Finlande - États-Unis (22 février 2006)

 

Quart de finale des Jeux Olympiques de Turin 2006.

Les États-Unis, quatrièmes de leur groupe après un début laborieux contre la Lettonie et trois courtes défaites face aux trois premiers, sont opposés pour leur quart de finale aux Finlandais et devront réussir ce que ni le Canada, ni la République Tchèque, ni personne d'autre n'est parvenu à faire : dompter les lions de Finlande.

La partie commence sans round d'observation et le bad boy de l'équipe finlandaise Jarkko Ruuttu écope de deux minutes pour sa charge sur le gardien Rick Di Pietro. Les Américains avaient enfin retrouvé leur efficacité la veille en supériorité numérique contre la Russie, mais ils avaient aussi encaissé leurs deux premiers buts sur deux palets perdus en jeu de puissance. Et comme la veille, ils laissent Ville Peltonen s'échapper, et ce dernier en voulant tellement contourner le dernier défenseur parvient même à mettre le gardien hors de position. Son tir en angle fermé échoue sur poteau. Mais il prend sa revanche juste après. Sami Salo envoie à Jussi Jokinen derrière le but qui remet au centre pour la reprise de Peltonen. Rick DiPietro ne réussi qu'à ralentir le palet entre ses jambières (1-0 à 9'33").

Face à la domination finlandaise, Peter Laviolette fou de rage n'attend pas la première pause et demande un temps mort à la dixième minute. Chris Chelios semble écouter attentivement l'entraîneur des Carolina Hurricanes qui réussit une bonne saison en NHL. Mike Knuble se dirige vers la prison, suivi de Saku Koivu. Mais lors de leur courte période de supériorité numérique, le syndrome de la veille touche à nouveau les Américains : Sami Salo contre-attaque sur la gauche et arme tranquillement un puissant tir en entrée de zone, sans que personne ne vienne le déranger, et qui se loge en pleine lucarne (2-0 à 12'01"). Sur le reste de la supériorité, Brian Rolston perd encore un palet à la bleue, sans conséquence cette fois. Puis finalement, le powerplay finit par payer sur un beau slap mi-distance de Mathieu Schneider qui réduit la marque (2-1 à 13'14"). Seuls les Tchèques avaient réussi à déjouer la défense finlandaise dans le tournoi. Le jeu s'équilibre, et sur deux mauvaises entrées de zone finlandaises, les Américains obtiennent deux contres. Puis la défense finlandaise s'affole sur quelques montées de défenseurs adverses.

Saku Koivu commence le deuxième tiers sur le banc du cachot suite à une pénalité différée du premier tiers-temps que l'arbitre n'avait pu siffler, faute de Finlandais touchant le palet. Le jeu de puissance n'est pas spécialement incisif mais Matthieu Schneider est décidément en forme et inscrit, bien décalé par Brian Rafalski, un doublé sur un slap. Antero Niittymäki n'a pas eu la mitaine chaude (2-2 à 21'29"). Juste récompense pour la domination américaine de ce début de période. Deux minutes contre Derian Hatcher permettent aux Finlandais de souffler, d'autant que Bret Hedican le rejoint après avoir fauché Ville Peltonen parti en contre. Le 5 contre 3 ne donne rien et Rick Di Pietro s'écroule intelligemment sur sa cage pour respirer un peu ; mais il s'incline finalement sur l'infériorité : Olli Jokinen d'un tir à mi-hauteur en angle très fermé bat le gardien des Islanders de New York, surpris, qui s'était déjà agenouillé pour anticiper le centre (3-2 à 25'06").

Les Finlandais ont beaucoup de mal quand les États-Unis sont installés en zone offensive à cause en grande partie d'un jeu américain plus physique (ce qui donne un idée de la partie quand on connaît le jeu finlandais de ces dernières années). La Finlande défend très bas et ne se reprend que sur une pénalité contre Keith Tkachuk. Puis Ville Nieminen, pas très à l'aise à l'image de son équipe dans son rôle de forechecking, se prend deux minutes. Le jeu de puissance américain est infructueux, mais il a une deuxième chance sur une nouvelle pénalité contre Nieminen qui récidive à sa sortie de prison. Tkachuk, probablement jaloux, enchaîne lui aussi une nouvelle pénalité. Puis Matthieu Scheider rejoint Keith qui s'ennuie. Cette fois, les Finlandais ne laissent pas passer l'occasion d'un 5 contre 3 : Olli Jokinen reprend au centre et le palet rebondit en l'air avant de retomber sur la barre, puis sur DiPietro qui se débat et envoie le palet du bouclier dans son but (4-2 à 37'10"). Le but n'annule qu'une pénalité et les Américains reprennent avec encore un joueur en moins, mais réagissent avec un 2 contre 1, raté. Puis les Finlandais s'offrent un 2 contre 1 à leur tour, raté, puis un second, encore raté. Et encore un 2 contre 1 (raté bien sûr) pour les Américains... Ça sent la précipitation et la fatigue et il est temps pour les deux équipes de rejoindre le vestiaire.

