Épinal - Dijon (1er mars 2008)

 

Premier tour des play-offs de Ligue Magnus, match aller.

Sans Petrik, point de salut ?

C'est reparti pour un tour ! Entre vieilles connaissances, nulle série de ce premier tour de playoffs n'aura cette saveur si particulière d'une bonne vieille rivalité "régionale". Placée, de surcroît, sous le signe de la revanche. Celle des Dauphins d'Épinal, coupables d'avoir par deux fois laissé filer la victoire face à des Ducs parfois inconstants mais finalement tenants de l'avantage de la glace pour cette série.

Il faut dire que le CPHD a surtout basé ses succès sur une force de caractère lui ayant permis de multiplier les retournements de situations. Pas de quoi cependant satisfaire pleinement Daniel Maric, sorti particulièrement déçu d'une ultime victoire étriquée sur le Mont-Blanc (3-2). De quoi inspirer une pique cinglante à l'égard de ses joueurs, ponctuellement coupables de ne pas développer suffisamment de jeu à son goût...

Mais, à défaut de créativité, ses troupes montrèrent en revanche, tout au long de la phase régulière, un réel instinct de survie. Une ténacité compensant, en partie, la faiblesse de rotations fréquemment amoindries par les méformes, les blessures et même les suspensions. Ainsi cette fois-ci, après Miro Kristin et Stephen Dugas en janvier, c'est un autre cadre de l'escouade, Michal Dian, qui ne sera pas en tenue ce soir. Le buteur slovaque, expulsé mardi, purge un match ferme assurément très mal venu. Le retour du polyvalent Pavol Milec est donc un moindre mal compte tenu du forfait, définitif celui-là, d'un Alexandre Lefebvre diminué par une mononucléose. Du petit contingent d'ex-espoirs rouennais recruté à l'été subsiste désormais le seul Yvan Fontana.

Shawn Allard, très confiant avant la rencontre, insistait lourdement (et donc fort logiquement les antécédents de ses boys) sur la nécessité des siens à être constants. Pour éviter de fâcheux passages à vides, qui furent par deux fois rédhibitoires en saison régulière. Pour autant la forme étincelante des cadres spinaliens semblait appuyer l'assurance totale du natif de Mont-Tremblant. Concernant le potentiel, mais aussi la densité de ses troupes qu'il jugeait tous deux supérieurs à ceux de son contradicteur. "Dijon, pour moi, c'est le meilleur choix". À ses yeux il semblait certain d'avoir "un effectif pour aller au bout... Mais voilà, le Canadien allait très vite devoir réviser son jugement. Stanislav Petrik, en état de grâce durant tout le mois de février, s'est blessé au genou hier à l'entraînement. Un coup dur, et presque fatal, porté avant même le coup d'envoi puisque sa doublure Franck Constantin n'a plus joué depuis de longues, très longues semaines...

Un seul être vous manque...

Une remise en question s'impose donc, et sonne comme une évidence vu les largesses spinaliennes de ce début de partie. Les Ducs, flairant le bon coup, n'hésitent pas à forechecker pour semer le trouble, se repliant efficacement au besoin pour agir en contres. Une stratégie qui, couplée à la méforme de Constantin, porte rapidement ses fruits. Lancé dans l'intervalle par Pavol Milec, Miroslav Fišer s'en va facilement trouver le petit filet d'un gardien local livré à lui-même (0-1 à 01'25"). Première démonstration d'un certain opportuniste offensif dijonnais et, déjà, premier mauvais but accordé par Franck Constantin !

Pas de doutes, les Ducs semblent bien lancés dans une partie où planera l'ombre de Petrik. Déstabilisés et gênés par le mouvement adverse, les Spinaliens, étonnement amorphes, subissent les assauts énergiques d'un Miroslav Kristin plus précieux que jamais aux côtés d'un Anthony Guttig sacrément volontaire dans les deux sens. Un abattage constant tout au long d'une soirée que Kristin marquera de son empreinte.

On est donc très loin des attentes initiales d'un Shawn Allard pouvant compter, en (déjà !) dernier recours, sur la force de persuasion d'un Jan Plch pesant lourdement sur la défense ducale. Les Ducs, en difficulté pour contenir le Slovaque, tombent alors dans l'indiscipline. Et ce n'est qu'un début !

