Tours - Clermont-Ferrand (15 janvier 2005)

 

Match comptant pour la vingt-troisième journée de Ligue Magnus.

Ce n'est pas faute d'avoir été prévenue. Après sa très belle performance à Mulhouse, une semaine avant, l'ASGT savait qu'en recevant les Sangliers arvernes, en lutte pour la poule de maintien, rien ne serait facile. Pourtant, les Diables noirs se sont fait piéger. Ils ont dominé toute la partie, butant sur un Radek Lukes impérial, s'empêtrant dans la toile tissée par une équipe auvergnate très repliée, et s'exposant aux contres. Bref, le même système de jeu qu'affectionnent particulièrement les Tourangeaux d'habitude.

Le coach tourangeau avait choisi Vladimir Hiadlovsky pour garder les cages. Etait-ce là la volonté de traiter ce match un peu plus à la légère ? Toujours est-il que Hiadlovsky se rappelle aux bons souvenirs du public par un premier arrêt très délicat sur un tir anodin et lointain dès les premières secondes de jeu. Cette première frayeur passée, l'ASGT s'installe dans le camp clermontois à la suite d'une pénalité concédée par Lionel Simon pour une charge incorrecte sur Loïc Sadoun (0'24"). Le jeu de puissance est installé et Anton Poznik, par deux fois, allume les premières mèches (1'30). Gillings aura également sa chance mais le festival Lukes commence.

Le jeu est très rapide, d'autant plus que les deux équipes évoluent à quatre contre quatre (surnombre pour Tours et attitude antisportive pour Carl Michaelson). L'ASGT se procure une belle occasion grâce à la bonne entente entre Jonathan Roy et Rob Millar (3'49), et la première incursion clermontoise est à mettre à l'actif du capitaine Frédéric Nilly, un bon lancer dévié par Hiadlovsky (5'04).

La suite du premier tiers est totalement à mettre sous la domination territoriale de Tours. Jo Roy et François Gleize combinent parfaitement et il faut une faute de Michaelson de nouveau pour stopper l'élan des Diables noirs (5'50). La supériorité numérique ne donnera rien. L'ASGT campe dans la zone défensive de Clermont et semble évoluer systématiquement en power-play ; les Auvergnats ne sortent plus, ils restent groupés autour de leur dernier rempart et gênent considérablement les attaquants tourangeaux, complètement statiques. Quand les joueurs du CAHC peuvent récupérer le palet, leurs rares contres sont redoutables, et seul, une certaine maladresse dans le dernier geste les empêche d'ouvrir le score.

À l'inverse, les occasions tourangelles se multiplient : Gleize (11'15) qui part seul mais échoue, un tir dévié du défenseur slovaque Robert Fail (12'07), ou encore Alon Eizenman, dont le palet, ralenti par le gardien, aurait pu filer dans les buts, entre les jambières, si dans un ultime sursaut Lukes ne l'en avait empêché (13'39). De l'autre côté, Vladimir Hiadlovsky effectue son deuxième arrêt de la soirée après 14'06 de jeu sur un tir de Nilly, pas très appuyé. C'est ensuite Mrena qui teste le portier tourangeau (14'18), sans grand danger.

Ces incursions auraient dû apparaître aux hommes de Millette comme les premiers signes d'une confiance auvergnate retrouvée. Sur une remise en jeu gagnée dans leur zone offensive, François Martin décale Luc Mazerolle dont la reprise instantanée fait mouche. Hiadlovsky, masqué par le trafic devant sa cage, n'a rien pu faire (0-1, 14'52). Ce but, un peu contre le cours du jeu, semble déstabiliser l'équipe de Millette, alors qu'elle n'était déjà pas au mieux de sa forme. Manque de confiance ou de concentration, l'ASGT tombe dans des travers inhabituels comme cette passe manquée de Robert Fail qui remet en jeu, plein axe, un Cyril Gavalda qui n'en demandait pas tant. Heureusement, dans un geste impeccable de la crosse, Hiadlovsky écarte le danger (15'54).

À ce moment du match, l'ASGT éprouve de grosses difficultés pour trouver des solutions tactiques. Par de longues passes ou un palet envoyé systématiquement au fond, les Diables noirs donnent l'impression de ne pas avoir les ressources nécessaires pour proposer autre chose que le jeu voulu et imposé par Clermont. Le voilà, le fameux match piège tant redouté.

