Interview d'Alon Eizenman

 

Né à Toronto, Alon Eizenman a connu les filières nord-américaines jusqu'à participer au camp d'été des Penguins de Pittsburgh en 2001. Non retenu par le club de Mario Lemieux, c'est en Israël puis à Tours qu'il débarque, avant de retourner dans le pays de son cœur, qu'il a représenté à Amiens.

- Comment avez-vous intégré l'équipe nationale ?

J'ai passé une partie de mon enfance en Israël, mais c'est au sein de la communauté israélienne de Toronto, forte de quarante mille personnes et assez compacte, et après avoir vu un reportage sur l'équipe senior, que quelqu'un m'a approché pour intégrer l'équipe junior qui devait jouer à Sofia en 1997.

- Non retenu par Pittsburgh en 2001, vous signez à Bat Yam...

Pendant deux semaines, j'ai vécu mon rêve de NHL, mais finalement cela n'a pas abouti, et j'ai voulu retrouver le pays, même si je n'ai pas beaucoup joué pour Bat Yam.

- Et finalement vous arrivez à Tours.

Les contacts se sont faits par l'intermédiaire du scout qui a repêché mon petit frère pour une équipe junior en OHL. Je lui ai confié que je voulais jouer en Europe, et comme il connaissait une personne proche de l'entraîneur de Tours, qui lui-même recherchait un centre... Cela s'est fait par hasard, je ne cherchais pas forcément Tours ou la France.

- Suite à un aller-retour avec le Canada pour reprendre vos études de droit à Toronto, vous êtes revenu l'année suivante. La France vous manquait ?

Oui, la France, Tours et le hockey me manquaient. J'adore la ville, les gens et les supporters. En plus Bob (Millette) m'a dit qu'il voulait gagner la Coupe Magnus. Je n'ai pas hésité et j'ai arrêté mes études pendant un an.

- Vous avez marqué 28 points en 28 matches, aux cotés notamment de Loïc Sadoun...

J'adore jouer avec Loïc, mais nous n'avons évolué que dix matches ensemble. Cependant nous avons beaucoup marqué ensemble. Je me souviens d'un cliché du photographe de Rouen suite à notre victoire a domicile, sur une passe décisive de Loïc. Un superbe souvenir.

- Mais finalement Mulhouse était trop fort, malgré votre but au premier match...

Steven Reinprecht était trop fort. Fabrice Lhenry a fait un super match dans la seconde manche. Je me souviens surtout de notre série contre Grenoble, que nous avons malheureusement terminée épuisés physiquement. Nous ne pouvions finalement rien contre Mulhouse.

- La fin d'une aventure car le club a été relégué dans la foulée, mais vous aviez décidé de rentrer en Israël.

Je voulais reprendre mes études et l'équipe d'Haïfa a racheté mes droits. Nous sommes d'ailleurs devenus champions.

- Quel est le niveau du championnat israélien ?

Pas très élevé, mais le niveau progresse d'année en année. Les jeunes désireux de progresser sont intégrés au fur et à mesure, et dans quelques années on risque d'avoir un championnat de qualité.

Tous les matches sont disputés à Metulla, ce qui rend les choses difficiles...

- Pendant une semaine, à l'occasion de ces championnats du monde, vous étiez de retour en France. Cela fait plaisir ?

Oui, bien sûr, d'autant que je reviens l'année prochaine pour faire un semestre ou une année à la Sorbonne. Alors, si un club francilien est intéressé, je suis preneur...

- À Amiens, vous n'avez jamais voulu abdiquer au cours de matches pourtant difficiles...

On essaie de montrer que même si nous n'avons pas le niveau des autres équipes nous avons du courage. On cherche le respect pour Israël, comme équipe, comme peuple et comme pays de hockey. Peu de gens nous connaissent mais on veut faire bonne impression.

- Quelle est votre entente sur votre ligne ?

Mon petit frère Oren est un grand joueur, c'est un plaisir de jouer avec lui. On s'éclate tous les trois. C'est drôle car j'ai grandi avec eux, et nous n'avons jamais imaginé que nous jouerions ensemble en France.

- Oren a un gros potentiel. Il a un parcours comparable au vôtre et a joué comme vous à Wexford.

Oui, mais avec des meilleurs résultats que moi. À tous les niveaux. Il a trouvé une meilleure équipe en université et a fait une très belle saison cette année en NCAA avec de belles statistiques.

- Votre second frère, Erez, joue avec vous à Haïfa.

Il est comme moi étudiant, et c'est une joie de jouer avec lui aussi.

- Dans l'équipe nationale, on peut dire que votre ligne est plutôt nord-américaine et la deuxième ligne, avec Sergueï Belo, est plutôt russe. Quel est le style d'Israël ?

J'espère que dans quelques années on parlera d'un style israélien. Pour l'instant c'est plus facile pour Sergueï de jouer avec Edouard Revniaga car ils sont issus du même système. C'est plutôt un aspect pratique qui explique la composition de notre équipe, aucun style ne prédomine.

- Jean Perron et Alan Maislin ont fait beaucoup pour le hockey israélien, mais votre père, Moshe, a également œuvré ?

Oui, mon père a fait plus que tout le monde. Il a mis la machine en route, même s'il n'aime pas être mis sous les projecteurs. Cependant, sans Jean Perron, nous ne serions jamais arrivés en division I. Nous avons de la chance de l'avoir avec nous.

- Comment une équipe devancée par l'Espagne ou la Belgique en 2004 a-t-elle pu changer à Belgrade un an plus tard ?

Nous n'étions pas la meilleure équipe en Serbie-Monténégro mais notre gardien a fait de superbes matches et notre système était parfait, surtout grâce à Jean Perron.

- Avez-vous gardé des contacts avec d'anciens Tourangeaux ?

J'ai joué contre Julien Desrosiers, c'était un plaisir. J'aime beaucoup Julien, nous étions proches à Tours. J'ai aussi croisé Loïc Sadoun, avec qui j'ai beaucoup parlé, ainsi que Rob Millar et Jean-François Jodoin. Les contacts sont rares mais quand on se voit cela fait plaisir.

- On vous a beaucoup vu à l'œuvre cette semaine. Votre avenir est-il en Europe de l'ouest ?

Déjà, l'an prochain, je serai à Paris. Je souhaite jouer une saison encore, avant de trouver un boulot une fois mes études terminées.

Quant à Oren, j'espère qu'il aura une grande carrière. En NHL, cela serait énorme... Quoi qu'il arrive, nous sommes très fiers de lui. Je préférerais qu'il évolue en Europe que dans une ligue mineure, car l'expérience d'une nouvelle langue et d'une nouvelle culture est superbe. J'adore la France, j'adore ce pays et ses habitants. J'espère qu'il aura la même expérience que moi.

Propos recueillis le 29 avril 2006 par Mathieu Hernaz

 

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