Spartak Moscou - Khimik Voskresensk (23 octobre 2004)

 

Match comptant pour la vingt-et-unième journée de la Superliga russe 2004/05.

En voilà une affiche de légende. Le Spartak de Moscou contre le Khimik de Voskresensk. Deux clubs parmi les plus grands fournisseurs de talents du pays. Deux clubs formateurs et chéris pour cela par les amateurs de hockey russes. Deux clubs en pleine renaissance. Le Spartak remonte cette saison en élite après une saison au purgatoire de la poule occidentale de la D1, le Khimik est lui remonté l'an passé. Le Spartak 2004-05 ressemble d'ailleurs au Khimik 2003-04 : une bonne équipe pétrie de bonnes intentions, qui joue bien, mais qui a du mal à s'extirper du fond du classement. Avec un bémol cependant, le Spartak est quatorzième, alors que le Khimik de la saison passée était resté longtemps scotché un peu plus bas, quinzième ou seizième, les deux places de relégable. Mais comme cette année, il n'y a pas de relégation...

À signaler que jusqu'à l'an passé, on disait le Khimik Voskresensk, du nom de cette petite ville au sud-est de Moscou. Désormais, il faut dire le Khimik de la Région de Moscou (Moskovskaïa Oblast). C'est à cause de la politique sportive - ambitieuse - des autorités de la région de Moscou et de son président Boris Gromov. La région de Moscou (l'équivalent de la région Île-de-France) souhaite que ses clubs rivalisent avec ceux de la capitale. Pour cela, il a décidé de financer quelques-uns de ses clubs dans les disciplines phares. Le Saturn de Ramenskoïe qui joue en Première Ligue de football (élite) est ainsi devenu le Saturn Région de Moscou, le Dynamo de Tchekhov en Superliga de basket (élite) est donc transformé en Dynamo de la Région de Moscou, et le Khimik Voskresensk est donc désormais le Khimik de la Région de Moscou. Mais, je vous rassure, les fidèles supporters des Jaunes et Bleus continuent à scander "Voskresensk" lorsqu'ils encouragent les leurs. D'ailleurs cet après-midi à Sokolniki, ils sont une bonne cinquantaine a être venus depuis leur banlieue (oh, le snob de Moscovite... Ben quoi, moi j'habite au centre de Moscou !) en bus.

Et il faut dire qu'ils ont de quoi être satisfaits. L'équipe 04-05 du Khimik a fière allure. Avec ses deux joueurs de LNH, le défenseur d'Anaheim Vitali Vichnevski et l'attaquant d'Atlanta Viatcheslav Kozlov. Sans oublier les anciens de grands championnats européens comme Andreï Potaïtchouk (formé aux Krylia Sovietov, eh oui, encore un...) qui a joué au Sparta de Prague et en Finlande au HPK et à Ässät) ou Dimitri Chamoline qui a longtemps écumé la Suisse (Lausanne, Kloten, Sierre, Olten, Martigny ou Fribourg). Mais le Khimik, c'est avant tout les deux légendes, bientôt quadragénaires, du hockey local et mondial : le capitaine Guerman Titov, 39 ans, et son compère Valéri Kamenski. Quel plaisir de voir évoluer de tels joueurs qui sont rentrés donner un coup de main à leur club formateur. Cela change de certains...

Le Spartak est donc quatorzième et comme d'hab' en blanc et rouge, le Khimik est dixième et comme toujours en jaune et bleu. C'est parti ! Et c'est parti plus que vite ! Le Spartak ouvre la marque d'entrée par Dimitri Oboukhov. Un jeune joueur de 21 ans, arrivé du Tatarstan à l'intersaison du Neftyanik Almetievsk et formé dans le grand club tatar Ak Bars Kazan. Côté pile, Oboukhov marque (01'38), côté face, il part peu de temps après (03'24) sur le banc des prisons. Et la réplique des "banlieusards" ne se fait pas attendre. Un tir lointain du jeune défenseur, international junior des moins de vingt ans en 2003, Mikhaïl Lioubouchine fait mouche : 1-1 (04'29) Et là, je dis stop ! Ce jeune défenseur de talent, qui évolue sur la première ligne du Khimik a été formé où ? Ben oui, encore un qui viens des Krylia Sovietov ! C'est du pillage ! Bon, le Spartak n'a pas le temps de s'appesantir sur les déboires financiers de son voisin de l'ouest de Moscou (le Spartak étant à l'est de la ville), il a un match à gagner...

Les Moscovites profitent d'ailleurs d'une prison infligée au Kazakhstanais du Khimik Alexandre Lioubimov pour mettre le feu dans la défense des "Régionaux". Mais Peteris Skudra, le gardien international letton (formé à Riga puis longtemps passé par l'Amérique du Nord et même par la LNH à Vancouver) tiens parfaitement la baraque en cet après-midi sokolnikienne. Et c'est même le Khimik qui trouve la faille sur un contre rapide en fin de pénalité. L'attaquant, formé au CSKA, Albert Lechev part en trombe et dribble Alexeï Volkov, le gardien du Spartak (formé dans l'Oural avant de débuter chez les grands... où ? Aux KRYLIA SOVIETOV, nom d'un petit bonhomme...). Et cela fait 1-2 à la dixième minute.

