Allemagne 2019/2020 : présentation

 

Le hockey allemand connaît actuellement une embellie. Ses trois représentants en CHL dominent tous leur sujet et n'ont perdu aucun match dans le temps réglementaire après les quatre premières journées. Si le classement des ligues (pondéré sur quatre ans) s'arrêtait ce jour, la DEL passerait de la cinquième à la deuxième place, et l'Allemagne aurait donc 5 clubs qualifiés au lieu de 3 ! Cette réussite maximale sera peut-être corrigée, mais obtenir au moins un quatrième qualifié semble déjà certain.

Cette progression européenne est concomitante au retour des jeunes. Certains râlent que des joueurs plus âgés aient perdu leur place, se recasant en DEL2, mais l'Allemagne ne fait que redécouvrir ce qui est une normalité dans les autres championnats, le développement des jeunes. L'an passé, 1 joueur de moins de 23 ans était imposé sur une feuille de match de 19 joueurs ; il pouvait donc rester en réserve comme treizième attaquant ou septième défenseur. Le quota passe à 2 cette année et les U23 vont donc forcément jouer. Ils le méritent. L'étonnante sixième place de draft NHL de Moritz Seider est un premier signe : de beaux talents allemands arrivent dans les nouvelles générations.

 

 

Une équipe championne court habituellement le risque de se reposer sur ses lauriers. Avec Pavel Gross, comme entraîneur, les pauses relaxantes sont néanmoins plus difficiles. L'exigence de performance s'est vite diffusée à Mannheim, sans considération des mérites passés : le capitaine Marcus Kink, malgré 14 ans au club et encore 2 ans de contrat, a été poussé vers la sortie : il aura son jubilé et son maillot sous le toit, mais cela ne suffit pas à lui donner droit à une place dans le vestiaire. En coulisses, une autre figure du club, l'ex-chouchou des supporters Ronnie Arendt, a aussi été remercié de son poste de préparateur physique.

Étrangers (10 pour 9 places) ou Allemands de 23 ans et plus (13 pour 10 places), personne n'échappe à la concurrence. Le gardien Dennis Endras, à peine auréolé du titre et d'excellents play-offs, a été récompensé par... le recrutement d'un concurrent de très haut niveau, Johan Gustafsson, rien moins que le gardien titulaire des deux dernières conquêtes européennes de Frölunda ! Peut-être un signe que les ambitions des Adler pourraient dépasser les frontières allemandes et englober la CHL. Viser toujours plus haut, c'est devenu une seconde nature. Cela a aussi toujours été la devise de Borna Rendulic, joueur qui a réussi la performance unique d'atteindre la NHL - et dernièrement la KHL - en commençant le hockey sur glace dans un pays comptant seulement quatre clubs (la Croatie) et qui considère que c'est la Finlande qui lui a tout appris dans ce sport entre 15 et 22 ans, alors qu'il était déjà apparu dans l'équipe première du Medvescak.

Les ambitions élevées sont partagée chez les jeunes. Les Detroit Red Wings ont tout juste fait sensation en recrutant Moritz Seider que le prochain premier tour de draft NHL issu des "Jungadler" est déjà annoncé pour l'édition 2020 : l'attaquant Tim Stützle, en évidence dès ses premières sorties en CHL. Formé à Krefeld jusqu'à ses 15 ans, il a rejoint depuis deux ans le sports-études de référence qui attire tous les meilleurs joueurs du pays... du moins avant que Red Bull ne vienne faire concurrence en les appelant presque tous les jours pour les appâter vers sa propre académie en Autriche.

 

On l'aura compris : le duel entre les "géants" du hockey allemand se poursuit à tous les étages. Des diverses équipes de l'académie de Salzbourg arrivent les talents Justin Schütz (19 ans) et John Jason Peterka (17 ans et meilleur marqueur du championnat junior tchèque), qui ont prouvé dès la pré-saison qu'ils n'étaient pas là pour faire de la figuration.

Pour sa part, Munich ne met pas tous ses vétérans méritants dehors. Ce sont bien Michael Wolf - comme annoncé - et John Mitchell - de manière plus impromptue - qui ont décidé de raccrocher les patins. Le premier sera remplacé par Philipp Gogulla, qui veut finir sa carrière par des titres et retrouve Patrick Hager avec qui il a toujours formé un duo complémentaire. Le second sera substitué par un profil semblable, un centre à la longue carrière NHL, l'ex-international canadien Derek Roy (36 ans).

