Grenoble : quand sagesse rime avec jeunesse...

 

Après une saison 2008/09 historique, Grenoble avait mis la barre très haut pour faire aussi bien. Du point de vue des résultats la saison 2009/10 est donc forcément une déception avec la perte des trois coupes gagnées en 2009 sans oublier une prestation décevante en finale de la Coupe continentale avec une dernière place peu valorisante. Le seul trophée glané est le plus anecdotique d'entre tous, le trophée des champions, obtenu sur la plus petite des marges face à Briançon (1-0). La coupe de la ligue a été abandonnée à Rouen après une finale qui laisse un goût amer, les Brûleurs de Loups n'ayant rien montré pendant deux tiers-temps. La coupe Magnus a été laissée au même adversaire sur la route des demi-finales avec une élimination indiscutable en trois manches sèches, réplique inversée de la série de la saison précédente. Quant à la coupe de France, elle a été perdue sans même pouvoir disputer un seul match, les Brûleurs de Loups ayant été exclus de la compétition par sanction de la fédération sur la situation financière du club.

Car il ne faut pas se le cacher, le sportif est bel est bien passé au second plan la saison dernière, conséquence des événements qui ont secoué le club à l'automne lorsque la fédération a découvert que les comptes du club étaient bien différents de ceux annoncés en juin. Une fois les sanctions tombées (suspension de la coupe de France pour deux ans et six points en moins au classement), c'est la pérennité même du club qui se trouvait en question. Une nouvelle équipe dirigeante a pris le relais de Jean-Luc Blache, démissionnaire et suspendu pour cinq ans de toute fonction dirigeante pour avoir volontairement dissimulé la situation financière du club à la CNSCG sous couvert d'une augmentation de capital. Blache hors-jeu, c'est une page du hockey grenoblois qui se tourne puisqu'il avait pris les rênes du club lors du retour en Ligue Magnus en 2000 et l'avait progressivement hissé au niveau qui était le sien en 2009.

Les nouveaux dirigeants, Stéphanie Carrel-Magnan, présidente du directoire et Jacques Reboh, président du conseil de surveillance, ont eu la lourde tâche de démêler les fils d'une situation financière bien plus mauvaise qu'annoncée et de faire retrouver une crédibilité à un club qui n'en avait plus aux yeux de la fédération. La participation aux play-offs était d'ailleurs conditionnée à des résultats financiers en ligne avec le contrat d'objectifs fixé par la fédération, et grâce à la bouffée d'oxygène représentée par l'organisation de la finale de la Coupe Continentale, la menace a pu être levée in extremis.

Dans ce contexte très difficile, en particulier pour les joueurs qui avaient déjà dû consentir à une baisse de salaire de 12% l'an dernier, beaucoup se satisferont de la fin de saison grenobloise qui aurait pu être encore beaucoup plus terne sans une participation aux play-offs. Le handicap de points au classement n'a pas permis une qualification directe pour les quarts de finale, mais les Brûleurs de Loups ont prouvé, en écartant successivement Épinal et Amiens, qu'ils faisaient sportivement toujours bien partie des quatre meilleures équipes françaises, et ce pour la dixième saison consécutive. Presqu'un miracle, mais Mats Lusth pouvait légitimement avoir le sentiment d'avoir tiré le maximum d'un groupe mis à rude épreuve.

Un staff complètement chamboulé

Malheureusement les tracasseries grenobloises n'allaient pas s'arrêter à la fin de la saison dernière, et le plus difficile était encore à venir. Si la situation financière s'était améliorée, en partie grâce aux recettes générées par la Coupe continentale, le "modèle" financier était encore structurellement déficitaire à causes des nombreux contrats en cours. Et avec de tels déficits prévisionnels, la validation par la commission de contrôle restait plus qu'hypothétique. La nouvelle direction du club grenoblois a donc dû reprendre un par un les contrats signés et prendre les décisions qui s'imposent. Et à la surprise générale, le premier visé par ces nouvelles mesures n'était autre que l'entraîneur Mats Lusth.

