Épinal - Strasbourg (4 octobre 2008)

 

Ligue Magnus - cinquième journée.

Le casse du siècle

Passée la piètre prestation de Neuilly, l'IC Épinal se doit retrouver ses valeurs. Entre un recrutement bâclé pour certains, laborieux pour d'autres. Mais peut-être finalisé par l'arrivée d'Alexander Sundqvist, le Nordique succédant à l'éphémère Marek Grill. Et même s'il y a de quoi être échaudé par certains précédents, ce jeune routinier arrive d'Allsvenskan. Certains y voient une petite garantie vu la réputation qu'a l'antichambre de l'Elitserien suédoise.

Mais d'ici là, l'ICE doit encore racler les fonds de tiroir pour combler les vidés béants que laissent les blessés Michal Petrak et Ilpo Salmivirta dans un contingent très loin de sa configuration optimale. À croire qu'on a jeté un sort à Shawn Allard. Ou que la réalité le rattrape, au point de renoncer à ses activités sur glace pour mieux se consacrer au coaching. Et si ses choix, du moins cette saison, n'ont jamais été vraiment judicieux, celui-là agit concrètement pour le bien de l'équipe. Un moindre mal si l'on tient compte tenu des incertitudes relatives aux blessures et aux divers passages à vides défensifs.

Enfermée dans un "tout ou rien" devenu chronique, l'ICE doit toutefois négocier un derby déjà crucial face à Strasbourg, un concurrent direct. Le Finlandais Esa Hämäläinen, préservé mardi dans la débâcle amiénoise en Coupe de la Ligue (0-5), retrouve donc sa place au cœur de la défense. Là où précisément, trône Vladimir Hiadlovsky, un facteur indéniable des succès bas-rhinois. Et s'ils revendiquent, comme leurs hôtes, d'avoir déjà gagné à Villard-de-Lans, les Alsaciens partent avec un handicap psychologique dû au camouflet infligés par les Dauphins voilà deux semaines (2-5). C'était en Coupe de la Ligue, un fil rouge assurément pas prioritaire pour les hommes de Daniel Bourdages.

C'était surtout en d'autres circonstances, l'alignement n'étant pas décimé de la sorte lors de ce premier voyage à l'Iceberg. Mais il reste toutefois une bonne carte dans les manches spinaliennes. Un petit "Plch" nommé Jan qui, d'entrée, fait parler sa rapidité d'exécution pour créer une première pénalité (0'21"). De quoi confirmer les excellentes dispositions collectives d'un powerplay ne payant pas encore les absences conjuguées de Petrak et Salmivirta. Pour preuve, le danger est durablement installé devant Hiadlovsky et Guillaume Chassard embrasse le petit filet en dégainant du rond d'engagement, sur un face-off gratté par Caicco (1-0 à 01'10").

Affamés...

Une entame pour le moins inattendue, il faut dire, et digne du renouveau espéré par Shawn Allard avant la rencontre, moyennant un investissement de tous les instants. L'intensité de la paire Simko-Plch déteint donc sur un groupe surmotivé. Trop, peut-être, pour des Alsaciens déjà dans les cordes. Jan Simko, même transcendé, reste toutefois toujours aussi médiocre dans la finition. Après avoir enrhumé Élie Marcos, l'ex-Tourangeau ne redresse cette fois pas suffisamment sa course, s'empalant finalement sur un Vladimir Hiadlovsky venu l'aborder (04'05").

Contraints à subir cette furia locale, les Strasbourgeois sont emportés par un rythme élevé, où chacun trouve son compte côté spinalien. Même un Anthony Pernot habitué à faire banquette mais mordant à pleines dents chacune de ses présences. Déjà culotté face aux Bisons, le petit numéro sept récidive et manque d'obtenir une récompense inespérée sur un breakaway "offert" par Maxime Catelin, mais facilement enrayé par Vladimir Hiadlovsky (07'25"). La fraîcheur, qu'il partage notamment avec Tarik Chipaux, est donc pour beaucoup dans cette entame réussie.

À grands coups de forechecks et de patinage, les locaux font mieux que se défendre. Laissant une marge de manœuvre assez restreinte à une Étoile noire repoussée en zone neutre mais finissant malgré tout par retrouver ses esprits. Ou du moins un déploiement offensif certes inconstant, mais basé sur l'activité d'une paire Riendeau-Cayer à l'affût des bons coups. Nécessitant au besoin quelques interventions d'un Stanislav Petrik retrouvant son poste de titulaire après l'intérim d'Eero Väre.

