République Tchèque - Russie (7 mai 2002)

 

Quart de finale des Championnats du monde 2002 de hockey sur glace.

On retrouve le même quart de finale qu'aux Jeux Olympiques, mais aujourd'hui les Tchèques partent très largement favoris face à une piètre équipe russe. Il n'y a pas Khabibulin dans les cages, mais Maksim Sokolov, préféré à Podomatsky. De plus, le meilleur défenseur russe du tournoi, Dmitri Bykov, est absent, blessé au genou contre la Finlande. Ce sont donc des lignes arrières remaniées, avec Gusev en renfort, que Mikhaïlov espère plus performantes pour les phases finales.

Même en infériorité, pendant la première prison du match (un cinglage de Kubina), Jágr s'essaie à son exercice du "coast-to-coast", mais Ryabykin se replie bien. Pour autant, le jeu de puissance des Russes est toujours aussi peu convaincant. En revanche, même s'ils sont dominés, leur défense est bien présente physiquement. Un peu trop pour ce qui est de Kalinin, qu'une charge avec la crosse amène sur le banc des punitions. Malgré tout, Sokolov préserve sa cage inviolée et ses arrières éloignent bien les rebonds. L'attaque tchèque n'arrive pas à être vraiment dangereuse. En fin de compte, la Russie ouvre le score sur une contre-attaque rondement menée : Tkachenko passe derrière la cage, remet à Guskov dont le lancer de la bleue est dévié victorieusement par Kalinin. On n'est finalement pas si éloigné que ça du scénario des JO, puisque l'attaque tchèque est dramatiquement inefficace. Quant à sa défense, un moment d'absence lui a coûté très cher. La Russie, qui a pris trois engagements sur dix-neuf (!), aurait pu être complètement privée de palet, mais les rebonds perdus et les prises de risques tchèques dans la relance le lui ont suffisamment rendu.

La République Tchèque commence le deuxième tiers à fond. Dès que les Russes partent à l'attaque et se découvrent, l'occasion est immédiatement exploitée par les tenants du titre pour déployer leur jeu en mouvement : Hlinka perce sur la droite et décale Hrdina pour l'égalisation. Les Tchèques peuvent souffler, mais pas pour longtemps. Kubina met son genou en travers de la course de Tkachenko, et la Russie profite de la pénalité, encore par une déviation, de Karpov sur un tir de Kalinin. Les nerfs tchèques commencent à craquer, et Sýkora réplique de sa crosse après une mise en échec d'Afinogenov. Bien qu'en infériorité, la République Tchèque combine magnifiquement, mais Kubina vient buter sur Sokolov et s'échouer sur la cage. Ces instants sont fatidiques car les Russes se retrouvent bientôt à trois pendant plus d'une minute. Ce double avantage numérique est d'une importance cruciale pour la suite des débats, mais les Tchèques ne trouvent pas la faille malgré une reprise de Jágr qui heurte la transversale. La fin de tiers est éprouvante pour les Tchèques qui s'épuisent à attaquer en vain. Dans les vingt dernières secondes, Sushinsky est même lancé en contre, mais manque de champ pour contrôler le palet.

Les Tchèques sont assommés dès le début du troisième tiers par Karpov qui conclut un superbe tour de cage de Kovalenko. Celui-ci place également un contre pendant une supériorité tchèque encore inefficace. Le jeu de puissance tchèque ne paraît plus aujourd'hui en mesure d'ouvrir les paquets-cadeaux que sont les dernières pénalités russes : Yudin sanctionné seul après une altercation, une pénalité de banc pour un surnombre, et enfin Butsaïev qui retient la crosse de Jágr après avoir perdu la sienne. Les Tchèques sont éteints, incapables de la spontanéité qui les rendait par moments si imprévisibles. Quant à Sokolov, il continue jusqu'au bout à parfaitement boucher les angles et à lâcher peu de rebonds.

La dynastie tchèque a donc pris fin. Cette formation conquérante, à qui la réussite souriait dans les grands rendez-vous, a disparu ce 7 mai aux alentours de Jönköping. Cette fin de règne est d'autant plus cruelle qu'elle intervient comme aux JO face à l'éternel rival russe, contre qui tout avait commencé à Nagano. Le ciel est tombé sur la tête des Tchèques, et il ne leur reste plus aucun trophée, seulement leurs yeux pour pleurer. Seule équipe invaincue dans le tournoi, la République Tchèque est rentrée dans le rang et est redevenue une nation de hockey comme les autres. La faute à une défense russe bien organisée et qui n'a jamais rien lâché contrairement à son homologue tchèque. Elle s'était bien entraînée contre la Finlande à passer tout le match dans sa zone et à résister, cela lui a finalement servi. Après sa prestation ridicule de la veille contre la Slovaquie, elle a su passer aux choses sérieuses quand le jeu en valait la chandelle.

Élus meilleurs joueurs du match : Petr Cajánek pour la République Tchèque et Maksim Sokolov pour la Russie.

