États-Unis - Suède (13 février 1998)

 

Jeux Olympiques 1998, phase finale, première journée.

Ce premier match de la phase finale oppose déjà deux des favoris et doit donner un bel avant-goût de la piste aux étoiles de Nagano. Les États-Unis n'avaient retenu que douze attaquants, contre treize pour la plupart des autres équipes (sauf les Russes qui tournent comme toujours à huit défenseurs), et ils pâtissent déjà de ce choix avec le forfait Shawn McEachern : souffrant de douleurs dans le bas du dos, il s'était déjà fait masser dans l'avion. Il n'a pas pu participer aux trois premiers entraînements après l'arrivée de l'équipe américaine au Japon. Il a donc été renvoyé dans ses foyers. En attendant l'arrivée du remplaçant d'urgence (Langenbrunner), c'est l'arrière Bryan Berard, numéro 1 de la draft NHL 1995 et benjamin de l'équipe américaine, qui doit jouer les utilités en attaque.

Les deux camps ont réservé leurs meilleurs atouts dans leur deuxième ligne à entrer en jeu, menée par Modano d'un côté et Forsberg de l'autre. Avantage aux États-Unis sur l'entrée en jeu des stars : tandis que Tommy Salo repousse de la jambière droite le fort tir du poignet de Bill Guerin, Peter Forsberg retient Keith Tkachuk pour l'empêcher de prendre le rebond. Cette première pénalité est tuée malgré une reprise de Mike Modano servi de derrière la cage par Pat LaFontaine. À la fin de la prison, Patric Kjellberg sort du coin et revient au but pour la première occasion suédoise, mais sur la contre-attaque, Modano trouve Tkachuk seul dans le slot. Le palet passe sous Salo mais est arrêté dans son dos... par le manche de sa crosse posé sur la glace ! Un arrêt très chanceux... La Suède se procure à son tour une immense occasion quand Mats Sundin, à 2 contre 1, ne fait pas la passe mais met dans le vent Chris Chelios et se présente seul face à Mike Richter qui arrête son revers in extremis avec la botte. Un arrêt qui, en revanche, peut donner confiance...

Bill Guerin joue un rôle-clé sur l'ouverture du score américaine, d'abord en protégeant très solidement le palet dans le coin, malgré Ulf Samuelsson dans son dos, puis en venant faire écran dans l'enclave sur le lancer de la ligne (1-0). Adam Deadmarsh part en prison pour avoir rudoyé Norström après un arrêt de jeu, et le powerplay suédois transforme cette première opportunité par une magnifique action : Daniel Alfredsson passe à Peter Forsberg derrière la cage qui fait se déplacer le gardien et redonne alors le palet derrière lui à Alfressson pour un tir instantané en angle (1-1). Le trio de Modano retourne sur la glace pour l'engagement... et marque de nouveau ! Tkachuk et Guerin ont encore gagné la bataille pour le palet, alors que Salo s'est laissé entraîner trop loin de sa cage et laisse Modano ajuster les filets déserts (2-1). Les États-Unis tuent leur deuxième pénalité (une crosse haute de Schneider) avec deux bons arrêts de Richter, du gant face à Dahlén et des bottes face à Renberg.

Les États-Unis semblent donc avoir le dessus. Leur trio dominant Tkachuk-Modano-Guerin, sur la lancée de sa Coupe du monde remportée il y a un an et demi, s'est créé toutes les occasions de son équipe (sauf un tour de cage de LeClair sur son revers). Les Américains n'ont plus à se cacher : c'est bien cette ligne qui démarre en deuxième période. L'absence de ces adversaires aide sans doute Peter Forsberg quand il entre en jeu à son tour : grande protection de palet, superbe passe pour Albelin au second poteau, puis charge très rude avec élan qui étale Amonte. Le joueur de Colorado s'est tellement lâché dans cette charge qu'il a abandonné sa position et laisse un 2 contre 1 américain : Tommy Salo plonge face à John LeClair décalé par Brian Leetch. Mais Calle Johansson récupère alors le palet et le donne à Mikael Renberg qui accélère pendant le changement de lignes des Américains pour un 2 contre 1 d'école dans l'autre sens, que convertit Patric Kjellberg (2-2).

Keith Tkachuk et Bill Guerin continuent de mettre le feu dans le slot, après un slap de la bleue de Gary Suter, et leur effort provoque un cross-check d'Andreas Johansson dans le dos de Guerin. Heureusement que Bryan Berard - qui retrouve son poste de défenseur pendant ce jeu de puissance - se couche pour bloquer un 2 contre 1 suédois en infériorité. Le vent a clairement tourné. Les Suédois ont de longues séquences de possession de palet en zone offensive. Ils les convertissent certes peu en tirs cadrés, sauf une bonne tentative du cercle droit d'Alfresson. Mais il en suffit d'un et c'était peut-être un signe avant-coureur... Peter Forsberg fait un gros travail derrière la cage et envoie le palet du revers dans les bottes de Richter. Daniel Alfredsson plonge pour le propulser entre les jambes du gardien (2-3).