Heureusement, de rares éclairs de génie font rugir le public de plaisir comme cette chevauchée de Jo Roy (17'26), un des Tourangeaux les plus en vue ce soir, ou encore cette occasion pour Alon Eizenman sur une ouverture lumineuse de Philippe Roy (18'56). Mais, dans les buts, il y a Radek Lukes. Et c'est son soir aussi. Arrêts impeccables, un petit peu de chance, juste ce qu'il faut ; et ça suffit à Clermont pour rejoindre les vestiaires avec ce petit but d'avance.

Pour le deuxième tiers, on prend les mêmes ingrédients et on recommence. Tours domine, Lukes brille, Clermont résiste. Pourtant, ce n'est pas faute d'essayer côté tourangeau. Perricone d'abord (21'09), Jo Roy ensuite obligeant Martin à commettre une faute (23'30), Loïc Sadoun (24'18) dont le tir du revers manque de puissance, Jo Roy de nouveau (25'05), Poznik avec un très bon slap, dévié par le gardien clermontois (25'20). À de rares moments, Clermont sort la tête de l'eau et les Sangliers se disent qu'il y a moyen de se mettre davantage à l'abri quand ils voient la fébrilité du gardien de Tours, toujours aussi peu inspiré (26'10).

Le jeu s'emballe complètement alors ; la domination de Tours permet aux Clermontois de contrer, mais dans le même temps, la sortie de zone des Auvergnats laisse enfin les espaces tant prisés des attaquants tourangeaux. Les combinaisons fonctionnent, la défense adverse s'affole, c'est enfin le Tours que l'on aime.

Mais, bien vite, les Clermontois reviennent à leur système de jeu. Bien repliés, ils verrouillent la zone neutre, obligeant les attaquants tourangeaux à balancer au fond pour récupérer le palet. Une fois tout le monde bien en place, Lukes entre en piste. Et il est très très bon. Tous les attaquants de Tours s'y cassent les dents, tous les défenseurs en position de lancer à la bleue sont renvoyés à leurs chères études. Clermont résiste toujours, y compris pendant une pénalité de Lecompère. Agacés, les Diables noirs commettent eux aussi des fautes (Sadoun qui veut se rattraper d'un palet perdu en zone offensive, 37'23). Ils frôlent même la correctionnelle avec une nouvelle faute de Philippe Roy, offrant aux Sangliers une double supériorité numérique. Cette dernière, assez mal négociée, ne sera pas véritablement dangereuse mis à part le shoot d'Andrej Mrena (39'13).

Les Diables noirs reviennent avec les mêmes intentions de recoller au score qu'au deuxième tiers. Alon Eizenman est en action après quinze secondes de jeu seulement, mais Lukes est déjà présent lui aussi. Peu après, le juge de ligne, M. Antunes, prend le palet en plein visage sur un dégagement d'un joueur de Tours par le plexiglas. Le jeu est interrompu pour permettre à l'arbitre d'être soigné. Il souffre d'une forte coupure à la lèvre qui nécessitera la pose de points de suture. Le jeu reprendra quelques minutes après, mais sans lui.

Et on retombe dans le même schéma. Tours propose et Clermont dispose.

Dans ce match, le public est réveillé par les petites toiles du gardien Hiadlovsky, comme sur ce dégagement complètement raté où le portier oublie carrément le palet (45'09). Et la soirée des Diables noirs vire au cauchemar quand, sur une des rares poussées adverses, Philippe Roy trompe son propre gardien sur un palet venant de la droite (0-2, 45'58). Curieusement, ce deuxième but ne provoque pas une vive réaction de l'ASGT, complètement chloroformée par les Auvergnats. Au contraire, ces derniers flairent même le bon coup et commencent à croire sérieusement en la perf' du jour. Deux très belles occasions sont à mettre de leur côté : la première est pour François Martin sur un lancer capté sans rebond. La seconde, bien plus nette, est l'aboutissement d'un trois contre un. William Mouly tente sa chance mais rate cette énorme occasion (48').