L'autre recrue offensive, l'ex-international américain Chris Bourque (33 ans), sera le seul représentant des États-Unis dans une équipe constituée d'Allemands et de Canadiens. Oh, bien sûr, Munich n'a pas l'originalité du recrutement multinational de Mannheim. Rien que des vétérans nord-américains éprouvés, mais cette recette traditionnelle aussi a fait ses preuves et Don Jackson sait bâtir une équipe championne. Une saison à deux finales perdues (CHL et DEL) n'a sûrement pas entamé son envie de gagner. L'entraîneur a appelé auprès de lui comme adjoint Steve Walker, son ancien joueur-vedette de l'époque de la dynastie berlinoise.

 

Personne ne peut rivaliser financièrement en DEL avec les "monstres" Munich et Mannheim, qui ont derrière eux les moyens colossaux de multinationales. La stratégie des autres doit donc être plus fine, en tentant de trouver la formule adéquate sans se lancer dans une course financière perdue d'avance. Cologne s'est doté du meilleur atout en engageant Mike Stewart, entraîneur à haute réputation qu'on a hâte de voir dans un grand club : c'est exactement ce qu'on disait l'an passé avec Pavel Gross à Mannheim, et on sait comment ça a fini... Les deux personnalités ne sont pas comparables. On apprécie chez Stewart sa capacité à toujours adapter son système de jeu et à reconnaître ses faiblesses. Il se juge ainsi pas assez versé en psychologie et a engagé un coach mental, Ulf Wallisch, qui avait déjà travaillé avec lui à Bremerhaven.

L'autre élément qui suscite un grand intérêt pour cette nouvelle équipe de Cologne, c'est la qualité du recrutement. Un international tchèque au passé NHL comme Jakub Kindl ne débarque plus tous les jours, même si cela s'explique par ses deux dernières saisons parasitées par les blessures à Plzen. Il sait utiliser intelligemment sa longue crosse et est un bon relanceur comme l'autre recrue Taylor Aronson. Mais la clé qui a manqué au KEC, c'est un défenseur offensif majeur. A-t-on fait bonne pioche avec Kevin Gagné ? Surnommé "Gags" depuis qu'un coach anglophone ne savait pas prononcer son patronyme, le natif du Nouveau-Brunswick n'a rien d'un plaisantin. Il mesure seulement 1m73 mais est un fanatique des salles de musculation qui doit être le principal soutien de l'attaque et du jeu de puissance.

L'attaque des Haie est d'une précision chirurgicale... par sa régularité chiffrée : cela fait quatre ans qu'elle marque entre 145 et 148 buts en saison régulière (52 rencontres). C'est bien mais pas top, comme on dit dans la police niçoise... Et c'est pour cela que les requins ne font plus vraiment peur depuis un bout de temps. La ligne qui a le mieux fonctionné (Tiffels-Genoway-Akeson) a été conservée. Reste à en trouver d'autres. Jon Matsumoto était le meilleur marqueur de la dernière saison régulière à Iserlohn, et même s'il n'est pas réputé si fiable, Mike Stewart le connaît bien pour l'avoir entraîné à sa première saison à Augsbourg. Les absents sur blessure de la saison passée - Marcel Müller en totalité et Ben Hanowski en partie - doivent aussi contribuer à augmenter le potentiel offensif. Celui du Franco-Allemand Lucas Dumont - un des meilleurs U23 du championnat - est également très élevé.

Enfin, le dernier chantier est le jeu en infériorité numérique, faible l'an passé. Le plus efficace de la ligue était celui d'Augsbourg, entraîné par Mike Stewart ! Il doit disposer des hommes adéquats car les autres recrues en attaque, Jason Bast et l'agitateur Zach Sill, ont de bonnes références dans cette spécialité.

 

Après avoir fait lui-même office de pompier sur le banc des Eisbären de Berlin la saison dernière, le directeur sportif Stéphane Richer a engagé un entraîneur qu'il avait déjà fait débuter à Hambourg, Serge Aubin, encore un Québécois. Les recrues étrangères en attaque viennent aussi de la Belle Province : le provocateur mais aussi talentueux Maxim Lapierre, plus Pierre-Cédric Labrie, engagé de dernière minute après un essai tout comme l'international junior Sebastian Streu. L'offensive fonctionne bien puisque tous les attaquants ont trouvé le chemin des filets pendant la pré-saison, même le très attendu débutant Lukas Reichel (17 ans). Tous, sauf un : l'international Leo Pföderl, le Bavarois qui rêvait de venir jouer à Berlin et qui a pourtant une réputation de buteur !