La nouvelle présidente justifiait cette décision par le fait que le club ne pouvait plus continuer avec deux entraîneurs, les finances du club ne le permettant plus. Patrick Rolland était donc appelé à devenir entraîneur-principal et seul à bord. Le choix de Rolland était avant tout financier : Mats Lusth, à qui il restait encore deux ans de contrat, percevait vraisemblablement un des plus importants salaires du club et Patrick Rolland représentait la filière locale, une sorte de garantie de continuité et un lien avec le hockey mineur. Il est tout de même surprenant que, par simple souci d'économie, le club ait choisi en priorité d'éliminer celui qui avait apporté six trophées au club en seulement trois ans (une coupe Magnus, deux coupes de France, une coupe de la Ligue et deux trophées des champions), qui avait démontré beaucoup de rigueur et de sens tactique et qui avait largement fait ses preuves dans sa capacité à mener un groupe vers le succès. Si l'on ajoute à cela l'intégration à succès des jeunes joueurs réalisée ces dernières années, on pouvait penser que Mats Lusth était bien l'homme fort du club grenoblois, le pilier sportif sur lequel il devait s'appuyer. Lui-même inscrivait sa présence à Grenoble sur la durée et ne se voyait pas quitter les Alpes si tôt. L'affaire traînait en longueur afin de négocier ses indemnités de départ, mais Mats Lusth finit par se rendre à l'évidence et se mit à chercher ailleurs un autre poste qu'il finit par trouver du côté de la Norvège.

Cet épisode à peine terminé, Patrick Rolland devenait le nouvel entraîneur en chef du club et commençait son recrutement. Mais nouveau coup de théâtre : le club grenoblois annonçait que Rolland décidait de renoncer après avoir été sollicité dans le secteur privé pour diriger la galerie commerciale de la caserne de Bonne, une "opportunité en or" qu'il ne pouvait pas refuser. En l'espace de quelques semaines, les Brûleurs de Loups avaient donc perdu leurs deux entraîneurs et se retrouvaient sans coach en pleine période cruciale de recrutement ! Une situation pas simple à gérer compte tenu des contraintes budgétaires du club.

Et plutôt que de choisir l'un des nombreux CV parvenus au club, nouvelle surprise avec l'option d'une solution interne : Jean-François Dufour se voyait proposer un contrat d'entraîneur à condition qu'il mette un terme à sa carrière de joueur. Une proposition qu'il acceptait rapidement. Là encore, il est relativement étonnant que le club ait préféré la solution d'un entraîneur totalement inexpérimenté alors qu'au moment du départ de Gérald Guennelon, Patrick Rolland, alors entraîneur-adjoint, avait été jugé encore un peu tendre pour le poste, d'où le recrutement de Mats Lusth. Il est donc vraisemblable qu'une fois encore les considérations économiques aient dicté ce choix. À défaut d'expérience d'entraîneur-chef, Dufour pourra s'appuyer sur son rôle d'entraîneur-adjoint exercé à Briançon, sur ses qualités de vision du jeu louées par son mentor à l'époque Luciano Basile, mais aussi sur les bons conseils de son beau-père, Gilles Meloche, entraîneur des gardiens chez les Penguins de Pittsburgh. Car la famille du Dufour est une famille d'entraîneurs, et lui-même avait toujours souhaité se reconvertir dans ce secteur une fois sa carrière terminée. Les événements ont simplement été un peu précipités par les départs conjoints de Patrick Rolland et Mats Lusth. Dufour se retrouve donc seul à la barre d'un groupe qu'il connaît bien en tant que joueur mais qu'il va devoir désormais diriger. Pas simple.

Un dégraissage indispensable

Après ces multiples changements au sein du staff, il a fallu également régler la question des joueurs afin de réduire la masse salariale dans des proportions plus acceptables avec comme objectif premier : permettre la validation du club en Ligue Magnus par la commission de contrôle, chose qui ne fut pas aisée. Un certain nombre de joueurs ont donc dû faire leurs valises, parfois par choix, parfois par nécessité.

En défense, ils sont trois à quitter le club grenoblois, dont deux après une année seulement de présence en Isère. Besch et Milovanovic étaient venus chercher un titre, pas sûr qu'ils repartent avec un excellent souvenir des Brûleurs de Loups après une saison aussi chaotique. Nicolas Besch a réalisé une bonne saison à Pôle Sud, en étant un des défenseurs grenoblois les plus réguliers dans un registre sobre mais efficace. Mais souvent cantonné sur une troisième ligne, il a eu un rôle limité en supériorité numérique et n'a peut-être pas eu la production qu'il escomptait. Il retourne donc dans le club où il évoluait en Finlande. Jakob Milovanovic a eu pour sa part un début de saison assez poussif, loin des promesses attendues suite à sa dernière saison briançonnaise. Sa fin de saison en revanche a été nettement plus intéressante avec des play-offs plutôt réussis. Il aurait mérité de revenir une saison supplémentaire mais il a été victime des coupes réalisées dans l'effectif, le club préférant se priver d'un défenseur étranger supplémentaire pour faire la place à un jeune joueur.

