Keramin Minsk - Rouen (17 janvier 2009)

 

Coupe Continentale, superfinale, deuxième journée.

Rouen est maintenant la seule équipe à pouvoir encore priver Martin de titre, si elle gagne ses deux dernières rencontres. Une perspective hypothétique, surtout pour demain soir, mais avec un match sérieux, le Keramin Minsk n'est pas imprenable, même si le challenge est réel. L'absence de Niskavaara, qui réduit la défense à quatre et s'ajoute à celle de Malette, complique encore la tâche.

Le match commence par une bonne action de Doucet côté gauche et un centre sur lequel le gardien slovaque Matus Kostur est recouvert d'un empilement de joueurs. En sandwich entre trois (très jolis) maillots grenat, Olivier Bouchard bien sûr. Il faut voir cela comme un bon présage, de même que la glissade que se paye Kostur un peu plus tard sur une sortie. Doucet s'offre un breakaway, détourné dans les airs par le gardien - photo de droite.

La pénalité précoce de Lampérier pourrait inquiéter, mais elle est tuée. Et sur la première prison biélorusse, une crosse haute de Glebov, un tir de la bleue de Jean-François David, semble-t-il dévié entre les cercles, finit au fond des filets - photo de gauche (0-1, 07'46").

Le Keramin Minsk essaie d'accentuer la pression et de s'installer en zone offensive, mais les lancers partent n'importe où. Les Dragons, en revanche, impressionnent par la qualité de leurs passes. Les longues relances vers la zone neutre sont excellentes, et même Sopko s'y met. On peut se prendre à rêver en voyant la qualité du hockey rouennais en ce début de partie... et c'est presque logiquement que Marc-André Thinel double la mise en insistant sur son revers au poteau opposé après avoir fait le tour de la cage (0-2, 12'37").

Thinel, encore, déborde sur la droite et centre pour Bouchard qui a foncé à son habitude vers la cage... et s'est fait accrocher par Valentin Ebert. En supériorité, Doucet manque de peu le troisième but, et Thinel, réceptionnant à merveille une longue passe de Glad, rate complètement son lancer. Le jeu de puissance n'est pas encore terminé que Glad prend une pénalité, mais Desrosiers file dans un intervalle et Andryushchenko le fait trébucher. À quatre contre quatre, Rouen commence franchement à souffrir, mais une belle mitaine de Sopko déclenche l'ovation du public.

Seul point noir, l'obstruction sifflée en zone neutre contre Jérémie Romand à neuf secondes de la fin du tiers. Pour le reste, c'est le plus beau tiers-temps réalisé par un club français dans une compétition européenne depuis très longtemps... Les Dragons, n'ayant plus rien à perdre, ont été moins nerveux et plus sûrs de leur jeu qu'hier.

Le Keramin commence donc le deuxième tiers-temps en supériorité numérique, et la meilleure opportunité de ces deux minutes est une déviation à ras glace d'Aleksei Permiakov absolument démarqué, mais il écrase et freine le palet. La dynamique reste cependant biélorusse à cinq contre cinq. Yuri Faïkov oublie Khafizov et se laisse enfermer sur une situation de 2 contre 1, mais dans la continuité de l'action, il parvient à contourner le gardien avec l'assistance de Sergei Drozd qui a déboussolé la défense (1-2, 23'11"). Ce Drozd, qui a signé avant-hier un contrat de quatre ans pour jouer en KHL avec le Dynamo de Minsk, n'a que 18 ans mais est déjà redoutable. Les juniors français en avaient déjà fait les frais au dernier Mondial de division 1 à Herisau. Sur l'action suivante, c'est encore Drozd qui met le feu par une passe en retrait.

Les pénalités trahissent les difficultés que Rouen rencontre désormais. Jean-François David commet d'abord un cinglage, et Ramon Sopko se fait surprendre par un lancer à ras glace de l'international estonien Toivo Suursoo (2-2, 26'49"). Le même David est ensuite sanctionné pour faire trébucher, Sopko lâche un court rebond sur un tir de Glebov, et Evgeni Kurilin a tout le temps de se retourner pour glisser le palet dans l'angle - photo de droite (3-2, 29'01"). Un tir de la bleue de Zhydkikh touche même le poteau derrière Sopko.

La riposte rouennaise vient d'un rebond que Loïc Lampérier vient chercher en pivot, mais Kostur bouche mieux l'angle que Sopko sur le but précédent. Jérémie Romand reçoit ensuite un bon palet en 2 contre 1, mais Pavel Chernook tend la crosse et vient le lui enlever de la palette. Second 2 contre 1 avec les mêmes protagonistes, mais cette fois la passe de Desrosiers est contrée au départ.