Maintenant qu'elle est passée devant, la Suède se délecte d'autant plus à contrôler le jeu et à privée les Américains de palet. Quant à Tkachuk et Guerin, on leur assigne systématiquement les solides défenseurs Nicklas Lidström et Mattias Norström pour les neutraliser. La Tre Kronor est proche de tuer le match dès le début de la troisième période : Mats Sundin intercepte une mauvaise relance par le milieu de Chelios et son tir fulgurant à mi-distance oblige Richter à un arrêt difficile. Les États-Unis recourent bien à leur arme, les mises en échec : John LeClair enplastronne Alfredsson contre la bande, mais aussitôt Forsberg réplique d'une charge récupatrice et l'action s'achève par une obstruction sifflée contre Carney sur Alfredsson. La pénalité est annulée quand Öhlund accroche Roenick, mais Ulf Samuelsson tue l'infériorité numérique résiduelle par une bonne lecture du jeu et par son acharnement dans les coins. Samuelsson réussira aussi un plongeon spectaclulaire le long de sa ligne bleue pour arrêter une contre-attaque américaine.

Il y a beaucoup de vitesse de jeu de part et d'autre sans ce troisième tiers-temps. La mitaine de Salo détourne de justesse un tir de la bleue d'Adam Deadmarsh. C'est la dernière présence de Deadmarsh sur son trio d'origine car Ron Wilson modifie ses lignes en le permutant avec LeClair pour les huit dernières minutes. Mais les efforts américains restent vains et la Tre Kronor se procure de plus en plus de contre-attaques. À 3 contre 1, Kjellberg choisit le tir mais Mike Richter baisse son gant et attrape la rondelle. Il a ensuite plus de mal à capter de la mitaine un puissant slap envoyé de la zone neutre par son coéquiper des New York Rangers, Tomas Sandström. Mais il est encore un Suédois qui aimerait bien une petite cerise sur le gâteau : Mats Sundin fête en effet ses 27 ans aujourd'hui. Frustré par un arrêt de l'épaule gauche de Richter en début de tiers, le numéro 13 souffle ses bougies à trois minutes de la fin en dribblant le gardien dans un fabuleux un-contre-un après avoir été servi dans le dos d'Amonte et Deadmarsh par Tomas Sandström (2-4). Salo n'arrête pas totalement un slap du cercle droit de Brett Hull qui passe sous son bras, mais Mikael Andersson sauve ce palet. Le score en reste donc là, car Hull bloque aussi un tir en cage vide de Sundin.

Ce tournoi olympique annoncé légendaire a été bien lancé par ce beau premier match. Une très bonne ligne Tkachuk-Modano-Guerin n'aura pas suffi pour les États-Unis, qui n'ont pas eu la même contribution de leurs autres trios. Leur gardien Mike Richter semble chaud en revanche, plus rassurant même que Salo malgré le résultat, et sera bien un de leurs points forts. Le camp suédois a aussi bénéficié d'un très bon trio : Peter Forsberg a été une force physique le long des bandes, Mikael Renberg a mis de la vitesse et de la puissance et Daniel Alfredsson a été opportuniste avec huit tirs cadrés dont deux buts.

Étoiles du match Hockey Archives : *** Peter Forsberg / ** Daniel Alfredsson et Bill Guerin / * Keith Tkachuk et Mats Sundin

Marc Branchu

Commentaires d'après-match :

Ron Wilson (entraîneur des États-Unis) : "J'avais dit aux joueurs combien il était important de gagner notre groupe. On préfère jouer un adversaire plus facile en quarts, pas une équipe comme les Tchèques avec Dominik Hasek. On ne veut pas se faire sortir sur une performance de 60 arrêts. Le quatrième march reste le plus important, nous devons construire dans cet objectif. Nous devons réexaminer notre façon de jouer. C'était presque trop facile en première période, et nous avons dépensé beaucoup d'énergie à essayer de faire passer le score à 3-1 ou 4-1. Nous devons avoir un meilleur soutien au porteur du palet et nous relâcher un peu. Nous ne devons être équilibrés et pas hors de contrôle. On aurait espéré jouer trois périodes comme la première, mais à l'évidence nous n'en sommes pas capables. Peter Forsberg ? C'est un grand joueur."

Kent Forsberg (entraîneur de la Suède et père de Peter) : "Calle Johansson et Niklas Lidström ont été nos meilleurs défenseurs. Peter ? Il a été OK."