Enfin, dernier départ à la ligne bleue : celui d'Antonin Manavian. L'homme "fort" des Brûleurs de Loups était loin de faire l'unanimité. En début de saison, Mats Lusth l'a relégué à plusieurs reprises sur le banc pour prestations insuffisantes, et son flegme sur et en dehors de la glace laissait toujours planer un doute sur sa motivation réelle. Mais en play-offs, il a su hisser son niveau de jeu en l'absence de Viktor Wallin à un niveau encore jamais vu, se révélant soudainement une arme à la ligne bleue et dans le jeu. Sa décision de tenter une nouvelle aventure en Amérique du Nord a scellé son départ du club, laissant quelques regrets malgré ses prestations en dents de scie.

Du côté de l'attaque, outre l'arrêt forcé de Dufour qui devient entraîneur, on dénombre également trois départs. Les deux Suédois Nilsson et Jansson rentrent au pays en laissant assez peu de regrets derrière eux. Martin Jansson, très attendu après un début de saison 2008-2009 extrêmement prometteur avant d'être blessé au genou, a beaucoup déçu cette saison. Joueur le plus pénalisé du club et souvent transparent dans le jeu, il s'est plus signalé par son indiscipline que par sa capacité à marquer des buts ou débloquer des situations compliquées. Stig Nilsson a souvent brillé par sa fougue et son intensité mais lui aussi a été trop pénalisé et s'est montré incapable d'apporter la "scoring touch" nécessaire pour des renforts étrangers. Un constat nuancé par les bons play-offs de Nilsson mais dans l'ensemble les deux compères suédois avaient plus le profil de bons "penalty killers" que de buteurs nés ou de fabricants de jeu. Un luxe que ne peut plus se permettre le club désormais avec des joueurs importés.

Le dernier départ en attaque est en revanche un crève cœur : Damien Fleury a connu une saison exceptionnelle qui lui a valu d'être élu meilleur joueur français de la Ligue Magnus. Son départ vers l'étranger devenait donc pour lui plutôt logique afin de franchir un palier supplémentaire dans sa carrière. Seul hic, il lui restait une année de contrat et Grenoble souhaitait le conserver jusqu'à la fin. Il a fallu donc négocier une rupture de contrat, ce qui fut fait non sans quelques difficultés pour parvenir à un accord puisque l'affaire s'est terminée devant les prudhommes. Sportivement, Fleury laissera en tout cas un grand vide au sein de l'attaque grenobloise tant il fut l'attaquant le plus régulier. Son association avec Dufour et Tartari avait produit l'une des lignes les plus performantes du dernier championnat.

Avec ces sept départs en comptant l'arrêt de Dufour, Grenoble a perdu deux joueurs majeurs (Fleury et Dufour) ainsi que beaucoup d'expérience et de profondeur qu'il sera difficile de remplacer compte tenu des contraintes imposées sur la masse salariale. Le recrutement se devait donc d'être ciblé et modeste.

Des recrues ciblées avec des moyens financiers limités

Afin de compenser l'expérience partie avec les nombreux départs, le club grenoblois a choisi d'abord de faire appel à deux anciens qui ont connu tous les succès de la saison 2008-09. Baptiste Amar revient en Isère après un an en Suède où il a connu le bon et le moins bon avec son équipe de Rögle. Un début de saison satisfaisant avec un gros temps de jeu, une fin de saison plus frustrante avec plus de temps en quatrième ligne et surtout la relégation sportive en Allsvenskan. Baptiste Amar a donc choisi de revenir en France et son ancien club l'a bien entendu accueilli à bras ouverts, lui permettant au passage de retrouver ses galons de capitaine. Amar, c'est l'assurance tout risque à la ligne bleue, celle d'avoir dans ses rangs un des meilleurs arrières de la Ligue Magnus.

L'autre retour attendu vient en partie compenser l'arrêt de Dufour. Le Tchèque Ludek Krayzel s'était exilé à Brest en Division 1 lorsque le club grenoblois avait du revoir sa masse salariale à la baisse au cours de l'été dernier. Une parenthèse donc dans la carrière du joueur qui n'a pas été particulièrement significative. Dépassé sur le plan des statistiques par certains coéquipiers (dont le néo-Rouennais Brunelle), il a également connu une saison noire sur le plan des blessures à l'instar de son ex-nouveau compère de l'attaque Ludek Broz. Difficile donc de juger Krayzel sur son année brestoise. Ses qualités techniques en font assurément un joueur du calibre de la Magnus comme il l'a démontré il y a deux saisons en Isère. Reste à voir quel sera son état de forme et sa motivation compte tenu d'une certaine nonchalance affichée de temps à autre sur la glace. Mais à coup sûr son association renouvelée avec Ludek Broz devrait faire des étincelles.

