Canada - États-Unis (31 décembre 2005)

 

Championnats du monde des moins de 20 ans 2006, groupe A.

C'est LE choc de ce premier tour. Les deux équipes font figure de favorites pour le tournoi mais ne sont pas dans le même état d'esprit. Le Canada apparaissait jeune et inexpérimenté mais a fait plutôt ses preuves lors des premiers matchs. Justin Pogge a tenu son rang dans les cages, les buts viennent de partout, y compris des défenseurs. La ligne travailleuse de Boyd, Downie et Comeau mène l'équipe en points de manière surprenante. Brent Sutter vise son deuxième succès en tant qu'entraîneur, ce qui lui permettrait de rejoindre Terry Simpson (1985-86) et Dave King (1982-83).

Les Américains pour leur part ont déçu depuis leur succès éclatant face à la Norvège, au point de concéder le nul face aux Suisses. Du coup la victoire est impérative pour terminer premier du groupe et se qualifier directement pour les demi-finales. Schneider est présent dans les buts, le duo des Johnson à l'arrière et le prodige Kessel affronte son concurrent pour la place de n°1 de la prochaine draft NHL, Jonathan Toews. Bref, tous les éléments sont réunis pour un grand match, avec un public canadien nombreux et entièrement acquis à la cause de la feuille d'érable, quitte à écorner le fair-play...

Le match suit les prévisions : physique, rapide et technique. Les mises en échec sont sévères mais les deux formations restent disciplinées... Ou plutôt, l'arbitrage siffle moins mais à bon escient (malgré l'oubli d'un cinglage de Downie sur Bourque dès la première mise au jeu). Les déclarations de la veille et la rencontre des deux entraîneurs avec le directeur du tournoi a donc permis de clarifier les choses... Le match est physique et spectaculaire pour le grand bonheur du public (et de la presse). Chorney franchit la ligne jaune en accrochant Boyd. Le Canada ouvre le score rapidement sur cet avantage numérique avec un tir croisé de la bleue par Cameron Barker, meneur de l'escouade défensive des rouges. Le défenseur de Medecine Hat, seul revenant de la médaille d'or de l'an passé (il avait manqué la finale sur mononucléose) montre ainsi la voie, servi par son équipier de club Kris Russell. Une minute plus tard, Cogliano part à son tour deux minutes pour accrocher. Les États-Unis posent le jeu de puissance mais Pogge verrouille avec l'aide de Luc Bourdon, espoir des Canucks très applaudi par le public local. Le rapide Cogliano part en deux contre un avec Chipchura dès la fin de la pénalité mais Schneider réalise un arrêt acrobatique et sauve les meubles. Peu de temps après, il bloque Michael Blunden à bout portant. Mais le cerbère de Boston College ne peut pas tout faire. Après sept minutes, pendant que Chris Bourque est gêné dans son replacement défensif par l'arbitre assistant, Boyd et Downie s'échangent le palet en deux contre un, le premier servant le deuxième pour fixer le gardien avant de recevoir le retour de passe pour un but ouvert. Malheureusement pour les locaux, Comeau prend une double pénalité pour crosse haute quelques secondes plus tard. Après plusieurs chances, les États-Unis réduisent la marque lorsque Kessel sert Bourque. Le joueur des Hershey Bears, devant son père Raymond présent dans les tribunes, frappe de loin, le palet est dévié par Dan Bertram côté crosse du gardien. Avec toujours autant de rythme, la période s'achève sur une occasion de Cogliano seul devant le gardien qui pense avoir marqué mais trouve en fait la transversale de Schneider. La puissance physique canadienne coûte malgré tout des pénalités et provoque un trois-contre-cinq en fin de tiers.

Ce double avantage se reporte en début de deuxième période mais le Canada tient bon avec un bon travail tout au long du match pour bloquer les tirs et laisser une bonne vision au gardien. Pogge, dont le nom est scandé par le public, réussit un superbe arrêt du gant sur Jack Johnson, avant d'être sauvé par son poteau sur un missile du défenseur de l'université du Michigan. Jack Johnson trouve peu après le poteau pour la seconde fois. Finalement, les pénalités finissent par coûter l'égalisation. Erik Johnson lance Tom Fritsche par une passe qui traverse toute la zone neutre, ce dernier trouve immédiatement Peter Mueller par une passe entre les jambes, et l'attaquant élimine Ryan Parent, qui manque sa mise en échec, pour tromper Pogge. Brent Sutter fait appel à son sens tactique pour casser le rythme adverse en envoyant son Energy Line. O'Marra, Bertram et Pyatt percutent la défense, multiplient les charges au point de garder le palet plus d'une minute dans la zone défensive américaine. Cela permet au Canada de digérer le 2-2 et de se re-concentrer. La fin de période reste indécise.

Dès le début du troisième tiers, Brian Lee accroche l'excellent Dustin Boyd. Ce dernier manque de peu de se faire justice lui-même sur une transversale de Bolland mais Schneider glisse bien pour fermer la porte. Puis, Ryan O'Marra reçoit le palet seul dans l'enclave mais son tir passe à côté. Le match devient fou, avec des occasions de part et d'autre et un mouvement permanent qui forcent Pogge et Schneider à se livrer un duel épique. Blunden part deux minutes en prison, offrant aux Américains une chance de gagner. Mais Pogge tient le choc, avant de sauver du gant un tir redoutable de Kevin Porter, déviant le palet sur le dessus du but. Le Canada se recroqueville en défense puisque le nul suffit, au point de simplement dégager le palet au fond une fois la zone neutre atteinte. Walt Kyle sort alors Schneider pour un attaquant de plus. Un nul ou une défaite ne changent en effet rien au classement, seule la victoire compte. Mais c'est Chipchura qui marque cage vide, offrant la victoire au Canada.

