Bâle - Davos (10 octobre 2006)

 

Match avancé de la treizième journée de LNA.

Bâle fait sauter la banque

Le contraste est saisissant. Un monde semble opposer des Bâlois au creux de la vague, bons derniers au classement et des Davosiens sereins, fort de la meilleure défense de LNA. Pour les frontaliers, la confirmation s'avère plus délicate que prévue avec cinq défaites de rang, série en cours. L'attaque rhénane affiche en effet de sérieuses carences et c'est d'autant plus fâcheux que la défense, axe fort de l'EHC Basel, n'a plus la même garantie de succès depuis le départ d'Olivier Keller, moyennement remplacé par Shawn Heins.

Quoiqu'il en soit, il faudra beaucoup de vaillance et une sacré dose de patience pour tenir tête au puissant HC Davos. Le vieux champion, finaliste malheureux l'an passé, est toujours aussi branché stars, et cette année n'a pas fait exception à la règle. Certains doutaient des capacités d'Alexandre Daigle, fragilisé par des blessures et déclinant en NHL. L'ancien premier choix de draft leur répond actuellement par une bonne série offensive et un plaisir retrouvé à jouer au hockey. Partageant le titre de top-scoreur avec Reto von Arx, son bouillant compère de la ligne de parade (qui fut d'ailleurs long à se mettre en route), Daigle dirige pour l'heure une brigade offensive de qualité, mais bridée. En effet, seuls Langnau et Bâle font pire...

Davos est parti lentement, mais sûrement dans cette nouvelle campagne. Une entame poussive bien rattrapée par deux grosses victoires ce week-end, la première devant Lugano (3-2) et la seconde le lendemain à Rapperswil (3-1). C'est dire si la courbe semble ascendante chez les Grisons, au contraire de leurs hôtes d'un soir...

Pourtant, chacun est fermement disposé à jouer sa chance à fond ce soir. Ainsi, Davos lance les hostilités sur une passe dans l'intervalle de Reto von Arx à destination de Michel Riesen (0'19") avant que Niklas Anger ne leur réponde sur un débordement côté gauche (0'32"). Cette première offensive de l'ailier suédois provoque ainsi la première infraction du match mais Bâle n'en profite toutefois pas. Trop approximatif, le jeu de puissance ne pose pas de soucis à des Grisons biens en place. Assurément volontaires en ces premiers instants, les hommes d'Arno Del Curto précisent leurs intentions et apportent un danger accrû aux abords de la cage de Daniel Manzato. Difficile pour les Rhénans, mis sous pression, d'éviter les pénalités et deux pensums quasi-successifs amènent le HCD à poser le camp en zone offensive. Sûr de sa force, Davos procède avec minutie et fait méthodiquement tourner la rondelle. Patiemment, les vice-champions en titre attendent leur heure et finissent pas faire mouche sur un jeu à trois amorcé par Alexandre Daigle dans l'axe, en direction de Reto von Arx lequel centre au second poteau pour la conclusion imparable de Michel Riesen (0-1 à 05'59").

Rude entrée en matière pour l'EHC Bâle, qui parvient néanmoins à tuer la seconde pénalité de Mark Astley et tente de partir à l'abordage. Comme l'initiative est toujours récompensée, les locaux se voient octroyé un avantage numérique mais ne parviennent toujours pas à trouver la moindre solution. Pire encore, c'est même Alexandre Daigle qui se signale sur cette séquence en pressant Adrien Plavsic à sa bleue puis filant en break-away sans toutefois parvenir à venir à bout de Manzato (09'02"). Les Rhénans ont frisé la correctionnelle mais n'en demeurent pas moins sous l'emprise de leurs visiteurs. Le match se durcit alors peu à peu et les pénalités ne cessent de s'enchaîner. Dans cette averse de coups de sifflets, Bâle perd son avantage numérique et se fait prendre sur une incursion en zone offensive de Pascal Müller, lequel parachève son œuvre d'un slap flottant pleine lucarne (0-2 à 14'23"). Daniel Manzato paraît bien faible sur ce coup et voilà Davos pourvu d'une avance confortable de deux unités.

Le capitaine réveille ses troupes

Bâle se retrouve donc contraint de jouer contre sa nature: faire le jeu plutôt que le contrer. Une situation plaisante pour un HCD souverain qui n'a guère l'occasion d'être inquiété. Impuissants, les Rhénans ne profitent pas d'une suite de pénalités adverses et semblent tout droit se diriger vers les vestiaires avec un retard conséquent. Mais c'est sans compter sur la fougue du capitaine Alex Chatelain qui sonne la charge en remontant la zone neutre avant de placer un scud sous la barre. Jonas Hiller en reste pantois (1-2 à 19'16"). Une réduction du score aussi soudaine qu'inattendue qui a le mérite de complètement relancer ses coéquipiers. Ce premiers tiers annonce également la musique, ce match sera heurté et accroché jusqu'au bout...