Cela ne refroidit pas les rouges et blancs défendant l'honneur et la réputation de l'esclave révolté Spartacus. Igor Chetsov (12e) puis Andreï Chouroupov (14e) sont à deux doigts d'égaliser, mais Peteris Skudra est présidentiel (je ne peux pas dire impérial pour un Letton, cela risquerait d'être mal perçu...). Sur cette dernière action, Alexandre Lioubimov retourne d'ailleurs sur le banc des pénalités. Le Khimik laisse passer l'orage et le jeu devient de plus en plus équilibré. Les visiteurs prennent même l'ascendant en fin de tiers et il faut un Volkov bien inspiré pour éviter le troisième but de Voskresensk, en particulier sur un ultime tir d'Andreï Potaïtchouk.

Le Khimik repart sur les mêmes bases en début de deuxième tiers, avec une action dangereuse de Valéri Kamensky dès la deuxième minute, bien arrêtée par Alexeï Volkov. Peteris Skudra répond trente secondes plus tard avec un spectaculaire renvoi de l'épaule d'un violent tir spartakiste.

Une équipe spartakiste qui se fait une belle frayeur à la vingt-quatrième minute. Sur un mauvais changement de ligne, Andreï Potaïtchouk file vers le but, mais une fois encore, Alexeï Volkov veille. Et cela file d'une cage à l'autre, une minute plus tard, c'est au tour de Peteris Skudra d'arrêter un tir... du casque du Tchèque Martin Strba ! Le Spartak est en supériorité numérique (Denis Metliouk a été sanctionné à la 26e), mais le Khimik parvient à se défaire de l'étreinte et à tuer tranquillement la pénalité. Du moins, c'est ce que l'on pense. Tss, quelle erreur ! Car Peteris Skudra laisse un rebond en fin de prison et Dimitri Léonov n'a aucun mal à contourner le gardien letton et à marquer dans la cage vide (2-2 à 26'58). Peteris Skudra est encore à l'ouvrage à la 27e avec une superbe mitaine sur un tir de Dimitri Sémine.

À 30'00 pile poil, le Spartak invente la pause de la mi-match. Un bout de la balustrade se casse la figure (une balustrade a une figure maintenant ?) et les employés de Sokolniki en sont réduits à remplacer les joueurs sur la glace... Une fois le jeu repris, C'est Viatcheslav Kozlov qui se met en évidence. L'attaquant d'Atlanta effectue un beau raid en slalom dans la défense des joueurs de la capitale, puis c'est Andreï Potaïtchouk qui vingt secondes plus tard tire de près. Les attaques sont chimiques en cette fin de tiers. D'ailleurs, à la 35e, les visiteurs pensent avoir marqué. Ils lèvent les bras. Mais le palet n'est pas rentré. Vexés, les défenseurs spartakistes font savoir avec les poings que l'on ne marque pas comme cela un but à Sokolniki ! Viatcheslav Kozlov et Evgueni Tsybouk (qui venait de sortir de prison depuis sept secondes !) vont donc se calmer deux minutes sur le banc. La dernière action dangereuse du tiers sera quand même spartakiste avec un tir de Dimitri Sémine sur un rebond, après une très belle action des locaux.

La première occasion du troisième tiers-temps est également pour le Spartak, avec Andreï Chouroupov en évidence à la 43e, mais son tir passe juste à côté. Tiens, les supporters du Spartak déploient un grand drapeau du club ! Pourtant les "bouillants" fans du Spartak football ne sont pas là, leurs favoris jouent cet après-midi contre la lanterne rouge du Rotor Volgograd, et on ne les regrettera pas...

Le jeu s'accélère très nettement, mais les deux gardiens restent parfaits. Mais petit à petit, c'est le Spartak qui cède à la pression chimique... Le public s'énerve un peu contre l'arbitre lorsqu'il envoie en prison le défenseur moscovite Alexeï Komarov. Les supporters des Rouges et Blancs estiment que monsieur Boutourline a "oublié" deux fautes précédentes sur des joueurs spartakistes. Cela met de l'ambiance ! Cela chauffe encore plus lorsque le capitaine du Spartak, Sergueï Rechetnikov est "aplati" contre la bande, mais cela ne change rien au fond de l'affaire. Et le fond de l'affaire, c'est que Voskresensk est en train de mettre la main sur le match. La domination du Khimik est constante, même si à la 51e, le Spartak a un beau sursaut avec une suite de tirs dangereux.

Cela finit par payer pour l'équipe "régionale" à la 57e. Après un premier tir dangereux de Guerman Titov renvoyé par Alexeï Volkov, le défenseur d'Anaheim Vitali Vichnevski récupère le palet pour le but de la victoire.

Une petite parenthèse pour clamer ma joie de voir évoluer sur la glace des grands messieurs comme Guerman Titov et Valéri Kamenski. Quelle classe. Jamais une faute technique, jamais un mauvais geste. La "vieille" école est quand même plus "élégante" que les nouveaux millionnaires du hockey russe. Non, je ne vise personne...

