Autriche 2010/11 : présentation

 

La ligue autrichienne (Erste Bank Eishockey Liga, EBEL) n'a plus de concurrence pour le titre de huitième meilleur championnat en Europe depuis que le Bélarus a sacrifié la qualité de sa compétition nationale à une équipe de KHL. Elle a été reconnue par ses pairs : Hockey Europe, l'organisation des principales ligues continentales hors KHL, l'a admise en son sein l'an dernier. Et quand l'IIHF a présenté un projet de ligue européenne avec sept pays représentés (Russie, Suède, Finlande, République Tchèque, Suisse, Allemagne, Slovaquie), plus le vainqueur de la Coupe Continentale, ces ligues ont réagi la semaine suivante en réclamant que l'EBEL ait aussi des places attribuées directement.

Ce lobbying efficace n'est pas dû seulement au "modèle d'intégration européenne" que les dirigeants sont allés vanter dans une présentation au parlement de Bruxelles. Les clubs des pays invités (Slovénie, Hongrie et Croatie) passent encore au second plan, et pas seulement au classement. Ils se plaignent aussi parfois d'être considérés comme des faire-valoir et d'être traités de manière inégalitaire.

Le vecteur de cette montée en puissance est surtout économique : le hockey autrichien est de plus en plus dépendant de Salzbourg, c'est-à-dire de Red Bull, sponsor devenu organisateur d'évènements et force médiatique. Le contrat de diffusion de la ligue a ainsi été perdu par Sky au profit de Servus TV, une télévision appartenant à 100% à... Red Bull. Le téléspectateur y perd en fréquence (un match hebdomadaire au lieu de deux) mais aussi en coût, puisque cette nouvelle chaîne est sans abonnement. Le hockey, pour sa part, y gagne-t-il en visibilité ? Certes gratuite, Servus TV n'a été lancée qu'en octobre 2009 et n'a aujourd'hui qu'une part de marché de 0,6%. Elle est cependant visible dans toute l'Europe par satellite et par internet et constitue donc une vitrine.

 

Quand l'IIHF attribue un ticket au "vainqueur de la Coupe Continentale", c'est en croisant les doigts pour qu'il se nomme Salzbourg. Mission réussie l'an passé et à confirmer cette année à Minsk avec un effectif presque inchangé.

Les objectifs du club sont clairement continentaux : c'est pour ça qu'il a fait de son tournoi de pré-saison la finale du nouveau "European Trophy" : même invité d'office, il y a échoué à domicile. Sanction immédiate pour Pierre-Luc Sleigher et Joey Morminer, les deux joueurs au chômage après l'exclusion de Kassel de la DEL : leur essai a été terminé sur-le-champ. Ce tournoi était plus important pour Salzbourg que le début du championnat.

La saison régulière n'a jamais été une priorité pour Pierre Pagé. Ses hommes ont encore perdu quelques points en route, et plutôt que de tout faire pour rattraper Klagenfurt, il préfère faire une croix sur certaines rencontres et reposer une demi-douzaine de titulaires à la fois en prévision du voyage à Minsk. Mais en play-offs, le favori sera comme toujours Salzbourg, qui se sera construit une équipe gagnante sans lésiner sur les moyens.

Dernier exemple avec Thomas Raffl : la rumeur fait état d'un salaire de 120 000 euros annuels pour faire rentrer de Suède cet ailier physique. Une sacrée somme pour un joueur de 24 ans qui ne s'est pas encore affirmé comme un meneur de l'équipe nationale. En tout cas pas au niveau des Koch, Welser, Trattnig et Lakos qui forment toujours avec Ryan Duncan les cadres de cette équipe de Salzbourg. Le système de points (voir présentations 2007/08 et 2008/09) était censé mettre un terme aux salaires exorbitants des meilleurs joueurs autrichiens, voilà qu'il reproduit au contraire les ponts d'or au profit de la jeune génération. Pas sûr que ce soit le meilleur moyen de la faire mûrir...

 

D'octobre à décembre, Klagenfurt a réussi une série de 17 victoires d'affilée. Certes, le KAC a eu sa dose de chance, et les succès aux tirs au but sont comptabilisés dans ce total, mais il reste impressionnant et pas près d'être battu.