C'est sans surprises que l'acte médian s'ouvre sur une empoignade comme on en voit peu ici. Réagissant à une attaque de Robin Leblanc sur Stefan Voegele, le top-scoreur Thomas Nüssli jette les gants et ouvre la boîte à gifles et se jetant sur le Canado-Suisse du HCD. S'ensuit un brassage monstre où Nüssli et Leblanc s'étripent avec joie et bonne humeur avant que l'international Andres Ambühl ne vienne mettre son grain de sel. Direction la porte pour Ambühl et Nüssli, qui sort sous l'ovation du kop bâlois (22'09").

Après ces quelques minutes de flottement, les deux formations tentent de reprendre leurs esprits. Sans grand succès pour Alexandre Daigle qui vendange stupidement deux superbes contres en commettant de grossières erreurs de contrôle (25e). Davos a sans le savoir laissé passer sa chance et voit les pénalités lui tomber sur le râble. Cette fois-ci, le powerplay rhénan gagne en confiance et se montre de plus en plus dangereux, notamment sur ces déviations devant la cage (27e). Réduits en infériorité, les Grisons défendent toutefois correctement et contrarient parfois leurs hôtes en proposant un jeu rapide en contre-attaque. La tendance semble ainsi doucement s'inverser, Bâle prenant petit à petit la mesure de Davosiens en nette baisse de régime malgré la sortie sur blessure du centre défensif Andreas Camenzind. À trop commettre de fautes on finit souvent par le payer...

Retour de flamme

C'est ce qui arrive au HCD, pris à froid au retour des vestiaires sur une montée côté droit du naturalisé Adrien Plavsic et le centre devant la cage qui en découle, coupé dans l'axe par le gardien Jonas Hiller mais repris en demi-volée par l'opportuniste Éric Landry (2-2 à 40'29"). Le mouches ont changé d'âne et Bâle survolté, embrase son public tout en enflammant la zone offensive. Dispersés, les Grisons ne résistent pas devant l'abnégation offerte notamment par Patric Della Rossa, auteur d'un travail colossal dans les deux sens. C'est d'ailleurs sur une de ces séquences que le palet continue à vivre en zone d'attaque. Chris Bright en hérite à la bleue et arme son lance frappé. Le slap de l'international nippon, bloqué dans l'enclave, se voit aussitôt récupéré par le lutin Régis Fuchs qui crée le décalage en passant au second poteau pour Mark Astley (3-2 à 43'26").

Cet incroyable retour de flamme plonge la partie rhénane de la St.Jakob-Arena en transe (l'autre partie, plutôt bleue et or, rumine) et ramène l'EHC Bâle à jouer dans son registre favori, la défense. La trappe de Kent Ruhnke se met inexorablement en place dans la neutre et le HCD n'a d'autres alternatives que de s'y empêtrer. Et comme tout semble aller de travers chez les Grisons, tous les contres de voient avortés à l'image de ce break de Daigle détourné de la mitaine par Manzato (46'43"). Seul coup de pouce du destin, une reprise sèche de Mark Astley s'en venant heurter le montant gauche de Jonas Hiller (51'12), enrayant par la même l'inflation du score.

Dos au mur, les Grisons sont contraints de se lancer à l'assaut du filet de Daniel Manzato. Sans grande réussite malgré une sacré débauche d'énergie. Rien n'y fait et le HCD se casse les dents sur le bloc bâlois, loupant une cage quasi-vide par Baumann (54'17") et perdant progressivement sa concentration. Ainsi, le défenseur Benjamin Winkler en couverture dans sa zone défensive se fait prendre par le forecheck agressif d'Éric Landry et met Hiller en danger (56'34"). Le temps presse désormais pour Reto von Arx et sa troupe mais les plus franches occasions restent désespérément dans le coin de Jonas Hiller, comme ce slap perforant signé Shawn Heins de la bleue que le portier international laisse filer dans son dos. Pas assez cependant pour franchir la ligne de but (58'37").

C'est maintenant ou jamais pour Davos, qui sort Hiller de sa cage (59'07") tout en mettant ses gros bras estampillés "ligue nationale" sur la glace. Mais, en dépit d'un siège dans le fort adverse, l'équipe se défend bec et ongles pour finalement s'offrir un succès de prestige.

