Allemagne 2018/19 : présentation

 

Les amateurs de hockey allemand ont eu un cadeau inattendu au cœur de l'été. Après des années de controverse et un second dépôt de dossiers qui menaçait de se finir en imbroglio juridique, la DEL et la DEL2 se sont mis d'accord pour que le système de montée et de descente soit rétabli en 2021. Les clubs connaissent tous l'échéance et peuvent s'y préparer. Les candidats à la promotion - et uniquement eux - devront déposer leurs dossiers et leur garantie bancaire un an à l'avance. Chacun saura ainsi à quoi s'en tenir.

Le hockey allemand se structure sur plusieurs plans. Par exemple, les temps de jeu de chaque joueur feront désormais enfin partie des statistiques enregistrées. La DEL passe aussi cet été de trois à sept arbitres professionnels, dont deux "recrues" étrangères, le Finlandais Aleksi Rantala (qui a arbitré la finale olympique) et l'Américain Andrew Howard (arrivé d'AHL).

La principale faiblesse, l'intégration des jeunes, commence à être abordée. Le nouveau règlement de la DEL obligera à aligner un Allemand de moins de 23 ans cette saison, 2 la saison suivante, puis 3. L'excuse de la faiblesse de la relève ne tient plus au vu des générations qui arrivent, à l'exemple la deuxième place de l'Allemagne au récent tournoi international U17 de Piestany, derrière les Tchèques mais devant les Américains, battus par un but en prolongation de Lukas Reichel (fils de Martin), meilleur marqueur du tournoi.

 

 

Si le triplé de Munich restera historique, un quadruplé le serait encore plus. Depuis la création de la Bundesliga, il y a soixante ans, six équipes ont remporté trois titres d'affilée : Füssen 1963-65, Cologne 1986-88, Düsseldorf 1990-92, Mannheim 1997-99, Berlin 2011-13 et donc Munich 2016-18. Pour l'instant, une seule d'entre elles a enchaîné avec un quatrième titre, la DEG de Hans Zach en 1993.

L'effectif a perdu un peu plus de joueurs que d'habitude, en partie par choix, en partie non, avec les départs en NHL de Dominik Kahun et plus étonnamment de Brooks Macek, repéré lors de la médaille d'argent olympique. Munich a donc perdu techniquement, d'autant qu'il n'a pas reconduit le joueur de l'année Keith Aucoin. Le Red Bull a des moyens de recruter "sans risque" des Canadiens éprouvés en DEL chez ses concurrents directs. Mark Voakes est un meneur de jeu habile mais souvent blessé à Wolfsburg qui remplace Kahun (entre Mads Christensen et Frank Mauer). Un nouveau trio a été formé avec les ailiers Trevor Parkes et Justin Shugg, copains de longue date, et John Mitchell, vétéran de NHL efficace dans les deux sens de la glace. Reste à y ajouter une "petite" arrivée de dernière minute Matt Stajan, 34 ans et plus de 1000 matches en NHL

Il n'y a certes pas eu de recrue allemande, malgré les nombreux départs de "nationaux", mais c'est le moment de donner leur chance aux jeunes, couvés l'an passé en DEL2 chez le club partenaire Riessersee (qui n'offrira plus une plate-forme de niveau équivalent en Oberliga). Kevin Reich peut maintenant devenir deuxième gardien derrière Danny aus den Birken, et les talentueux attaquants Andreas Eder et Jakob Mayenschein, sont prêts pour le haut niveau. L'un d'eux jouera forcément du fait du nouveau règlement de la DEL qui obligera à aligner un Allemand de moins de 23 ans cette saison, 2 la saison suivante, puis 3... Avec le second frère Eder en réserve, Red Bull a déjà ces joueurs sous contrat.

 

Après avoir démis tout son staff, Mannheim a tout misé sur Pavel Gross : cela se comprend au vu des résultats qu'il a obtenus depuis dix ans à Wolfsburg. Partie prenante du triplé de Mannheim quand il était joueur, il a charge de s'attaquer à une autre dynastie, celle de Munich. Gross est accompagné de son adjoint de confiance, le Belge Mike Pellegrims, lui aussi un ancien pilier de la période Bozon. Et même le nouveau directeur sportif Jan Axel Alavaara, théoriquement son supérieur hiérarchique, est un de ses anciens hommes, qui a joué trois ans pour lui à Wolfsburg.

