Épinal - Briançon (23 février 2008)

 

Match comptant pour la vingt-troisième journée de la Ligue Magnus.

Brillants-sonnés !

Trotte-t-il, quelque part sous les casques briançonnais, un esprit de revanche ? Les Diables rouges, assoiffés de victoires mais toujours vierges de titres, gardent sûrement un souvenir mitigé de leur dernier voyage à Poissompré. Ce camouflet ne manquera sûrement de rappeler à la "bande à Basile" qu'il leur barra, un soir de janvier 2007, la route de Bercy...

Devant une telle armada, les Spinaliens, qui boucleront quoiqu'il arrive la meilleure phase régulière de leur histoire en élite, devront proprement friser la perfection. Au cœur d'une lutte à distance pour l‘avantage de la glace un succès de prestige, ce soir, relancerait les dés à deux étapes de la ligne d'arrivée.

Au pied de la citadelle briançonnaise, les "boys" de Shawn Allard, flingueurs de l'Étoile Noire samedi dernier, peuvent désormais compter sur l'intégralité de leurs forces. En effet le retour de Jan Plch ramène l'alignement à sa configuration optimale, qui fit d'Épinal l'équipe en forme du mois de décembre. Pas un luxe avant de ferrailler avec quelques-unes des plus belles pointures du championnat. Entre internationaux de tous bords et routiniers du circuits continental, le contingent briançonnais regorge de certitudes et s'assoit sur une défensive réputée. Et même si un des trois Hongrois du cru (Balazs Ladanyi en l'occurrence) fera défaut ce soir aux avant-postes, les Diables disposent d'une sacré force de frappe.

Un Jan Plch endiablé

La montée en puissance d'Ilpo Salmivirta, promu aux côtés de Jan Plch en l'absence de l'improductif Jan Simko, est très nette depuis quelques semaines. Aussi l'ailier de Tampere, en une montée appuyée, provoque-t-il la première infamie du match en imposant son physique contre la bande. Et si quelques maladresses parsèment ce premier jeu de puissance, Épinal dévoile clairement son atout-maître de la soirée, une ligne de parade où trône un Jan Plch plus diabolique que jamais.

De quoi augurer une soirée des plus tourmentée pour ses vis-à-vis, pris de vitesse par la patte du technicien slovaque. De quoi présager, aussi, une partie active pour son compatriote Stanislav Petrik, notamment mis à contribution par l'activité incessante d'un duo Marton Vas - Mitja Sivic à surveiller tel le lait sur le feu. L'infatigable slovène, démarqué dans l'enclave, finit par enfoncer le clou en ajustant le haut du filet (05'40"). Enfin le croit-il, son essai étant rapidement annulé par le corps arbitral, la cage ayant bougé...

Qu'à cela ne tienne, l'ICE redouble d'intensité collective, pour pallier notamment l'inconstance des deuxième et troisième trios. En effet, derrière Plch et les siens, la continuité n'est pas vraiment de mise et joue en faveur de visiteurs commençant là une longue, très longue soirée de frustration devant un Petrik déjà infranchissable. Il faut bien ça pour contenir ce diable de Sivic, le joker multi-fonctionnel du système "basilien" !

Incapables, eux, de contrôler l'impact écrasant de Jan Plch sur le front de l'offensive, les Diables rouges apparaissent sans remède, sans solutions malgré l'assurance démontrée par Viktor Szélig. En un mot ils semblent déboussolés, comme sur une longue relance de l'impeccable Stéphane Gervais qui transperce leurs lignes pour atterrir dans la palette du capitaine lorrain. Et comme ce dernier, insaisissable, résiste au marquage "à la culotte" de son contradicteur, il finit par loger son palet dans le haut du filet défendu par Bronsard (1-0 à 09'52").

C'est donc peu dire que Jan Plch, de retour depuis la semaine passée, s'émancipe dangereusement en ces premiers instants. Dans tous les bons coups (et bien relayé par ses acolytes), le Slovaque n'est pourtant pas le seul à prétendre faire la différence côté vosgien. Car il y a Stanislav Petrik...

Un Stanislav Petrik "on fire"

Au meilleur de sa forme, Petrik dresse un véritable mur devant sa cage, annihilant systématiquement chaque tentative avec un brio rappelant ses fracassants débuts voilà bientôt cinq ans. À l'époque, souvenons-nous, le Slovaque avait tenu à bout de bras ses couleurs toute une saison durant, multipliant les prouesses pour sauver à lui seul le jeune promu. Certes, les choses ont changé depuis, et ses coéquipiers, plus aguerris et plus talentueux, sont d'un tout autre calibre. Et Briançon, même en multipliant les schémas rapides, même en misant sur la complémentarité et les automatismes, va très vite comprendre sa douleur. Les Sivic, Vidgren et autres Vas, intenables, ont beau tout tenter, rien n'y fait. Avantages numériques... ou pas !