Si l'ICE étonne de part son implication de tous les instants, elle n'a pas eu encore à défier le jeu de puissance alsacien. Une double sentence dont écope ce diable de Tarik Chipaux, pour un bâton haut (suivi d'un saignement) sur un Juho Lehtisalo toujours très vif, envoie ainsi Riendeau & co au charbon (16'56"). Sans qu'ils ne déjouent une gnac locale leur causant assurément bien des soucis !

Le temps d'échafauder un plan B aux vestiaires, Strasbourg revient au jeu fort d'une détermination nouvelle. Et après avoir raté la cible sur une bonne séquence, l'Étoile noire s'en remet à la complémentarité de son duo Cayer-Riendeau pour égaliser. Servi ligne de fond par Dirnbach, Cayer lève les yeux pour trouver un Riendeau coupant dans l'enclave et d'un petit revers sous la botte de Petrik (1-1 à 23'48").

S'ils restent soumis aux poussées d'adrénaline vosgiennes, les visiteurs concrétisent là l'influence croissante d'une attaque exploitant mieux les espaces. Comptant au besoin sur un Hiadlovsky solide, et même chanceux de voir un des siens dégager du patin sa ligne un contre conjointement mené par les "deux Guillaume" du coin (24'58").

Épinal, de son côté, peut également miser sur la sûreté d'un Petrik assurément pas étranger à l'équilibre observé des forces en présence. Pavol Resetka, frustré par son compatriote sur une montée spectaculaire de Milan Dirnbach, peut en témoigner (37'41").

Si l'engagement de Ryan Caicco ne compense pas totalement les compétences des absents du soir, son travail de sape est forcément appréciable dans la très bonne partition des Dauphins. Une solidarité parfaite dans tous les domaines, où une rigueur défensive retrouvée se mêle à une belle audace offensive. À l'image d'un Benoît Quessandier au jeu décidément très propre et maîtrisant parfaitement la polyvalence de son nouveau rôle de pilier défensif.

Devant un tel contradicteur, pas avare de pressings, Strasbourg n'a donc pas la vie facile. À plus forte raison lorsque son jeu de puissance tombe dans les stéréotypes, dénué d'autres alternatives que les slaps d'Hämäläinen et l'attentisme du sniper Riendeau à la pointe. Il en va tout autrement pour un Jan Simko enfin décidé à bonifier son jeu en exploitant au maximum son explosivité. En développant son sens du collectif, le Slovaque devient le meilleur allié de Jan Plch pour faire vivre le danger. Stéphane Gervais, le troisième larron, est quant à lui souvent décisif en supériorité numérique. Et lorsque le disque ressort en pointe, le lancer frappé du Canadien reste redoutable. Simko, lui, l'a bien compris et délivre Poissompré, en embuscade pour un rebond gagnant (2-1 à 49'05").

Malgré les efforts consentis dans leur couverture défensive, les Vosgiens se font immédiatement surprendre par la vista de Cayer, lequel reprend instantanément une mise au jeu glanée par Marcos (2-2 à 52'11'). Mais s'ils doivent puiser tout au fond de leurs ressources, les locaux restent déterminés à ne rien lâcher. Un moral d'acier contrant l'essentiel des menaces, à l'image de ce repli d'un Peter Slovak taille-patron, lequel coupe l'herbe sous le pied d'un David Cayer filant dans l'intervalle (54'28").

Un faux rythme tenace s'installe alors jusqu'à la prolongation, inévitable vu l'impuissance de chacun à créer l'ultime différence. Et vu les circonstances, ce point empoché par ces Dauphins décimés est une victoire en soi. Même si un petit bonus ne serait pas de refus...

...puis désabusés !

Malgré la vivacité de Yannick Riendeau et un contrôle global du palet, Strasbourg finit par céder en premier. Peter Slovak, d'habitude dévolu aux tâches obscures, monte aux avant-postes pour déjouer Vladimir Hiadlovsky avec panache, se décalant au rond d'engagement pour mieux feinter puis embarquer l'homme masqué loin de sa cage pour ainsi s'ouvrir le filet (65'33"). Une réalisation à priori incontestable, signifiant la fin des débats et laissant Poissompré tomber dans l'allégresse... avant qu'une réclamation ne soit portée, arguant de la présence de Tarik Chipaux dans la zone. De quoi pousser le trio zébré à revoir son jugement. Dans l'incompréhension générale.

