Suède - Slovaquie (9 mai 2007)

 

Quarts de finale des championnats du monde 2007.

Débridés comme des... Suédois

Le résultat du premier quart de finale fait monter la pression sur Bengt-Åke Gustafsson. Les Tchèques, tout tchèques qu'ils soient, n'ont pas pesé lourd contre les Russes. Si son équipe s'incline face aux Slovaques, l'entraîneur suédois se verra donc reprocher d'avoir laissé filer le dernier match de poule en misant sur le mauvais adversaire. Et si la médaille d'or avait éteint toute polémique aux JO, les critiques resurgiraient alors sur son cynisme et son manque de sportivité.

La Suède attaque la première, mais sur le premier contre, Roman Kukumberg déborde complètement Dick Tärnström qui l'accroche. La supériorité numérique est concrétisée par Marian Hossa qui arrive dans le slot plus vite que Wallin, au bon moment pour envoyer au fond un palet échappé de la crosse de Gaborik (0-1, 02'10"). À la quatrième minute, c'est au tour de Richard Kapus de filer sur l'aile gauche et d'être retenu par Martin Thörnberg. Quelle belle répartition des rôles chez ces Slovaques : les autres lignes drainent les pénalités, et le trident Gaborik-Demitra-Hossa est chargé de les concrétiser. Sauf que l'arbitre suisse Danny Kurmann ne craint pas le torticolis. Il n'hésite pas à expliquer au géant Zdeno Chara qu'il a empiété sur la zone du gardien. L'engagement suivant se fait à l'extérieur et la pénalité est tuée.

Loin d'être rendus sereins par ce début de match prometteur, les Slovaques multiplient les pertes de palet dans leur zone. Une horrible relance dans l'axe de Tomas Harant est ainsi interceptée avant la bleue par Fredrik Emvall. Celui-ci ne trouve que le poteau, mais la défense est incapable de se replacer correctement et Fredrik Warg peut prendre le rebond (1-1, 07'28"). La Tre Kronor peut souffler... Pas pour longtemps. Richard Kapus utilise Hörnqvist comme écran pour tirer sous la mitaine de Johan Backlund, qui faiblit au plus mauvais moment (1-2, 08'16").

Les vagues bleues se succèdent pendant quelques minutes et la Suède est étouffée. Mais c'est dans leur camp que les Slovaques sont tout sauf sûrs : Pavol Demitra a la frôle d'idée de porter le palet hors de sa zone et se le fait voler par Jörgen Jönsson, l'homme aux 283 sélections ce soir. L'action se termine par un tir ouvert de Tony Mårtensson, sans danger pour Karol Krizan. Ce qui est inquiétant pour les Suédois dans cette première période, c'est qu'on a l'impression que le jeu dépend surtout de la Slovaquie : elle a créé ses opportunités offensives par son talent, et elle a fourni les opportunités offensives adverses par ses erreurs en zone défensive.

La Suède prend enfin le jeu à son compte au début du deuxième tiers-temps. Jonathan Hedström prend un lancer, Krizan laisse un rebond en coin, que Niklas Bäckström récupère, étrangement seul derrière la cage. Le grand espoir sert Hedström étrangement seul dans l'enclave pour une reprise imparable (2-2, 22'17"). Les deux buteurs suédois, Warg et Hedström, sont les deux attaquants "reposés" lundi contre la Russie ! "BAG" peut ainsi se justifier d'autant plus facilement d'avoir fait tourner son effectif.

La défense slovaque est encore à la rue un peu plus tard sur une action de la première ligne suédoise. Jörgen Jönsson est seul dans l'enclave pour récupérer un palet traînant, et Krizan livré à lui-même fait l'arrêt. Dès l'engagement gagné par "JJ", Martin Thörnberg vient de nouveau chercher le gardien champion de Suède en angle fermé. Le pauvre Krizan prend alors l'attaquant scandinave sur le dos et ne peut rien faire pour empêcher le but de Mårtensson (3-2, 26'02"). Il adresse aussitôt une protestation outrée à l'arbitre, mais celui-ci lui répond probablement d'aller se plaindre auprès de Milan Jurcina. Car c'est bien le défenseur des Washington Capitals qui a balancé Thörnberg sur son gardien, ce qui avait d'ailleurs été signalé par une pénalité différée.

La Slovaquie est dominée sur chaque palet et s'en remet aux talents de ses ailiers... mais la défense suédoise est bien en place. Si Gaborik dribble un joueur, il y en a un second qui l'attend derrière. Quand Hossa entrevoit enfin un 2 contre 1, le jeune arrière Anton Strålman coupe parfaitement sa passe. La plus belle occasion est à suivre : Backlund est avancé face à un lancer de Hossa, finalement mal cadré, qui arrive dans le patin de Gaborik. Celui-ci est à côté de la cage ouverte mais ne peut se saisir du palet, gêné par Åkerman sans qu'une faute soit sifflée.