Il n'y a plus de Québécois en revanche dans les cages puisque Kevin Poulin, le joker providentiel de l'an passé, a été remplacé par Sebastian Dahm, le gardien du Danemark qui reste sur une saison délicate à Iserlohn. Les supporters sont dubitatifs et peinent toujours à faire confiance aux jeunes, en qui le staff croit toujours à moyen terme. Blessé en pré-saison l'an dernier, Marvin Cüpper devrait cette fois avoir sa chance. En défense, Constantin Braun s'est marié et doit donc être assez entouré pour gérer ses anciens problèmes d'alcool et de dépression. Il est arrivé en très bonne forme physique et psychologique au camp d'entraînement. Les lignes arrières ne comptent que deux étrangers, deux Américains à vocation offensive, John Ramage pour sa qualité de relance et Ryan McKiernan pour sa puissance de lancer. Les Eisbären ont de quoi se retourner, ils n'ont même pas encore rempli leurs neuf places d'étrangers.

 

La participation à la CHL est une fantastique consécration pour Augsbourg, un des plus petits budgets de DEL (même s'il a augmenté après cette belle réussite). Le club a réussi à créer un environnement quasi-familial dans lequel les joueurs se sentent chouchoutés, se consacrant uniquement à leur performance sur la glace. Le groupe exceptionnel de la saison dernière a ainsi presque entièrement re-signé. Le recrutement était donc bouclé dès le mois de mai... jusqu'à ce que le meilleur marqueur Matt White utilise sa clause de sortie vers l'étranger pour signer un contrat en KHL (au Neftekhimik Neftekamsk). Son remplaçant Mitch Callahan a néanmoins des références tout aussi probantes en AHL (si on parle de ses stats et non de ses 20 matches de suspension pour infraction anti-dopage...).

L'équipe est donc presque inchangée. Elle a simplement déploré la retraite de l'ex-international letton Arvids Rekis, simplement compensée par un temps de jeu probablement accru pour un autre joueur physique, le colosse John Rogl (195 cm et 103 kg), un jeune défenseur allemand - formé à Landshut - comme son prénom ne l'indique pas. Pour le reste, un joueur de quatrième ligne (Hans Detsch) a été remplacé par Jacob Mayenschein, prêté par Munich et qui rentre dans les quotas de jeunes joueurs.

Mais le vide, énorme, c'est celui laissé derrière le banc par l'entraîneur Mike Stewart, qui aura pendant quatre saisons conduit le club à deux saisons dans le top-6 (et deux hors des play-offs). Augsbourg risque-t-il de subir le même destin que Wolfsburg, l'habituel trouble-fête parmi les gros budgets qui est redevenu ordinaire l'an passé après le départ de son coach emblématique ? Tout est fait pour l'éviter. La continuité est extrême dans l'effectif et dans le système de jeu, puisque Tray Tuomie, adjoint depuis trois ans, prend le poste d'entraîneur en chef. Le but de tous est que la magie de ce groupe survive au départ de son guide.

 

L'élimination contre Cologne après avoir mené 3 victoires à 1 reste en travers de la gorge d'Ingolstadt. Quatre années sans demi-finales, c'est trop long. Le club demeure candidat au top-6 pour retenter sa chance en évitant a priori les deux géants. Il se présente avec les mêmes gardiens (Pielmeier / Reimer) et la même défense, bon gré mal gré puisque les défenseurs déclinants Ville Koistinen et Dustin Friesen ont encore un an de contrat. Seul Benedikt Kohl est parti car le poste de septième défenseur devra désormais être occupé par un jeune. L'autre "quota" correspond toujours à Tim Wohlgemuth (20 ans), déjà révélé comme titulaire la saison passée en jouant au centre comme à l'aile.

Le recrutement a été critiqué par les supporters pendant tout l'été. Le manager Larry Mitchell a pris un risque en misant sur Kris Foucault, joueur créatif aux mains d'or mais souvent gêné par des ennuis de santé. Wayne Simpson fait figure de recrue plus "sûre" par ses stats régulières en AHL. Mais ce n'est pas une garantie : Colin Smith en avait même de meilleures mais a connu une saison déplorable à Berlin (fiche de -20). S'il a retrouvé un contrat, c'est que son passeport allemand le rend intéressant... Ingolstadt a en effet eu le déplaisir d'apprendre qu'un autre double national, Daniel Sparre (recruté après avoir vu sa dernière année de contrat rachetée par Mannheim), avait décidé de rester au pays moins d'un mois avant la reprise. Le club, rappelant qu'un contrat est un engagement des deux parties, a annoncé vouloir se retourner contre le joueur pour se faire rembourser les dépenses engagées (billets d'avion, équipement) et s'assurer qu'il ne rejoue pas ailleurs.

On suivra aussi avec intérêt Mirko Höfflin : barré dans l'effectif de Mannheim, il a eu à l'inverse du gros temps de jeu dans des clubs de bas de tableau (Straubing et Schwenningen). On pourra vraiment jauger de ses capacités dans un club "intermédiaire" où il aura un rôle plus médian, sans doute en troisième ligne.