Tout le monde connaît la philosophie de Gross : il doit donc transformer une équipe soupçonnée de se reposer sur son talent en un adversaire inconfortable, qui patine sans relâche et ne ménage jamais ses efforts. Le défi est facilité par des ruptures de contrat, qui auraient coûté à elles seules un million d'euros, pour que l'effectif soit adapté à ses goûts. Pour ajouter du leadership, les Adler ont embauché Ben Smith, qui vient de conduire comme capitaine les Toronto Marlies à la Coupe Calder de champion AHL. Alavaara a amené deux compatriotes, un attaquant qui sait "payer le prix" dans le slot (Tommi Huhtala) et un défenseur offensif (Joonas Lehtivuori). Deux arrières arrivent du championnat suédois : le bon patineur Mark Katic et le solide Brendan Mikkelson, une montagne de plus avec les gros gabarits conservés Denis Reul, Thomas Larkin et dans une moindre mesure Sinan Akdag. Ces quatre-là sont tous à plus de 190 cm et 95 kg. Quant à Cody Lampl, sa barbe impressionnante fait l'effet psychologique d'une silhouette de bûcheron même si son gabarit est plus modeste.

Mais avec ces sept défenseurs cités, quelle place reste-t-il aux joueurs formés au club que sont Janik Möser - revenu de NCAA et déjà trop âgé à 23 ans pour être prêté - et le grand talent de 17 ans Moritz Seider ? Dans le nouveau projet du club, il est aussi question d'enfin utiliser les produits de l'équipe junior, qui truste le titre chaque année. Or, on compte pour l'instant 14 attaquants et 8 défenseurs de plus de 23 ans pour 18 places sur la feuille de match, en excluant la place réservée à un "jeune". Cela fait quatre surnuméraires, et cette gestion d'un effectif pléthorique, qui fait la particularité de Mannheim, n'est pas la moindre nouveauté pour Pavel Gross.

 

Les Eisbären de Berlin ont laissé partir Uwe Krupp, et la place n'était pas forcément facile à prendre dans une DEL où la durée de vie des entraîneurs est souvent courte (seuls 4 sur 14 ont gardé le même poste depuis l'année dernière à la même époque). Clément Jodoin ne s'en formalisera pas et a assez d'expérience - à 66 ans - pour connaître toutes les vicissitudes du métier, même s'il n'a pas si souvent été en responsabilité principale avec des professionnels. Il sait qu'il sera jugé à l'aune des résultats de son prédécesseur, qui vient d'atteindre la finale.

L'effectif a en effet très peu changé. Le deuxième marqueur Nick Petersen a étonnamment signé dans une ligue autrichienne moins relevée, mais où les gros clubs ne paient sûrement pas moins qu'en DEL. Le petit gabarit d'AHL Colin Smith (25 ans) utilisera sa vitesse pour le remplacer. Jason Jaspers a été pris à l'essai dans l'incertitude de savoir si l'international Marcel Noebels rentrera du camp NHL des Bruins de Boston. Le défenseur Blake Parlett, parti loin à Pékin, est substitué par Mark Cundari, une valeur sûre de la DEL. Et comme Constantin Braun, déjà victime de dépression par le passé, a replongé dans des problèmes d'alcool et ne sera plus disponible de sitôt, Berlin a densifié sa défense avec Florian Kettemer, du champion Munich.

Mais le plus grand changement, et le plus audacieux, se situe devant les filets avec la retraite de Petri Vehanen. Dans une DEL si frileuse envers les jeunes, les Eisbären ont fait confiance à deux gardiens de 24 ans (Marvin Cüpper) et 22 ans (Maximilian Franzreb). Dans un environnement incrédule qui se demandait un temps quand arriverait le vrai numéro 1, les prestations convaincantes de Franzreb pendant la préparation ont légitimé ce choix. Néanmoins, et à l'exact inverse de Munich, dès qu'on est passé des matches amicaux aux premières rencontres officielles en CHL, les Berlinois ont commencé à perdre, déjà éliminés de la compétition européenne et donc un peu dans le doute.

 

En revanche, Nuremberg n'a pas raté ses débuts en Ligue des Champions. Après trois présences de suite en demi-finale, les Thomas Sabo Ice Tigers sont devenus une puissance stable de la DEL. Ils se sont bâtis une défense, qui reste en place avec deux ans de prolongation de contrat pour l'ex-joueur de NHL Tom Gilbert (35 ans), et qui enregistre l'intéressant ajout du jeune Tim Bender.