Les trois meilleurs Tchèques de la compétition : Milan Hnilicka, Pavel Kubina et Jaromír Jágr.

Compte-rendu signé Marc Branchu

 

Commentaires d'après-match :

Josef Augusta (entraîneur de la République Tchèque) : "La défense a bien travaillé. Sur le premier but, le tir a été dévié, sur le deuxième, les Russes étaient en supériorité, et le troisième est venu d'une contre-attaque rapide. Non, la défense n'a pas failli à sa tâche. Si nous avons perdu, c'est parce que nous n'avons pas su concrétiser nos occasions en attaque."

Pavel Patera (République Tchèque) : "Cela n'a rien de plaisant. Je m'en veux d'avoir pris la pénalité qui amène le second but. J'avais perdu le palet dans l'action et j'essayais juste de ralentir le joueur. Nous avons pressé bien trop fort. Nous n'avons pas profité de ce double avantage numérique. Cela nous a cassé les reins."

Martin Procházka (République Tchèque) : "Les Russes ne savaient que trop bien que notre jeu de puissance était organisé autour de Jaromír Jágr. Ils l'ont neutralisé grâce à un gros travail défensif et à une impressionnante performance tactique. [...] Ces dernières années, nous avons eu pas mal de chance dans nos succès, maintenant c'est à notre tour d'avoir la poisse."

Maksim Sokolov (gardien de la Russie) : "C'était un adversaire très difficile. Leur première ligne en particulier nous a fait tourner la tête au début. Les Tchèques jouent toujours un hockey attrayant. Mais nous avons gagné aujourd'hui, non pas parce qu'ils nous ont sous-estimés, mais parce que nous avons joué avec beaucoup de cœur."

Andreï Kovalenko (capitaine de la Russie) : "Au début du tournoi, nous avons joué comme on nous l'a appris, nous avons attaqué, nous avons tenté de bouger l'adversaire... et nous n'avons pas gagné. À partir des quarts de finale, il est trop tard pour expérimenter. Il était clair que si nous attaquions les Tchèques la fleur au fusil, ils allaient nous flinguer en contre-attaque. Nous n'avions pas un effectif supérieur, mais nous avions la bonne attitude. Eux voulaient leur revanche de Salt Lake City, mais surtout, ils s'étaient déjà projetés au-delà de ce quart de finale. C'est le pire qui peut arriver à une équipe de ce niveau, la plus forte formation tchèque de ces dernières années selon Vladimír Vujtek [entraîneur tchèque du Lokomotiv Yaroslavl, club champion de Russie où joue Kovalenko]."

 

République Tchèque - Russie 1-3 (0-1, 1-1, 0-1)
Le 7 mai 2002 à 20h00 à la Kinnarps Arena de Jönköping. 4903 spectateurs.
Arbitrage de Marko Lepaus (FIN) assisté de Serge Carpentier (CAN) et Kevin Redding (USA).
Pénalités : République Tchèque 6' (2', 4', 0'), Russie 14' (2', 4', 8').
Tirs : République Tchèque 37 (11, 12, 14), Russie 17 (5, 7, 5).
Engagements : République Tchèque 42 (16, 13, 13), Russie 23 (3, 11, 9).

Évolution du score :
0-1 à 15'47" : Koznev assisté de Tkachenko et Guskov
1-1 à 23'58" : Hrdina assisté de Hlinka et Sýkora
1-2 à 28'27" : Karpov assisté de Kalinin et Kovalenko (sup. num.)
1-3 à 40'22" : Karpov assisté de Kovalenko
 

République Tchèque

Attaquants :
Jaroslav Hlinka - Ján Hrdina - Jaromír Jágr
Martin Procházka - Pavel Patera - David Moravec
Tomáš Vlasák - Petr Cajánek - Viktor Ujcík
Zdenek Sedlák - Michal Broš - David Výborný

Défenseurs :
Jaroslav Špacek - Pavel Kubina
Frantisek Kaberle - Michal Sýkora
Rostislav Klesla - Filip Kuba
Ondrej Kratena - Martin Richter

Gardien :
Milan Hnilicka [sorti à 58'46"]

Remplaçant : Dušan Salfický (G).

Russie

Attaquants :
Valeri Karpov - Vyatcheslav Butsaïev - Andreï Kovalenko
Dmitri Zatonsky - Aleksandr Prokopiev - Maksim Sushinsky
Igor Tkachenko - Alekseï Koznev - Vladimir Antipov
Ravil Gusmanov - Roman Lyashenko - Maksim Afinogenov

Défenseurs :
Dmitri Kalinin - Sergei Zhukov
Dmitri Ryabykin - Sergei Gusev
Sergei Vyshedkevich - Aleksandr Yudin
Anton Volchenkov - Aleksandr Guskov

Gardien :
Maksim Sokolov

Remplaçant : Egor Podomatski (G).

 

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