Dynamo Moscou - Lada Togliatti (6 décembre 2003)

 

Match comptant pour la trente-deuxième journée de la Superliga russe 2003/04.

Une après-midi d'ennui à Loujniki

Match entre équipe de haut de tableau en cet après-midi moscovite enneigé. Le Dynamo, quatrième, reçoit le Lada, troisième. Comme la victoire est à trois points, le Dynamo tient l'occasion de reprendre son fauteuil de leader abandonné en novembre. Pour cette rencontre, les bleus et blancs moscovites sont privés de leur jeune attaquant Igor Mirnov blessé au ménisque lors de la petite victoire (3-1) du Dynamo deux jours plus tôt contre Oufa, déjà à Loujniki.

Ce match face au Salavat Youlaev a laissé des traces psychologiques : menés 1-0, les Moscovites ont couru après le score pendant toute la rencontre pour s'imposer dans les cinq dernières minutes. Pour éviter une telle mésaventure, les Moscovites partent patin au plancher dans ce premier tiers. Un tir d'Alexandre Kharitonov (ex-NHL) au ras du poteau de Jean-François Labbé (Ex NHL) et un gri-gri d'Alexandre Ovetchkine (futur NHL) qui se termine sur le plastron du gardien québécois de Togliatti et le ton est donné.

Surtout que la quatrième minute n'est pas terminée que le défenseur "togliattien" Filip Metliouk est en prison. Le nombreux public du Dynamo (aujourd'hui le club le plus populaire de la ville, du moins en nombre de spectateurs) y croit. Mais rien ne passe. Plus grave, dès la prison terminée, et sur sa première action, le Lada marque. Une action confuse devant la cage d'Alexeï Volkov. Ce dernier repousse deux tirs de près, le troisième fait mouche grâce à Rouslan Bernikov. Un but de rapine (non, ce n'est pas un joueur russe...) suite à un palet mal dégagé.

Ce but coupe les pattes aux "Dynamistes", surtout que le jeu se stabilise suite à quelques prisons de chaque côté. Le bel enthousiasme du (tout) début de partie s'est envolé et l'on repense au scénario du match contre Oufa. On entre dans la dernière minute, et une nouvelle action confuse se déroule devant la cage de Volkov. Bis repetita, c'est Sergueï Sevostianov qui marque de près sur un but de raccroc et une assistance de son frère jumeau Mikhaïl. À 0-1, c'était déjà pas simple, à 0-2, les promesses de beau jeu s'envolent comme des flocons légers dans le ciel gris de Moscou (c'est aussi poétique qu'une affiche de Russie Unie cette phrase...).

Pourtant, dans les cinq premières minutes de jeu du deuxième tiers, les Moscovites ont deux supériorités numériques, mais cela ne donne rien. Le système défensif du Lada est effrayant, et cela dans chaque situation de jeu. Il y a toujours au minimum trois joueurs en position défensive, y compris si le palet est en zone neutre. On passe à quatre en cas d'attaque adverse.

Et puis survient le fait du match à la vingt-cinquième minute. Les Moscovites sont en double supériorité numérique. Au moment où la première prison "togliattiste" s'achève, le Dynamo marque par Alexeï Choupine. Un but en coin qui se loge dans la lucarne opposée. Le stade Loujniki se lève comme on lève sa "choupine" pour trinquer... Mais l'arbitre est aussi indécis qu'un électeur russe. Il demande leur avis à ses deux assesseurs qui n'en savent pas plus que lui. C'est donc la séance vidéo qui va durer de très longues minutes. L'arbitre ne sait toujours pas. Un photographe de presse vient même lui montrer un cliché pris sur l'action. Mais il ne sait toujours pas et replonge dans sa vidéo qui doit être aussi passionnante qu'un clip électoral pour l'absorber autant. Le public hurle "but", "Dynamo", mais finalement, après une très longue attente, le but n'est pas validé. Comme nous sommes en Russie et que l'on ne va quand même pas perdre son temps à s'expliquer auprès du petit peuple, aucune annonce n'est faite au micro. Je ne sais donc pas pourquoi ce but a été refusé. Moi, en tout cas, je peux certifier, votre honneur, que j'ai vu le palet de Choupine entrer dans le but de Labbé. Maintenant, peut-être que l'arbitre a estimé qu'il y avait un joueur dans la zone, ou peut-être aussi qu'il n'a rien vu et que la vidéo était nulle... En tout cas, ce but refusé stoppe net toutes les velléités offensives du Dynamo.

Pire, comme au premier tiers, à l'ultime minute de la période, Ilia Vorobiev, en supériorité numérique, inscrit le but assassin par excellence (0-3). Le calice, la lie, la boisson et ce genres de choses... D'ailleurs, puisque l'on parle de boisson, la majorité du public n'attend pas les 23 dernières secondes de jeu et se précipite au bistro. (Extraordinaire (?) jeu de mots franco-russe entre l'idée d'aller vite et le bistro...)

Le désespoir tombe sur Loujniki. Car franchement, la dernière période s'annonce fastidieuse. Le Dynamo ne sait pas comment percer la muraille et le Lada ne déroge surtout pas à sa tactique hyper-défensive, même en supériorité numérique. Pourquoi s'en priver quand ça marche ? La preuve : Sergueï Sevostianov marque d'un tour de cage ! 0-4 ! Et il reste dix minutes à jouer, enfin, à attendre la fin. Une grande partie du public n'a pas cette patience et préfère aller voir tomber la neige.