Il faut attendre plus de quinze minutes pour voir la première pénalité biélorusse de la période, une obstruction de Valentin Ebert. Elle donne deux énormes occasions à Rouen. Tout d'abord, c'est David qui fait une offrande à Thinel sur une passe croisée au second poteau, mais l'attaquant canadien tire juste au-dessus de la lucarne. Ensuite, Blagoï rate l'interception sur une longue passe à la bleue, et le palet est donc récupéré dans son dos par Mikko Peltola pour une échappée qui bute encore sur Kostur - photo de gauche. Les regrets sont d'autant plus vifs que Minsk enfonce le clou une fois au complet. Avant que Rouen ait pu comprendre ce qui se passait, Aleksandr Zhidkikh, recruté il y a un peu plus de deux semaines par le Keramin reprend une superbe passe de derrière la cage de la petite merveille Sergei Drozd (4-2, 38'08").

Ebert reprend une pénalité au début du troisième tiers-temps, le lancer de Jean-François David dans les jambières du gardien cherche clairement un rebond, et celui-ci est pris par Marc-André Thinel laissé seul dans le slot (4-3, 42'15"). Une minute tard, un Biélorusse rate une douteuse interception de la jambe à la ligne bleue rouennaise, et avec sa technique plus quelques contres favorables, Thinel passe en revue tout le monde sur son aile droite. Il remet en retrait à Mikko Peltola qui tire dans la lucarne gauche (4-4, 43'34").

Le festival continue avec Olivier Bouchard qui se présente seul dans l'axe et bute sur Kostur en grand écart. Il tente de reprendre le palet dans le petit intervalle qui reste, sans autre succès que la cage qui sort de ses gonds. La pression rouennaise ne se dément pas. Doucet contre le palet dans le coin, Thinel récupère pour un tir en angle détourné dans les bandes, Virolainen ferme la zone et renvoie le palet vers la cage, où Bouchard est évidemment présent pour un tir en pivot. C'est finalement Thinel qui prend le rebond en angle fermé (4-5, 47'07").

Piqué dans son orgueil, le Keramin se met même à donner des mises en échec, ce qu'il avait oublié de faire jusque là. Dmitri Shvedov charge proprement Romand au moment où celui-ci reçoit un bon palet à la ligne bleue défensive. Une action très chaude devant le but rouennais aboutit à une pénalité de Carlsson, mais elle est tuée. Nouvelle frayeur quand Evgeni Baukin reprend une passe de derrière la cage à deux-trois mètres, mais Ramon Sopko réalise un magistral arrêt de la mitaine qui lui vaut d'avoir son nom scandé par toute l'île Lacroix.

Glebov sort le visage en sang, mais aucune pénalité n'est appelée. À trois minutes et de la fin, en revanche, Virolainen est sanctionné pour un retenir derrière sa cage. Glad écarte un rebond très dangereux et le temps file. Après un temps mort rouennais, le Keramin est installé mais le gant de Sopko cueille un nouveau palet. C'est au tour de Minsk de demander son temps mort. La première ligne reste confinée dans sa zone par six Biélorusses, jusqu'à ce que Thinel contre le palet. Il est accroché en zone neutre et provoque une pénalité différée mais arrive à pousser le palet vers la cage en déséquilibre. Éric Doucet a suivi l'action et n'a plus qu'à pousser le palet au fond.

Minsk a mis beaucoup moins d'impact physique que contre Martin, peut-être en raisons de consignes de discipline. Cela a été une erreur au premier tiers-temps, quand Rouen a eu le temps de soigner ses passes et de développer son jeu. Cette retenue a peut-être été déterminante pour renverser le match, car la balance de pénalités favorable a été une des clés de la remontée biélorusse au deuxième tiers. Mais au final, c'est bien Rouen qui s'est senti pousser des ailes et a pris confiance.

L'alliance du talent d'un excellent Marc-André Thinel et de l'intensité physique d'un Olivier Bouchard qui va toujours, toujours, toujours à la cage, ce sont les deux visages complémentaires de Rouen ce soir. Leurs contributions respectives ont été énormes, dans deux styles bien différents. Malgré les défauts défensifs, Rouen a été porté par une énergie insufflée notamment par Bouchard, une énergie capable de renverser les montagnes.

La montagne suivante est une falaise à pic qui s'appelle Martin, à escalader par la face nord. Rouen reste en effet en lice pour le titre puisqu'une victoire - certesimprobable - au dernier match (si Bolzano ne gagne pas, sinon il faudrait trois buts d'écart) assurerait une première place qui relèverait de l'inouï.

Désignés joueurs du match : Sergei Drozd pour Minsk et Marc-André Thinel pour Rouen.