L'attaque a par contre dû être reconstruite en bonne partie. Si la retraite de Steven Reinprecht était anticipée, et bien compensée par l'arrivée d'un des meilleurs marqueurs de la ligue en la personne de Will Acton, le club a été piégé par l'attrait soudain de la NHL pour les joueurs allemands, et pour Yasin Ehliz en particulier. De la première ligne des dernières saisons, il ne reste plus que Patrick Reimer. Les Ice Tigers ont joué la sécurité en recrutant des figures connues du championnat allemand, et n'ont pas engagé cette fois un nouveau vétéran de NHL. Ils ont cependant soigné la profondeur de banc, nécessaire pour gérer le calendrier étoffé : en plus de la CHL, ils ont en effet accepté l'invitation à la Coupe Spengler.

Un marathon attend cette équipe qui devra donc gérer ses forces. Ce sera un des défis du nouvel entraîneur Kevin Gaudet, qui fait son retour en DEL douze ans après : s'il a eu du succès dans ses dernières étapes à Vienne et à Bietigheim-Bissingen, il avait aussi plutôt l'habitude de beaucoup utiliser ses cadres. Il devra donc apprendre à faire un peu plus tourner son banc.

 

Derrière ces quatre favoris, les autres clubs ont moins de certitudes. Ingolstadt ne se fixe même plus une qualification directe en quart de finale (c'est-à-dire un top-6) comme objectif officiel, alors qu'il paraîtrait pourtant assez légitime. L'objectif prioritaire de l'intersaison a été atteint : aller au bout de ses possibilités financières pour conserver l'excellent joker Ville Koistinen. Après des mois à se remettre d'un virus Epstein-Barr qui l'empoisonne, l'ex-international Benedikt Kohl sera chargé de couvrir les arrières du Finlandais. La deuxième paire est même constitué de deux défenseurs offensifs (Sean Sullivan et Maury Edwards) car le coach Doug Shedden tient à avoir un quatrième homme qui soutient l'offensive.

Dans l'esprit de Shedden, Brett Olson est son centre de troisième ligne, c'est-à-dire celui dont la mission est de neutraliser les meilleures lignes adverses. Ce dont il a regretté le manque l'an passé, c'est un top-6 offensif vraiment performant. Trois recrues américaines doivent y amener de la vitesse : Patrick Cannone sera le premier centre avec Jerry d'Amigo à ses côtés, et l'attaquant de poche Tyler Kelleher (168 cm) pourrait être la petite merveille sortir du chapeau. Le gros gabarit finlandais Vili Sopanen semble pour sa part moins mobile, également ennuyé par des problèmes musculaires.

Tous devront être performants, y compris les vétérans Thomas Greilinger et Darin Olver, car la concurrence s'amplifiera en octobre lorsque la recrue aux 316 matches NHL Ryan Garbutt reviendra de sa blessure contractée au deuxième match amical. Une dégradation peut très vite arriver, comme a pu s'en apercevoir Petr Taticek : toujours sous contrat, le Tchèque naturalisé a tant décliné qu'on ne lui laisse qu'une place en quatrième ligne.

 

En évinçant un joueur-symbole sous contrat à chaque printemps, Cologne semble se créer plus de problèmes qu'il n'en résout. Le départ anticipé de Patrick Hager à Munich l'été dernier n'a pas été digéré, car le KEC a connu des problèmes toute la saison au poste de centre, y compris à cause de blessures. Trois nouveaux centres arrivent donc : le vétéran de LNA et KHL Colby Genoway, un joueur intelligent qui doit mener l'offensive, le jeune Fabio Pfohl et l'Américain Mike Zalewski. Cela relègue Kai Hospelt, en son temps joueur de l'année de la DEL et maintenant âgé de 33 ans, en quatrième ligne.

Cette fois, c'est Philip Gogulla qui a été mis dehors : on le jugeait soudain un peu paresseux après quatorze années passées au club ! L'objectif était de le remplacer par Marcel Müller, lui-même souvent taxé de peu travailleur, mais ce joueur puissant s'est rompu les ligaments croisés et ne rejouera pas avant janvier. Il est impossible de trouver un Allemand de même niveau, et il a donc été remplacé par le naturalisé Steve Pinizzotto, le si controversé "shérif" venu de Munich qui dépasse si souvent les bornes.