La panique et l'agacement s'emparent de l'ASGT, de plus en plus en proie au doute. À vouloir aller trop vite (mais il est vrai que le temps presse), les joueurs ratent leurs passes ou tentent de longues transversales interceptées par l'adversaire la plupart du temps.

Mais les matches difficiles disputés dans ce championnat ont quand même apporté une expérience bénéfique aux joueurs. Après tout, il n'y a "que" 0-2. Alon Eizenman remet l'équipe dans le droit chemin avec une petite déviation, juste devant Lukes, qui passe de peu à côté (49'21). Poznik manque de nouveau le cadre dans la foulée, juste avant que Gleize et Paillet ne jouent les feux follets dans la défense (50'39), mais rien n'y fait, il y a toujours une crosse, un patin adverse qui traînent. Alors que l'on n'y croyait plus trop, l'espoir renaît avec cette reprise de l'attaquant canadien Éric Perricone. Suite à un engagement gagné en zone offensive, le tir ras de glace décoché instantanément trompe Lukes (1-2, 50'41).

L'ouverture du score pour l'ASGT a au moins le mérite de décrisper les joueurs. Le jeu prend une autre allure, beaucoup plus débridée, d'autant plus que Perricone d'un côté (51'08 pour cinglage) et Martin de l'autre (52'30 pour retenir) laissent leurs petits camarades de jeu s'exprimer sur la glace. Au tir de Pulscak, bien dévié (52'30) répond l'occasion nette de Fred Nilly, qui oblige Hiadlovsky à un arrêt pas très académique. Radek Lukes fait encore échec à une belle action menée par Benoît Paillet avec Rob Millar à la conclusion (55'31), et on se dit que le match va probablement en rester là.

C'est sans compter sur les ressources morales des joueurs de Millette. S'ils n'ont pas été brillants tout au long de la soirée, ce n'est pas faute d'avoir essayé. À l'image d'Anton Poznik. Toute la soirée, il a enchaîné les slaps, plus puissants les uns que les autres. Hors cadre ou déviés, le jeune défenseur n'a jamais trouvé la faille. Il sera finalement récompensé, après une première tentative encore infructueuse, en trouvant l'ouverture sur la droite de Lukes (2-2, 57'05). Une égalisation presque inespérée tant le mur clermontois paraissait infranchissable.

Piqués au vif, Clermont réagit dans la foulée, sur un deux contre un rondement mené par Luc Mazerolle, mais il trouve en face de lui un Hiadlovsky remotivé (57'58). Ce dernier se met encore en valeur sur le déboulé de Christophe Roux complètement oublié par les défenseurs de Tours (58'10). Vexé d'avoir manqué, l'Auvergnat se met à la faute en voulant se rattraper et écope de deux minutes pour obstruction (58'18).

Sur leur sixième supériorité numérique, les Diables noirs vont enfin marquer, suite à une combinaison magnifique de Perricone, Jo Roy et Philippe Roy. Le gardien Radek Lukes est embarqué par le jeu de passe des deux premiers, et le troisième ajuste son tir dans la cage désertée (3-2, 59'26). Dans une indescriptible cohue, l'ASGT vient de renverser une situation très mal engagée.

À trente secondes de la fin du match, le coach de Clermont demande un temps mort. Dès que son équipe est en possession du palet, il fait sortir son gardien. Il reste vingt secondes de jeu. Le palet est remis en jeu dans la zone défensive de Tours. Toute la pression clermontoise se fait sur la cage de Hiadlovsky. Et, alors qu'il reste une poignée de secondes à jouer, nouveau renversement de situation. Sur une mise en jeu du côté droit du portier tourangeau, l'ASGT se fait surprendre, les avis divergent sur le nom du buteur. Il semble toutefois que ce soit Christophe Roux. Toujours est-il que les Sangliers arrachent l'égalisation et la prolongation, ce qui n'est pas tout à fait immérité (3-3, 59'47).

Au cours de la prolongation, après un rush clermontois, l'ASGT tente d'arracher la décision avec Jo Roy (63'59) puis par l'intermédiaire de Rob Millar avec un tir malicieux, mais Lukes est toujours très vigilant. Anton Poznik en remet une couche, sans succès.