Pour le reste, il a fallu recruter malin et à l'intérieur de la Ligue Magnus car les finances ne permettaient pas d'autres recrues étrangères. C'est ainsi que le club grenoblois a sollicité les services d'Aymeric Gillet, pilier de la défense des Ducs de Dijon depuis de nombreuses années. Ce défenseur expérimenté, doté d'un bon gabarit et d'un bon tir à la ligne bleue, s'est laissé séduire par l'offre grenobloise, avec l'espoir de franchir un palier supplémentaire dans sa carrière et notamment pourquoi pas d'intégrer l'équipe de France qui s'est toujours refusée à lui à 30 ans. Il tourne donc la page dijonnaise et vient compléter la défense grenobloise, offrant un profil plus complet et plus expérimenté que Manavian.

Autre recrue "magnusienne", le Villardien Matthieu Le Blond effectue son retour à Grenoble, le club de ses débuts qu'il avait quitté en cadets pour gagner du temps de jeu sur le plateau du Vercors. Depuis, il a confirmé, intégrant l'effectif villardien puis s'affirmant comme un des cadres des Ours avec une dernière fin de saison canon alors que Villard finissait en trombe la saison régulière. Joueur polyvalent, à la fois buteur, passeur et bon défensivement, Mathieu Le Blond se voit offrir une belle opportunité d'intégrer durablement l'équipe première des Brûleurs de Loups. Compte tenu de la jeunesse de l'effectif, il sera appelé dès son arrivée à prendre des responsabilités et à figurer parmi les cadres de l'attaque avec l'objectif de prendre la place laissée vacante par Damien Fleury.

Dernière recrue, le Caennais Graham Avenel avait été coaché en équipe de France des moins de 20 ans par Patrick Rolland qui l'a fait venir à Grenoble alors qu'il était appelé à prendre les commandes de l'équipe. Ce jeune espoir tricolore, de la même génération que les Baylacq, Arrossamena et autre Moisand, a préféré tenter le challenge grenoblois plutôt que d'accompagner sagement la remontée de son club de toujours en Ligue Magnus. Un pari osé pour ce jeune élément, moteur en division 1 de la remontée de son club mais qui a encore tout à prouver en Magnus où il espère marcher sur les traces d'un autre Caennais d'origine, Damien Fleury. Il dispose néanmoins des qualités pour réussir : une bonne vitesse, une bonne intensité et surtout un sens du but qui a fait merveille en division 1. Les profils de "buteur" ne sont pas légion à Grenoble, et s'il réussit la transition Magnus-D1, Avenel pourrait vite devenir incontournable et s'ouvrir ainsi les portes de l'équipe de France.

Avec sept départs pour cinq arrivées, les Brûleurs de Loups ont donc dû puiser dans le réservoir du hockey mineur pour compléter leur effectif. Et cela tombe plutôt bien puisque les Espoirs viennent tout juste de conquérir le titre national. Il y a donc de la qualité dans la formation grenobloise et c'est le moment où jamais de s'en servir. Le prometteur attaquant de 17 ans seulement, Joris Bedin, l'attaquant grand format et ex-défenseur reconverti Maxime Suzzarini et le défenseur Rémi Colotti viennent donc compléter l'effectif, rejoignant ainsi Loup Benoît, Vincent Llorca et Elie Raibon incorporés la saison dernière. Au milieu de cette nouvelle génération de jeunes, Julien Baylacq, Raphaël Papa, Nicolas Arrossamena, Maxime Moisand et Jason Crossman, tous restés fidèles au club, font quasiment figure d'anciens... C'est dire la jeunesse de la formation grenobloise alignée cette saison.

La défense au top, l'attaque un flop ?

Au final, l'escouade grenobloise parait bien armée derrière. À commencer par la protection des filets. Le duo de gardiens Ferhi-Raibon a en effet rempilé, apportant ainsi une bonne dose de sécurité devant les cages. Eddy Ferhi a eu, comme quasiment chaque année, la possibilité offerte de se trouver un club à l'étranger pour poursuivre sa carrière. Avec peut-être plus d'insistance que les saisons précédentes compte tenu de la situation financière du club qui n'aurait sans doute pas vu d'un mauvais œil d'alléger la masse salariale en s'affranchissant du contrat longue durée de Ferhi. Mais malgré de bonnes prestations au championnat du monde, la bonne opportunité ne s'est pas présentée et Ferhi a choisi de rester. Un défi pour lui qui reste sur une saison de Magnus en demi-teinte et qui ne cache plus que son entente avec les coachs Lusth et surtout Rolland s'était détériorée au fil de la saison dernière. Cette saison sonne comme un nouveau départ pour lui, mais il devra faire face à la concurrence de Sébastien Raibon, gardien prometteur et révélation de la Continental Cup. Même s'il n'a pas pu confirmer ses prestations à cause d'une blessure, il a contribué au titre gagné par les Espoirs et a incontestablement franchi un palier. Il fait désormais plus figure de n°1 bis que de n°2 et la concurrence devrait être réelle et saine entre les deux cerbères.