Cologne a aussi dû gérer la retraite de Christian Ehrhoff qui laisse un vide à la ligne bleue. Le rôle de défenseur offensif revient à Morgan Ellis, mais a-t-il la même précision de tir ? Au moins a-t-il vite trouvé ses repères sur la première paire aux côtés de Moritz Müller, qui a été élu capitaine après avoir demandé à abandonner ce rôle il y a un an. C'est qu'il est un choix évident, le plus ancien en poste après quinze années dans l'équipe. En n'espérant ne pas lui porter malheur en disant ça...

 

Pendant que Cologne a donné l'impression de s'embourber tout l'été, Düsseldorf a multiplié les gros coups sur le marché des transferts, y compris aux dépens de son grand rival. Sitôt qu'il avait traîné le KEC aux prud'hommes pour se faire verser une bonne indemnité de résiliation, Philip Gogulla s'est en effet empressé de signer à Düssledorf, club de sa ville natale où il habite encore (même s'il a été formé dans le troisième grand club rhénan Krefeld). Ce joli coup ne fut pas le seul puisque la DEG a fait revenir Calle Ridderwall - meilleur marqueur de DEL en 2012/13 - et l'international norvégien Ken André Olimb, qui était devenu le moteur offensif de l'équipe pendant son passage de 2013 à 2016. Ils ont été attirés par des contrats de trois ans. Et pendant de temps-là, Cologne échouait à convaincre le grand frère Olimb, Mathis...

On peut se demander comment la DEG, réputée financièrement précaire, a pu autant recruter. Il faut en effet y ajouter Jerome Flaake, qui doit relancer sa carrière après un passage à Munich assez discret, un véritable défenseur offensif (Ryan McKiernan) et un gardien suédois (Fredrik Pettersson-Wendel) pour faire concurrence à Mathias Niederberger dans les cages ! Le directeur sportif Nikolaus Mondt s'est appliqué à changer la politique salariale de son prédécesseur Christoph Kreutzer, qu'il jugeait trop égalitaire. En se défaisant de joueurs de quatrième ligne un peu trop payés, il a dégagé des marges de manœuvre pour rappeler des chouchous du public.

Cela fonctionne évidemment auprès des supporters ravis qui attendent impatiemment cette saison. Après deux années sans play-offs, Düsseldorf doit faire son retour dans le haut du tableau. Le défi est clair pour le nouvel entraîneur Harold Kreis, qui devra réussir l'intégration d'une équipe presque entièrement reformée en attaque. Il s'appuie pour cela sur le leader offensif restant, Alexander Barta, qu'il a nommé capitaine. Quand il était junior, Barta avait été prêté à Bad Nauheim pour avoir du temps de jeu. Il habitait alors à proximité de son coach Harold Kreis, et, avec son compagnon de chambrée, ils avaient cru malin de laisser la lumière dans l'appartement afin de faire croire à leur présence pendant qu'ils faisaient le mur... Mais comme la lumière était encore allumée à 4 heures du matin, Kreis n'avait pas été dupe et avait "puni" le jeune Barta en le clouant presque tout le temps sur le banc. Le péché de jeunesse est pardonné, preuve en est que c'est le joueur lui-même qui a rapporté cette anecdote !

 

Après le départ de son entraîneur Pavel Gross, Wolfsburg arrivera-t-il encore à rester compétitif face aux sept gros budgets ? Il s'est habitué au fil des ans au haut du tableau, mais c'est la saison de tous les dangers. Le nouvel entraîneur Pekka Tirkkonen, au caractère "finlandais", plus réservé mais tout aussi impliqué, succède à un homme qui a marqué le club de son empreinte. En plus, il arrive dans une équipe nettement rajeunie dont la colonne vertébrale a été intégralement remplacée : les quatre centres ont changé d'un coup !

Trois Américains sont arrivés à ce poste, plus un Allemand pour la quatrième ligne (Nick Latta). Le passeur Cole Cassels peut emmener un deuxième trio offensif, Corey Elkins est plus chargé de l'infériorité numérique et des mises au jeu décisives en zone défensive, mais c'est le centre présumé le plus complet, John Albert, qui a pris la place de l'ex-capitaine contraint à la retraite par une blessure Tyler Haskins, entre les vedettes allemandes Sebastian Furchner et Gerrit Fauser. Le problème est que ce trio ne fonctionne pas.