Même si les rebonds de Christian Bronsard ne sont pas exploités, Épinal densifie progressivement ses présences en zone d'attaque en profitant d'une implication croissante de sa relève. Par son intensité, son envie et sa générosité, l'ICE fait en effet doucement la différence, neutralisant l'impact d'un Edo Terglav dispersé (ce qui influe évidemment sur le rendement de son alignement) et regagnant les vestiaires forte d'une confiance décuplée.

Visiblement tourmentés, les Diables rouges subissent étonnamment au retour du premier entracte et se heurtent, l'esprit à peine recouvré, à un Petrik des grands soirs. Plongés en désavantage numérique, conséquence d'une liaison Terglav-Dufour avortée par Slovak (23e), les joueurs de la ville haute ne savent plus à quel saint se vouer. Et sûrement pas Saint-Stanislav d'ailleurs !

Oui Petrik est en feu. Comme à ses plus belles heures. Rien ne peut lui arriver, se dit-on, a fortiori lorsque Damien Raux, servi plein axe par Jakob Milovanovic (et en désavantage numérique) voit l'ange-gardien local sortir un arrêt... petrikéen (24e) !

Le bloc du lymphatique Simo Romo (d'ailleurs coupable de cette dernière négligence) décidément trop stérile, c'est vers celui de Jan Plch que se fera la décision. Décalé au second poteau par le génial slovaque, Guillaume Chassard exécute Bronsard pour la peine (2-0 à 24'21"). Jouant comme s'ils avaient le diable chevillé au corps, les Spinaliens donnent une petite leçon à un co-leader étonnement impuissant. Dans le sillage de ses individualités fortes, et de surcroît préservée par un Stanislav Petrik d'exception devant son filet, l'ICE est à son apogée.

Eh oui, les temps sont Ruid pour la "bande à Basile". Et n'allez pas chercher le sauveur chez l'Américain, décrié comme jamais et restant, ce soir, fidèle à sa réputation (le but par match en moins). Le robuste New-Yorkais boit la tasse, comme les autres devant Petrik, et ne montre pas une énergie débordante. Au contraire de Sivic et Vas, voire d'un Rohat, d'un Boldron ou même d'un Benjamin Arnaud sans cesse sur la brèche, notamment en infériorité numérique. La nonchalance de J.C. Ruid ne souligne en rien la nervosité des débats, où aucun voyage ne se fait à vide et où le défi physique devient systématique.

Habituel fer de lance offensif Edo Terglav, lui, démontre pour sa part une inhabituelle fébrilité. Son ouverture mal ajustée vers Jean-François Dufour, aussitôt suivie d'une passe dans les mollets de Jan Plch, conduit ainsi vers le troisième filet local, parachevé de main de maître par Michal Petrak. Le Tchèque, attendant patiemment à la ligne bleue, profite du coup d'œil de Plch pour s'en aller loger le disque sous la barre (3-0 à 33'39").

Refroidis !

Refroidie la "bande à Basile" ? Sûrement pas ! Au contraire, elle ne s'en laisse pas compter et redouble d'efforts en zone offensive, ciblant désespérément un objectif improbable : déjouer Stanislav Petrik. Possédé, le "divin chauve" est sur tous les coups, bloquant, plongeant, stoppant et sortant au besoin sa plus belle mitaine comme sur une reprise très sèche de Terglav à bout portant (35'06"). Le superlatifs peuvent pleuvoir sur sa prestation, proprement parfaite vu la qualité, et surtout la dangereuse fréquence des sollicitations briançonnaises...

Le numéro trente-trois reprend là où il en était resté, allant de parades en sauvetages. Mais sa bonne étoile finit pourtant par le quitter au terme d'une énième pression adverse, où Damien Raux finit par trouver la faille dans un angle pourtant très difficile (3-1 à 42'11"). Le blueliner québécois Alexandre Rouleau, en pointe, y va lui d'un slap flottant pour prendre l'œil de chat spinalien à contre-pied (3-2 à 44'06").

Les "boys" de Shawn Allard sentent clairement passer le vent du boulet. De là à en venir à Peter Listiak... il n'y a qu'un pas ! Où plutôt une énième tergiversation (un palet perdu dans le demi-cercle cette fois-ci) d'un "Pistol Pete" au meilleur de sa forme. Cela profite à Damien Raux; le néo-international l'exploitant d'un revers sans appel (3-3 à 44'24").

Désormais placés en positon de force, les Diables rouges perpétuent leur siège, le soutenant d'accélérations décisives pour prendre le meilleur sur une défense émoussée. Maîtres du puck et des espaces, les Briançonnais ont même repris le monopole d'une zone neutre longtemps contestée, mais désormais toute acquise à leur cause. Cela leur permet, dans un premier temps, de cadenasser leur ligne bleue et de couper immanquablement les lignes de passe, engendrant des relances précises vers des attaquants plus disponibles que jamais. S'ensuit un matraquage en règle contre lequel Petrik fait front, suppléant l'incapacité des siens à se défaire d'un collectif resserré et d'individualités pleinement retrouvées.