Le CAHC aura également sa chance avec Jean-Michel Bortino et Vladimir Hiadlovsky fait un arrêt délicat (65'29). La fatigue se fait sentir, les deux équipes se contentent de ce point partagé. Les Diables noirs ont abdiqué devant l'insolente réussite de Lukes, et les Clermontois dans leur course au maintien tiennent déjà un très bon point. La prolongation se termine sur une occasion de Gillings d'un lancer instantané (66'25), et surtout sur celle de Luc Mazerolle qui aurait pu, sur le gong, faire pencher la balance du côté des Sangliers (69'30).

Voilà donc l'épilogue de ce match bizarre, une sorte d'"attaque-défense". Mais les Diables noirs, sans pouvoir ouvrir le score rapidement, se sont découverts, ont été contrés par une équipe très solidaire et s'appuyant sur un Radek Lukes très bon. L'ASGT n'aura que peu de temps pour récupérer avant la venue d'Épinal, en match décalé de la 21e journée.

Compte-rendu signé E. O'Grady

 

Commentaires d'après-match (dans La Nouvelle République)

Bob Millette (entraîneur de Tours) : "C'est un gros point perdu à la maison dont on risque de reparler plus tard. Hiadlovsky a été fragile aujourd'hui mais je me devais de le mettre à l'épreuve. Ce n'est pas le fait qu'il nous manque un but qui a fait la différence mais plutôt d'en avoir encaissé un de trop. J'ai vu encore une fois le rouleau compresseur se mettre en marche lors du troisième tiers. Ça, c'est notre force."

François Gleize (Capitaine de Tours) : "C'est sûrement l'équipe qu'on a le plus dominée depuis le début de la saison, encore plus même que lors du match aller chez eux. Mais leur gardien s'est transcendé, il était béni des dieux. On ne pouvait rien, si bien qu'à la fin du match j'avais presque le sourire pour eux car ils ont joué crânement leur chance. Cela va nous faire redescendre sur terre, mais le plus important c'est de ne pas avoir perdu."

Milan Jancuska (entraîneur de Clermont) : "En faisant sortir mon gardien j'y croyais. On avait déjà été récompensé de la sorte à Villard-de-Lans. Ce résultat nous soulage, car Tours est une bonne équipe qui possède trois lignes très compétitives."

 

Tours - Clermont-Ferrand 3-3 après prolongation (0-1, 0-0, 3-2, 0-0)

Samedi 15 janvier 2005 à 20h00 à la patinoire municipale de Tours. 1500 spectateurs.

Arbitrage de Didier Bocquet assisté de Laurent Antunes et Yann Ruault.

Pénalités : Tours 14' (2', 10', 2', 0'), Clermont-Ferrand 18' (6', 8', 4', 0').

Évolution du score :

0-1 à 14'52" : Mazerolle assisté de Martin et Mouly

0-2 à 45'48" : Mazerolle

1-2 à 50'41" : Perricone assisté de P. Roy et J. Roy

2-2 à 57'05" : Poznik assisté de Sadoun et Eizenman

3-2 à 59'26" : P. Roy assisté de J. Roy et Millar (sup. num.)

3-3 à 59'47" : Roux assisté de Mrena et Nilly

 

Tours

Gardien : Vladimir Hiadlovsky.

Défenseurs : Anton Poznik - František Pulscak (A) ; Radek Stepan - Philippe Roy (A) ; Robert Fail.

Attaquants : Kent Gillings - Alon Eizenman - Loïc Sadoun ; Rob Millar - Jonathan Roy - Éric Perricone ; Peter Bohunicky - François Gleize (C) - Benoît Paillet.

Remplaçants : Ramon Sopko (G), Jan Simko, Valère Falck.

Clermont-Ferrand

Gardien : Radek Lukes (sorti de sa cage de 59'40" à 60'00").

Défenseurs : Andrej Mrena - Lionel Simon ; François Martin (A) - Carl Michaelson ; David Sarliève - Yann Lecompère.

Attaquants : Michal Dian - Frédéric Nilly (C) - Christophe Roux (A) ; Paul Kelley - Luc Mazerolle - William Mouly ; Cyril Gavalda - Jean-Michel Bortino - Martin Jeannette.

Remplaçant : Fabien Chardon (G). Absents : Frédéric Brodin (entorse), Alexis Billard.

 

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