C'est uniquement par conscience professionnelle que je reste sur mon siège numéro 77 dans la rangée 23, car franchement, vivement le coup de sirène final ! Ce dernier finit par arriver et tout le monde rentre à la maison. La seule "vengeance" est de se dire que Togliatti est loin et que les joueurs du Lada ne sont pas encore couchés...

Certes, le Lada est premier ce soir, mais j'avais déjà vu "jouer" cette équipe contre le CSKA, et bien la prochaine fois qu'elle viendra à Moscou, je ferai l'économie de quelques roubles. Je sais bien que le jeu défensif est à la mode, qu'il est terriblement efficace et que dans le monde professionnel seul compte... gnagnagna et gnagnagna.

Sauf qu'à ce rythme, le hockey va devenir aussi pénible à regarder que le foot. Les entraîneurs qui se lancent dans ce genre de tactique (pour sauver leur fauteuil) jouent avec le feu, car si l'on voulait tuer la poule aux œufs d'or on ne s'y prendrait pas autrement. Pour la première fois, j'ai presque regretté de venir assister à un match de hockey. Dire que le Lada ne produit pas de jeu est un pléonasme, c'est tout simplement triste et insipide. J'espère pour le public de Togliatti que le Lada ne "joue" pas comme cela à domicile.

Enfin, après avoir fait ouf contre Oufa, le Dynamo a fait plouf dans la Lada... Malgré tout le respect que j'ai pour l'industrie automobile russe.

Compte-rendu signé Bruno Cadène

 

Commentaires d'après-match :

Zinetula Bilialetdinov (entraîneur du Dynamo) : "Pendant la préparation du match, nous avons attentivement étudié toutes les nuances du jeu du Lada, ses qualités et ses défauts. Mais en fin de compte nous avons perdu sur le point le plus important, l'attitude. L'envie de vaincre était clairement supérieure chez notre adversaire. Nous n'avons percé leur bloc, nous avons perdu la bataille dans l'enclave. Si l'on ajoute à cela le grand match du gardien de Togliatti, voilà ce qui explique cette sèche défaite."

Piotr Vorobiev (entraîneur de Togliatti) : "Nous n'apprécions pas de jouer à cette heure, c'est trop tôt pour un match de hockey. Néanmoins, nous avons peut-être livré notre meilleur match de la saison. Si nous mettons de côté la victoire sur Magnitogorsk au match aller, il semble que les rencontres face aux leaders ne nous réussissent guère. Par conséquent, nous avons adopté l'attitude appropriée, le combat. L'équipe a été un monolithe. De plus, n'ayons pas peur des mots, Labbé a été somptueux."

Jean-François Labbé (gardien de Togliatti) : "Sur le but refusé, je n'ai pas vu s'il est rentré au moment du tir. Quand le palet est passé dans mon dos, tout ce que j'ai senti, c'est l'attaquant du Dynamo qui m'arrivait dessus. Ensuite, j'ai vu le palet alors qu'il était pratiquement retombé sur la glace - mais pas dans la cage. Et je suis content sur l'arbitre ait partagé mon opinion. [...] Sur une attaque du Dynamo, je suis retombé sur ma main pliée, et des joueurs m'ont atterri dessus, ce qui a aggravé la torsion. Les docteurs n'ont rien décelé de sérieux, ça me fait un peu mal, j'espère que la douleur va passer. C'était probablement le match le plus difficile pour moi depuis mon arrivée en Russie, et aussi le plus réussi. Je ne voudrais pas que ce résultat soit terni par une sérieuse blessure."

 

Dynamo Moscou - Lada Togliatti 0-4 (0-2, 0-1, 0-1)

Samedi 6 décembre 2003 à 13h00 à la Malaya Arena Luzhniki. 3600 spectateurs.

Pénalités : Dynamo Moscou 14', Lada Togliatti 18'.

Évolution du score :

0-1 à 06'53" : Bernikov

0-2 à 19'10" : S. Sevostianov assisté de M. Sevostianov

0-3 à 39'37" : I. Vorobiev assisté de Skugarev et Titov (sup. num.)

0-4 à 49'34" : S. Sevostianov assisté de Pavlov et M. Sevostianov

 

Dynamo Moscou

Gardien : Alekseï Volkov.

Défenseurs : Sergueï Vyshedkevich - Aleksandr Zhdan ; Ilya Nikulin - Andrei Skopintsev ; Tomáš Harant (SVK) - Vladislav Bulin ; Mikhaïl Lyubushin - Igor Shchadilov.

Attaquants : Aleksei Tereshchenko - Aleksei Chupin - Vladimir Vorobiev ; Aleksandr Kuvaldin - Vadim Shakhraïchuk (UKR) - Aleksandr Ovechkin ; Aleksandr Stepanov - Denis Kartsev - Aleksandr Kharitonov ; Ruslan Zaïnullin - Yuri Babenko - Vladislav Evseïev.

Gardien remplaçant : Vitali Eremeïev (KAZ).

Lada Togliatti

Gardien : Jean-François Labbé (CAN).

Défenseurs : Ladislav Cierny (SVK) - Mikhaïl Balandin ; Vladimir Malenkykh - Maksim Semenov (KAZ) ; Aleksandr Titov - Filip Metlyuk ; Dmitri Vorobiev.

Attaquants : Aleksandr Buturlin - Aleksandr Gutov - Aleksandr Boïkov ; Oleg Belkin - Aleksandr Skugarev - Stanislav Zhmakin ; Mikhaïl Sevostyanov - Sergueï Sevostyanov - Evgueni Pavlov ; Ruslan Bernikov - Dmitri Kazionov - Yakov Rachinsky ; Ilya Vorobiev.

Gardien remplaçant : Vassili Koshechkin.

 

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