je l'ai rassuré. Graves et Niedermayer étaient restés avec moi après l'entraînement pour des séances de face-à-face. Je devais arrêter le tir de Spacek, mais apparemment Dieu n'était pas derrière le Canada ce soir. J'ai presque pleuré, et [Rob Blake] a passé le bras autour de mes épaules en me disant de ne pas décourager car j'avais encore beaucoup de victoires devant moi. Les pénaltys, c'est peut-être excitant pour les spectateurs, mais ce n'est pas agréable d'y prendre part. Même si on avait gagné, j'aurais été contre cette pratique. Ce qui m'agace, c'est qu'on transforme un sport d'équipe en sport individuel pour trancher l'issue d'un match. En prolongation, leurs cinq joueurs se repliaient. C'était évident qu'ils attendaient les tirs au but."

 

Canada - République Tchèque 4-6 (1-2, 1-1, 2-3) / 0-0 en prolongation, 3-4 aux tirs au but
Jeudi 13 mai 1999 à 16h30 au Håkons Hall de Lillehammer. 6579 spectateurs.
Arbitrage d'Alex Dell (USA) assistés de Panu Bruun (FIN) et Kent Thuden (SUE).
Pénalités : Canada 10' (2', 8', 0' / 0') ; République Tchèque 14' (2', 8', 4' / 0').
Tirs : Canada 32 (7, 10, 12 / 3) ; République Tchèque 31 (11, 11, 8 / 1).

Évolution du score :
0-1 à 05'50" : Stillman assisté de Blake et Morris (sup. num.)
1-1 à 07'33" : Kubina assisté de Sykora et Dvorak (sup. num.)
1-2 à 12'19" : Patera assisté de Kubina
2-2 à 22'59" : Marleau assisté de McCabe
2-3 à 31'01" : Rucinsky assisté de Spacek
3-3 à 41'47" : Thornton assisté de Redden
4-3 à 42'11" : Graves assisté de Niedermayer
4-4 à 48'39" : Dvorak assisté de Hlavac et L. Prochazka
4-5 à 49'28" : Dvorak assisté de Spacek et Sykora
4-6 à 59'37" : Vyborny (cage vide)

Tirs au but :
Canada : Savage (réussi), Whitney (réussi), Stillman (réussi), Niedermayer (arrêté), Friesen (arrêté).
République Tchèque : M. Prochazka (réussi), Rucinsky (réussi), Simicek (réussi), Sykora (arrêté), Spacek (réussi).

 

Canada

Attaquants :
Scott Walker (2') - Claude Lapointe (-2) - Scott Thornton
Brian Savage (-2) - Cory Stillman (-1) - Jeff Friesen (-1)
Ray Whitney - Rob Niedermayer (-1) - Adam Graves (A)
Shane Doan - Patrick Marleau (+1) - Ryan Smyth (-1, 4')
Chris Szysky

Défenseurs :
Wade Redden - Rob Blake (C, 2')
Doug Bodger (A) - Sean O'Donnell
Bryan McCabe (2') - Stéphane Quintal (-3)
Derek Morris (-1)

Gardien :
Ron Tugnutt [sorti de 59'02" à 59'37"]

Remplaçant : Rick Tabaracci (G). Non alignés : Fred Brathwaite (G), Éric Dazé (genou).

République Tchèque

Attaquants :
David Moravec - Pavel Patera (C) - Martin Prochazka
Viktor Ujcik (2') - David Vyborny (+2) - Jan Hlavac (+2, 2')
Radek Dvorák (+2, 2') - Petr Sykora (+1) - Martin Rucinsky (A, +1)
Tomas Kucharcik (-1) - Roman Simicek (4') - Tomas Vlasak (-1, 2')

Défenseurs :
Frantisek Kaberle (-2) - Libor Prochazka (-2)
Frantisek Kucera (A, +2) - Jiri Vykoukal (+3)
Jaroslav Spacek (+2, 2') - Pavel Kubina (+1)

Gardien :
Milan Hnilicka [puis Roman Cechmanek après deux tirs au but]

Remplaçants : Ladislav Benysek, Roman Meluzin. Non alignés : Martin Prusek (G), Jan Caloun.

 

Les championnats du monde 1999