États-Unis - Suède (19 février 1994)

 

Jeux olympiques 1994, groupe B, quatrième journée.

Après trois matches nuls dans ce tournoi (France, Slovaquie, Canada), les Américains peuvent voir le verre à moitié vide ou à moitié plein. Ils sont normalement d'un naturel optimiste, mais se satisfont rarement de la demi-mesure : affronter la Suède, une des favorites du groupe, permettra de mieux jauger cette invincibilité. Le match a un record de têtes couronnées dans les tribunes : le roi et la reine de Suède (Carl Gustav et Sylvia) y côtoient en effet le couple royal de Norvège (Harald et Sonja).

Les États-Unis mettent de l'intensité et de l'engagement physique dès le début de la partie. Le gardien suédois Tommy Salo semble se mettre au diapason de ce style de jeu. Il est agressif et actif de la crosse, n'hésitant pas à plonger pour écarter un palet en devançant l'attaquant. Après deux minutes une contre-attaque rapide sur la gauche aboutit à une reprise de Charles Berglund seul dans l'enclave face au but largement ouvert : il trouve le moyen de manquer le cadre ! Cette action prouve que la vitesse de patinage joue en faveur de Tre Kronor, ce qui se vérifie encore quand Patric Kjellberg déborde David Roberts et se fait accrocher. Les Suédois multiplient les lancers pendant cette première supériorité numérique.

Après avoir tué une pénalité bête de Roger Hansson en zone offensive (faire trébucher), la Suède tente à son tour de mettre la pression sur la défense adverse par un fore-checking très haut. Mais cela peut être dangereux sur les transitions. Dans un duel dans la bande, Roger Johansson semble perdre l'équilibre, comme s'il avait coincé son patin. Il en a lâché son marquage sur Thomas Lilley, qui peut repiquer à la cage : il évite Magnus Svensson qui se couche puis le poke-check de Salo puis fait passer le palet juste derrière la ligne, comme le montre l'arbitrage vidéo introduit pour la première fois, et qui met près de trois minutes à rendre sa décision. La Suède égalise très vite. Mats Näslund entre en zone en contrôle du palet, capte l'attention et sert du revers dans le profondeur Patrik Juhlin qui est passé derrière de la défense. Un peu gêné par le poke-check de Dunham qui touche ses patins, Juhlin parvient quand même à marquer... du revers derrière son dos. Deux jolis buts techniques !

Le style physique des Américains, à l'instar de Rolston qui propulse Doe-Boje dans la bande, ne gêne pas les Suédois qui prennent le contrôle du palet et du match. Ils prennent l'avantage, de nouveau par Juhlin, qui dévie dans l'enclave un lancer de la bleue de Magnus Svensson.

La deuxième période assoit la domination suédoise. Les Américains sont tenus à distance sur leur jeu de puissance. David Sacco, qui s'est sacrifié en se couchant devant un lancer, déloge ensuite la cage de ses gonds alors que Peter Forsberg a mis le feu en repiquant au but. Il ouvre le bal d'une succession de pénalités américaines. La Suède finit par marquer en supériorité numérique, encore grâce à Patrik Juhlin qui signe un authentique hat-trick (trois buts consécutifs). Placé à droite du but, Juhlin a bénéficié du travail de Charles Berglund, dont la présence très affirmée a fixé les défenseurs dans l'axe. Roger Hansson enfonce le clou en prenant un rebond en angle très fermé. Cela fait 4-1, et cela aurait pu faire 5-1 après une nouvelle pénalité américaine (un cinglage de Lilley) : le boulet de canon envoyé par Due-Boje depuis la ligne bleue fait résonner le poteau !

La vigilance doit cependant se maintenir 60 minutes dans un match de hockey. Même si les États-Unis abordent la troisième période en infériorité, Darby Hendrickson s'échappe en solitaire. Il perd son face-à-face avec Tommy Salo, mais subit un violent cinglage de Due-Boje. Quand la pénalité de ce dernier s'achève, le défenseur américain Edward Crowley récupère un palet envoyé dans la zone, évite Jörgen Jönsson lancé et effectue une passe via la bande vers Craig Johnson qui dévie instantanément pour Peter Ferraro, parti dans l'axe au milieu des défenseurs inattentifs. En face-à-face avec le gardien, l'attaquant amorce une feinte vers la gauche mais le palet lui échappe involontairement de la crosse et part tout droit piéger le malheureux Salo !

Un but chanceux qui peut tout relancer. Deux minutes plus tard, à la conclusion d'une longue séquence offensive, une passe de derrière la cage de Peter Cavaglia est détournée par la jambe de Lilley et arrive entre les cercles pour Brian Rolston qui tire aussitôt à la cage et ramène le score à 3-4. Les Américains sont transfigurés, la confiance est revenue... mais pas la discipline. La charge de Peter Laviolette en zone neutre, poings en avant dans la tête contre la bande, est logiquement sanctionnée de deux minutes pour rudesse. Un slap puissant de Roger Johansson bat Mike Dunham côté plaque (3-5). Mais Örnskog part en prison à son tour 28 secondes plus tard en accrochant indiscutablement David Roberts. Ce même Roberts rate un slap à la ligne bleue pendant le powerplay, le palet s'écrase et arrive... dans le cercle droit à Rolston qui marque alors d'un tir du poignet précis !