Les Finlandais continuent d'attendre les Américains à la rouge mais semblent défendre plus sereinement qu'au deuxième tiers. Derian Hatcher écope de quatre minutes de pénalité pour avoir joué au dentiste avec Teemu Selänne qui crache le sang. Les palabres de Chris Chelios pour expliquer à l'arbitre que le geste est complètement involontaire n'y changeront rien. La Finlande prend son temps (ou plutôt ne veut prendre aucun risque) et fait tourner le palet en zone neutre, Selänne prend le premier tir après seulement une minute pour tenter de se faire justice, en vain. Teppo Numinen prend deux minutes pour éviter que Chris Drury parti en face-à-face ne recolle au score. Les Américains font tout pour revenir au score, ils installent presque un powerplay pendant quelques secondes alors qu'ils sont à quatre contre cinq. Keith Tkachuk prend sa troisième pénalité du match et Scott Gomez vient lui tenir compagnie pour avoir expliqué sa façon de penser à l'arbitre (dix minutes). Puis c'est au tour de Saku Koivu d'être la cible de l'arbitre une troisième fois, lors de ce match très viril. À quatre contre quatre, Chris Chelios prend un bon tir après une belle feinte mais Antero Niittymäki bloque parfaitement. En revanche, il s'incline sur un splendide tir que Chris Drury lui adresse en pleine chute et que Brian Gionta détourne, libre du marquage de Niko Kapanen, pas vraiment spécialiste pour faire le ménage devant le gardien (4-3 à 55'33").

La Finlande s'enfonce dans sa stratégie d'attente et casse le jeu pour annihiler toute tentative américaine. On comprend toute l'utilité de la ligne d'Antti Laaksonen pour compléter les deux premières lignes offensives. Rick DiPietro quitte sa cage à 58'37" pour créer le surnombre. Un tir contré de Cole à la bleue manque de peu de prendre le chemin du filet désert. Les Américains poussent, Matthieu Schneider à six contre cinq croit au triplé, il tire une fois, deux fois, mais la Finlande tient son but d'avance jusqu'à la sirène finale.

Les Finlandais se qualifient donc pour les demi-finales au terme d'une rencontre très physique où ils auront été bousculés au sens propre comme au figuré. Les Américains, dotés d'un gardien correct mais pas excellent, peuvent regretter leur mauvais début de partie qui les a conduits à courir après le score durant tout le match. Chose qui n'est encore jamais arrivée dans le tournoi à la Finlande grâce à la superligne Lehtinen-Koivu-Selänne (qui n'a pourtant pas marqué ce soir, tout le mérite revenant à la deuxième ligne), mais on ignore comment elle réagira alors.

Compte-rendu signé Benoît Mantel

 

Commentaires d'après-match

Teemu Selänne (attaquant de la Finlande) : "Nous savons que nous pouvons battre n'importe qui quand nous jouons à notre niveau, et nous n'avons même pas eu besoin de jouer si bien ce soir. J'ai perdu trois dents. C'est un petit sacrifice pour une médaille olympique. Les médailles sont plus rares que les dents."

Peter Laviolette (entraîneur des États-Unis) : "Nous n'avons jamais semblé sur la bonne voie dans ce tournoi. Dès le début du match, nous ne patinions pas. J'ai pris un temps mort parce que nous n'allions nulle part. Il fallait faire quelque chose avant que le match nous échappe. [À propos de Modano qui a peu joué au troisième tiers] Nous avions besoin de buts et de jeu offensif. La troisième période a clairement été notre meilleure période... Je pense que certains joueurs en général n'avaient pas la forme, et on fait de son mieux pour aligner les joueurs qui peuvent faire la différence."

Mike Modano (attaquant des États-Unis) : "On penserait que USA Hockey est une machine bien huilée, mais ce n'est pas le cas. Nous avons dû prendre nos billets d'avion et réserver nos hôtels tout seuls. Normalement nous n'aurions pas à dû nous préoccuper de ce genre de choses."

Don Waddell (manager des États-Unis) : "Ces commentaires sont très décevants, parce que les gens de USA Hockey font un boulot formidable. Il y a beaucoup de pression sur les gens, et les hauts cadres de USA Hockey sont des bénévoles."

 

Finlande - États-Unis 4-3 (2-1, 2-1, 0-1)

Mercredi 22 février 2006 à 20h05 au Palasport Olimpico de Turin. 6691 spectateurs.

Arbitrage de Paul Devorski (CAN) assisté de Milan Masik (SVK) et Steven Michael Miller (CAN).

Pénalités : Finlande 16' (8', 4', 4'), États-Unis 30' (2', 10', 8'+10').

Tirs : Finlande 25 (12, 10, 3), États-Unis 28 (8, 4, 16).

Évolution du score :

1-0 à 09'33" : Peltonen assisté de J. Jokinen et Salo

2-0 à 12'01" : Salo (inf. num.)

2-1 à 13'14" : Knuble assisté de Schneider et Weight

2-2 à 21'29" : Schneider assisté de Rafalski et Conroy (sup. num.)

3-2 à 25'06" : O. Jokinen assisté de Peltonen (sup. num.)

4-2 à 37'10" : O. Jokinen (sup. num.)

4-3 à 55'33" : Gionta assisté de Drury et Cole

 

Finlande

Gardien : Antero Niittymäki.

Défenseurs : Kimmo Timonen - Antti-Jussi Niemi ; Sami Salo - Petteri Nummelin ; Aki-Petteri Berg - Toni Lydman ; Teppo Numminen.

Attaquants : Jere Lehtinen - Saku Koivu - Teemu Selänne ; Ville Peltonen - Olli Jokinen - Jussi Jokinen ; Jukka Hentunen - Niko Kapanen - Niklas Hagman ; Ville Nieminen - Jarkko Ruutu - Antti Laaksonen ; Mikko Koivu.

Remplaçant : Fredrik Norrena (G).

États-Unis

Gardien : Rick DiPietro.

Défenseurs : Derian Hatcher - Jordan Leopold ; Mathieu Schneider - Chris Chelios (C) ; Bret Hedican - John-Michael Liles ; Brian Rafalski.

Attaquants : Keith Tkachuk - Scott Gomez - Brian Gionta ; Brian Rolston - Mike Modano - Erik Cole ; Jason Blake - Craig Conroy - Mike Knuble ; Chris Drury - Doug Weight - Bill Guerin.

Remplaçants : John Grahame (G), Mark Parrish.

 

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