Cette forme précoce du KAC s'explique par l'homogénéité de son effectif, qui ne compte paradoxalement aucun marqueur dans les vingt premiers. Cela permet d'assurer une grande continuité malgré des modifications à quelques postes-clés : le gardien Jordan Parisé a laissé sa place à Andy Chiodo, le slap de Peter Ratchuk tentera de faire oublier celui du défenseur et meilleur marqueur Jeff Tory, et l'attaquant défensif Jason Morgan est remplacé par Tyler Scofield, absent depuis fin novembre en raison d'une déchirure abdominale.

Ce qui rend ces victoires en chaîne encore plus remarquables, c'est qu'elles ont été acquises avec un effectif diminué par les blessures, et sans le vétéran Andy Schneider. Le héros du titre 2009 ne se sent plus la force de faire une saison pleine de hockey, il a donc le droit à un privilège spécial : ne rechausser les patins qu'en décembre. Son substitut provisoire au centre, Tyler Spurgeon, restera finalement au-delà des trois mois de son contrat initial. Klagenfurt se trouve ainsi surnuméraire, avec un joueur en tribune à chaque match.

À nouveau, c'est donc un duel de milliardaires (voir présentation 2009/10) qui domine le hockey autrichien : Klagenfurt contre Salzbourg, c'est-à-dire la veuve contre le self-made-man.

 

Quand, comme Vienne, on se fait éliminer en demi-finale (par Linz) après avoir mené 3 victoires à 0, il faut un bouc émissaire. Ce fut le gardien canadien Frédéric Cassivi, qui a craqué dans cette série maudite. Une opportunité s'est présentée de recruter Jürgen Penker, dont l'intéressante expérience scandinave de deux ans s'est finie en queue de poisson : il a été relégué avec Rögle après avoir perdu sa place de titulaire en fin de saison. Dans la capitaine autrichienne, il doit cependant défendre son poste de numéro 1 face à Adam Hauser : l'ancien gardien de DEL n'était pas dans les plans, mais a été récupéré à un "tarif de chômeur" après la faillite de Kassel.

Avec l'arrivée de Penker, les Capitals font d'une pierre deux coups. Pour contredire la mauvaise réputation qui leur était faite, ils ont en effet décidé de se débarrasser de leur image de club d'étrangers et de recruter des joueurs autrichiens : le défenseur offensif Martin Oraze (Graz, formé à Villach) et les attaquants Martin Ulmer (Salzbourg, formé à Dornbirn et en Suisse), et Philipp Pinter (Villach).

La formation viennoise, elle, est toujours représentée par Rafael Rotter, qui a pris 16 matchs de suspension pour avoir bousculé un arbitre. Dommage pour lui à l'heure où il accumulait les mentions d'assistance en première ligne aux côtés du duo de choc Gratton-Fortier qui écrase le championnat.

L'agressif Benoît Gratton a en effet été rejoint par François Fortier, qui a été son coéquipier pendant trois ans en Allemagne. Buteur d'une extrême régularité, avec jamais moins de 22 buts en cinq saisons à Hambourg qui n'a pourtant rien d'une équipe constante, Fortier canarde en Autriche où il tourne à un but par match grâce à son tir aussi puissant que précis. Le duo sera redoutable s'il maintient son rendement jusqu'en play-offs. Le coach Kevin Gaudet devra s'en assurer, lui qui a la réputation de sur-utiliser ses cadres et de ne jamais faire tourner son effectif.

 

Deux légendes ont raccroché les patins en même temps, honorées par une cérémonie d'adieux en août. Wolfgang Kromp et Günther Lanzinger ont passé toute leur carrière à Villach, et en choisissant de s'arrêter ensemble après vécu tant d'années sportives côte-à-côte (cinq titres de champion) ils marquent la fin d'une époque. Ils sont en effet les derniers survivants d'une espèce disparue de cadres de l'équipe nationale qui étaient aussi de vrais amateurs : tous deux ont en effet des emplois de facteurs. Même dans l'actuel hockey professionnel, Wolfgang Kromp, à 40 ans, restait une référence de la condition physique et était parmi les premiers à tous les tests. Il a fini sa carrière en défense mais devait y faire place aux jeunes. Günther Lanzinger, à 38 ans, plantait toujours des buts grâce à son one-timer, mais peinait plus à suivre le rythme de jeunes.

