Dynamo Moscou - Ak Bars Kazan (21 janvier 2007)

 

Match comptant pour la quarante-quatrième journée de Superliga russe.

En voilà d'l'affiche ! De la bonne, de la grosse affiche ! Mesdames et Messieurs, devant vous, les deux derniers champions d'Europe et les deux derniers champions de Russie !

Dans le côté bleu, les locaux du Dynamo de Moscou, englué en cette année de leur soixantième anniversaire à la 14e place du classement, mais toujours aussi motivés lorsqu'ils rencontrent Kazan et sa dizaine d'anciens joueurs... du Dynamo.

Dans le côté vert, les visiteurs d'Ak bars Kazan, une panthère des neiges à peine couronnée impératrice d'Europe à Saint-Pétersbourg, l'impériale capitale de toutes les Russies, et donc même du Tatarstan... et leader incontestable de la Superliga, avec déjà 86 points.

Le public ne s'y est pas trompé, avec un Loujniki bien rempli de près de sept mille personnes (il faudra cependant en trouver plus l'an prochain, car 6 500 spectateurs, cela risque de sonner creux dans la nouvelle aréna du nord de Moscou où évoluera le Dynamo la saison prochaine...).

Et cela commence fort d'entrée avec un beau pressing des dynamistes. Vitali Prochkine, le défenseur d'Ak bars, ancien du Dynamo (mais on ne va commencer à tous les citer sinon on y sera encore demain), fait alors le ménage devant sa cage en envoyant promener Igor Mirnov un peu trop près de Mika Noronen, le gardien finlandais de Kazan, héros de la dernière finale de la Coupe des clubs champions d'Europe. Deux minutes de supériorité donc pour le Dynamo. Mais à part une belle tentative d'Alexandre Skougarev, les Moscovites ne parviennent pas à être véritablement dangereux. Pourtant, les Tatars aiment bien la prison en ce début de rencontre, avec à la troisième minute, une autre pénalité contre Evgueni Riasenski, pour une faute sur le nouveau Canadien du Dynamo, Mike Bishai (un ancien de l'AHL, de l'ECHL et un tout petit peu de la LNH dans sa ville natale d'Edmonton). Et cette fois-ci, le Dynamo met la machine en marche. Les Moscovites s'installent dans la zone et trouvent la faille au bout d'une minute par Igor Mirnov, à la suite d'un magnifique slalom dans la défense tatare, le tout à la limite du déséquilibre (1-0, 03'08"). Superbe but !

Le problème pour les locaux, c'est qu'ils se retrouvent immédiatement en double infériorité numérique avec des fautes de Maxime Ossipov et Evgueni Fédorov. Les Dynamistes résistent et au moment où ils se retrouvent à cinq... hop, ils sont à nouveau sanctionnés (Grigori Micharine). Ils s'en sortent, et re-hop, voilà Anton Prigaro pris à son tour par la patrouille. Cela fait encore quarante secondes à trois contre cinq. C'est l'installation du campement tatar sous les murailles du Kremlin ! Mais que fait Michel Strogoff ?

Il faut attendre la douzième minute pour voir le Dynamo enfin à égalité numérique. Pas pour longtemps ! Une minute plus tard, les deux Canadiens du Dynamo sont sanctionnés en même temps. David Ling prend deux minutes et Mike Bishai, lui, écope de dix minutes de méconduite. Voulant certainement ne pas faire pâle figure au près de ses compatriotes, l'excellent défenseur de Kazan, Raymond Giroux, prend à son tour deux minutes juste après !

Il sera dit que ce match sera placé sous le signe des prisons, puisque quelques secondes plus tard, voilà le défenseur moscovite Denis Kouliach qui va à son tour sur le banc d'infamie. Du coup, le jeu est décousu et il faut attendre la 18e pour revoir du jeu à cinq contre cinq. Et à ce moment-là, qui sort de sa boîte ? Le meilleur buteur du championnat Alexeï Morozov qui lance Alexeï Badioukov pour l'égalisation (1-1, 18'00"). Un dernier tir dangereux de Dimitri Chitikov, bien renvoyé par Mika Noronen, et l'on en reste là pour la première période, où le préposé aux prisons ne s'est pas ennuyé... S'il connaissait la suite...

Dès la première minute du deuxième tiers, le sifflet de Monsieur Poliakov a déjà envoyé le tatar Alexandre Golovine se calmer deux minutes. Le Dynamo n'en aura besoin que d'une pour reprendre l'avantage au score par l'intermédiaire de son attaquant vedette Alexandre Kharitonov (2-1, 22'40"). Les Moscovites ont l'occasion d'enfoncer le pieu tatar, deux minutes plus tard, lorsque Alexandre Stépanov est en prison. C'est leur défenseur Sergueï Vychedkevitch qui a une belle possibilité, mais son tir est bloqué par Noronen. Les pénalités se succèdent, mais c'est au retour sur la glace des bannis que le compteur va se débloquer. Un contre de Vladimir Vorobiev fait mouche et c'est l'égalisation de Kazan (2-2, 36'00"). Le problème est que Vorobiev en fait un peu trop. Qu'il soit content de marquer, soit, qu'il se tourne vers les tribunes en montrant le logo de Kazan sur son maillot et en l'embrassant... alors qu'il vient du Dynamo ! Cela laisse une impression désagréable de "foutage de gueule" au public de Loujniki et ne fait qu'envenimer l'ambiance déjà pesante.