À la ligne bleue, on pourra compter sur quatre éléments d'expérience : le capitaine Baptiste Amar qui fait son retour, le nouveau venu Aymeric Gillet qui devrait dès le début de la saison figurer parmi les cadres de la défense sans oublier les deux piliers qui continuent l'aventure grenobloise : Alexandre Rouleau et Viktor Wallin. Pour le Suédois, il s'agit là d'une véritable histoire d'amour avec Grenoble puisqu'il entame sa sixième saison sur les bords de l'Isère ce qui en fait l'un des étrangers les plus fidèles de l'histoire du club. Très solide défensivement, utile par son lancer en jeu de puissance, Wallin a manqué toute la fin de saison à cause d'une appendicite péritonite. Il a cruellement fait défaut durant les play-offs, et s'il a retrouvé tous ses moyens physiques, il devrait être de nouveau une valeur sûre de la défense grenobloise. Quant à Alexandre Rouleau, il entame sa troisième saison sur les bords de l'Isère avec les responsabilités d'assistant-capitaine. Souvent utilisé en attaque par Mats Lusth durant l'absence de Broz la saison dernière, son jeu défensif s'en est ressenti par la suite avec tout de même un mieux au moment des play-offs. Désormais stabilisé à la ligne bleue, il a tout pour être un pilier de la défense, utile tant en power-play qu'en infériorité numérique pour peu qu'il maîtrise son intensité physique et reste en dehors de la prison.

Pour compléter la défense, il faudra bien évidemment compter sur les jeunes. Maxime Moisand a gagné ses galons de titulaire la saison dernière en affichant une assurance défensive et une qualité de relance intéressantes qui compensent son petit gabarit. Ses prestations lui ont valu une convocation en équipe de France lors du tournoi de pré-saison en Pologne, ce qui est prometteur pour la suite. Il devrait confirmer cette saison. Moins utilisé, Jason Crossman aura une chance réelle de jouer cette saison puisque Milovanovic n'a pas été remplacé. Dans un rôle plus défensif, il devra confirmer les bonnes dispositions affichées l'an dernier tout en subissant la concurrence de Vincent Llorca. Révélation de la saison dernière, le jeune défenseur de 18 ans a été lancé dans le grand bain en cours de saison par Mats Lusth. Doté d'un gabarit déjà très impressionnant, il a joué un grand rôle avec l'équipe de France moins de 18 ans lors des derniers championnats du monde. Grand espoir tricolore à ce poste, il devrait gagner en temps de jeu cette année. Rémi Colotti complète l'escouade défensive en tant que huitième défenseur mais devrait être aligné essentiellement avec l'équipe Espoir Elite cette saison.

Avec Amar, Wallin, Rouleau et Gillet, les Brûleurs de Loups possèdent quatre défenseurs avec un bon lancer ce qui a fait défaut l'an dernier en supériorité numérique puisqu'en fin de saison seul Rouleau était une arme offensive à la ligne bleue. Avec cette force de frappe retrouvée, le power-play devrait gagner en efficacité. Ces quatre-là auront également un rôle essentiel en infériorité numérique en apportant une sécurité nécessaire lors de ces phases de jeu délicates. La défense grenobloise a donc perdu en quantité mais gagné en qualité, ce devrait être assurément une des forces sur laquelle s'appuiera Jean-François Dufour cette saison.

Si les gardiens et les défenseurs rassurent, difficile d'en dire autant de l'attaque qui a perdu à la fois en qualité et en quantité. Après avoir longtemps hésité, Ludek Broz, a décidé de rempiler pour une nouvelle saison au sein du club (la sixième). Encore une fois meilleur pointeur grenoblois pendant les play-offs, le centre tchèque a connu une saison écourtée par une lombalgie qui l'a tenu écarté de la glace une bonne partie de la saison. Difficile de savoir où il en est physiquement, d'autant que l'âge (35 ans) commence à le rattraper. Avec un Broz en santé, les Brûleurs de Loups ont la garantie d'avoir un faiseur de jeu hors pair, très précieux en supériorité numérique. D'autant que la présence à ses côtés de Ludek Krayzel devrait booster à la fois son moral et son efficacité.

