Interview de Laurent Bougro
Laurent Bougro est l'entraîneur-joueur de Rennes, invaincu dans le championnat de division 3.
- Après avoir quitté Viry-Chatillon, vous avez connu énormément de clubs (un an à l'ACBB, un à Nice, un à Nantes, deux à Tours, un à Anglet, un à Courbevoie, un à Cherbourg). Pourquoi cette bougeotte ?
Après avoir connu beaucoup de titres avec mon club formateur Viry, je tenais à découvrir la France sous toutes ses coutures et surtout apprendre et comprendre les différentes mentalités et cultures des différentes régions. J'ai eu la chance de voyager dans des régions très convoitées, les Alpes, la Côte d'Azur, la Touraine, la Loire-Atlantique, le Pays Basque, un retour dans la capitale, la Normandie, et pour finir mon parcours la Bretagne.
Avec une vie de famille remplie de trois petits garçons à la maison (7 ans, 2 ans et le dernier qui vient d'arriver en janvier 2005), il était temps de se poser. Le grand est en CP, et nous souhaitons ma femme et moi qu'il reste dans la même école.
- L'an dernier, vous étiez déjà entraîneur-joueur en D3 avec Cherbourg. Quel bilan tirez-vous de votre passage là-bas ?
J'ai travaillé avec beaucoup de passion et je souhaitais m'installer durablement mais la mentalité normande ne correspondait pas à ma famille. Nous avions acheté une maison pour ne plus bouger car notre fils aîné allait rentrer en CP l'année suivante. Les dirigeants n'ont pas compris mon message, alors nous avons une nouvelle fois déménagé, mais cette fois pour de bon !
- Vous êtes né à Vannes, ces origines bretonnes ont-elles compté dans votre choix de rejoindre Rennes ?
Oui, énormément. Je connais bien la région - et les Bretons. J'ai passé toutes mes vacances scolaires à Vannes chez mes grands-parents, mes cousins et cousines... et je suis ravi ainsi que ma famille de rejoindre à nouveau cette très belle région.
- Qu'est-ce que Rennes a de plus que Cherbourg pour progresser dans le hockey français ?
Rennes est une grande ville et il y a énormément de possibilités de faire éclore la Bretagne par rapport à notre structure. Nous avons un complexe magnifique - le Blizz - avec une piste de compétition (60 x 30) et une piste ludique pour travailler avec les enfants.
- L'apport d'un renfort canadien (Patrice Tessier) est-il indispensable pour jouer la montée en D2 ?
C'est un message que j'ai voulu faire passer aux dirigeants. pour accéder à l'échelon supérieur, la venue d'un étranger de qualité m'était indispensable, j'ai donc été en contact avec Patrice Tessier en début de saison, il avait de très bonnes références et surtout une mentalité de Canadien exemplaire, et nous avons trouvé un accord. Patrice Tessier a eu une adaptation rapide et il travaille fort pour nous aider à réaliser notre objectif. Je dois être un entraîneur bizarre par rapport à d'autres, car j'ai pris la décision de le rémunérer car le club ne pouvait le faire.
- Cela fait plusieurs années que Rennes vise la D2. Cette saison est-elle la bonne ?
Je l'espère, nous souhaitons le bureau et moi-même monter en D2 sportivement. Le bureau fait un travail remarquable et les spectateurs apprennent notre sport. Ils ne connaissaient pas le hockey et depuis le début de saison, ils viennent en nombre ; nous avons une moyenne de 700 à 800 spectateurs à domicile avec une pointe à 900 en fin de première phase contre Brest. Avec des gradins pouvant contenir 750 sièges, ce n'est pas mal ! Surtout en D3.
- Quels seront à votre avis vos adversaires les plus dangereux pour la montée ?
En fait, je pense que l'équipe qui peut nous poser des problèmes, c'est nous. Depuis le début de saison, je travaille par étapes. Je donne ma touche de compétition et de soif de gagner à chaque rencontre et nous serons prêts contre toutes les équipes, je prend les adversaires au fur et à mesure mais je regarde bien sûr les autres poules...
- Hormis vous, il y a finalement assez peu de noms connus dans votre équipe qui domine la D3. Quel est le potentiel des jeunes joueurs locaux comme Anthony Cavalon ?
Anthony Cavalon fait une très belle saison, c'est un très bon joueur qui s'investit énormément dans la vie du club, il est du niveau d'Adrien Dufournet à Rouen. Il n'a pas eu le même parcours que son ami, mais il est resté fidèle à son club et il espère comme toute l'équipe avoir un titre dans son club formateur. Pour les autres jeunes du club, j'ai beaucoup de travail avec eux, car ils ne connaissent pas vraiment la compétition, ils apprennent...
- Trois joueurs sont originaires de Saint-Pierre-et-Miquelon dans l'équipe rennaise. D'où vient cette connexion ?
Tout simplement des concours de circonstance, Rennes est une grande ville et peut proposer énormément de choix au niveau des études, du travail et des formations...
- Il y a dans l'équipe rennaise quelques joueurs formés à Lanester et Saint-Brieuc. Rennes a-t-il l'ambition de devenir la locomotive de tout le hockey breton ?
Oui, nous sommes sur une formation de longue durée et nous souhaitons former plus de jeunes Bretons. Nous donnons la possibilité aux jeunes de Lanester, Saint-Brieuc et Vannes de travailler avec nous. Nous avons créé un challenge de ligue cette année qui à beaucoup de succès auprès des jeunes. Et je souhaite organiser une fusion plus grande pour créer un centre de formation à Rennes dans les prochaines saisons...
- Comment vous apparaissent les perspectives de développement du hockey en Bretagne ?
Franchement, depuis que je suis à Rennes, je suis surpris de voir autant de bons jeunes et de ne pas les voir en sélection régionale et/ou nationale. Il est temps de changer les habitudes et de regarder toutes les régions, nous avons des talents dans toute la France, malheureusement, beaucoup sont oubliés...
Le système français reste aléatoire, on prend les joueurs que l'on connaît (Pierre, Paul, Jacques), et les autres, ils ne sont pas retenus tout simplement car les parents ne peuvent pas suivre financièrement, je trouve ça désolant. J'ai appris récemment que des sélectionnés minimes devaient payer leurs repas lors d'un regroupement, je trouve ça scandaleux mais bon, je ne vais pas polémiquer sur ce sujet...
- Rennes avait déposé un dossier cette année pour organiser la finale de la Coupe de France. Pourquoi cette candidature ? Sera-t-elle renouvelée ?
Nous souhaitons encore faire la demande pour l'année prochaine. Le hockey à Rennes commence son travail de longue durée et nous souhaitons faire découvrir aux spectateurs rennais du hockey de bon niveau. Une finale de Coupe de France sera le point fort de la saison prochaine, nous travaillons avec des partenaires, et nous sommes sur le point de lancer un club entreprises.
Propos recueillis le 7 mars 2005 par Marc Branchu