À couper le souffle

Muselés en début de partie, les Rhénans ont su exploiter l'indiscipline grisonne (quinze pénalités mineures, trois méconduites et une exclusion pour un total de 82 minutes !) pour arracher, au courage, une victoire symbolique et réconfortante. Toute l'équipe à su s'accorder pour tirer de l'arrière et remonter son retard, à priori irrattrapable face à la défense la plus hermétique du pays. C'était sans compter sur l'orgueil bâlois. Cela, pas sûr que Davos l'ait pris en compte... Suffisants par instants et beaucoup trop nerveux, les hommes d'Arno Del Curto se sont fait surprendre en arrêtant de jouer après une période, ne réagissant qu'après avoir dépassé le point de non-retour en fin de match. En cela, les performances de ses leaders supposés n'ont pas franchement été au niveau escompté. Les NHLers Vaclav Varada et Aleksandr Khavanov furent bien discrets alors qu'Alexandre Daigle aura définitivement commis trop d'erreurs, pour la plupart en situation idéale devant le but. Ce fut donc l'enfant terrible Reto von Arx le plus efficace ce soir, et le plus convaincant des attaquants. Derrière, l'arrière-garde a progressivement baissé sa vigilance jusqu'à encaisser deux buts en quelques secondes. Sans doute là l'effet pervers de tous ce temps passé sur le banc d'infamie !

Voilà un coup d'arrêt dans la bonne série grisonne. Et une sacré relance dans le camp opposé où cette belle victoire chasse les nuages accumulés depuis quelques journées. Si l'EHC Bâle n'avait pu résister au retour final de Rapperswil la semaine passée (avec un but égalisateur de Mariusz Czerkawski à trente-six secondes du terme), la défense a cette fois-ci tenu bon devant le pressing désespéré du HCD. En confiance, cette équipe est décidément une peste à manœuvrer. Davos l'a réappris ce soir à ses dépens (pareille mésaventure leur était arrivée l'an dernier à la même époque)... Cela devient une habitude mais Daniel Manzato, en dépit de son mauvais but accordé face à Müller, a tenu le fort alors que l'équipe a su monter en puissance sur la lancée de l'égalisation d'Alex Chatelain en fin de première période. Jusqu'à déborder Davos à l'image d'un Éric Landry intenable et incisif durant la dernière période, ou encore d'un Patric Della Rossa s'affirmant petit à petit comme l'âme du groupe. Tout ne fut pas parfait, évidemment, mais un gain de la sorte face à un tel calibre de LNA a de quoi rassurer sur le potentiel du contingent.

L'histoire ne dit pas si les barbelés que compte prochainement installer Kent Runhke dans son ancien écrin de la BernArena empêcheront les Ours de mordre, mais elle nous apprend que Bâle - qui grimpe au neuvième rang provisoire - aura encore son mot à dire pour la suite des évènements.

Compte-rendu signé Jérémie Dubief.

 

Bâle - Davos 3-2 (1-2, 0-0, 2-0)

Mardi 10 octobre 2006 à 19h45 à la St.Jakob-Arena. 4023 spectateurs.

Arbitrage de Danny Kurmann assisté de Paul Rebillard et Laurent Schmid.

Pénalités : Bâle 46' (8'+10', 4'+20', 4'), Davos 82' (12', 12'+10'+20', 8'+10').

Évolution du score :

0-1 à 05'59" : Riesen assisté de Leblanc et von Arx (double sup. num.)

0-2 à 14'23" : Müller assisté de Daigle

1-2 à 19'18" : Chatelain assisté de Wüthrich

2-2 à 40'29" : Landry assisté de Plavsic

3-2 à 43'26" : Astley assisté de Fuchs et Bright (sup.num.)

 

Bâle

Gardien : Daniel Manzato.

Défenseurs : Adrien Plavsic - Gaétan Voisard ; Shawn Heins - Mark Astley ; Ralf Bundi (A) - Markus Wüthrich ; Sandro Tschuor - Lukas Gerber.

Attaquants : Jussi Tarvainen - Éric Landry (A) - Niklas Anger ; Patric Della Rossa - Chris Bright - Régis Fuchs ; Stefan Voegele - Alex Chatelain (C) - Thomas Nüssli ; Julian Walker - Andreas Camenzind - Franco Collenberg.

Remplaçant : Daniel Rüfenacht (G). Absents : Stefan Tschannen (prêté à Langenthal pour un mois), Corey Ruhnke, Stefan Schnyder, Urban Leimbacher (retourné à Olten en échange de Rüfenacht).

Davos

Gardien : Jonas Hiller [sorti de sa cage à 59'07"].

Défenseurs : Marc Gianola (C) - Gian-Marco Crameri ; Florian Blatter - Aleksandr Khavanov ; Benjamin Winkler - Gian-Andrea Randegger ; Andreas Furrer - Pascal Müller.

Attaquants : Michel Riesen - Reto von Arx - Alexandre Daigle ; Vaclav Varada - Josef Marha (A) - Loïc Burkhalter ; Andres Ambühl - Sandro Rizzi (A) - Robin Leblanc ; Peter Guggisberg - Ahren Nittel - André Baumann.

Remplaçant: Florian Kindschi (G). Absent : Jan von Arx (suspendu six mois pour consommation de cannabis).

 

Retour au championnat de Suisse