Derrière la paire tchèque, les Brûleurs de Loups pourront compter sur le fidèle Christophe Tartari, désormais assistant capitaine et auteur de la meilleure saison de sa carrière aux côtés de Dufour et Fleury. Il devra désormais réitérer ses performances en l'absence de ses deux compères. Autre cadre devant, Mitja Sivic, toujours sous contrat, poursuit l'aventure à l'inverse de son compatriote Jakob Milovanovic. Cadre de l'équipe nationale slovène, il a connu un départ tonitruant la saison dernière avant d'être freiné par des blessures. Sa seconde moitié de saison a été plus difficile, ne parvenant pas à se fixer sur l'un des trios réguliers de l'équipe. Abusant parfois d'individualisme dans ses actions, il est l'un des rares attaquants à pouvoir faire la différence techniquement et à avoir un profil de buteur. L'attaque grenobloise aura besoin de toute son efficacité cette saison. Avec Le Blond, cela fait donc seulement cinq attaquants seniors alignés au sein de l'attaque grenobloise. Pas de quoi se permettre beaucoup de blessures.

Pour le reste, il faudra donc aller chercher du côté des jeunes : les plus confirmés comme Julien Baylacq, devenu spécialiste du jeu défensif et véritable poison en infériorité numérique par son forecheck incessant. Il est un des rares joueurs à avoir disputé tous les matchs la saison dernière et possède une inépuisable énergie communicative aux autres joueurs. Son seul défaut est peut-être de manquer d'adresse devant le but, une adresse que possède justement Graham Avenel qui devrait voir beaucoup de glace cette saison. Autres "jeunes expérimentés", Nicolas Arrossamena et Raphaël Papa auront une place de titulaire à part entière saison compte tenu de la faible profondeur de l'effectif. Pas toujours réguliers jusqu'à présent, ils devront se montrer à la hauteur sous peine de se voir concurrencer par des joueurs plus jeunes. Arrossamena, convoqué avec Baylacq en équipe de France lors du tournoi de pré-saison en Pologne, s'est illustré et a confirmé un opportunisme devant le but qu'il avait déjà démontré lors du carré final U22 élite. Il a une belle carte à jouer cette saison.

Du côté des jeunes les moins confirmés, Loup Benoît visera une place de titulaire ainsi qu'une sélection pour les championnats du monde des moins de 20 ans. Il a beaucoup progressé à l'entraînement la saison dernière et s'est affirmé comme un cadre de l'équipe Espoirs championne de France. Son temps de glace devrait augmenter. Le fougueux Elie Raibon aura également l'occasion de faire ses preuves dans le système à quatre lignes mis en place par Dufour. Quant à Joris Bedin, c'est peut-être le plus talentueux des jeunes Grenoblois et il fait déjà figure de joker potentiel à 17 ans seulement.

La jeunesse au pouvoir : choix par défaut ou stratégie payante ?

Défense solide et expérimentée, attaque "light" et manquant de profondeur, voici comment on pourrait résumer le cru 2010-11 des Brûleurs de Loups. Un cru qui ne comptera que cinq étrangers (Wallin, Rouleau, Sivic, Broz et Krayzel), un nombre qui n'a jamais été aussi faible depuis 2003. Même si les cinq étrangers sont tous des cadres solidement implantés, cette baisse drastique du nombre de renforts est plus due à la conjoncture économique entourant le club qu'à une réelle volonté pro-française de rajeunissement de l'effectif. Sur le plan du jeu, des renforts comme Dufour, Jansson, Nilsson ou Milovanovic sont remplaçables sur la glace. Aucun d'entre eux n'était un talent exceptionnel, capable de faire la différence à lui tout seul. Mais leur présence contribuait à pouvoir aligner trois blocs homogènes et solides même en cas d'absences, ce qui sera plus difficile avec l'équipe actuelle.

De plus, le cru 2010-11 des Brûleurs de Loups comporte également des éléments vieillissants comme Ludek Broz ou Ludek Krayzel qui sortent d'une saison parsemée de blessures. Leur association est pourtant la clé de la réussite de l'attaque grenobloise cette saison. Malgré leur talent indiscutable, leur style de jeu similaire (plus passeur que buteur) peut soulever des questions sur leur complémentarité. Leur propension à se faire des passes à l'infini sans prendre de tir à la cage est un risque et ils devront être complétés par un joueur ayant le sens du but. Leur âge et leur fragilité est également facteur d'interrogation. Sont-ils capables de produire au même niveau qu'il y a deux ans ? Leurs blessures à répétition ne constituent-elles pas un risque de se retrouver rapidement démunis en attaque ? Au fond est-il raisonnable de confier les clés de l'attaque à ce duo talentueux mais vieillissant et fragile ? La direction du club en a pris le pari, le déroulement de la saison montrera si ce choix était judicieux ou non.