La partie se termine sur un vilain geste de Jack Johnson, avec un coup de coude violent sur Steve Downie envoyant ce dernier à l'hôpital sous la bronca du public. Jack Johnson, sorti pour méconduite, est élu joueur du match pour les États-Unis mais devant l'hostilité du public, c'est le capitaine Kevin Porter qui décide d'aller recevoir le trophée à sa place... Frank Gonzalez, directeur du tournoi, annonçait après le match que l'action de Johnson ne serait pas revue et n'entraînerait aucune suspension : un soulagement pour les Américains, qui auraient eu du mal à remplacer les trente minutes de glace de l'espoir des Carolina Hurricanes.

Le Canada est donc en demi-finales après avoir gagné le plus beau match du tournoi. Les États-Unis doivent pour leur part réussir l'exploit de gagner trois matchs en quatre jours pour la médaille d'or, performance que seules deux équipes ont déjà réussi.

Désignés meilleurs joueurs du match : Justin Pogge pour le Canada, Jack Johnson pour les États-Unis.

Compte-rendu signé Nicolas Leborgne

 

Commentaires d'après-match :

Brent Sutter (entraîneur du Canada) : "C'était un sacré match... J'ai trouvé que les deux équipes avaient joué à leur meilleur. Tous les joueurs se sont battus et c'était très équilibré. L'arbitrage a été très bon ce soir, surtout comparé à ce qu'il était les matchs précédents. C'est comme cela que le hockey doit se jouer. Les pénalités sifflées étaient justifiées. [À propos de la fête du nouvel an] Les joueurs ont bien mérité du lait et des cookies..."

Chris Bourque (attaquant des États-Unis) : "Ce n'est pas très amusant quand vous avez un nul et que vous perdez le match sur un but cage vide. Mais nous avions besoin de gagner et nous avons fait ce que nous devions. C'était la bonne décision mais nous n'avons pas pu en profiter. [À propos de l'attitude hostile du public] J'aime bien ça... C'est sûr, vous préférez être encouragés, mais vivre l'opposé était amusant. Le tournoi n'a pas été frustrant, mais intéressant. Je ne sais pas si nous sommes les favoris. Le Canada a une belle équipe et je pense qu'ils sont favoris désormais. Nous devons juste construire notre jeu pour avoir notre revanche."

Walt Kyle (entraîneur des États-Unis) : "Je suis fier de nos joueurs. C'était un sacré match, nous étions menés 2-0 dans un environnement hostile... Nous étions inquiets et anxieux au départ et nous avons commis des erreurs qui ont coûté cher. Mais la mentalité de l'équipe dans les vestiaires a permis de poser les choses et de jouer le match avec un très bon rythme. C'était une atmosphère difficile et nous avons montré beaucoup de persévérance. L'arbitrage a été bon, c'est comme cela qu'un match doit se jouer."

 

Canada - États-Unis 3-2 (2-1, 0-1, 1-0)

Samedi 31 décembre 2005 à 16h00 au Pacific Coliseum de Vancouver. 16083 spectateurs.

Arbitrage de Marcus Vinnerborg (SUE) assisté de Frantisek Kalidova (TCH) et Fredrik Ulriksson (SUE)

Pénalités : Canada 22' (4', 8', 10'), États-Unis 22' (4', 14', 4').

Tirs : Canada 30 (17, 8, 5), États-Unis 24 (8, 6, 10).

Évolution du score :

1-0 à 02'35" : Barker assisté de Russell et Pouliot (sup. num.)

2-0 à 06'42" : Boyd assisté de Downie et Comeau

2-1 à 10'27" : Bourque assisté de Kessel (sup. num.)

2-2 à 28'10" : Mueller assisté de Fritsche et E. Johnson (double sup. num.)

3-2 à 59'27" : Chipchura assisté de Downie (cage vide)

 

Canada

Gardien : Justin Pogge.

Défenseurs : Marc Staal - Ryan Parent ; Kris Russell - Cameron Barker ; Luc Bourdon - Kristopher Letang ; Sasha Pokulok.

Attaquants : Michael Blunden - Jonathan Toews - Benoît Pouliot ; Blake Comeau - Dustin Boyd - Guillaume Latendresse ; Kyle Chipchura - Andrew Cogliano - David Bolland ; Steve Downie - Daniel Bertram - Ryan O'Marra ; Tommy Pyatt.

Remplaçant : Devan Dubnyk (G).

États-Unis

Gardien : Cory Schneider.

Défenseurs : Jack Johnson - Erik Johnson ; Taylor Chorney - Brian Lee ; Chris Butler - Matt Niskanen ; Mark Mitera.

Attaquants : Phil Kessel - Kevin Porter - Chris Bourque ; Nathan Davis - Tom Fristche - Geoff Paukovich ; TJ Oshie - Nathan Gerbe - Jack Skille ; Bobby Ryan - Blake Wheeler - Robbie Schremp ; Peter Mueller.

Remplaçant : Jeff Frazee (G).

 

Retour aux championnats du monde des moins de 20 ans