Russie - France (29 avril 2000)

 

Championnats du monde 2000 à Saint-Pétersbourg, premier tour, groupe D.

Les Français ne pouvaient pas imaginer une entrée en matière plus difficile : affronter une impressionnante équipe de Russie, favorite du Mondial, chez elle à Saint-Pétersbourg. Pour Patrick Rolland, qui passe du deuxième niveau français (Nationale 1) à l'élite mondiale avec une première ligne Kamensky-Zhamnov-Bure, la transition est abrupte. Le gardien de Villard-de-Lans capte pourtant deux bons palets d'entrée de match, mais après seulement 1'14" de jeu, Maksim Sushinsky récupère un rebond et ouvre le score. Le joueur de l'Avangard Omsk double même la mise cinq minutes plus tard après un débordement sur la gauche d'Aleksandr Kharitonov. Puis c'est Viktor Kozlov qui réalise un superbe travail et fixe deux défenseurs pour décaler Maksim Afinogenov, qui marque. Trois buts en dix minutes : le score reflète la domination sans partage des Russes, qui acculent les Français dans leur camp.

Pavel Bure

Heureusement, Benoît Bachelet réduit la marque sur ce qui n'est que le deuxième tir cadré français, et permet de dissiper les craintes d'humiliation des Tricolores. Les qualités individuelles des Russes obligent souvent les Français à se porter à deux sur le même homme, ce qui laisse des joueurs démarqués. Les occasions franches sont ainsi nombreuses et Rolland, sollicité de toutes parts, sauve la baraque à plusieurs reprises. Même si la période a été à sens unique (18 tirs à 2), on peut retenir des points positifs : la réaction d'orgueil des Bleus après le départ en trombe des Russes, les trois pénalités tuées par les Français, et leur capacité à se montrer dangereux lors de leurs bien trop rares incursions dans la zone adverse.

D'entrée dans le deuxième tiers, Rolland détourne un tir de Sushinsky sur le poteau au cours d'un action où Zwikel est pénalisé de deux minutes. Sur la supériorité numérique qui en découle, Sergueï Gonchar aggrave le score par un slap de la ligne bleue. C'est alors que surgit l'étoile annoncée de ce Mondial, qui s'était faite relativement discrète jusque là : le capitaine russe Pavel Bure transperce la défense française lors d'une majestueuse action individuelle. Après ce début de période à nouveau difficile, les Français effectuent un changement de gardien volant qui déclenche une clameur dans la patinoire, puisque Lhenry regagne ses buts juste à temps pour récupérer un dégagement russe qui filait dans la cage des Bleus. Les Français tentent de se montrer entreprenants, à l'image de Briand qui trouve le poteau, mais en oublient les fondamentaux : Petrov part ainsi seul en contre-attaque sans succès, puis Sushinsky, laissé seul devant la cage à cause d'une grossière erreur de marquage du duo Bachet-Filippin lors d'un engagement, complète son triplé. Pavel Bure y va ensuite d'un nouvel exploit personnel en laissant sur place Amar dans le coin pour inscrire le septième but. L'addition est salée, mais les Français ont été absents des débats.

Le jeu s'équilibre dans le dernier tiers, la France réussissant enfin à peser sur le match. Les Bleus mettent à l'épreuve un gardien russe qui commençait à s'engourdir. Mais ils ne seront pas récompensés de leurs efforts, et les Russes, désireux de terminer le match sur une bonne note, rajouteront une dernière brique à leur édifice à deux minutes de la fin (but de Prokopiev assisté de l'inévitable Sushinsky), bien près d'inscrire même un neuvième but dans les toutes dernières secondes.

Les Russes n'ont pas manqué leur entrée en lice et s'affirment comme l'équipe à battre de ce championnat. On attendait leurs stars de la NHL - et Pavel Bure a été fidèle au rendez-vous par trois coups d'éclat enthousiasmants dont deux buts - mais force est de constater que la Russie s'est aussi beaucoup appuyée sur les joueurs restés au pays, tel Maksim Sushinsky. Quant aux Français, pour qui cette équipe était un trop gros morceau, ils doivent se concentrer sur les matches à leur portée, contre la Suisse et les États-Unis, des adversaires de haut calibre mais prenables.

Désignés joueurs du match : Pavel Bure pour la Russie et Benoît Bachelet pour la France.