 

Les clubs de haut de tableau ont conservé leur effectif à une exception près : Düsseldorf. La saison passée avait été un grand succès essentiellement grâce au trio Gogulla-Barta-Descheneau, mais les ailiers ont vite monnayé leur réussite dans de plus grands clubs. L'attaque est donc à reconstruire : les deux centres Alex Barta et Ken André Olimb sont les seuls joueurs majeurs restants et devront s'habituer à de nouveaux partenaires. L'international norvégien a été flanqué de deux ailiers qui connaissent la DEL et qui s'entendent bien sur la glace pour avoir été coéquipiers en AHL, Luke Adam (Mannheim) et Chad Nehring (Bremerhaven). Quant au capitaine Barta, il se voit adjoindre le revenant Maximilian Kammerer, qui n'a pas eu d'opportunité de se mettre en valeur pendant son année en Amérique du Nord.

La spécificité de la DEG est sa faible influence nord-américaine. Dans une DEL dont 78% des postes d'étrangers sont occupés par des joueurs d'outre-Atlantique, Düsseldorf ne compte que trois Canadiens (plus Nehring qui a un passeport allemand). Et encore, l'un des trois - Marc Zanetti - n'a été recruté que tardivement pour pallier l'indisponibilité de la recrue Alexander Sulzer, qui a dû être opéré pour se faire retirer une tumeur (heureusement bénigne). Le club privilégie la filière scandinave et fait venir de Norvège le troisième centre - le Suédois Viktor Svensson - et l'arrière international norvégien Johannes Johannesen. Les muscles en défense seront suédois (Alexander Urbom) et danois (Nicholas B. Jensen).

Après avoir dominé son concurrent suédois sans renâcler, Mathias Niederberger est cette année conforté dans son rôle de numéro 1 devant les filets. Ses débuts réussis aux championnats du monde l'ont aidé à faire taire ses détracteurs restants dans les tribunes qui ne le trouvent pas assez constant. Sa doublure sera le grand espoir formé au club Hendrik Hane, et ce n'est pas pour remplir un quelconque quota car les gardiens ne sont pas comptabilisés dedans. Les deux portiers sont donc natifs de Düsseldorf !

 

Ce fut un choc en plein milieu de l'été : Thomas Sabo, qui donne son nom depuis des années aux Ice Tigers de Nuremberg, annonçait son retrait à compter de la saison prochaine. Le chef d'entreprise en bijoux gothiques est l'un des plus gros sponsors dans le hockey allemand, mais le mécénat dans lequel il a englouti quelques millions d'euros de sa fortune a ses limites. L'inquiétude a été si vive sur l'avenir du hockey professionnel à Nuremberg - au bord de la ruine avant son arrivée - que Sabo a ensuite tenté de rassurer : il essaiera de faciliter la transition et continuera quoi qu'il arrive à financer le hockey mineur.

Nuremberg a en effet redécouvert l'existence de l'association (présidée par le père du gardien de l'équipe Niklas Treutle). L'ancien directeur du hockey mineur André Dietzsch est devenu le nouveau directeur sportif de l'équipe professionnelle, un type de transition rare en DEL. Avec des moyens financiers en baisse, les Ice Tigers ne pourront plus recruter des joueurs allemands majeurs venus de l'extérieur. Leo Pföderl - parti à Berlin - n'a pas été remplacé et le capitaine Patrick Reimer sera tout aussi irremplaçable quand il prendra sa retraite.

Le temps des "grosses recrues" est fini, au sens figuré comme au sens propre : le nouveau défenseur offensif Kevin Schulze pèse 69 kg. L'effectif s'est sérieusement aminci et les nombreuses blessures ont déjà affecté la préparation jouée à trois lignes. Deux attaquants majeur, Philippe Dupuis (opéré de l'épaule) et Jim O'Brien (problèmes musculaires), sont déjà absents pour de longs mois. L'espoir de Nuremberg, c'est d'avoir recruté l'entraîneur respecté Kurt Kleinendorst, qui a mis en place son système offensif et intense en patinage. En bon Américain, il garde un état d'esprit optimiste et dit même viser le titre. La pensée positive peut aider quand d'autres craignent pour la survie et sont envahis par le doute.

 

Les recrues de Straubing sont des joueurs tout sauf spectaculaires. Benedikt Kohl est un défenseur sobre au bon patinage, mais l'avoir récupéré permet de se dispenser d'un troisième étranger en défense. L'Américain Chase Balisy peut ainsi ajouter de la densité au centre de l'attaque avec son efficacité aux mises au jeu et son travail défensif. Quant à Travis Turnbull (qui dispose d'un passeport allemand depuis un an), il a été engagé pour amener sa présence physique dans le slot : il ne demande que ça tant il était malheureux d'avoir été sorti du powerplay à Iserlohn.