Les anciens partis, le VSV peut toujours compter sur ses joueurs formés au club. À défaut de son frère Thomas, attiré par la planche à billets de Red Bull, il reste Michael Raffl, beaucoup moins cher mais pas beaucoup moins performant. Le passeur Roland Kaspitz est une fois de plus le meilleur marqueur. Et les joueurs de troisième et de quatrième ligne ont évolué à leur meilleur niveau en début de saison, plaçant Villach dans le trio de tête, au-dessus de ses moyens.

Des résultats qui n'étaient guère tenables à long terme. La performance des étrangers a alors été observée et critiquée de plus près. Sur les cinq recrues de l'intersaison, il n'y a eu que deux bonnes pioches : l'attaquant américain Derek Damon, avec une technique sûre, et l'arrière canado-slovène Greg Kuznik, qui fait un solide boulot dans sa zone. Les deux autres anciens de Ljubljana déçoivent en revanche : Kevin Mitchell, ancien partenaire de Kuznik à l'Olimpija, n'est pas le danger attendu à la ligne bleue et commet des erreurs et des fautes idiotes, tandis que Tomaz Razingar réussit quelques actions de grande classe avec le palet mais ne sait pas rester concentré soixante minutes. La plus grande désillusion vient cependant de l'absence d'implication physique de Matt Ryan, fringant pendant la préparation et qui montre de moins en moins d'envie.

Villach a réagi fin novembre en recrutant un joker Josh Langfeld, un joueur très actif dans le slot adverse. C'était le buteur qui manquait à cette équipe bâtie sur la vision du jeu de Kaspitz et Damon. Pour autant, le nouvel équilibre reste encore certains, et même les supporters les plus assidus n'arrivent plus à suivre les changements de lignes incessants de l'entraîneur suédois Johan Strömwall.

 

Ayant perdu ses deux meilleurs pointeurs Greg Day et Eric Healey, Graz n'espérait plus répéter sa première place de saison régulière et semblait démuni. Mais la liquidation de Kassel, alors que les effectifs de DEL étaient déjà complets, a décidément constitué une aubaine pour les clubs autrichiens. Un bon marqueur devenait ainsi libre avec le jeune marié Mike Ouellette (ex-Zagreb).

Toujours sponsorisés par un laboratoire de lutte contre la calvitie, les 99ers ont donc moins de cheveux à se faire sur leur potentiel offensif. Ils ont cherché à compenser le départ de leurs deux vedettes par une meilleure profondeur. Ils ont ainsi embauché un Américain d'ECHL, Peter Lenes, un petit gabarit muni d'un précieux double passeport car son père est originaire de Graz. Ils ont aussi fait revenir dans son club d'origine Mathias Iberer, un jeune attaquant physique qui a besoin d'être cadré.

Pour faire travailler une équipe, on peut compter sur Bill Gilligan, qui a choisi de n'engager que cinq étrangers. La vraie star, cela reste l'entraîneur. Le seul qui puisse lui faire de l'ombre par son vécu, c'est le naturalisé Darcy Werenka, ancien capitaine muté assistant-coach l'an passé à Vienne après une blessure. Graz lui a proposé de revenir sur la glace et dispose ainsi d'un atout d'expérience en powerplay.

La principale promotion, c'est celle du jeune gardien formé au club Fabian Weinhandl, la révélation de la saison dernière. Son concurrent canadien Sébastien Charpentier est parti, et il reste donc seul avec deux doublures n'ayant jamais joué la moindre minute en élite. Aligné à chaque match, il doit prouver dans la durée qu'il a vraiment le niveau d'un numéro un incontesté.

 

Linz a créé la surprise l'an passé en atteignant la finale avec une équipe sans stars, mais bien motivée par son entraîneur Kim Collins à compenser son manque de talent par un travail défensif de tous les instants. Le club savait avoir dépassé son potentiel théorique, et il visait donc simplement le top-4 en saison régulière.

Malheureusement, la nouvelle saison est aussi mal partie que la précédente s'était bien terminée. L'esprit collectif avait disparu, et la confiance avec. Les attaquants étaient incapables de conclure. Les défenseurs étaient à leur tour gagnés par la frustration, et Robert Lukas a pris 12 matches de suspension pour avoir chargé Benoît Gratton (ce qui démange beaucoup de monde sur les glaces autrichiennes) crosse en avant pendant un arrêt de jeu.