La Suède n'a plus qu'un but de marge et manque une nouvelle énorme occasion... Par précipitation, Brett Hauer porte le palet au passage de sa ligne bleue et se le fait subtiliser par Peter Forsberg, bien décidé à se venger du rude traitement infligé par ce défenseur durant le match... Forsberg est à 2 contre 1 avec Roger Hansson et le sert dans l'axe pour un but aussi évident que celui raté par Berglund en début de match. Cette fois, c'est Mike Dunham qui signe une incroyable parade, du patin, en tendant sa jambe en catastrophe !

Le palet a rebondi tant de fois en faveur des Américains qu'on peut se demander si le destin a choisi son camp ? La Suède n'est pas superstitieuse et ne tremble pas, alors que l'engagement physique est total et que les duels se prolongent même au sol. Après une empoignade entre Forsberg et Crowley, on joue à 4 contre 4. Les États-Unis sont obligés de prendre des risques et Mats Näslund part en breakaway, mais son tir est détourné dans les airs par Dunham.

Pour les Suédois, la meilleure défense est la possession. Leur travail de sape se poursuit à une minute de la fin. Un tir de Kjellberg échappe alors à la mitaine du gardien et le palet tombe sur la glace ! Après un ricochet derrière la bande, le caoutchouc revient sur Håkan Loob qui met fin au suspense. Dunham reste couché sur la glace, la tête entre ses mains, comme s'il pleurait sous son masque. Difficile de lui en vouloir pour cette grosse boulette au vu des arrêts fantastiques qu'il a aussi réalisés ce soir !

La Suède était plus forte et s'affirme de plus en plus comme la favorite du tournoi. Les États-Unis, eux, devront jouer un match décisif pour l'accès en quart de finale face à l'Italie, qui peut leur passer devant en cas de victoire.

 

États-Unis - Suède 4-6 (1-2, 0-2, 3-2)
Samedi 19 février 1994 à 20h00 au Håkons Hall de Lillehammer. 9245 spectateurs.
Arbitrage de Petr Bolina (TCH) assisté de Lonnie Cameron et Pierre Tremblay (CAN).
Pénalités : États-Unis 16' (2', 10', 4'), Suède 10' (2', 2', 6').
Tirs cadrés : États-Unis 25 (10, 5, 10), Suède 37 (13, 16, 8).
Tirs totaux : États-Unis 41 (15, 7, 19), Suède 64 (19, 22, 13).
Engagements : États-Unis 34 (8, 10, 16), Suède 24 (8, 8, 8).

Évolution du score :
1-0 à 10'38" : Lilley assisté de Lazaro
1-1 à 12'29" : Juhlin assisté de Näslund
1-2 à 16'05" : Juhlin assisté de Svensson et Berglund
1-3 à 32'51" : Juhlin assisté de Näslund et Rohlin (sup. num.)
1-4 à 35'21" : Hansson
2-4 à 43'25" : Ferraro assisté de Johnson et Crowley
3-4 à 45'29" : Rolston assisté de Drury et Cavaglia
3-5 à 49'25" : Johansson assisté de Juhlin (sup. num.)
4-5 à 50'51" : Rolston assisté de Roberts et Sacco (sup. num.)
4-6 à 59'01" : Loob
 

États-Unis

Attaquants :
14 Craig Johnson - 23 Todd Merchant - 17 Peter Ferraro (2')
10 David Roberts (-1, 2') - 20 Mark Beaufait (-1) - 19 John Lilley (2')
18 Theodore Drury (+1) - 12 Peter Ciavaglia (+2) - 11 Brian Rolston (+1)
8 Jeffrey Lazaro (A, -1) - 16 David Sacco (A, -2, 2') - 25 James Campbell (-2)
27 Darby Hendrickson

Défenseurs :
33 Edward Crowley (+1, 2') - 7 Peter Laviolette (C, +1, 2')
3 Matthew Martin (-1) - 4 Christopher Imes (-1)
5 Brett Hauer (-1, 2') - 26 Barron Richter
21 Travis Richards (-1, 2')

Gardien :
1 Michael Dunham

Remplaçant : Garth Snow (G). En réserve : Jonathon Hillebrandt (G).

Suède

Attaquants :
11 Roger Hansson (+1, 2') - 21 Peter Forsberg (+1, 2') - 18 Jonas Bergkvist (A, +1)
26 Mats Näslund (+1) - 22 Charles Berglund (+1) - 5 Patrik Juhlin (+1)
27 Patric Kjellberg - 15 Stefan Örnskog (2') - 12 Håkan Loob
16 Niklas Eriksson (-1) - 20 Jörgen Jonsson (A, -1) - 17 Daniel Rydmark (-1)

Défenseurs :
3 Christian Due-Boje (+2, 4') - 2 Tomas Jonsson (+2)
8 Magnus Svensson (-2) - 34 Roger Johansson (-2)
14 Fredrik Stillman (+1) - 7 Leif Rohlin (+1)

Gardien :
35 Tommy Salo

Remplaçants : Håkan Algotsson (G), Kenny Jönsson (D), Andreas Dackell (A). En réserve : Mikael Sundlöv (G).

 

Retour aux Jeux olympiques 1994