Russie - Suisse (14 mai 2008)

 

Quart de finale des championnats du monde 2008.

La Suisse se saborde

Les Russes invaincus abordent le moment toujours dangereux des quarts de finale, mais ils pensent avoir hérité du bon numéro avec les Suisses, pour qui ce tour reste un mur insurmontable. Les deux équipes se sont rencontrées avant-hier et la comparaison est claire. Si la Russie joue son meilleur hockey, il sera bien difficile de l'arrêter. Mais la Suisse veut se servir de son bon dernier tiers-temps pour y croire. Elle veut bousculer son adversaire de cette façon, mais en comptant sur son système défensif pour tenir plus longtemps.

Le problème, c'est que la ligne des Washington Capitals passe à l'attaque dès son entrée sur la glace. Aleksandr Semin entre en zone sur la gauche, freine et prend un lancer, gagnant grâce à l'écran d'Aleksandr Ovechkin, qui s'est imposé physiquement, de dos, face à Bezina devant la cage.

C'est ensuite Maksim Afinogenov qui fait admirer sa technique et sa rapidité. Il part de la zone neutre, prend de la vitesse et contourne par l'extérieur Beat Forster qui est contraint de le faire trébucher au moment où il repique devant la cage. La pénalité différée est signalée, le joueur russe est au sol et le palet est libre dans la zone du gardien. En voulant le donner à son gardien, le jeune défenseur Rafael Diaz le pousse de la main dans sa propre cage !

Avec le retour du capitaine Morozov dans l'effectif, la ligne de Kazan fait son retour sur la glace, toujours uniquement en supériorité numérique. Comme le juge de ligne renvoie Zinoviev du point d'engagement, c'est son ailier Zaripov qui doit se présenter. La mise au jeu est alors logiquement gagnée par la Suisse, et Philippe Furrer n'a plus qu'à dégager le palet par les bandes derrière sa cage. Au lieu de ça, il envoie... un lancer rasant en angle dans les filets de Martin Gerber. Trois palets cadrés (dont un seul envoyé par un Russe...), trois buts. Un début de match cauchemardesque pour le gardien Gerber, revenu deux fois au banc pour des problèmes d'affûtage.

Pour relancer la Nati, il y a peut-être le duo romand, entraîné par Slava Bykov il y a quelques années à Fribourg-Gottéron et qui participent à ses camps pour les enfants. Sur un centre de la gauche de Thibaut Monnet, Julien Sprunger est accroché par Kalinin. Mais la supériorité ne donnera rien, sinon une pénalité en zone offensive de ce même Sprunger. Le jeu de puissance des Russes livre une prestation médiocre, il faut dire qu'ils ont un peu arrêté de patiner en cette fin de tiers. Gerber doit tout de même arrêter une reprise à bout portant d'Ovechkin, qui a pris le meilleur sur Forster dans le slot, après une passe de derrière la cage de Fedorov.

Dès le début de la deuxième période, une relance de Denis Grebeshkov envoie Sergei Fedorov entrer en zone seul sur la gauche. Son lancer puissant va droit dans la lucarne, laissant Martin Gerber sans réaction. Les défenseurs suisses sont au supplice. L'accélération d'Afinogenov laisse Bezina sur place. Ovechkin réalise un exploit technique - freinage puis pivot sur son revers - pour désorienter Diaz. Seul Raffaele Sannitz parvient timidement à répliquer avec un contre individuel.

Les Russes sont en démonstration collective. Une magnifique déviation de Mozyakin - jugé très décevant par Bykov avant ce match - prolonge le palet vers Kalinin, qui cherche Sushinsky au second poteau, mais celui-ci ne peut reprendre. C'est finalement sur une action plus directe, avec des lancers répétés à la cage, qu'ils creusent le score. Le tir en pivot de Zaripov est contré au départ par Seger, mais Maksim Afinogenov envoie tout de suite le palet au fond sur le rebond (5-0). Un but qui marque la sortie de Martin Gerber et la rentrée du second gardien Jonas Hiller. Celui-ci s'incline face à Aleksandr Semin, laissé libre (Forster a lâché son marquage) pour prendre le rebond d'un tir de Kovalchuk juste devant le gardien. Les arbitres refusent cependant le but en annonçant que le jeu était arrêté.

La meilleure occasion suisse est pour Andres Ambühl qui s'échappe en infériorité numérique. Evgeni Nabokov se couche et fait l'arrêt d'un réflexe de la jambière. Après cette parade spectaculaire, les supporters russes scandent le nom de "Na-bo-kov". Le sort s'acharne sur les Suisses... Le tir de la bleue de Vauclair atteint en effet Sprunger au visage devant la cage. Le Fribourgeois doit sortir, blessé, justement le jour où Krueger n'alignait que douze attaquants pour huit défenseurs. Ce deuxième tiers-temps s'achève par un nouveau contre fulgurant : Konstantin Korneïev récupère le palet au rebond après un tir de Bärtschi et l'envoie aussitôt à Aleksandr Ovechkin qui attend tranquillement en zone neutre. La star gagne son face-à-face avec Hiller, entre les jambières (6-0).