Dans les cages, Felix Brückmann, qui avait mal géré sa récupération, a dû se résoudre à se faire opérer de la hanche pour ne pas compromettre la suite de sa carrière. Le joker canadien Tanner Jaillet doit plutôt être vu comme un recours alternatif au titulaire naturalisé Gerald Kuhn, prié de rester performant. Wolfsburg a en effet trop besoin de ses 6 étrangers en attaque et de ses 3 étrangers en défense pour se permettre d'en laisser un en tribune comme surnuméraire.

 

Sixième il y a deux ans puis douzième l'an passé avec une équipe assez semblable, Mike Stewart, l'entraîneur d'Augsbourg, a souhaité gagner en force sans perdre en explosivité. Les trois nouveaux défenseurs ont ainsi 10 cm et 10 kg de plus en moyenne que leurs devanciers ! Quand aux cinq qui sont restés en place, ils ont pris en moyenne cinq kilos par rapport à leur poids de l'année dernière, et il s'agit bien essentiellement de masse musculaire. Pour autant, il faut quand même remplacer dans ces lignes arrières le potentiel de soutien offensif que représentait Mark Cundari (parti à Berlin) : la rupture de contrat de Patrick McNeill à Ingolstadt (où il est passé en trois ans de 40 puis 30 à 9 points) peut se révéler une bonne affaire pour les Souabes.

Pour que les trois nouveaux attaquants étrangers puissent substituer efficacement leurs prédécesseurs, il faudra qu'ils s'adaptent bien à la DEL. Ce devrait être le cas pour l'ex-joueur de NHL Matt Fraser qui arrive de Dornbirn (Autriche), mais les joueurs d'AHL Sahir Gill et Adam Payerl font le grand saut au-dessus de l'Atlantique. Si Augsbourg bénéficie de l'expérience du centre Christoph Ullmann (35 ans, 156 sélections), victime de la rénovation complète de Mannheim, le contingent d'attaquants allemands s'est réduit de deux unités. En effet, le club comptait sur la naturalisation de T.J. Trevelyan, qui n'a toujours pas eu lieu. Cela peut attendre un mois de plus, durée de sa convalescence à cause d'une fracture de la main au dernier match de préparation. C'est la grande chance pour deux talents de l'équipe junior Marco Sternheimer (20 ans, 40 points en 31 parties d'Oberliga en prêt à Sonthofen) et Tim Bullnheimer (19 points). Ils pourraient bénéficier dans les prochaines années des nouveaux quotas progressifs de la DEL, et Augsbourg est ainsi le premier club à redécouvrir son vivier.

Augsbourg est aussi été le premier club de DEL à mettre en place un nouveau système de géolocalisation très précis dans sa patinoire. Activé à chaque match et à chaque entraînement, il permet d'enregistrer chaque mouvement au moyen de capteurs de 15 grammes placé au dos des épaulettes entre les omoplates. Les résultats sont comparés aux profils d'effort de chaque joueur pour doser les entraînements. Ce système a été utilisé par deux clubs de football de Bundesliga et en hockey par l'académie Red Bull de Salzbourg.

 

La déception de la dernière saison a entraîné une baisse de 10% des abonnés, qui sont majoritaires dans la patinoire de Straubing : ils ne sont plus "que" 2500. Les actionnaires du club ont donc décidé de prendre des risques financiers en augmentant paradoxalement leur budget. Dans une DEL où les effectifs ont été pas mal chamboulés, le club bavarois a été le plus frénétique à signer de nouveaux joueurs en engageant pas moins de 16 recrues ! Pour ainsi dire, il a gardé sa première ligne Loibl-Connolly-Williams et renforcé tout le reste. Autant dire que la qualification en play-offs est espérée de manière impérative.

La défense totalement remaniée est emmenée par le Suédois Frederik Eriksson, qui est depuis des années un des défenseurs offensifs les plus célèbres de DEL à Nuremberg et à Cologne. L'attaque s'appuie sur deux recrues majeures, le grand gabarit Antoine Laganière, auteur d'une solide saison en Liiga finlandaise (17 buts pour les Ässät), et Kael Mouillerat, qui a été surnommé le "fossoyeur d'occasions" par les supporters d'Ingolstadt mais qui y a quand même mis 13 buts et 32 points. Les autres sont des Allemands (parfois naturalisés comme T.J. Mulock et Dylan Wruck de Cologne) qui déclinaient dans de gros clubs où ils étaient souvent frustrés par un maigre temps de jeu, mais qui ont les moyens de se relancer à Straubing.