L'enjeu n'était pas de recruter mais au contraire de garder un effectif qui a donné satisfaction, emmené par le meilleur marqueur de la ligue Jeremy Williams et son passeur attitré Michael Connolly. C'est peut-être cette année ou jamais pour que cette équipe stable vise haut, car le très convoité Stefan Loibl a déjà signé à Mannheim pour la saison suivante (2020/21). Mannheim ou la NHL, évoque-t-on au sujet de ce joueur que Straubing ne pouvait décemment pas espérer garder.

Frustré de son élimination rapide lors des pré-playoffs, l'équipe aimerait cette fois atteindre le top-6 pour les éviter. Mais s'il y a de très nets écarts avec les mastodontes de la DEL, le "'ventre mou" de la ligue est plus serré ; même l'accès aux pré-playoffs n'est pas une certitude. Mais si jamais l'invité de prestige du camp d'entraînement Felix Schütz finissait par signer faute de trouver un autre club...

 

Après la catastrophe de l'an I après Pavel Gross, Wolfsburg a besoin de ne plus se référer au passé. Il était indispensable de retrouver un entraîneur charismatique qui connaisse bien la ligue et n'ait pas besoin de temps d'adaptation. Pat Cortina était un choix idéal. Il inspire confiance, y compris à Felix Brückmann qu'il avait intégré en équipe d'Allemagne à l'époque : les performances du gardien, de retour d'une année blanche après deux opérations de la hanche et du bassin, seront une des clés de la saison.

Cortina a été suivi par Anthony Rech (interview) qui retrouve ainsi son premier entraîneur en DEL. Le Français a déjà démontré en préparation son sens du but et ses qualités de patinage, comme le nouvel ailier-vedette Mike Sislo (31 ans, 42 matches en NHL et 510 matches en AHL mais victime de problèmes de hanche l'an passé). Passé près d'une rupture forcée de son contrat cet été, Brent Aubin a droit à une nouvelle chance après une saison noire. Il est mis dans de meilleures conditions avec le maître à jouer norvégien Mathis Olimb pour le servir. Wolfsburg a soigné le poste de centre qui était en souffrance : Olimb et Garrett Festerling sont là pour la créativité, et le Suédois Alexander Johansson - ancien capitaine de Färjestad freiné par des problèmes de dos - pour son style très accrocheur défensivement.

La défense manque encore d'un peu de densité, mais Wolfsburg a encore une place d'étranger de libre, en cherchant un profil à la fois abordable et solide dans les duels. La saison passée doit être une anomalie : la place de Wolfsburg est en milieu de tableau, donc en pré-playoffs.

 

L'euphorie se maintient à Bremerhaven, plus petit budget de DEL qui n'a pourtant jamais manqué les (pré-)playoffs en trois années dans la ligue. Jusqu'à quand cet exploit restera-il possible ? Pour l'instant, ça tient. Le club a pour une fois pu conserver l'intégralité de sa première ligne (Urbas-Zengerle-Verlic) et sa première paire défensive (Moore-Fortunus). Le meneur offensif slovène Jan Urbas et le capitaine Mike Moore ont recouvré la santé et l'équipe qui avait fini la saison en effectif réduit ne compte plus aucun blessé à la reprise du championnat. Ross Mauermann et Curtis Gedig sont aussi de retour près des saisons presque blanches.

Le filon de joueurs à passeport allemand ne semble pas s'éteindre : on en a trouvé en Slovaquie avec Tomas Sykora, le meilleur buteur du championnat de Pologne, et en Extraliga tchèque avec le gros défenseur Stanislav Dietz. Cette dernière recrue a permis de remplacer le physique international danois Nicholas Jensen par le très offensif international norvégien Stefan Espeland.

La règle des U23 met néanmoins en lumière les limites du système Bremerhaven. C'est le seul club à n'avoir engagé que deux joueurs pour ces deux positions, sans donc la moindre concurrence interne. Les deux jeunes hockeyeurs en question, Luca Gläser et plus encore Tom Horschel, évoluaient en DEL2 et ont été eux-mêmes surpris de la proposition de contrat. Horschel a mis ses études entre parenthèses pour vérifier cette opportunité d'une durable carrière professionnelle, qui s'arrêtera selon toute probabilité dans un an quand aura passé la limite d'âge du quota.