Quand Linz s'est retrouvé dernier, les dirigeants ont réaffirmé leur confiance en leur entraîneur et ont prévenu les joueurs que ce sont eux qui paieraient les conséquences. La recrue-phare Eric Healey, meilleur marqueur du dernier championnat, en a fait les frais : n'ayant pas été le meneur de jeu attendu, il a été remplacé par Jason Ward, ex-joueur de NHL sans contrat, moins créatif plus travailleur. L'équipe ayant besoin à tout prix d'un buteur, il est arrivé en la personne de Justin Keller, joueur d'AHL qui a mis un mois d'essai pour prouver qu'il avait bien signé une saison à 51 buts en junior en WHL.

Ce second joker a un coût humain : comme un joueur étranger vaut 4 points sur la feuille de match dans le comptage autrichien, il a fallu se séparer de trois joueurs locaux pour l'embaucher ! Les deux recrues ont cependant amélioré l'ambiance du vestiaire selon Kim Collins, et Linz s'est remis à gagner. Les Black Wings peuvent toujours espérer revivre de beaux play-offs.

 

Le Medvescak Zagreb est probablement aujourd'hui le club qui sait le mieux se vendre en Europe. Il incarne une image neuve dans une Croatie dont les dirigeants sportifs ont souvent une réputation douteuse. Un McDonald's à son nom a ouvert été à Zagreb, et il est devenu le quatrième club sportif partenaire de l'UNICEF. Les trois précédents étaient trois des clubs de football les plus populaires de la planète : le Barça, Manchester United et Boca Juniors...

Hors ce partenariat humanitaire, le Medvescak a tellement de sponsors qu'il a augmenté son budget de 20%. Son principal problème est la limite de 60 points qui plafonne de fait les renforts étrangers qui en valent 4. Il est donc toujours à la recherche de fils d'émigrés qui pourraient bénéficier de la nationalité croate. On chasse donc activement tout patronyme en -ic, voire en -ich selon les transformations subies en Amérique du nord. Et on ne tombe pas forcément sur des joueurs au rabais : Ryan Kinasewich avait ainsi la meilleure moyenne de points par match en ECHL (103 points en seulement 59 rencontres, parce qu'il en a aussi joué une dizaine en AHL).

C'est avec les étrangers "officiels", ceux qui n'ont plus l'âge ni la volonté de se faire refourguer un passeport, que le club a la main moins heureuse. Les deux recrues phares devaient être deux anciens de NHL, qui ont été les meilleurs buteurs des play-offs autrichiens en 2007 (Banham) et 2008 (MacLean) avec Salzbourg. Mais ce sont deux joueurs en pente descendante. Frank Banham livre des prestations correctes, mais était-ce prudent de lui offrir à 35 ans un contrat de deux saisons que l'on dit richement doté ? Le meilleur joueur d'AHL 2006 Don MacLean, pour sa part, n'est absolument pas le centre numéro 1 attendu.

La principale faiblesse du Medvescak résidait cependant en défense. À l'instar du trop offensif Robby Sandrock, elle peinait à tenir sa zone et les connaisseurs des tribunes réclamaient à corps et à cris un pur profil défensif en renfort. Leur vœu a été exaucé avec l'arrivée mi-novembre de Jamie Rivers, vétéran de NHL encore sans contrat en novembre, comme lors de son recrutement par la lanterne rouge suisse Ambri-Piotta il y a un an. Mais plutôt que de licencier et dédommager un joueur cher, les dirigeants ont fait la place à Rivers en enlevant trois attaquants : Marko Lovrencic, le seul vrai Croate senior de l'effectif, et deux joueurs à double nationalité slovène et croate (Jakopic et Rajsar) ont été prêtés dans le club croate de la ligue slovène, à un niveau nettement en dessous.

Une semaine plus tard, John Hecimovic, le deuxième marqueur du championnat, s'est blessé à l'épaule. Une catastrophe pour le Medvescak qui venait de sacrifier sa quatrième ligne : l'équilibre était détraqué et les défenseurs défensifs comme le lourd Ben Gazdic et le lent Mario Brumercik ont dû faire des piges en attaque. Le bon côté de la chose, c'est que les internationaux juniors Dominik Kanaet et Mislav Blagus, qui sont l'avenir du hockey en Croatie, vont enfin avoir du temps de jeu.