La recrue qui a le plus attiré l'attention des adversaires, c'est Jeff Zatkoff, qui était le deuxième gardien des Penguins de Pittsburgh vainqueurs de la Coupe Stanley en 2016. Il y a connu la meilleure période de sa carrière chez les Pens, et l'entraîneur des gardiens y était Mike Bales, qui a passé de longues années à Straubing. Il lui a chaudement recommandé le club bavarois, qu'il a rejoint à la recherche d'une stabilité pour sa première expérience européenne.

 

Même si Iserlohn a perdu ses cinq meilleurs marqueurs, il a réussi un très joli coup en embauchant Jon Matsumoto dont Munich ne voulait plus... avant qu'il ne devienne le meilleur joueur des play-offs ! Il aurait été inabordable quelques semaines plus tard. Il emmènera la première ligne avec Luigi Caporusso, qui aurait été dans les meilleurs marqueurs sans sa blessure, et Jordan Smotherman, un gabarit énorme de 102 kg que les Roosters avaient déjà mis sous contrat il y a quelques années avant que sa venue soit annulée par une blessure. En défense, le club s'est séparé de ses trois Scandinaves et est retourné vers ses premières amours canadiennes, avec en tête d'affiche Dylan Yeo (ex-Straubing).

La profondeur de banc recourt toujours aux naturalisations, même si le passeport allemand du vétéran américain Travis Turnbull, se fait attendre. Le manager Karsten Mende a encore trouvé un "Allemand" dans le championnat universitaire canadien avec Michael Clarke. Mais le club a aussi quelques jeunes pour anticiper les évolutions sur les quotas de jeunes, et en particulier le défenseur Tom-Eric Bappert (formé au club) comme projet à long terme sous contrat jusqu'en 2021.

 

Après avoir atteint deux fois les quarts de finale, Bremerhaven répètera-t-il le même miracle pour sa troisième saison en DEL ? Le club annonce avoir augmenté son budget de 500 000 euros, mais il ne faut pas oublier que ledit budget reste le plus petit de la ligue à 4,5 millions d'euros. Le club a su conserver une bonne partie de son effectifs, en particulier ses gardiens tchèques à passeport allemand Tomas Pöpperle et Jaroslav Hübl.

L'enjeu le plus important était la resignature de Jan Urbas qui a vraiment été le meneur offensif. Pour mieux le convaincre de rester, le club a même recruté son partenaire de ligne en équipe de Slovénie, Miha Verlic. Les deux hommes ont immédiatement cartonné ensemble en pré-saison, avec comme centre Alex Friesen, venu de Leksand en élite suédoise.

Bremerhaven n'a en revanche pas pu empêcher ses concurrents de venir se servir avec ses deux défenseurs majeurs, Cody Lampl (Mannheim) et le bon patineur Wade Bergman (Wolfsburg). Mais il a su réagir. Né au Québec de parents haïtiens, l'ancien meilleur défenseur de LHJMQ Maxime Fortunus n'est pas grand (1m80) mais est un condensé de muscles qui compte plus de 1000 matches d'AHL, dont un titre en 2014 en tant que capitaine des Texas Stars. L'autre recrue Curtis Gedig a démontré son potentiel de défenseur offensif dans le championnat norvégien.

 

S'il est un club qui ne va pas prétendre sortir gagnant du marché des transferts et expliquer par de grands discours combien ses recrues sont plus fortes, c'est Schwenningen. Le jeune espoir défensif Tim Bender n'a pas été remplacé, et aucun des nouveaux attaquants n'a l'impact offensif d'un Will Acton ou d'un Damien Fleury, rentré en France.

Le staff l'a répété dès l'annonce de la volonté de départ d'Acton (malgré une année restante de contrat), la solution ne pourra venir que du collectif. L'identité de l'équipe est une valeur forte défendue par l'entraîneur Pat Cortina. Cette homogénéité s'est vérifiée en pré-saison : personne n'a marqué plus de deux buts, mais treize joueurs différents ont trouvé le chemin des filets.