Sur sa lancée, la panthère blanche montre encore les griffes avec un lancer lointain et puissant de Raymond Giroux, né dans l'Ontario malgré son nom à consonance francophone. Mais Vitali Eremeiev, né au Kazakhstan malgré son nom à consonance russophone, est sur la trajectoire. On en reste là à la deuxième sirène sur ce score de parité deux partout.

Pour ne pas contredire la tradition de ce match, le dernier tiers débute par une pénalité dès la première minute, pour l'attaquant de Kazan, en provenance d'Oufa, Andreï Zoubarov, mais ensuite le jeu se stabilise. Le jeu va moins vite, les deux adversaires hésitent à prendre le risque d'être contrés. Il faut attendre la cinquantième minute pour voir une belle action locale conclut par une tentative intéressante de Kharitonov. Noronen reste cependant impassible.

Une petite pénalité, juste après, pour ne pas perdre le rythme, pour le Tatar Dimitri Kazionov (formé au Dynamo, cela va de soi...), permet à Gueorgui Micharine d'avoir une belle chance, mais son tir frôle la cage visiteuse. Et c'est à peu près tout. La mort subite annoncée arrive comme de bien entendu...

Autant vous le dire, cette prolongation ne va pas rester dans les mémoires pour le jeu... mais plutôt pour ce qui va se passer à 62 minutes et 34 secondes précisément..

Le capitaine du Dynamo, l'international ukrainien Vadim Chakhraïtchouk, file au but. Dans son élan, il "flirte" avec la zone du gardien, mais franchement sans commettre quoi que ce soit de répréhensible. Sauf que les deux joueurs de Kazan présents à ce moment se jettent sur lui crosses en avant dans le dos. Et il se trouve qu'il s'agit de deux anciens coéquipiers de Chakhraïtchouk au Dynamo, le défenseur Ilia Nikouline, auteur de la charge la plus violente, et l'attaquant Alexandre Stépanov. C'en est visiblement trop pour Chakhraïtchouk qui "pète un plomb". L'Ukrainien se rue sur les deux joueurs, "choisit" Nikouline et c'est parti pour LA bagarre de l'année en Superliga. Vadim Chakhraïtchouk est déchaîné, comme si toutes les frustrations du match, de la saison, et plus généralement du fait que désormais Kazan domine le hockey russe grâce à des joueurs du Dynamo ressortaient à ce moment-là. Tout ce qui était latent dans l'agacement moscovite par rapport au club tatar, dont l'entraîneur et pratiquement tous les joueurs majeurs sont originaires de Moscou et plus particulièrement du Dynamo, tout cela ressurgit dans les poings de Chakhraïtchouk, qui en l'occurrence agit en capitaine, en porte-parole du peuple dynamiste ! Le public ne s'y trompe pas, qui lui aussi ressort en "beuglant" cette même frustration. Lors des 60 ans du Dynamo quelques semaines plus tôt, Chakhraïtchouk s'était excusé au près des glorieux anciens du club du mauvais classement de l'équipe cette saison. Cette bagarre ressemble à la fois à une tentative de rachat par les poings et de message aux "traîtres" partis chez le rival lointain sur la Volga.

Plus rien n'arrête Vadim Chakhraïtchouk. Dépossédé de son maillot, retenu avec difficulté par les juges de ligne, il ne veut pas arrêter le combat, il veut aller jusqu'au bout, malgré les quelques égratignures ensanglantées qu'il a causées à Nikouline. Le capitaine du Dynamo veut encore allumer d'autres mèches de la vengeance dynamiste. Alors le combat repart quelques secondes plus tard avec d'autres protagonistes. Et le bilan comptable est impressionnant. L'arbitre prend d'ailleurs le temps d'aller revoir tout cela à la vidéo, afin d'être certain d'avoir oublié personne. Il veut d'ailleurs la jouer équitable, alors qu'il était question d'honneur, et envoie un nombre équivalent de joueurs de chaque côté se calmer en prison.

Chez les Dynamistes, Vadim Chakhraïtchouk prend évidement les 25 minutes réglementaires, Evgueni Blokhine, Renat Mamachev et Vladislav Evseiev, 14 minutes chacun. Chez les panthères des neiges, les "provocateurs" du début Ilia Nikouline et Alexandre Stépanov écopent eux aussi de 25 minutes, Alexeï Terechtchenko (un autre ancien du Dynamo) et Andreï Zoubarev prennent leurs 14 minutes.