Marc Branchu

Commentaires d'après-match

Aleksandr Yakushev (entraîneur de la Russie) : "Nous avons remporté une victoire tranquille, mais cela ne signifie pas que l'équipe n'a pas de défauts. Nos mécanismes étaient parfois défectueux. Nous avons reçu le renfort de dix joueurs de la NHL ces derniers jours, et il nous reste à améliorer notre jeu de puissance et notre travail d'équipe. La ligne de Bure n'a par exemple existé que grâce aux actions individuelles de Pavel. La ligne de Nikolishin a raté son match et a encaissé le but français, mais Andreï Kovalenko n'est arrivé à l'hôtel que quatre heures avant le match et je n'en attendais donc pas grand-chose. Les actions collectives ont laissé à désirer, à part peut-être pour la ligne de Prokopiev. Le meilleur joueur a été sans discussion Sushinsky, excellent."

Stéphane Sabourin (entraîneur de la France) : "Nous avons attentivement écouté la météo hier, et elle prévoyait une tempête pour aujourd'hui. Nous avons subi l'ouragan pendant trois tiers-temps. Dans notre équipe, il y avait beaucoup de jeunes joueurs, et la majorité de leurs adversaires étaient leurs idoles. J'ai tenté de les préparer à ça, mais comment voulez-vous qu'ils ne soient pas intimidés ? Nous avons essayé de faire bonne figure, mais il est dommage que notre début de match ait été si mauvais. Notre troisième période permet cependant d'aborder la suite avec optimisme. J'ai félicité Yakushev, mais il n'en avait rien à cirer. Nous n'avons pas le respect de nos pairs, et ils ont raison. Nous ne sommes que la 15e nation mondiale. On ne surprendra pas la Suisse. Depuis deux ans, ils nous ont battus 5-1 et 6-0. Quel coach irait prétendre que c'est jouable ?"

 

Russie - France 8-1 (3-1, 4-0, 1-0)
Vendredi 29 avril 2000 à 20h30 au Ledovy dvorets de Saint-Pétersbourg. 11000 spectateurs.
Arbitrage de Vladimír Šindler (TCH) assisté de Panu Bruun (FIN) et Johan Norrman (SUE).
Pénalités : Russie 8' (0', 4', 4'), France 20' (6', 6', 8').
Tirs : Russie 48 (18, 6+13, 11), France 14 (2, 5, 7).

Évolution du score :
1-0 à 01'14" : Sushinsky assisté de Markov
2-0 à 06'21" : Sushinsky assisté de Kharitonov
3-0 à 09'31" : Afinogenov assisté de Petrov et Kozlov
3-1 à 10'54" : Bachelet
4-1 à 22'54" : Gonchar assisté de Kudashov (sup. num.)
5-1 à 24'15" : Bure
6-1 à 28'52" : Sushinsky assisté de Prokopiev et Kharitonov
7-1 à 30'41" : Bure assisté de Zhitnik
8-1 à 57'56" : Prokopiev assisté de Sushinsky
 

Russie

Attaquants :
Valeri Kamensky (+2) - Aleksei Zhamnov (A, +2) - Pavel Bure (C, +2, 2')
Oleg Petrov (+1, 2') - Viktor Kozlov (+1) - Maksim Afinogenov (+1, 2')
Aleksandr Kharitonov (+4) - Aleksandr Prokopiev (A, +4, 2') - Maksim Sushinsky (+4)
Aleksei Kudashov (-1) - Andrei Nikolishin (-1) - Andrei Kovalenko (-1)

Défenseurs :
Aleksei Zhitnik (+1) - Sergei Gonchar
Dmitri Mironov (+2) - Igor Kravchuk (+2)
Andreï Markov (+4) - Aleksandr Khavanov (+4)
Maksim Galanov (-1)

Gardien :
Ilya Bryzgalov

Remplaçant : Egor Podomatsky (G).

France

Attaquants :
Stéphane Barin (-1, 2') - Robert Ouellet (-1) - Benoît Bachelet
Maurice Rozenthal (-3) - Arnaud Briand (C, -2, 2') - Philippe Bozon (A, -4, 4')
Pierre Allard (-1) - Laurent Meunier (-1, 2') - Yorick Treille
Richard Aimonetto (-1) - Jonathan Zwikel (-1, 2') - François Rozenthal (-2)
Anthony Mortas (-1)

Défenseurs :
Vincent Bachet (-1, 2') - Jean-Christophe Filippin (-3, 2')
Jean-Marc Soghomonian (-2) - Denis Perez (A, -2, 2')
Grégory Dubois (-2) - Karl Dewolf (-1, 2')
Baptiste Amar (-1)

Gardien :
Patrick Rolland puis Fabrice Lhenry à 25'11"

En réserve : Cristobal Huet (G).

 

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