Ce contrôle total de l'entrejeu souffre néanmoins d'une légère exception. Jan Plch, encore lui, le seul à parfois passer entre les mailles du filet. Pour le reste, Stanislav Petrik se porte seul garant de l'intégrité de ses couleurs dans cette fin de match à sens unique, où son barrage résiste tant bien que mal à ces vagues successives. Et en dépit d'un ultime baroud d'honneur local, le sort de la partie se jouera en mort-subite...

Gervais, ledémon de minuit

De quoi raviver le traumatisme de Christian Bronsard, déjà coupable l'an passé du rebond fatal devant l'inépuisable Michal Petrak. Cette fois-ci le Canadien né en Forêt-Noire, après avoir repoussé une reprise de Shawn Allard (61'55"), craquera devant l'homme qui tire plus vite que son ombre. Il ne s'agit évidemment pas du légendaire "Lucky Luc" Mazerolle, perdu corps et biens pour ce niveau. Mais du "clutch-player" du moment, un Stéphane Gervais servi en pointe par Michal Petrak et dégainant son fameux lancer frappé, punissant-là une fatale indiscipline - retenir - de Cédric Boldron (4-3 à 62'33")...

Une fois encore Briançon est rentré la tête basse de Poissompré, accablé par la grâce accordée ce soir à un Stanislav Petrik des grands soirs. Porté par un deuxième bloc percutant (et assurément le plus consistant), le récent finaliste de la Coupe de la Ligue provoqua pourtant un danger constant, mais stérile, aux abords de la cage vosgienne. Avant que l'appoint du troisième trio et le réveil d'un Terglav retrouvant cependant trop tardivement son influence ne vienne à bout de cette muraille improvisée.

Le renouveau défensif briançonnais connu en fin de partie ne fut pourtant pas suffisant pour s'adjuger la mise devant des Vosgiens courageux mais peur-être trop tributaires d'une poignée d'individualités. Leur premier bloc en l'occurrence, où Peter Slovak confirma son statut de ministre de la défense aux-côtés d'un Stéphane Gervais relayant parfaitement ses avants. Les autres paires, fréquemment submergées, eurent plus de mal à contenir l'activité des trios subalternes à l'image d'un Peter Listiak toujours plus désespérant de négligences et d'approximations.

Et si ce succès est également dû aux Salmivirta, Petrak et autres Chassard, qui gravitaient autour de l'inévitable Plch, il était à savourer sans modération pour des partisans régalés par un match d'une intensité rare.

Compte-rendu signé Jérémie Dubief

 

Épinal - Briançon 4-3 après prolongation (1-0, 2-0, 0-3, 1-0)

Samedi 23 février à 20h15 à la patinoire de Poissompré. 1150 spectateurs.

Arbitrage de Didier Bocquet assisté de David Courgeon et Éric Bouguin.

Pénalités : Épinal 20' (4', 2', 4', 0'), Briançon 12' (6', 4', 0', 2').

Évolution du score :

1-0 à 09'52" : Plch assisté de Gervais

2-0 à 24'11" : Chassard assisté de Plch et Gervais (sup.num.)

3-0 à 33'39" : Petrak assisté de Plch

3-1 à 42'11" : Raux assisté de Rohat et Dermigny

3-2 à 44'06" : Rouleau assisté de Ruid et Terglav (sup.num.)

3-3 à 44'24" : Raux assisté d'Arnaud et Boldron

4-3 à 63'05" : Gervais assisté de Petrak et Plch (sup.num.)

 

Épinal

Gardien : Stanislav Petrik.

Défenseurs : Peter Slovák - Stéphane Gervais ; Marc-André Crête - Peter Listiak ; Borislav Ilic [ou Lionel Simon] - Radoslav Regenda.

Attaquants : Ilpo Salmivirta - Michal Petrák - Ján Plch (C) ; Marc Lefebvre - Simo Romo - Guillaume Chassard (A) ; Shawn Allard - Luc Mazerolle (A) - Guillaume Papelier.

Remplaçants : Franck Constantin (G), Tarik Chipaux, Daniel Scott, Anthony Pernot. Absents : Ján Simko (douleur au genou), Sébastien Geoffroy (blessé).

Briançon

Gardien : Christian Bronsard.

Défenseurs : Viktor Szélig ; Jakob Milovanovic ; Milan Tekel (A) ; Alexandre Rouleau ; Gary Levêque (A) - Sébastien Dermigny.

Attaquants : John Christian Ruid [puis Sivic] - Márton Vas - Simo Vidgren ; Jean-François Dufour - Mitja Sivic [puis Ruid] - Edo Terglav (C) ; Sébastien Rohat - Damien Raux - Cédric Boldron ; Benjamin Arnaud.

Remplaçants : Damien Angella (G), Dimitri Faure-Brac. Absents : Balázs Ladányi (adducteurs), Luciano Lomanno, Cyril Arnaud.

 

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