En cas de coup dur, les plus jeunes et les recrues devront prendre la relève et s'affirmer plus vite que prévu. Le Blond, Gillet et Avenel n'auront pas de temps d'adaptation, ils devront être opérationnels dès le début de saison. Baylacq, Moisand, Crossman, Arrossamena et Papa devront encore élever leur niveau de jeu et repousser leurs limites. Les éclosions de Llorca, Benoît, Bedin ou Elie Raibon pourraient être autant de bonnes surprises. Mais bien qu'auréolée de son titre de championne de France U22, la nouvelle génération grenobloise manque encore d'expérience et ne peut pas regorger d'autant de talents pour permettre aux Brûleurs de Loups de briller constamment au firmament du hockey français. L'intégration d'un ou deux nouveaux éléments par an peut se faire sans incidence sur le niveau général de l'équipe, à plus de trois par an cela devient difficile.

Dufour, sans expérience et seul maître à bord, aura en plus la lourde tâche de diriger un groupe avec lequel il a joué, constitué d'éléments très expérimentés et d'autres très jeunes. Un sacré défi, d'autant que Lusth et Rolland pouvaient eux se partager la tâche. Pour compenser, Dufour, qui a exclu de remettre les patins sur la glace pendant la saison, pourra se reposer sur des cadres d'expérience comme Baptiste Amar, Viktor Wallin ou Alexandre Rouleau. Des piliers à la ligne bleue à qui il compte laisser plus d'autonomie dans l'animation défensive pour se concentrer sur l'animation de l'attaque qui en aura bien besoin.

Grenoble a été finalement validé dans la douleur par la CNSCG. En plus de nouveaux efforts financiers demandés aux joueurs pendant l'été, il a fallu couper à la dernière minute la masse salariale de 50 000 euros pour rentrer dans les limites imposées par la fédération. Un actionnaire du club a pris en charge les avantages en nature de sept joueurs, réduisant ainsi la masse salariale sportive à 551 000 euros pour un budget annuel total de 2 millions d'euros. Le bout du tunnel est encore loin car le club s'est engagé sur un plan de redressement de trois ans avec la fédération avec pour objectif d'atteindre l'excédent au bout des trois ans. Pour y parvenir, la nouvelle direction tentera de mettre en place un modèle financier plus pérenne que le précédent avec pour objectif de dégager un excédent voire d'être au moins à l'équilibre à l'issue de chaque saison.

Comme lors de chaque crise depuis le début des années 90, Grenoble s'est donc tourné une nouvelle fois vers son centre de formation. La force de la formation grenobloise a fait ses preuves par le passé. Son plus beau joyau, Cristobal Huet, a, comme un clin d'œil, fait un passage à Grenoble cet été avec la Coupe Stanley pour remercier son club d'origine et ses formateurs. En d'autres temps, après le titre de 1991 et celui de 1998, les juniors grenoblois avaient eu abondance de temps de glace suite aux problèmes financiers du club. Une nouvelle génération de joueurs s'était formée et avait pu relancer la machine. Les Baylacq, Arrossamena, Moisand et Papa marcheront-ils sur les traces des Agnel, Arcangeloni, B.Bachelet, S.Tartari ou plus tard des S.Bachelet, De Murcia, Bellet, Billieras et Antonoff ? Cela paraît vraisemblable et Grenoble a la chance de pouvoir compter sur un tel réservoir en cas de coup dur.

Mais il faudra être patient. Par le passé, on se souvient que les résultats avaient mis du temps à venir et n'avaient vraiment payé qu'au bout de trois ou quatre saisons, précisément le temps pour le club de se refaire une santé financière. Les Brûleurs de Loups auront donc du mal à se montrer ambitieux dès cette année. Quel objectif donc pour cette saison ? Avec seulement deux compétitions au programme (le club grenoblois est toujours privé de coupe de France et ne dispute plus la coupe continentale), les efforts pourront être ciblés. Garder une place dans le top 4 de la Ligue Magnus paraît envisageable mais difficile, de même un bon parcours en coupe de la ligue permettrait d'agrémenter la saison. Mais les matchs seront sûrement plus âprement disputés que lors des dernières saisons car la marge par rapport à de nombreux adversaires s'est réduite. Grenoble devra aussi apprendre des défaites qui seront certainement plus nombreuses. Pour mieux rebondir, cette saison ou lors des saisons prochaines, grâce à une jeunesse qui aura mûri. Et retrouver ainsi les sommets auxquels les Brûleurs de Loups se sont habitués.