On s'inquiète néanmoins sur la suite de la saison. On a l'impression que chaque réparation, au lieu d'améliorer l'équipe, la fragilise un peu plus. Et la mise à la porte de T.J. Guidarelli, meilleur marqueur du club l'an dernier et toujours régulier, pour recruter Greg Day en joker risque fort de s'ajouter à la liste des bouleversements intempestifs peu réfléchis.

Pour la première fois depuis son intégration dans la ligue autrichienne, les Croates sont passés sous la barre des qualifiés en play-offs courant décembre. Ils sont repassés mais leur position ne tient qu'à un fil. Le moment s'y prête mal. Fin janvier, la Zagreb Arena de 15 000 places sera mise en glace pendant dix jours, et quatre matches du Medvescak sont alors au programme. Ce doit être une étape-clé de son développement. Pourra-t-il remplir l'enceinte que les six mille sièges de la Dom Sportova ne trouvent déjà plus preneur en raison des résultats peu engageants ?

 

L'entraîneur Hannu Järvenpää, qui a remplacé Dany Gélinas en novembre dernier à la tête de l'Olimpija, n'a pu empêcher la dernière place mais a vu son contrat prolongé de deux ans. Alors que Ljubljana a une tradition canadienne bien ancrée, l'effectif a subi du coup une vraie mue avec l'arrivée de quatre Finlandais, compatriotes du coach. Il n'en reste finalement que deux (Toni Mustonen et Kevin Kantee)... Après ses passages à Strasbourg et Clermont-Ferrand dans sa jeunesse, Sami Ryhänen a voulu quitter de nouveau les pays nordiques, mais il n'a tenu que deux mois avant d'être écarté pour performances insuffisantes. C'est toujours moins grave que pour Kari Haakana, qui s'est fracturé le fémur au septième match et a dû mettre un terme à sa carrière.

Le remplaçant du très défensif Haakana a été... le très offensif Jeff Tory, pas physique pour deux sous mais doté d'une première passe exceptionnelle et précieux en jeu de puissance. Cela ne résout pas les problèmes en défense des verts, mais s'ils sont si fragiles derrière, c'est aussi parce que leurs deux jeunes gardiens slovènes manquent d'expérience à ce niveau. Malgré les déclarations de confiance de l'entraîneur, on a fait venir un vétéran tchèque, Jan Chabera, qui rassure dans les cages. Il avait déjà un compatriote dans l'équipe avec Petr Šachl, auteur du but décisif dans le titre slovaque de Kosice au printemps dernier.

L'Olimpija est sous-estimé parce qu'il n'a pas de grands noms. Il faut dire que le directeur sportif Matjaz Sekelj n'a plus tout pouvoir sur le recrutement. Une agence de marketing sportif a pris en charge les finances du club et les salaires des joueurs et s'assure que le budget est suffisant avant de signer un contrat.

Le contingent slovène est cependant plus fort que l'an passé. Ziga Pance prend de plus en plus d'importance : il a été prolongé jusqu'en 2013 et a été désigné capitaine à seulement 21 ans après la retraite de Jurij Golicic cet été. De plus, deux internationaux sont rentés à Ljubljana : le défenseur Ziga Pavlin, qui jouait en Italie, et l'attaquant Andrej Hebar, qui faisait partie de l'expédition punitive de Jesenice (voir ci-dessous).

Mais en novembre, Hebar (que Dijon avait failli recruter à l'automne 2009) a de nouveau déraillé. Chargé contre la bande par Kevin Puschnik en plein élan, il s'est vengé d'une charge avec la crosse à la tête et a continué à frapper son adversaire au sol. Verdict de la commission de discipline de la ligue (composée de deux Autrichiens et un Slovène) : suspension pour la saison. Une décision qui a entraîné un débat sur une justice à double vitesse. Aurait-on autant sanctionné un international autrichien, compte tenu des conséquences pour l'équipe nationale ? Même en Autriche, on n'est pas à l'aise pour répondre.

L'Olimpija a donc un vrai handicap : il a perdu un joueur qui valait un point par match, et est dans l'impossibilité de le remplacer (un suspendu compte sur la feuille de match dans le total des points). Les Dragons sont furieux, mais pourraient en sortir renforcés, car ils ont bien l'intention de se qualifier en play-offs quand même.