Branko Radivojevic est sanctionné en zone offensive pour une crosse haute involontaire sur Davidsson, et cette pénalité vaut cher : Alexander Steen prend un lancer, Chara et Demitra regardent dans la même direction, ce qui est peut-être un signe de grand amour mais pas de vigilance défensive. Dans leur dos, Jonathan Hedström prend le rebond (4-2, 33'55"). Le petit changement opéré par l'entraîneur suédois dans ses lignes aujourd'hui a été une totale réussite : l'ajout de Hedström a clairement réveillé la quatrième ligne des jeunes Bäckström et Steen. La Slovaquie tente de réagir. Marek Uram s'échappe sur la gauche et tire dans un angle impossible, mais Backlund a fermé son poteau. Sur l'engagement, Chara lance du coin de la zone et le gardien bloque le palet sous sa jambière. Gaborik essaie de le pousser derrière la ligne en forçant, mais l'arbitre a déjà sifflé et fait signe que le but ne sera pas accordé. Roman Kukumberg, promu au centre de la première ligne en cours de match, réussit à son tour à déborder toute la défense par la gauche à l'avant-dernière minute, mais le rebond passe hors de portée de la crosse d'Uram qui a suivi.

La Suède rentre aux vestiaires avec une marge de deux buts, qui semble suffisante pour que son système défensif fasse le reste. Elle imite pourtant les mauvais travers de la Slovaquie en perdant le palet dans sa zone à la reprise : une relance d'Åkerman est mal contrôlée par Rickard Wallin derrière la bleue. Peter Podhradsky en profite pour prendre un lancer dévié par Radivojevic, qui exploite ensuite son propre rebond (4-3, 41'21"). Les bleus continuent sur leur lancée, avec un centre de Kukumberg dévié par Uram dans l'axe. Mais les Suédois se remettent en place et leur unique joueur au forechecking arrive à gêner la construction adverse.

Et le match bascule sur un but impensable : les Slovaques changent de ligne parce que le palet est sorti de leur zone, et Tony Mårtensson, qui l'a récupéré à la rouge près de la bande, perçoit la brèche qui s'ouvre ainsi. Il fonce droit vers le but, passant en plein milieu d'une défense slovaque estomaquée, et il peut ainsi marquer au-dessus de la jambière droite de Krizan, comme une revanche de la finale d'Elitserien où il avait eu peu d'efficacité dans ses tentatives (4-3, 57'03", photo de droite).

La Slovaquie perd définitivement la partie en perdant ses nerfs : alors que Kukumberg est en prison pour obstruction, Hedström chatouille la mitaine du gardien et Jurcina lui met un cross-check dans le dos. Cerise sur le gâteau, Marian Gaborik prend une méconduite pour avoir protesté. Les bleus perdent donc leur meilleur joueur pour dix minutes (on en est à 49'14"...), et dans l'immédiat, ils jouent à trois. Dans ces conditions, un lancer de Magnus Johansson passe entre les jambières de Krizan masqué par

Bremberg (6-3, 49'46"). Roman Kukumberg, l'attaquant du Slovan Bratislava qui a réalisé de loin son meilleur match du tournoi, ne quittera pas la scène sans un joli but : il part de son camp, lance une contre-attaque rapide et s'appuie sur Radivojevic qui lui rend une passe aérienne pour éviter l'interception du gardien. Kukumberg volleye ce palet dans les filets à hauteur de hanche (6-4, 51'27"). Les Slovaques ont le mérite de donner de la vie à cette fin de match. Les dernières minutes sont totalement débridées, le jeu va d'une cage à l'autre. À une minute de la fin, Demitra met une vilaine charge dans le dos de Thoresen, puis Kenny Jönsson commet un cinglage sur Hossa. La Slovaquie finit à cinq contre quatre sans gardien, mais Mårtensson, qui avait été contré un peu plus tôt dans une première tentative en cage vide, part cette fois tout seul pour s'assurer que son hat-trick est bien complété (7-4, 59'45").

Ce fut un match offensif, fertile en occasions et en émotions en tout genre. Un match à rebondissements, avec des hauts et des bas. Bref, un match plus slovaque que suédois dans son allure. Mais c'est bien la Tre Kronor qui l'a gagné, en toute logique. Offensivement, la Slovaquie a bien alterné ses quatre lignes pour mettre du rythme et jouer à haute vitesse. Mais sa défense ne s'est imposée ni par son physique, ni par son effort de patinage, ni par son placement, ni par sa sûreté technique. Ce n'est pas la faute des seuls arrières : l'implication défaillante de ses cinq joueurs sur la glace contribue à cette faiblesse défensive rédhibitoire à ce niveau.