 

"Nous avions plusieurs égoïstes dans l'équipe". C'est par ce constat sans ambages que le patron d'Iserlohn a tiré un trait définitif sur une saison 2018/19 ratée. Le public a boudé, et les actionnaires de la structure pro ont dû puiser dans leur portefeuille pour combler le trou. Pour tous, un seul mot d'ordre : plus jamais ça ! Du passé, faisons table rase. Nouveau directeur sportif (Christian Hommel), nouvel entraîneur (Jason O'Leary) et nouvelle équipe. Sur les deux premières lignes, il ne reste que deux joueurs, le défenseur Daine Todd et l'attaquant Marko Friedrich. Manque de bol, ils se sont tous deux blessés pendant la préparation. C'est d'autant plus dommage pour le chouchou du public Friedrich qu'il avait joué le premier match amical avec le "C" et qu'il avait une chance d'hériter du capitanat.

En reconstruisant son effectif, Iserlohn n'a pas finassé sur le nombre de contrats - y compris pour les jeunes - et dispose donc d'une bonne profondeur de banc. Mais les Roosters ont-ils assez de joueurs dominants capables de faire la différence ? Bobby Raymond, de retour au club pour la troisième fois (!), se retrouve un peu seul comme défenseur offensif car on a principalement cherché des arrières capables de faire la loi dans leur zone sans se laisser facilement écarter. Mais c'est surtout en attaque que le duo venu de Bolzano (Alex Petan - Bett Findlay) porte des responsabilités qui paraissent un peu lourdes. Les autres joueurs sont des travailleurs dans les deux sens de la glace, mais l'impact offensif de l'équipe semble limité. Les deux gardiens Andrew Peters et Andreas Jenike doivent aussi se relancer après avoir connu parallèlement une saison compliquée (89% d'arrêts en 19 matches pour chacun, l'un en AHL et l'autre à Nuremberg).

Il est d'autant plus étonnant que cette équipe en mal de repères, devant apprendre en même temps apprendre un système et découvrir ses coéquipiers, soit celle qui ait repris le plus tard, avec seulement cinq matches avant le début de la DEL (contre six à Krefeld et au moins sept aux autres concurrents).

 

Trois fois lanterne rouge de DEL en cinq ans, Schwenningen sent bien que sa place est fragile alors que la relégation sera remise en place en 2021. Après la catastrophique saison dernière, les sponsors se sont mobilisés pour augmenter le budget de 500 000 euros. Première étape, se professionnaliser en embauchant un directeur gérant à plein temps (Christoph Sandner qui occupait ce poste à Nuremberg), placé au-dessus du directeur sportif Jürgen Rumrich dans l'organigramme. Deuxième étape, constituer un effectif capable de reconquérir les supporters qui ont fui.

Le gardien aux bons réflexes Dustin Strahlmeier, très apprécié du public, est resté, mais le reste de l'équipe a fait l'objet d'un grand ménage. Huit nouveaux joueurs sur le top-9 offensif, trois recrues sur le top-4 défensif : on ne reconnaît plus grand chose. Et comme il s'agit aussi de préparer la saison prochaine, celle de tous les dangers, quatre trentenaires ont été dotés de contrat de deux ans. C'est le cas du nom le plus prestigieux, l'ex-international suédois Andreas Thuresson, joueur aux bonnes qualités techniques et physiques. C'est le cas aussi de Jamie McQueen, le pur buteur qui a tellement manqué aux Wild Wings l'an passé après les départs d'Acton et Fleury (et a fortiori après celui de Rech cet été). Mais si McQueen a mis 24 buts à Berlin, Stéphane Richer l'avait laissé partir sans regret en pointant sa fiche de -20. Un même déséquilibre entre performances des deux côtés de la glace a souvent été reproché à Dylan Yeo, arrière à l'excellent répertoire offensif qui commet parfois de grosses erreurs. Lui aussi fait partie des contrats biennaux de même que l'autre défenseur-relanceur Christopher Fischer.

Dans son désir de mettre fin à son impuissance devant, Schwenningen ne penche-t-il pas un peu trop vers l'avant ? L'homme chargé de remédier à ce risque, c'est Matt Fraser, défenseur aux 100 kilos et aux 224 matches de NHL qui jouait dernièrement en Slovaquie à Zvolen. Encore un gros CV qui change la physionomie de l'équipe du tout au tout : formation la moins pénalisée de DEL la saison passée, les "cygnes" ont joué les vilains petits canards pendant la pré-saison. Il faudra montrer les dents, mais pas trop, en gardant quand même une discipline d'ensemble. Un équilibre à trouver pour le coach britannique Paul Thompson.

 

Les deux fois où Schwenningen n'a pas fini dernier sur les cinq dernières années, c'est Krefeld qui occupait la place. Là où le SERC ne comptera plus que des étrangers sur ses deux premières lignes, le KEV compte encore et toujours sur l'idole formée au club Daniel Pietta, à qui il reste six ans sur son fameux dernier contrat décennal ! Mais chaque année, c'est la même rengaine : le trio de Pietta fait tout le boulot et le reste de l'équipe peine à suivre.