La frustration ainsi générée est ensuite accentuée par un siège stérile dû à la pénalité compensatoire attribuée par Monsieur Hauchart à Maillot. Avant que l'infortuné Fabien Leroy, contrôlant mal une passe en retrait à sa bleue, ne se fasse dépouiller par l'opportuniste David Cayer. L'infatigable ailier québécois n'en demandait pas tant et allume à mi-distance l'angle droit d'un Petrik étonnement fébrile (2-3 à 68'22").

Mais là n'est pas l'essentiel, Épinal était proprement floué d'un succès légitime. Une pilule impossible à avaler pour un Shawn Allard remonté à bloc. S'emportant au point de perdre son sang-froid, attisant une foule devenue hostile envers le trio arbitral. Sous une retentissante bronca, les premières canettes fusent sur la glace. Certaines atteignent des Strasbourgeois écourtant le protocole pour filer fissa vers les vestiaires. Pour une fin en eau de boudin et qui ne sera pas sans conséquences...

Compte-rendu signé Jérémie Dubief

 

Commentaires d'après-match (dans L'Alsace)

Daniel Bourdages (entraîneur de Strasbourg) : "Nous avons des brèches à colmater très vite. Vladimir Hiadlovsky a encore réalisé des arrêts fabuleux, mais les défenseurs - Hugues Cruchandeau, Pavol Resetka et Milan Dirnbach, que je n'avais pas vu aussi bon depuis longtemps - ont eux aussi été héroïques. La réalité, c'est que nous nous battons comme des malades. C'est comme traverser le désert avec un verre d'eau. Tu peux résister si tu as une bonne constitution, mais l'épuisement finit toujours par te rattraper. En ce moment, nous courons ce risque. J'espère que nos bons résultats ne vont pas conduire mes dirigeants au statu quo."

 

Épinal - Strasbourg 2-3 après prolongation (1-0, 0-1, 1-1, 0-1)

Samedi 4 octobre 2008 à 20h15 à la patinoire de Poissompré. 806 spectateurs.

Arbitrage d'Alexandre Hauchart assisté de Jérémy Rauline et Éric Bouguin.

Pénalités : Épinal 12' (4', 4', 4', 0') ; Strasbourg 16' (4', 6', 4', 2').

Tirs : Épinal 40 (9, 10, 13, 8) ; Strasbourg 36 (9, 10, 12, 5).

Évolution du score :

1-0 à 01'17" : Chassard assisté de Caicco (sup. num.)

1-1 à 23'48" : Riendeau assisté de Cayer et Dirnbach

2-1 à 49'06" : Simko assisté de Gervais et Plch (sup. num.)

2-2 à 52'11" : Cayer assisté de Marcos

2-3 à 68'26" : Cayer

 

Épinal

Gardien : Stanislav Petrik.

Défenseurs : Peter Slovak - Stéphane Gervais (A) ; Benoît Quessandier - Fabien Leroy ; Borislav Ilic.

Attaquants : Jan Simko - Ryan Caicco - Jan Plch (C) ; Guillaume Papelier - Tarik Chipaux - Guillaume Chassard (A) ; Lionel Simon - Erwan Agostini - Anthony Pernot.

Remplaçants : Eero Väre (G), Nathan Ganz. Absents: Michal Petrak (genou), Ilpo Salmivirta (cuisse), Shawn Allard (coach), John Paulson (finalement de retour pour motifs économiques ?).

Strasbourg

Gardien : Vladimir Hiadlovsky.

Défenseurs : Milan Dirnbach - Pavol Resetka ; Hugues Cruchandeau - Esa Hämäläinen ; Julien Burgert - Michal Cesnek.

Attaquants : Élie Marcos - Yannick Riendeau (A) - David Cayer ; Juho Lehtisalo - Pierre-Antoine Devin - Juha Silvander ; Romain Bonnefond - Maxime Catelin (C) - Yannick Maillot (A).

Remplaçants : Gilles Beck (G), Timothée Franck. Absent : Benoît Martin (entorse de la cheville gauche).

 

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