Quant aux juges de lignes, ils écopent d'une peine d'intérêt général en devant nettoyer la glace de tout ce que les supporters du Dynamo ont jeté, c'est-à-dire à peu près tout ce qui leurs tombaient sous la main : bouteilles en plastique, programmes, etc. Autant le dire, après un tel ouragan, les deux minutes trente restantes n'apporteront rien au score, ni à l'histoire de ce match !

Verdict : deux buts partout et deux matches de suspension partout pour Chakhraïtchouk (incapable de s'arrêter) et Stépanov (auteur d'un coup de patin sur l'Ukrainien).

Étoiles du match Sport Express : *** Sergueï Vychedkevitch (Dynamo), ** Alexei Morozov (Kazan), * Alexandre Kharitonov (Dynamo).

Étoiles du match Soviet Sport : *** Igor Mirnov (Dynamo), ** Alexandre Kharitonov (Dynamo), * Alexei Badioukov (Kazan).

Compte-rendu signé Bruno Cadène

 

Commentaires d'après-match

Vladimir Krikunov (entraîneur du Dynamo) : "Nous nous sommes battus. Il n'y a pas d'autre mot. Mais les arbitres ont joué des tours. Polyakov n'était déjà pas à son meilleur. Mais ses juges de ligne... Faire venir des novices de Chelyabinsk pour s'exercer sur Ak Bars et le Dynamo... Leurs décisions incompréhensibles ont amené à cette bagarre. C'est pourquoi je ne juge pas Shakhraychuk. Mais les gestes de Stepanov sont honteux ! Comment est-il possible de charger dans le dos, de venir se battre à deux contre un, qui plus est sur un joueur au sol ? En plus, il a donné un coup de patin à un homme avec lequel il jouait sur la même ligne il y a deux ans ! Nous préparons une cassette vidéo."

Zinetula Bilyaletdinov (entraîneur de Kazan) : "Le match s'est mal passé parce que les joueurs du Dynamo étaient plus rapides que nous. Nous avons toujours été menés au score. La bagarre a été provoquée par Shakhraichuk ! Il a donné un coup de crosse à Tereshchenko. C'est ce qui a tout déclenché."

 

Dynamo Moscou - Ak Bars Kazan 2-2 après prolongation (1-1, 1-1, 0-0, 0-0)

Dimanche 21 janvier 2007 à la Malaïa Arena Loujniki. 6500 spectateurs.

Arbitrage de M. Polyakov (Moscou) assisté de MM. Gofman et Monoshkov (Chelyabinsk).

Pénalités : Dynamo 97' (12'+10', 4', 0', 6'+10'+10'+10'+25'), Kazan 98' (6', 6', 4', 12'+10'+10'+25'+25').

Tirs : Dynamo 32 (9, 9, 12, 2), Kazan 33 (12, 12, 7, 2).

Évolution du score :

1-0 à 03'08" : Mirnov assisté de Vyshedkevich et Kharitonov (sup. num.)

1-1 à 18'00" : Badyukov assisté de Morozov

2-1 à 22'40" : Kharitonov assisté de Mirnov et Vyshedkevich (sup. num.)

2-2 à 36'00" : Vorobiev assisté de Tereshchenko

 

Dynamo Moscou

Gardien : Vitali Eremeïev.

Défenseurs : Sergei Vyshedkevich - Yakov Rylov ; Oleg Orekhosky - Anton Prigaro ; Georgi Misharin - Denis Kulyash ; Evgeni Blokhin - Rinat Mamashev.

Attaquants : Aleksandr Kharitonov - Evgeni Fedorov - Igor Mirnov ; Konstantin Romanov - Vadim Shakhraichuk (C) - Aleksei Sopin ; David Ling - Michael Bishai - Vladislav Evseiev ; Maksim Osipov - Aleksandr Skugarev - Dmitri Shitikov.

Remplaçant : Sergei Zvyagin (G).

Ak Bars Kazan

Gardien : Mika Noronen.

Défenseurs : Vitali Proshkin - Raymond Giroux ; Andrei Zubarev - Ilya Nikulin ; Vyacheslav Buravchikov - Igor Shchadilov ; Evgeni Ryasenski - Mikhaïl Tyulapkin.

Attaquants : Danis Zaripov - Aleksei Badyukov - Aleksei Morozov (C) ; Vladimir Vorobiev - Aleksei Tereshchenko - Aleksandr Stepanov ; Aleksandr Golovin - Dmitri Kazionov - Dmitri Obukhov ; Enver Lisin - Mikhaïl Yunkov - Mikhail Zhukov.

Remplaçant : Aleksandr Eremenko (G). Absents : Sergei Zinoviev (muscle de la cuisse), Andreï Pervyshin.

 

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