Peter Forsberg (attaquant de la Suède) : "Nous avons bien joué mais ce n'est pas important. Ce sont les trois derniers matches qui comptent. Pas les trois premiers."

Tomas Sandström (attaquant de la Suède) : "Ces gars ne sont pas habitués à la grande glace. On a beaucoup plus d'occasions de but quand les gars ne peuvent pas vous accrocher. Peut-être qu'ils pourraient agrandir les patinoires en NHL."

Brett Hull (attaquant des États-Unis) : "Une bonne équipe va apprendre d'un match comme celui-ci. Voyons à quel point nous sommes bons. On a pu voir leur expérience sur le premier but. [Forsberg] savait exactement ce qu'il faisait, et pas nous. Nous pensions qu'il traverserait derrière la cage. On a pu voir la façon dont ils utilisent si bien les coins. Nous devons comprendre ça nous-mêmes. Nous sommes juste habitués à une petite surface de glace."

Keith Tkachuk (attaquant des États-Unis) : "Notre jeu est d'aller à la cage, de faire du cycling, d'user leurs joueurs en fond de zone. Nous avons la taille et la force pour le faire, et nous n'avons pas utilisé cet atout. Mais nous ne sommes pas sortis, nous ne rentrons pas encore à la maison. Nous sommes déterminés, et nous sentons que nous sommes une équipe qui sera là à la fin quand ça comptera."

 

États-Unis - Suède 2-4 (2-1, 0-2, 0-1)
Vendredi 13 février 1998 à 14h45 au Big Hat de Nagano (JAP). 9985 spectateurs.
Arbitrage de Bill McCreary (CAN) assisté de Troy Sartison et Gérard Gauthier (CAN).
Pénalités : États-Unis 10' (4', 2', 4'), Suède 8' (2', 4', 2').
Tirs cadrés : États-Unis 31 (14, 8, 9), Suède 20 (6, 5, 9).
Tirs bloqués : États-Unis 8 (2, 1, 5), Suède 13 (4, 4, 5).
Tirs non cadrés : États-Unis 13 (6, 7, 0), Suède 6 (1, 0, 5).
Engagements : États-Unis 36 (9, 14, 13), Suède 28 (8, 8, 12).

Évolution du score :
1-0 à 11'10" : Chelios assisté de Guerin et Tkachuk Tkachuk et Guerin
1-1 à 12'26" : Alfredsson assisté de Forsberg (sup. num.)
2-1 à 12'50" : Modano assisté de Guerin
2-2 à 21'50" : Kjellberg assisté de Renberg et Samuelsson C. Johansson
2-3 à 31'33" : Alfredsson assisté de Forsberg
2-4 à 57'04" : Sundin assisté de M. Andersson
en noir, la feuille de match officielle ; en rouge, les corrections de Hockey Archives
 

États-Unis

Attaquants :
17 Keith Tkachuk (A, +1) - 9 Mike Modano (+2 +1) - 12 Bill Guerin (+1)
10 John LeClair - 27 Jeremy Roenick (-1) - 11 Tony Amonte (-1)
15 Brett Hull (-1) - 19 Doug Weight (-2 -1) - 18 Adam Deadmarsh (-2)
29 Joel Otto - 16 Pat LaFontaine - 6 Bryan Berard

Défenseurs :
2 Brian Leetch (A, -2) - 3 Derian Hatcher (-1)
20 Gary Suter (+2) - 7 Chris Chelios (C, +2)
5 Mathieu Schneider (-1) - 4 Kevin Hatcher (-2)
24 Keith Carney

Gardien :
35 Mike Richter [sorti à 58'28"]

Remplaçant : 34 John Vanbiesbrouck (G). En réserve : 31 Guy Hebert (G), Shawn McEachern (dos, reparti), Jamie Langenbrunner (pas encore arrivé).

Suède

Attaquants :
13 Mats Sundin (A) - 37 Niklas Sundström (+1) - 34 Mikael Andersson (+2)
11 Daniel Alfredsson - 21 Peter Forsberg (+1, 2') - 19 Mikael Renberg
24 Patric Kjellberg (+1) - 92 Michael Nylander - 22 Ulf Dahlén
17 Tomas Sandström - 41 Mats Lindgren (-1) - 38 Andreas Johansson (-1, 2')

Défenseurs :
3 Tommy Albelin - 6 Calle Johansson (C, +1, 2')
14 Mattias Norström (+1) - 4 Nicklas Lidström (A, +1)
5 Ulf Samuelsson - 2 Mattias Öhlund (-1, 2')

Gardien :
35 Tommy Salo

Remplaçants : 30 Tommy Söderström (G), 33 Marcus Ragnarsson (D), 20 Jörgen Jönsson (A). En réserve : 1 Johan Hedberg (G).

 

Retour aux Jeux Olympiques de Nagano