Le Spartak tente le tout pour le tout, mais il ne reste pas beaucoup de temps. Surtout, la pression "chimique" ne baisse pas en intensité. Accélérations, contres dangereux, une-deux Titov-Potaïtchouk, tir juste au-dessus de Dimitri Chamoline, la palette du talent du Khimik est très étendue. Le jeu des "régionaux" est très fin, très beau à voir.

Une victoire donc tout à fait logique et méritée. Cela confirme que le Spartak à une année de retard sur le Khimik. Le promu lutte en Superliga, mais il est quand même sur la bonne voie. Quand au Khimik, avec cette victoire, il entre dans le club fermé et capital des huit premiers.

Élus meilleurs joueurs à la fin du match : Peteris Skudra pour le Khimik et Dimitri Oboukhov pour le Spartak.

Étoiles du match selon Sport-Express : *** Albert Lechev (Khimik), Guerman Titov (Khimik), Dimitri Oboukhov (Spartak).

Compte-rendu signé Bruno Cadène

 

Commentaires d'après-match

Sergueï Shepelev (entraîneur du Spartak) : "Perdre à trois minutes de la fin est très difficile à admettre. Je n'ai aucun reproche à formuler envers l'état d'esprit de mon équipe. Mais de telles erreurs défensives ne doivent pas être commises. En raison de notre manque d'attaquants, nous avons dû faire passer à l'offensive notre défenseur Korsunov. Nous espérons que la campagne des transferts pendant la trêve pourra renforcer notre effectif. Oui, nous avons plusieurs joueurs prometteurs, cependant ils ne parviennent pas à tenir nerveusement dans un tel marathon. Maintenant que la probabilité que le lock-out outre-Atlantique dure toute la saison augmente, les propositions de stars très titrées affluent en Superliga. Mais elles ne sont pas pour nous, il nous faudra nous contenter de ceux qui vont être écartés à cause de ces arrivées. Le staff n'a qu'un souhait : en gros, il nous manque une ligne d'attaque, la première. Car pour l'instant nous n'avons de première ligne que le nom, tous nos blocs étant presque de même valeur. Sans un leader expérimenté qui donne le ton, il sera impossible de franchir un palier au classement."

Vladimir Marinichev (entraîneur du Khimik) : "Dans le deuxième tiers-temps, l'équipe s'est assise sur ses lauriers, et ce n'est pas la première fois que ça lui arrive. J'ai alors décidé de passer à trois lignes. Il est dommage que nous n'ayons pas assez de joueurs pour former un puissant trio offensif supplémentaire."

 

Spartak Moscou - Khimik Moskovskaïa Oblast (Voskresensk) 2-3 (1-2, 1-0, 0-1)

Samedi 23 octobre 2004 à 13h00 au palais des sports Sokolniki, Moscou. 2400 spectateurs.

Arbitrage de M. Buturlin assisté de MM. Kamurkin et Anisimov (tous de Moscou).

Pénalités : Spartak 10', Voskresensk 14'.

Tirs : Spartak 22 (8, 8, 6), Voskresensk 29 (10, 5, 14).

Évolution du score :

1-0 à 01'38" : Obukhov assisté de Semin

1-1 à 04'29" : Lyubushin assisté de Leshev et Deïev (sup. num.)

1-2 à 09'12" : Leshev assisté de Deïev (sup. num.)

2-2 à 26'58" : Leonov assisté de Tsybuk

2-3 à 56'15" : Vishnevski assisté de Titov

 

Spartak Moscou

Gardien : Alekseï Volkov (sorti de sa cage à 59'51").

Défenseurs : Evgueni Shaldybin - Sergueï Reshchetnikov (c) ; Andreï Lopatin - Alekseï Komarov ; Evgueni Tsybuk - Tomas Zizka (TCH) ; Valeri Klimov - Vladimir Korsunov.

Attaquants : Martin Strba (TCH) - Igor Shevtsov - Andreï Samokhvalov ; Sergueï Shikhanov - Dmitri Semin - Dmitri Obukhov ; Mikhaïl Ivanov - Aigars Cipruss (LET) - Dmitri Shandurov ; Anton Nosov - Andreï Shurupov - Dmitri Leonov.

Remplaçant : Andreï Medvedev (G).

Khimik Voskresensk

Gardien : Peteris Skudra (LET).

Défenseurs : Mikhaïl Lyubushin - Vitali Vishnevski ; Andreï Zabolotnev - Andreï Poddiakon ; Aleksandr Lyubimov (KAZ) - Andreï Dylevski ; Viktor Sokolov.

Attaquants : Andreï Potaïchuk - Vyacheslav Kozlov - Valeri Kamenski ; Denis Metlyuk - Herman Titov (c) - Ilya Krikunov ; Albert Leshev - Alekseï Deïev - Dmitri Shamolin ; Dmitri Levinski - Aleksandr Romanov - Lev Berdichevski.

Remplaçant : Alekseï Egorov (G).

 

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