Comme chaque été, l'objectif est d'obtenir enfin plus de profondeur offensive. Aucune recrue n'est sans doute capable d'égaler les 32 buts du partant Jacob Begrlund, mais les joueurs à 1 point par match en ECHL (Grant Besse et Justin Hodgman) ou en Norvège (Jacob Lagacé) sont censés amenés plus de solutions. Le coach Brandon Reid a ainsi construit son équipe autour de trois duos : l'inévitable tandem maintenu Pietta-Costello, les deux joueurs de 31 ans Hodgman et Jeremy Welsh qui ont de l'expérience du haut niveau, et un duo allemand Kai Hospelt - Laurin Braun, soit un ancien joueur de l'année qui n'a plus le même impact à 34 ans et un joueur de troisième/quatrième ligne de carrière. Il faudra attendre décembre pour que le petit chouchou Martin Schymainski rentre de sa blessure au tendon d'Achille et ajoute une variante.

Quand Krefeld ne recrute pas dans de plus petits championnats, c'est parce qu'il prend un risque avec des joueurs qui ont passé une bonne partie de la dernière saison à l'infirmerie : c'est le cas du nouveau défenseur Mark Cundari, victime d'une rupture des ligaments croisés la saison passée et qui s'est blessé à l'épaule pendant la pré-saison. C'est le cas aussi de Jussi Rynnäs, opéré du ventre l'an passé : le gardien double champion de Finlande avec Kärpät est clairement la recrue numéro 1 de Krefeld, celui qui peut poursuivre la tradition des grands gardiens qui a toujours été associée au succès de ce club.

 

 

DEL 2

Une révolution culturelle discrète est en train se produire avec pour théâtre la DEL2. Jusqu'ici, les patinoires allemandes se caractérisaient par la prédominance des places debout, où s'est développée la culture colorée, active et chantante des supporters. Même les bâtiments récents ont été conçus en respectant cette préférence. Mais l'attrait pour les sièges y est de plus en plus marqué. Bien qu'il ait différencié les prix pour augmenter ceux de la tribune centrale, le tenant du titre Ravensburg a dû arrêter la vente des abonnements "assis" car 1080 des 1150 places étaient attribuées : il fallait garder le reste disponible ne serait-ce que pour les représentants des clubs visiteurs ou de la ligue. Constatant qu'il ne restait souvent plus de places assises à vendre aux guichets, Kaufbeuren a pour sa part rajouté une rangée de sièges cet été aux dépens de gradins debout (ce qui diminue donc la capacité totale). Les supporters sont "vent debout" - c'est le cas de le dire - contre cette décision et expliquent si les places debout derrière le but se vendent moins bien, c'est en raison d'un manque de visibilité comparable à celui qui avait fait scandale il y a quelques années à Augsbourg (où il avait fallu reconstruire les tribunes). C'est le premier signe de mécontentement dans un club qui a tout bien fait depuis trois ans.

La DEL2 vient d'instaurer pour sa part sa propre réglementation sur les jeunes joueurs : elle concerne les U21 et se veut complémentaire de celle de la DEL2 sur les U23. Elle vise en effet non pas les tout meilleurs talents, mais les joueurs qui peinent à entrer dans le hockey pro en sortant de l'âge junior. Il ne s'agit pas "juste" d'un quota de deux joueurs sur la feuille de match (ramenée de 20 à 19 joueurs par alignement avec la DEL) : les joueurs concernés doivent bénéficier d'un vrai contrat de 24 mois avec un salaire réglementé. Un investissement de presque 20 000 euros par an et par joueur que les clubs devraient chercher à rentabiliser, en s'occupant de ces jeunes y compris lors de la préparation hors saison.

Deux ans, c'est le temps qu'il reste avant la ré-institution de la promotion en DEL au printemps 2021. La capitale économique Francfort est attendue au tournant. La ville a bénéficié d'une attention internationale du monde du hockey cet été quand le site de l'IIHF a publié un article sur la nouvelle ère des "méga-arénas", qu'illustrerait les projets de patinoires de 23 000 places à Saint-Pétersbourg et à Francfort. En réalité, les deux cas n'ont rien de comparables. En Russie, le projet conçu pour le Mondial 2023 a évidemment le plein soutien des autorités. En Allemagne, il s'agit d'un projet très contesté car jugé surdimensionné. Le contrat de "pré-location" proposé, selon lequel le club de hockey résident ne paierait pas de loyer mais serait au contraire payé par la direction de l'aréna, doit être compris dans le contexte de la campagne de publicité des investisseurs canadiens pour faire passer coûte que coûte leur projet, mal vu des collectivités locales. Le club est d'ailleurs plus discret sur le sujet. Il bâtit à moyen terme avec quatre actuels internationaux juniors sous contrat. Pour la saison à venir, il aura un concurrent sérieux : Bietigheim-Bissingen est tout aussi légitime après avoir rajeuni son effectif vieillissant. Le rival Kassel a soigné pour sa part sa présence physique pour revenir en haut de tableau.