D'un faire trébucher reproché à Andy Mrena (04'28") à l'expulsion d'Aymeric Gillet pour un coup de bâton apparemment asséné à Jan Plch (14'12"), les Ducs passeront pas loin d'un petit quart d'heure en désavantage numérique. Par chance leur box-play, exemple de solidarité et d'efficacité, tient le choc. Maîtrisant aisément le faible bloc des seconds couteaux et, même, la ligne des as spinaliens. Une échappée d'Ilpo Salmivirta bloquée par un Aymeric Gillet en position de dernier défenseur en est le meilleur symbole (9e).

Avec un Radovan Hurajt un tantinet "petrikéen" (comme en témoigne cette mitaine ferme devant Jan Simko), les Dijonnais repoussent les assauts répétés de Spinaliens pas toujours très ordonnés. Un reproche volontiers dédié au rendement douteux des Jan Simko et autres Peter Listiak au cœur d'un bloc totalement perdu lors de ses présences en supériorité numérique. Bannis de la zone offensive, ceux-ci tendent le bâton pour se faire battre. Et si Listiak, fidèle à lui-même, se fait rançonner par ce diable de Fiser, Constantin craquera une deuxième fois. Lancé dans le dos de la défense par Andy Mrena, Miroslav Kristin trouvera sans coup férir le haut du filet (0-2 à 15'04"). De quoi légèrement faire passer la pilule d'une méconduite de match amputant Dijon d'une de ses forces les plus vives...

Contraints à resserrer les rangs, et à tourner à quatre derrière, les Ducs poursuivent leur pénitence et finissent, malgré une farouche résistance, par céder sur une inspiration du seul Spinalien réellement saignant ce soir, Jan Plch. Le roi du contre-pied, toujours aussi insaisissable, déborde côté droit pour enfin créer le décalage, servant un Simo Romo plongeant au second poteau (1-2 à 17'55").

Toute la vigilance de Radovan Hurajt, par ailleurs décisif ce soir, n'est pas superflue pour enrayer les déviations et autres lancers de Spinaliens par ailleurs trop laxistes au repli défensif. Et comme le réalisme est Dijonnais, Kristin, encore lui, se paye une partie de flipper gagnante dans le slot d'un Constantin dépassé par les événements (1-3 à 20'52").

Désireux de rendre à Kristin la monnaie de sa pièce, Plch reprend aussitôt les choses en main, débordant Sadlon pour engendrer un mauvais rebond d'Hurajt. À l'affût Michal Petrak croyait tenir une réduction du score tant attendue. Mais finalement refusée par le trio arbitral pour une supposée présence illicite dans le demi-cercle (23'10").

La zone neutre, de moins en moins maîtrisée, devient une source de fréquentes incursions spinaliennes. Mais voilà, qui dit attaques dit forcément... contre-attaques. Logique, d'autant plus que le CPHD, au bénéfice d'une bonne couverture dans sa zone, s'en procure plus qu'à son tour. Et si Kristin laisse passer le sien en s'excentrant trop lors de sa manœuvre d'embarquement de Constantin (28'01"), Strapaty, lui, saura saisir sa chance. L'ex-Dauphin, peu mobile mais volontaire, s'ajoutera à la feuille de pointage sur un rebond confus (1-4 à 28'40").

Pas de doute, cela sent le sapin pour les Lorrains, exposés à la vaillance d'une arrière-garde toujours bien préservée par la vista salvatrice d'Hurajt. Dans ces conditions, et comme le suggère l'intervention décisive de Lalka entre Mazerolle et Lefebvre (30'12"), les récupérations se multiplient, créant toujours plus de contre-attaques. Inspiré par cette débauche de munitions, Miro Fiser s'en ira tout d'abord servir un Pavol Milec imprécis devant la cage (31e) avant d'aller lui-même corser l'addition. En dévalant le flanc gauche, profitant de la petite forme d'un Stéphane Gervais méconnaissable. Pour sûr, les fidèles de Poissompré n'avaient encore jamais vu le Canadien se faire déshabiller de la sorte, laissant tout ouvert le chemin du filet au redoutable centre tchèque puisque Constantin, vous l'aurez compris, est proprement à "côté de ses bottes" (1-5 à 31'14").