Christophe Laparra

 

Effectif :

Gardiens

N° NOM Prénom           Naissance    cm  kg  Club formateur    Club & Ch 2009/10   MJ   Min   Moy. Pén
 1 FERHI Eddy             26/11/1979  192  92  Français Volants  Grenoble    FRA-1  46           4'
39 RAIBON Sébastien       03/11/1990  179  81  Grenoble          Grenoble    FRA-1  27           2'

Défenseurs

N° NOM Prénom           Naissance    cm  kg  Club formateur    Club & Ch 2009/10   MJ   B   A  Pts  Pén
 5 AMAR Baptiste          11/11/1979  183  80  Gap               Rögle       SUE-1   58   2   5   7   30'
61 COLOTTI Rémi		  30/10/1990           Grenoble         Grenoble jr FRAjr   20    2   6   8    20'
91 CROSSMAN Jason         15/03/1990  182  77  Montpellier       Grenoble    FRA-1   38   1   2   3   12'
97 GILLET Aymeric         29/02/1980  190  89  Meudon    	 Dijon       FRA-1   35   5  17  22   62'
17 LLORCA Vincent         16/01/1992  190  84  Clermont          Grenoble    FRA-1   28   0   3   3    4'
22 MOISAND Maxime         11/06/1990  175  70  Grenoble          Grenoble    FRA-1   34   0   4   4   12'
32 ROULEAU Alexandre      29/07/1983  186  86        (Canadien)  Grenoble    FRA-1   45  20  35  55   90'
15 WALLIN Viktor          17/01/1980  192  99         (Suédois)  Grenoble    FRA-1   29   6  16  22   45'

Attaquants

N° NOM Prénom           Naissance    cm  kg  Club formateur    Club & Ch 2009/10  MJ   B   A  Pts  Pén
90 ARROSSAMENA Nicolas    09/01/1990  183  73  Saint-Pierre      Grenoble    FRA-1   40   7   4  11   53'
70 AVENEL Graham          26/06/1989  185  82  Caen              Caen        FRA-2   39  23  15  38   56'
13 BAYLACQ Julien         10/04/1989  183  75  Grenoble          Grenoble    FRA-1   46  10  13  23   16' 
93 BEDIN Joris            04/02/1993  172  71  Grenoble          Grenoble jr FRAjr   18   5   4   9   27'
12 BENOIT Loup            10/06/1991  177  68  Grenoble  	 Grenoble    FRA-1   35  0  1  1  0'
19 BROZ Ludek             19/03/1975  178  82        (Tchèque)   Grenoble    FRA-1   29   7  26  33   26'
21 KRAYZEL Ludek          10/01/1975  184  93        (Tchèque)   Brest       FRA-2   24  11  29  40   22'
88 LE BLOND Matthieu      16/09/1987  182  82  Grenoble          Villard     FRA-1   34  15  17  32   22'
74 PAPA Raphaël           26/02/1990  181  72  Grenoble          Grenoble    FRA-1   35   3   0   3    2'
11 RAIBON Elie            03/11/1990           Grenoble          Grenoble    FRA-1   20   0   1   1   27'
24 SIVIC Mitja            01/10/1979  177  85        (Slovène)   Grenoble    FRA-1   44  31  27  58   22'
76 SUZZARINI Maxime       07/12/1991           Grenoble          Grenoble jr FRAjr   20  12  10  22   28'
73 TARTARI Christophe     03/12/1984  189  81  Grenoble          Grenoble    FRA-1   46  11  49  60   38'

Entraîneur : Jean-François Dufour (CAN, 34 ans).

Départs : Mats Lusth (entraîneur, Frisk-Asker, NOR-1), Patrick Rolland (entraîneur-adjoint, arrêt), Jakob Milovanovic (D, 3+13, MsHK Zilina, SVK), Nicolas Besch (D, 5+8, Jukurit Mikkeli, FIN-2), Antonin Manavian (D, 7+15, Bakersfield Condors, ECHL), Martin Jansson (A, 14+28, Orsa IK, SUE-5), Stig Nilsson (A, 19+21, Orsa IK, SUE-5), Damien Fleury (A, 39+25, Västerås, SUE-2), Jean-François Dufour (A, 23+34, arrêt).

 

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