La DEL2 se distingue avec carrément deux matches en plein air cette saison. Bad Nauheim reçoit Francfort pour le derby de Hesse "ville thermale contre métropole" et espère plus de 20 000 spectateurs dans le stade d'Offenbach. Pour rentabiliser l'évènement, Dresde a pour sa part convaincu les Tchèques, peu familiers de ces évènements, de s'appuyer sur l'organisation allemande en la complétant : un match d'Extraliga tchèque (Litvínov-Sparta) aura ainsi lieu en lever de rideau d'un match de DEL2 !

Maintenue dans l'élite mondiale, la Grande-Bretagne est devenue "tendance" en hockey et la DEL2 a succombé à une nouvelle mode. Entraîneur de l'année avec Weißwasser, Corey Neilson - qui a coaché Nottingham pendant dix ans et était adjoint de la sélection nationale lors de son exploit - a ainsi engagé deux internationaux britanniques, Robert Farmer et Mike Hammond, alors qu'ils se sont toujours faits rares en dehors de leur île. Trois des quatre recrues étrangères viennent d'EIHL. Le Tchèque Tomas Andres (ex-Lyon) n'est pas compté dans le lot car il obtenu juste avant le début du championnat la nationalité allemande, qu'a déjà le nouveau pilier défensif Ondrej Pozivil (ex-Mulhousien venu du champion Ravensburg).

Si la lutte pour la montée attendra 2021, la bataille pour la relégation s'annonce extrêmement disputée cette saison. Le promu Landshut, club de grande tradition, n'est pas un promu "normal" : c'est même lui qui amené le nouveau sponsor général de la ligue, les salles de sport cleverfit qui parraineront le "top scorer" de chaque équipe (dont le casque sera désormais rouge et non plus doré. Les travaux de reconstruction complète de sa patinoire, programmés sur trois étés, l'ont toutefois obligé à reporter ses cinq premières rencontres à domicile et donc à avoir ensuite un calendrier infernal (30 matches entre la mi-novembre et la fin janvier). Pour autant, le directeur sportif de l'EVL Ralf Hantschke - qui a déjà officié dans la ligue à Weißwasser - a marqué le coup en engageant le duo dynamique et complice du champion Ravensburg (Robbie Czarnik - Mathieu Pompei) et a bâti une équipe capable d'accéder d'entrée aux play-offs. Il a même annoncé avoir gardé des réserves financières pour recruter si jamais l'équipe se trouvait en danger de relégation. De quoi inquiéter les habituels candidats à la descente. Bayreuth a pour lui un système de jeu et une équipe en place, et son président Mathias Wendel a donc rempli son objectif de devenir un club "ennuyeux" après des années de polémiques. Fribourg-en-Brisgau a - tout arrive ! - engagé enfin de bons joueurs étrangers, confiés à Peter Russell, le sélectionneur de la Grande-Bretagne qui s'y connaît en maintien !

La relégation, Bad Tölz ne veut même plus avoir à y faire. Le sponsor majeur Cengiz Ehliz a même choqué en projetant que le club monte en DEL en 2023 pour jouer le titre en 2026 ! Ambition démesurée pour le petit club formateur montagnard ? Il vise en tout cas déjà le haut du tableau après avoir engagé l'entraîneur Kevin Gaudet, qui a aussitôt rappelé les hommes qui avaient fait son succès à Bietigheim : le gardien Sinisa Martinovic et le duo offensif Shawn Weller - Tyler McNeely. Les trois hommes ont toutefois quelques années de plus et l'effectif est mince, mais cela a toujours été le cas des contingents de Gaudet. L'effet sur le public est spectaculaire : le nombre d'abonnements vendus (1800) dépasse déjà la moyenne totale de spectateurs sur la dernière saison !

Ces renforts au sein des habituels participants aux barrages de maintien menacent deux clubs qui s'en étaient dispensés depuis deux ans. Heilbronn a engagé un second gardien d'expérience - Mathias Nemec - pour atténuer son risque majeur, le rappel par Mannheim du gardien prêté Mirko Pantkowski, talent prometteur de 21 ans. Crimmitschau est stable tant dans son budget que dans son effectif, ce qui met en risque l'équipe de Daniel Naud tant la concurrence s'est affermie.

 

Marc Branchu

 

 

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