Un avantage fragile

Au contraire de son hôte, improductif en jeu de puissance, le CPHD a su saisir sa chance en contres. Mais restait à tenir un résultat toujours plus contesté au fil des minutes, sur fond d'indiscipline récurrente et de siège appuyé par-delà la ligne bleue ducale. Décelée très vite dans ce match, l'influence de Jan Plch concrétise encore sur une passe latérale tendue de Marc Lefebvre, qu'il bonifie dans le slot (2-5 à 32'20"). Et comme l'indiscipline rattrape les Ducs, la pression redouble pour une défensive s'organisant tant bien que mal autour de son dernier rempart. Celui-ci se démultiplie devant son filet et retarde l'échéance jusqu'à ce qu'un palet flottant, qu'il tente de cueillir au vol, ne lui échappe. Maladresse lourde de conséquence puisque Guillaume Chassard, en embuscade dans le coin gauche, s'empare du disque pour le glisser au fond du filet (3-5 à 36'41").

Perclus de pénalités, les hommes de Daniel Maric subissent comme jamais. Mais tiennent. Assiégés, poussés dans leurs derniers retranchements, ils résistent. Encore et encore, y mettant tout leur cœur. Et toutes leurs tripes. Une échappée avortée par Marc Lefebvre, qui rate son contrôle pour venir s'empaler sur Radovan Hurajt, sonnera tel un répit salvateur (39'26"). De quoi souffler un peu en attendant une troisième et dernier acte s'annonçant proprement irrespirable...

Les ressources physiques fondent comme neige au soleil dans les rangs bourguignons, sans pour altérer leur combativité. Goûtant à la médecine spinalienne, assaillis de toute part, acculés dans leur zone, les Ducs subissent une domination locale plus prononcée que jamais. Dans ces conditions, et malgré une vaillance louable, la lucidité chancèle chez certains. À commencer par Peter Lalka, incapable de bloquer le disque et, plus grave encore, Ilpo Salmivirta. Le Finlandais, en confondant Hurajt à bout portant, ramène ses couleurs à portée de fusil (4-5 à 44'48").

À quitte ou double

Les espaces nés d'un quatre contre quatre favorisent l'ICE, variant ses coups et rythmant le jeu au bénéfice d'une profondeur de banc plus fournie. Sans pour autant venir à bout de l'épineuse résistance dijonnaise. Le K-O flotte dans l'air et à la domination locale Dijon répondra encore par quelques ripostes audacieuses devant Constantin.

Les Ducs, sur le fil du rasoir, doivent encore tenir un quart d'heure face à une déferlante bleue. Aussi font-ils corps pour repousser des assauts spinaliens sans cesse dangereux. Hurajt préserve in-extremis les siens d'une égalisation qui serait à coup sûr fatale et la course contre la montre engagée des deux côtés atteint des sommets dans l'intensité dramatique. On croit alors que Peter Strapaty, en accrochant Shawn Allard, sera le fossoyeur des siens en créant la onzième pénalité mineure de la soirée côté bourguignon (51'10")...

Que nenni puisqu'une résistance acharnée (et d'ultimes coups sifflets sanctionnant une nervosité croissante dans les rangs vosgiens) aura raison d'une course-poursuite engagée depuis la mi-match. De quoi relâcher une pression insoutenable et contraindre le banc vosgien à sortir Constantin. En vain, Pavol Milec s'échappant une dernière fois, retenu par un Peter Listiak à son tour expédié au mitard pour sceller le destin d'une vraie partie de play-offs.