 

Depuis que six joueurs ont cogné leur entraîneur Mike Posma à la fin du dernier championnat de Slovénie, l'Acroni Jesenice essaie tant bien que mal d'effacer les traces de l'incident. Les six agresseurs ont été mis à la porte, mais Elik et Posma aussi, dont la relation avec l'alcool au volant reste problématique.

Déjà sans argent, Jesenice se trouvait donc aussi sans son entraîneur, sans son meneur de jeu, sans son directeur général (finalement démissionnaire) et avec un effectif sérieusement aminci. Il était donc parti pour jouer plus que jamais le rôle du "gentil club slovène" (contrairement à l'Olimpija et à ses méchants hooligans) qui aurait la gentillesse de se placer gentiment à la dernière place.

Sans faire de bruit, le nouvel entraîneur finlandais Heikki Mälkiä s'est mis au travail et confirme sa réputation de bon pédagogue auprès des jeunes. Alors que personne n'attendait l'Acroni, il pratique un beau hockey et tout le monde aimerait le voir récompensé par des play-offs. La ligne la plus productive n'est pas celle des étrangers, mais le trio Ziga Jeglic - Rok Ticar - Robert Sabolic, trois joueurs de 21 et 22 ans. Jeglic et Ticar avaient déjà été les deux meilleurs marqueurs de la Slovénie lors des derniers Mondiaux de division I où elle a obtenu la remontée à domicile ; ils ont donc devancé au passage les cadres habituels que sont les Rodman, Sivic ou Razingar. Ils incarnent la nouvelle génération, celle est peut-être capable d'installer durablement la Slovénie dans l'élite mondiale.

À Jesenice, on prépare donc l'avenir. Une équipe prometteuse est en construction, et l'infrastructure aussi. Une nouvelle tribune de mille places a été bâtie derrière un but, avec les vestiaires en dessous, et cela donne un meilleur cachet à la patinoire. Il ne reste plus que son vétuste toit "végétalisé" (de l'herbe y pousse naturellement) à remplacer, ce qui doit être fait l'été prochain.

 

La patinoire Gábor Ocskay fait elle aussi peau neuve. Après le remplacement du système de réfrigération l'an passé, la climatisation a été revue avec un système à quatre zones qui doit permettre aux spectateurs d'avoir moins froid. L'an passé, ce sont les visiteurs qui avaient souvent pris froid, puisque l'Alba Volán Székesfehérvár avait été la deuxième meilleure équipe à domicile...

De bons résultats, traduits par une sixième place, qui devaient beaucoup à l'entraîneur finlandais Jarmo Tolvanen. Il avait réussi à installer un système défensif à la nordique, mais il ne s'est pas entendu avec les dirigeants et a quitté le club. Son successeur Ulf Weinstock, ancien international suédois multi-médaillé, s'est mis en tête de rompre avec la tactique de contre d'Alba Volán et de jouer plus offensivement. Cela réussissait peut-être lorsqu'il entraînait le SC Miercurea-Ciuc dans le championnat roumain ou face au club hongrois, mais sûrement pas dans la ligue autrichienne.

Les Hongrois n'ont pas le potentiel pour rivaliser à armes égales avec les meilleures équipes de la ligue, leur effectif étant bien court. Ils n'avaient recruté en attaque que Roger Holéczy, centre canado-hongrois très fort aux engagements mais pas buteur pour deux sous. Leurs meneurs offensifs étaient donc toujours les mêmes, les meilleurs joueurs de Hongrie, toujours efficaces mais plus très jeunes (Krisztian Palkovics, Balazs Ladanyi, Marton Vas). On les imaginait mal porter sur leurs seules épaules un système nécessitant plus d'intensité de patinage et assurer en même temps le repli défensif.

Le nouveau système a échoué, et les gardiens Zoltan Hetenyi et Tommi Satosaari (le jeune Hongrois gagne progressivement en temps de jeu face au vétéran) ont été abandonnés à leur triste sort. Comme c'était presque inévitable, Weinstock a été licencié et remplacé par Kevin Primeau. Celui-ci a eu le droit à un nouveau joueur, le centre canado-suédois Eric Johansson (Leksand), un vrai meneur de jeu pour alimenter les buteurs hongrois. Mais c'est la défense qui devra être travaillée pour qu'Alba Volán retourne en play-offs.

 

Marc Branchu

 

 

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