Compte-rendu signé Marc Branchu (photos Thierry Frechon)

 

Commentaires d'après-match

Alain Vogin (entraîneur de Rouen) : "Tout un spectacle. On a pris les devants à 2-0, on les a un peu surpris. En deuxième période, ils ont appuyé sur l'accélérateur. Malgré ça, on a eu des occasions de marquer. J'ai préparé mentalement la troisième période avec ça, en disant qu'on a eu 9 minutes difficiles mais 31 minutes très bonnes. La troisième période a été incroyable, on va s'en souvenir très longtemps à Rouen. Juste avant le début de match, on a appris l'indisponibilité Niskavaara. Custosse a fait quelques présences, et les quatre défenseurs restants ont eu un temps de glace énorme. Ils ne se sont pas faits couper bêtement le palet en zone neutre comme hier. Les attaquants les ont aidés, et Ramon [Sopko] a sorti des arrêts incroyables sur la fin. Martin a déjà célébré comme si la Coupe Continentale était déjà dans sa poche. Pas de chance, il devra patienter encore 24 heures. Quand les matches s'enchaînent, les nuits sont courtes. La soirée n'est pas terminée pour moi, j'ai beaucoup de vidéo à préparer pour le match de demain."

Marc-André Thinel (entraîneur de Rouen) : "Le premier tiers était notre meilleur depuis le début de la saison. Il y avait le silence dans le vestiaire après le deuxième tiers, nous n'étions pas contents de nous. Nous étions fâchés mais le troisième but nous a redonnés des jambes, et ensuite, ça n'a pas arrêté. Avec une équipe rapide comme celle-là, quand elle tournait le palet dans le bas de la zone défensive, elle était difficile à contrôler. Les défenseurs ont fait du très bon travail à quatre, avec Custosse qui avait peu joué dernièrement."

 

Keramin Minsk - Rouen 4-6 (0-2, 4-0, 0-4)

Samedi 17 janvier 2009 à 20h00 au centre sportif du Docteur Duchesne. 2747 spectateurs.

Arbitrage d'Antonin Jerabek (TCH) et Tuomo Sorakangas (FIN) assistés de  XXX (FRA) et Eric de Witte (HOL).

Pénalités : Minsk 10' (6', 2', 2'), Rouen 14' (6', 4', 4').

Tirs : Minsk 42 (13, 14, 15), Rouen 28 (10, 5, 13).

Évolution du score :

1-0 à 07'46" : David assisté de Desrosiers et Peltola (sup. num.)

2-0 à 12'37" : Thinel assisté de Bouchard

2-1 à 23'11" : Faïkov assisté de Drozd

2-2 à 26'49" : Suursoo assisté d'Andryushchenko (sup. num.)

2-3 à 29'01" : Kurilin assisté de Glebov (sup. num.)

2-4 à 38'08" : Zhidkikh assisté de Drozd

3-4 à 42'15" : Thinel assisté de David (sup. num.)

4-4 à 43'34" : Peltola assisté de Thinel

4-5 à 47'07" : Thinel assisté de Bouchard

4-6 à 59'56" : Doucet assisté de Thinel (cage vide)

 

Keramin Minsk

Gardien : Dmitri Karpikov.

Défenseurs : Igor Shvedov - Pavel Chernook ; Oleg Blagoï - Andrei Glebov ; Vadim Sushko - Valentin Ebert ; Ilya Shinkevich - Aleksei Plotnikov (A).

Attaquants : Sergei Drozd - Evgeni Kovryshin - Igor Andryushchenko (C) ; Aleksandr Zhidkikh - Aleksei Permyakov (A) - Toivo Suursoo ; Aleksei Strakhov - Evgeni Baukin - Artur Tereshko ; Yuri Faikov - Evgeni Kurilin - Irek Khafizov.

Remplaçant : Matus Kostur (G). Absent : Dmitri Igoshin (fracture de la clavicule).

Rouen

Gardien : Ramon Sopko.

Défenseurs : Petri Virolainen - Jarkko Glad ; Daniel Carlsson (A) - Jean-François David ; Cédric Custosse [à 40'].

Attaquants : Olivier Bouchard - Éric Doucet (C) - Marc-André Thinel (A) ; Julien Desrosiers - Mikko Peltola - Jérémie Romand ; Lionel Tarantino - Loïc Lampérier - Sébastien Strozynski puis Édouard Dufournet à 40'.

Remplaçants : Ronan Quemener (G), Peter Bourgaut. Absents : Carl Mallette (déchirure abdominale), Jaako Niskavaara (infection ayant atteint l'oreille interne, vertiges).

 

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