S'ils ont dû s'arracher comme jamais, les Ducs ont acquis-là une victoire de haute lutte, leur offrant l'avantage dans la série la plus ouverte de ce premier tour. Bien sûr le médiocre intérim d'un Franck Constantin, par ailleurs soumis à l'inconstance défensive des siens, pesa très lourd dans la balance. Mais tout mettre sur le dos de l'absence de Stan Petrik serait injuste vu l'investissement consenti par les visiteurs. S'ils ont frisé la correctionnelle en fin de partie, les hommes de Daniel Maric ont su faire corps pour défendre leur bien. Un engagement total (et souvent payé en cachots sonnants et trébuchants par un arbitrage parfois incohérent) qui, ajouté d'un soupçon de réalisme, d'une pincée de chance et de quelques bonnes parades de Hurajt leur auront permis de ramener des Vosges un gain crucial. Les regrets sont immenses dans le camp des Dauphins, où Michal Petrak, resté sur le carreau au coup de sirène final, pourrait venir s'ajouter à la blessure de Petrik. À trois jours d'un périlleux déplacement à Trimolet pouvant signifier leur toute dernière heure...

Désignés joueurs du match : Jan Plch pour Épinal, Miroslav Kristin pour Dijon.

Compte-rendu signé Jérémie Dubief

 

Commentaires d'après-match (dans le Bien Public)

Daniel Maric (entraîneur de Dijon) : "Nous y sommes allés sans pression en nous disant que, de toute façon, nous pouvions avoir deux matches à domicile pour passer. Nous avons été hyper réalistes. Quand ils sont revenus de 5-1 à 5-3, j'ai failli demander un temps mort, puis j'ai vu que sur le banc les joueurs étaient bien. J'ai donc laissé aller. À 5-4, je me suis dit qu'avec la fatigue, ils allaient nous passer devant. Nous étions tellement lessivés que lorsque nous avons eu nos trois jeux de puissance, nous n'avons rien pu faire. À la fin du match, tous les mecs avaient le visage rougi. Nous étions gazés, mais les gars se sont arrachés."

 

Épinal - Dijon 4-5 (1-2, 2-3, 1-0)

Samedi 1er mars 2008 à 20h15 à la patinoire de Poissompré. 1234 spectateurs.

Arbitrage de Jimmy Bergamelli assisté de Jérémy Rauline et Adrien Ernecq.

Pénalités : Épinal 26' (2', 4', 10'+10'), Dijon 43' (10'+5'+20', 8', 4').

Tirs : Épinal 48, Dijon 22.

Évolution du score :

0-1 à 01'25" : Fiser assisté de Milec et Mrena

0-2 à 15'04" : Kristin assisté de Mrena et Hurajt (inf. num.)

1-2 à 17'55" : Romo assisté de Plch et Lefebvre (sup. num.)

1-3 à 20'52" : Kristin assisté de Guttig et Milec

1-4 à 28'40" : Strapaty assisté d'Offret et K. Dugas

1-5 à 31'15" : Fiser assisté de Strapaty et S. Dugas (inf. num.)

2-5 à 32'20" : Plch assisté de Lefebvre et Romo

3-5 à 36'41" : Chassard assisté d'Allard et Romo (sup. num.)

4-5 à 44'48" : Salmivirta assisté de Chassard et Listiak

 

Épinal

Gardien : Franck Constantin [sorti de 58'54" à 59'22" puis de 59'45" à 60'00"].

Défenseurs : Peter Slovák - Stéphane Gervais ; Marc-André Crête - Peter Listiak ; Borislav Ilic [ou Lionel Simon] - Radoslav Regenda.

Attaquants : Ján Simko - Michal Petrák - Ján Plch (C) ; Ilpo Salmivirta - Simo Romo - Shawn Allard [puis Chassard] ; Marc Lefebvre - Luc Mazerolle (A) - Guillaume Chassard (A) [puis Allard].

Remplaçants : Mathieu Perrin (G), Anthony Pernot, Guillaume Papelier, Daniel Scott, Tarik Chipaux. Absents : Stanislav Petrik (genou), Sébastien Geoffroy (blessé).

Dijon

Gardien : Radovan Hurajt.

Défenseurs : Andrej Mrena (C) ; Peter Lalka ; Juraj Sadlon ; Aymeric Gillet (A) ; Peter Strapaty.

Attaquants : Anthony Guttig - Stephen Dugas (A) - Miroslav Kristin ; David Dauphin - Miroslav Fiser - Pavol Milec ; Kévin Dugas - Yvan Fontana - Yannick Offret.

Remplaçants : Julien Roullier (G), Thomas Lecoanet. Absents : Michal Dian (suspendu), Alexandre Lefebvre (mononucléose), Yassine Fahas.

 

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