Cela peut paraître un peu étonnant, mais Schwenningen est le seul club (avec Wolfsburg) à avoir déjà engagé 10 étrangers, alors qu'il ne peut en engager que 9 sur la feuille de match. C'est en attaque, avec 8 étrangers, qu'un d'eux sera renvoyé en tribunes si tout le monde est en santé. L'arrivée du Letton Rihards Bukarts - joker de Berlin en fin de saison dernière - met surtout sous la pression de la concurrence deux autres internationaux, le Français Anthony Rech et le Hongrois Istvan Bartalis.

 

Krefeld est un peu l'enfant malade de la DEL, le club dont on se demande sans cesse s'il obtiendra sa licence et survivra à l'été. Il survit souvent en étant tenu à bout de bras par le centre formé au club Daniel Pietta, utilisé jusqu'à épuisement. Malgré le contrat de 10 ans dont il est doté, des rumeurs ont couru sur un éventuel intérêt à son égard de Nuremberg, ville dont sa copine est originaire... Pietta est toujours là ; les infériorités numériques - même s'il y excelle aussi - devraient lui être épargnées cette saison pour le laisser souffler.

Le club est allé chercher son bonheur en Scandinavie, dans des championnats moins huppés : cinq joueurs proviennent des championnats de Norvège ou du Danemark, plus l'entraîneur Brandon Reid, ancien joueur de DEL qui en sera cette saison le plus jeune entraîneur (37 ans). Le KEV tenait tellement à Reid, encore sous contrat, qu'il n'a pas hésité à payer une indemnité à Aalborg, devenu champion danois grâce à ce coach. Le Canadien a emmené dans ses bagages son meneur défensif Martin Lefebvre, à la très bonne lecture du jeu, et son ailier russe Kirill Kabanov, mais aussi Philipp Brugisser d'Esbjerg : ce défenseur offensif au tir puissant n'est même pas un titulaire indiscutable en équipe du Danemark, mais Krefeld en a fait son capitaine.

Mais le plus surprenant est survenu à une semaine du début du championnat : le Russe Mikhaïl Ponomarev a racheté 46% des parts du club pour devenir le second actionnaire du club après son président Wolfgang Schulz (48%), qui est âgé de 71 ans et annonce depuis des années qu'il cherche à passer la main. Or, Ponomarev avait acquis une réputation douteuse quand il était actionnaire du voisin Düsseldorf et avait été accusé de ne pas respecter ses engagements. À l'époque, il déclarait que la DEG était "un des clubs les moins profitables d'Europe". Aujourd'hui, il annonce que "Krefeld est un rares clubs sains de DEL". Le moins qu'on puisse dire est que cette opinion est relativement à contre-courant.

 

 

DEL 2

 

Maintenant que la promotion/relégation a été ré-instaurée pour 2020/21, les clubs ont deux ans pour s'y préparer avant la saison de vérité. Quatre fois champion dans les dix dernières années, Bietigheim-Bissingen doit essayer de construire un peu plus à long terme devant un public habitué au succès, notamment en consolidant ses finances. C'est aussi une décision financière si l'entraîneur à succès Kevin Gaudet a été remplacé par un novice, Hugo Boisvert (ex-adjoint à Kassel). L'équipe, vieillissante, doit elle aussi se renouveler. Après la retraite de l'ex-international polonais Adam Borzecki, le nouveau pilier physique de la défense est désormais Nikolai Goc (154 sélections en équipe d'Allemagne), victime du grand ménage de Mannheim à 32 ans et désigné capitaine. Le Belgo-Allemand Dennis Swinnen amène un peu de jeunesse bienvenue à l'attaque, formant un bon duo avec le meilleur marqueur Matt McKnight.

Le concurrent Francfort semble s'être déjà placé dans l'objectif 2021, ce qui ne l'empêchera pas d'être un redoutable prétendant au titre cette année. L'entraîneur Franz Fritzmeier a un contrat pour les trois prochaines années, et il a la réputation d'un entraîneur qui fait confiance aux jeunes. L'effectif est formé à l'inverse des Steelers : ici, les jeunes sont majoritaires, et les vétérans comme l'ex-international Eduard Lewandowski sont les exceptions chargées de les encadrer.