Déisgnés joueurs du match : Jonathan Hedström pour la Suède et Roman Kukumberg pour la Slovaquie.

Désignés trois meilleurs Slovaques du tournoi : Karol Krizan, Zdeno Chara, Marian Gaborik.

Marc Branchu

Commentaires d'après-match :

Bengt-Åke Gustafsson (entraîneur de la Suède) : "Après les dix premières minutes, les choses sont allées mieux et nous avons bien joué pendant le reste du match. Cette équipe travaille vraiment dur."

Miroslav Satan (capitaine de la Slovaquie) : "Nous savions qu'ils joueraient leur jeu donc nous avions besoin de prendre les meilleures décisions sur la glace. Cela n'a pas été le cas et ils ont été capables de marquer des buts. Nous sommes venus ici pour nous mêler à la lutte pour les médailles d'or, mais nous en avons été incapables, ce qui est décevant."

 

Suède - Slovaquie 7-4 (1-2, 3-0, 3-2)
Mercredi 9 mai 2007 à 20h15 à la Khodynka Arena, Moscou. 7000 spectateurs.
Arbitrage de Danny Kurmann assisté de Yuri Oskirko et Tobias Wehrli
Pénalités : Suède 8' (4', 0', 4') ; Slovaquie 28' (0', 2', 6'+10'+10').
Tirs : Suède 36 (16, 12, 8) ; Slovaquie 23 (9, 6, 8).

Évolution du score :
0-1 à 02'10" : Hossa assisté de Stehlík et Gaborík (sup. num.)
1-1 à 07'28" : Warg assisté d'Emvall
1-2 à 08'16" : Kapuš assisté et Šatan et Podhradský
2-2 à 22'17" : Hedström assisté de Bäckström
3-2 à 26'02" : Mårtensson assisté de Thörnberg et J. Jönsson
4-2 à 33'55" : Hedström assisté de Steen (sup. num.)
4-3 à 41'21" : Radivojevič assisté de Kapuš et Podhradský
5-3 à 47'03" : Mårtensson
6-3 à 49'46" : Johansson assisté d'Enström et Davidsson (double sup. num.)
6-4 à 51'27" : Kukumberg assisté de Radivojevič
7-4 à 59'45" : Mårtensson assisté de J. Jönsson (cage vide)
 

Suède

Attaquants :
Martin Thörnberg (+2, 2') - Jörgen Jönsson (A, +3) - Tony Mårtensson (+3)
Fredrik Emwall (-1) - Rickard Wallin (-1) - Magnus Kahnberg (-1)
Fredrik Bremberg (-1) - Johan Davidsson (-1) - Patric Hörnqvist (-1, 2')
Jonathan Hedström (+1) - Nicklas Bäckström (+1) - Alexander Steen (+1)
Mattias Månsson (+1)

Défenseurs :
Kenny Jönsson (C, +2, 2') - Anton Strålman (+2)
Dick Tärnström (A, -1, 2') - Johan Åkerman (-1)
Per Hållberg (-1) - Tobias Enström (-1)
Magnus Johansson (+3)

Gardien :
Johan Backlund

Remplaçant : Daniel Henriksson (G). Absents : Erik Ersberg (G), Jan Sandström, Magnus Kahnberg (en réserve).

Slovaquie

Attaquants :
Marek Uram - Richard Kapuš (+2) [puis Kukumberg] - Miroslav Šatan (C)
Tomáš Surový (-1) - Roman Kukumberg (2') [puis Kapuš] - Branko Radivojevič (+1, 2')
Marián Gáborík (-1, 10') - Pavol Demitra (A, -2, 2'+10') - Marián Hossa (-4)
Tibor Melichárek (-1) - Miroslav Kováčik (-1) - Ivan Čiernik (-1)

Défenseurs :
Zdeno Chára (A, -1) - Peter Podhradský
Richard Stehlík (-1) - Milan Jurčina (+1, 2')
[Chara] - Martin Štrbák (+1)
Dominik Graňák (-1) - Tomáš Harant (-1)

Gardien :
Karol Križan [sorti de sa cage de 58'21" à 58'46" et de 58'53" à 59'45"]

Remplaçants : Jaroslav Halák (G), Andrej Podkonický. Absents : Tomáš Starosta (bras), Radovan Somík (surnuméraire).

 

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