Le principal évènement de la troisième période est la méconduite pour le match d'Ilya Kovalchuk, pour une charge sur Julien Vauclair qui ne le voyait pas arriver. Le défenseur suisse reste au sol alors que ses coéquipiers ont le palet, et l'arbitre finit par arrêter le jeu même s'il avait différé la pénalité. Vauclair se relève, sonné, et se dirige droit vers le vestiaire. L'attaquant russe, qui a toujours zéro but au compteur, est expulsé pour la seconde fois du tournoi. Il sera donc suspendu pour la demi-finale.

Ce quart de finale a viré à la déroute pour la Suisse, dont le système défensif en zone neutre a volé en éclats sous l'effet des transitions fulgurantes de l'équipe russe. La défense helvète a aussi coulé dans sa propre zone. Furrer et Diaz, les deux jeunes arrières intégrés par Krueger, ont chacun marqué contre leur camp. Les plus anciens comme Bezina et Forster ont été souvent battus individuellement. La volonté affichée de neutraliser Ovechkin a échoué, tant il a pu faire ce qu'il a voulu. Durant les premières années de l'ère Krueger, les victoires sur la Russie avaient été les plus retentissantes, mais aujourd'hui, la Nati est loin du compte face à un adversaire aussi talentueux.

Désignés joueurs du match : Evgeni Nabokov pour la Russie et Raffaele Sannitz pour la Suisse.

Désignés trois meilleurs suisses du tournoi : Martin Gerber, Beat Forster, Andres Ambühl.

Compte-rendu signé Marc Branchu

 

Commentaires d'après-match

Ralph Krueger (entraîneur de la Suisse) : "Chacun sait que nous devions tenir le score longtemps pour qu'il puisse y avoir un match, et ce n'est pas arrivé. Une folle série de circonstances nous a mis dans un trou duquel nous n'avons pas pu sortir. [...] Kovalchuk avait pris une charge dure et correcte d'un de nos joueurs [NDLR : Sannitz] juste avant l'incident. Vauclair devra passer des examens. On craint une blessure... quelque part dans le bas du corps."

Vyacheslav Bykov (entraîneur de la Russie) : "Il faut enquêter sur la première pénalité de Kovalchuk. Il n'aurait pas dû être expulsé contre la Suède car il n'avait pas jeté les gants. Si Murray, qui a chargé un joueur à la tête, n'a qu'un match de suspension, alors que le joueur qui a reçu l'impact [Morozov] n'est pas encore revenu à son meilleur, il y a matière à réflexion. Concernant Kovalchuk, Vauclair l'a clairement reçu dans la poitrine. En plus, ce n'est pas à la tête que Vauclair est blessé. Nous essayons de jouer physiquement, mais en aucun cas nous ne cherchons à blesser les adversaires."

 

Russie - Suisse 6-0 (3-0, 3-0, 0-0)

Mercredi 14 mai 2008 à 19h15 au Colisée Pepsi de Québec. 12096 spectateurs.

Arbitrage de Peter Orszag (SVK) et Guy Pellerin (CAN) assistés de Peter Feola (USA) et Lars Schröter (ALL).

Pénalités : Russie 29' (2', 0', 2'+5'+20'), Suisse 14' (6', 2', 6').

Tirs : Russie 30 (8, 10, 12), Suisse 22 (8, 9, 5).

Évolution du score :

1-0 à 01'14" : Semin assisté de Grebeshkov et Fedorov

2-0 à 02'18" : Afinogenov assisté de Zaripov et Tereshchenko

3-0 à 06'23" : Zaripov (sup. num.)

4-0 à 21'22" : Fedorov assisté de Grebeshkov et Korneev

5-0 à 26'37" : Afinogenov assisté de Zaripov et Tereshchenko

6-0 à 38'07" : Ovechkin assisté de Korneïev et Nabokov

 

Russie

Gardien : Evgeni Nabokov.

Défenseurs : Andrei Markov - Ilya Nikulin ; Denis Grebeshkov - Konstantin Korneev ; Fedor Tyutin - Vitali Proshkin ; Dimitri Kalinin - Daniil Markov.

Attaquants : Ilya Kovalchuk - Sergei Zinoviev - Aleksei Morozov (C) ; Aleksandr Ovechkin - Sergei Fedorov (A) - Aleksandr Semin ; Sergei Mozyakin - Konstantin Gorovikov - Maksim Sushinsky (A) ; Danis Zaripov - Aleksei Tereshchenko - Maxim Afinogenov.

Remplaçant : Mikhaïl Biryukov (G). Absents : Aleksandr Eremenko (genou), Aleksandr Radulov, Dmitri Vorobiev (surnuméraires).

Suisse

Gardien : Martin Gerber puis Jonas Hiller à 26'50".

Défenseurs : Goran Bezina - Severin Blindenbacher ; Julien Vauclair - Beat Gerber ; Mathias Seger - Philippe Furrer ; Raphael Diaz - Beat Forster.

Attaquants : Marc Reichert - Sandy Jeannin (C) - Thomas Déruns ; Julien Sprunger - Thibaut Monnet - Raffaele Sannitz ; Paul DiPietro (A) - Thomas Ziegler - Thierry Paterlini ; Romano Lemm - Andres Ambühl (A) - Patrik Bärtschi.

Absents : Roman Wick (commotion cérébrale), Petter Guggisberg (surnuméraire).

 

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