Le vice-champion sortant Riessersee n'a plus obtenir de licence pour la DEL2, et le redressement judiciaire tardivement accepté par ses créanciers lui a seulement permis de repartir en Oberliga, ce qui sauve au moins l'avenir de ce bastion historique du hockey allemand. Ses joueurs se sont disséminés dans les autres clubs : en particulier, le joueur le plus rapide du championnat Richie Mueller a été embauché par Kassel (au nez et à la barbe du grand rival Francfort qui comptait sur son retour) et le joueur de l'année Andreas Driendl a signé à Ravensburg. Ces deux équipes seront les deux autres favoris.

Avec de nouveaux dirigeants, Dresde affiche l'ambition de se structurer à long terme pour la DEL et a déjà affiché ses ambitions dans le recrutement, notamment en engageant le défenseur offensif qui lui manquait, Jordan Heywood (ex-capitaine de Heilbronn). Au bord de la relégation il y a trois ans, l'ESV Kaufbeuren a connu une évolution incroyable dans sa nouvelle patinoire et compte aujourd'hui 1420 abonnés, ce qui était le nombre total de spectateurs dans les moments difficiles.

Les ventes de billets ne se sont guère ressenties de l'amélioration des résultats à Heilbronn, mais le club bénéficie du partenariat retrouvé et renforcé avec Mannheim, qui prête nombre de talents, dont le plus important sera le nouveau grand espoir allemand au poste de gardien Mirko Pantkowski (20 ans). On devrait le retrouver en milieu de tableau, tout comme Bad Nauheim, où le nouvel entraîneur Christoph Kreutzer a confié les clés de la défense au meilleur joueur néerlandais actuel, Mike Dalhuisen, revenu plus près de chez lui après deux années au Kazakhstan dans un environnement russophone.

Les clubs de l'Est devront s'accrocher aux dernières places en play-offs. Weißwasser a gardé l'essentiel de son équipe mais devra retrouver la sérénité après le second départ impromptu de son entraîneur en moins de neuf mois : cette fois, c'est à cause d'un conflit avec l'adjoint qu'il avait lui-même validé (Chris Straube) que Robert Hoffmann a claqué la porte en juillet, à deux semaines de la reprise des entraînements. Corey Neilson a relevé le défi après douze années à Nottingham. Après sa meilleure saison en DEL2, Crimmitschau est dans le cas inverse : l'entraîneur Kim Collins est toujours là, mais plus de la moitié de l'équipe a été remplacée, dont les quatre étrangers. L'attaquant américain Rob Flick et le défenseur offensif Carl Hudson (ex-Morzine et Milton Keynes) auront des rôles-clés.

Un autre défenseur offensif passé par la France puis par la Grande-Bretagne, Alex Miner Barron (ex-Strasbourg et Coventry), a rejoint Fribourg-en-Brisgau, qui a longtemps misé sur des vétérans et qui a cette fois recruté des étrangers de 24 à 28 ans. Les fans sont exigeants, mais si les dirigeants parlent ouvertement de play-offs, les fondamentaux restent les mêmes : le club a le plus petit budget de la division (avec le promu Deggendorf) et la mairie n'a toujours rien entrepris au pour remplacer la patinoire vétuste.

Les trois derniers promus en date sont trois clubs de Bavière qui joueront le maintien. Bayreuth a certes bénéficié d'un repêchage mais n'avait jamais connu autant de changements dans l'équipe. Le duo restant Bartosch-Kolozvary accueille l'international lituanien Arnoldas Bozas qui reste sur une bonne saison d'Oberliga à Regensburg, et le nouvel entraîneur finlandais Petri Kujala a choisi deux compatriotes en première ligne avec Juuso Rajala et Ville Järveläinen. Le promu de l'an passé Bad Tölz salue certes les retraites de ses deux figures marquantes, Josef ("Beppo") Frank en défense et l'ex-international Klaus Kathan en attaque, mais a quand même recruté le troisième homme de la première ligne de Riessersee, Libor Dibelka, et le gardien qui a confessé sa renaissance à la vie (voir anecdotes de septembre), Ben Meisner. Quant au nouveau venu Deggendorf, il a fait sensation en recrutant une star - fragile - de la DEL2, le meilleur marqueur des play-offs Justin Kelly (37 ans). Il a en revanche choisi de faire confiance à deux gardiens sans expérience à ce niveau, le jeune de 21 ans qui a obtenu la montée (Cody Brenner) et l'habitué d'Oberliga Björn Linda.

 

Marc Branchu

 

 

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