Allemagne 2004/05 : bilan

 

Pendant que l'équipe nationale allemande était reléguée de l'élite mondiale à la surprise générale, la DEL, cherchant peut-être à profiter de ces moments difficiles pour la fédération, prenait la décision de supprimer la passerelle sportive avec la division inférieure. Ce choix effectué entre soi par les clubs de DEL a rencontré assez peu d'opposition interne. Seul Düsseldorf, dont les importants sponsors ont dit ne pas vouloir s'investir dans une compétition qui ne serait pas fondée sur des critères sportifs, a montré une opposition farouche, même si les deux autres clubs-phares du hockey allemand de ces vingt dernières années, Cologne et Mannheim, ont aussi exprimé leur scepticisme.

Il faut dire que les votants, c'est-à-dire les membres actuels de la DEL, avaient tout à y gagner à première vue, puisqu'ils étaient débarrassés du danger d'une descente. Ceux qui avaient le plus à perdre, c'est-à-dire les prétendants à la montée, n'avaient pas été consultés. Mais ce repli égoïste a déclenché des protestations scandalisées de toute la communauté hockey. L'hebdomadaire Eishockey News a posé quatre questions sur son site internet pour prendre le pouls des fans. Les résultats ont été éloquents. "La DEL perd-elle de l'attractivité avec cette décision ?" 93,4 % répondent oui. "Irez-vous aussi souvent voir des matches de DEL malgré cette décision de fermer la ligue ?" 85,3 % de non. "La deuxième Bundesliga est-elle viable sans possibilité de monter ?" 87,6 % d'avis négatifs. Et enfin, "la DEB (la fédération allemande) doit-elle déclarer la DEL illégale ?" 81,9 % des votants approuvent cette solution radicale.

Le problème, c'est que la DEB est plutôt mollassonne. Sa passivité est tout autant critiquée par les supporters, et les clubs de deuxième Bundesliga, qui se sentent abandonnés, en ont marre d'elle. Le président de la fédération Uli Esken s'est justifié en disant qu'il n'avait aucun moyen de pression et qu'il lui fallait être très diplomatique vis-à-vis de la DEL. René Fasel, le président de la fédération internationale, a prouvé le contraire en rappelant que la DEB est l'unique organe reconnu et qu'une prolongation du contrat de coopération de la DEL est une condition sine qua non pour que la ligue ne soit pas illégale... Un Fasel prêt à servir d'intermédiaire dans les discussions mais excédé par la situation en Allemagne : "Ils ont les meilleures patinoires en Europe, les meilleurs supporters et le plus gros potentiel. Je ne peux plus comprendre ces problèmes persistants."

Quand on voit que la DEL gagnait en crédibilité et en intérêt ces dernières saisons, on se dit en effet qu'il faut être "timbré", pour reprendre les mots de Fasel, pour s'enferrer à nouveau dans la crise. Car, avec des clubs populaires dans toutes les divisions, l'Allemagne maintient une forte base de supporters, sans équivalent en Europe. Restreindre le hockey à une quinzaine d'arenas, comme la DEL semble le souhaiter, c'est risquer de se priver de tout le reste. Les chances de devenir le deuxième sport collectif du pays, l'objectif avoué, seraient alors compromises. Mais les dirigeants de clubs les plus influents font la sourde oreille. Gerd Schröder, le président de Francfort, a failli provoquer des étouffements chez les lecteurs de son interview en prétendant, à son retour de vacances, qu'il n'avait pas remarqué que la décision de la DEL suscitait une opposition, et qu'il n'avait pas reçu le moindre fax ou e-mail au site du club. C'était déjà faux, et cela le fut encore plus les jours suivants, car certains s'empressèrent de lui écrire pour lui faire ravaler son arrogance. On se dirige encore vers une intersaison très agitée et le retour aux pires années de la fracture du hockey allemand, lors des premières années de la DEL.

 

 

Les clubs de DEL

 

Premier : Eisbären de Berlin. Deux années durant, les hommes de Pierre Pagé ont dominé la saison avant d'échouer dans le sprint final. Et cette fois, alors que les médias s'étaient peut-être focalisés ailleurs, l'équipe du discret et précieux capitaine Steve Walker a témoigné de son talent et de sa persévérance pour aller au bout. Le joueur le plus spectaculaire n'était pas vraiment une star à l'origine, mais en est devenue une avec ses mises en échec - pour le meilleur et pour le pire avec sa suspension en play-offs. Erik Cole, puisque c'est de lui qu'il s'agit, a su dynamiser les Eisbären dans les joutes décisives, et la conséquence de son engagement a été une place en première ligne des États-Unis aux championnats du monde, aux côtés de Modano.

Son recrutement a donc été une meilleure affaire que celui de l'autre joueur de NHL Olaf Kölzig, qui était très convoité du fait de son statut de renfort au passeport allemand libéré par le lock-out. Le gardien né en Afrique du sud et formé au Canada a finalement atterri à Berlin, où joue son ami et ancien coéquipier aux Washington Capitals, Stefan Ustorf (ce dernier a d'ailleurs complètement relancé sa carrière en réussissant la transition du centre à l'aile). La venue de Kölzig a permis de vendre des maillots, mais guère plus, car il s'est vite blessé. C'est donc Oliver Jonas, dont la constance était remise en question, qui a prouvé qu'il était bel et bien capable de mener une équipe au titre. Là-dessus, il a tiré sa révérence, en faisant savoir qu'il tenait à s'en aller malgré ses deux ans de contrat restants, déçu qu'on lui ait si peu fait confiance en engageant Kölzig derrière son dos.

Autre départ, celui du jeune international Alexander Barta. Avant de faire ses valises pour Hambourg, il a tiré un bilan mitigé du travail de formation des Eisbären. Ce club est le seul à entretenir une réserve en Oberliga (troisième division), ce qui donne un palier utile aux juniors avant d'accéder à la DEL, et sa politique de jeunes est donc souvent citée en exemple. Barta fait cependant remarquer qu'il était un des rares Berlinois de l'équipe, et que si les Eisbären avaient de bons jeunes, c'est surtout parce qu'ils faisaient le forcing pour attirer les meilleurs espoirs du pays, sans forcément leur proposer, selon lui, une formation réellement meilleure qu'ailleurs. Le tableau n'est donc pas si idyllique, et on ne peut pas dire qu'on ait gardé ou même amélioré la qualité de la pépinière de l'ex-Dynamo.

Le dernier représentant de celle-ci est la fusée Sven Felski, pour qui ce titre à 30 ans est une véritable consécration après toute une carrière passée au club. Il y a tout vécu et en connaît les ambiguïtés. Il tient, comme son entraîneur Pierre Pagé, à respecter l'histoire du club, et il regrette la caricature qu'en font certains, mais d'un autre côté, il ne cautionne pas la nostalgie de l'ex-RDA en vogue chez certains supporters. C'est que le public des Eisbären a une image très forte et très particulière, celle des oubliés de la réunification, des exclus du système, qui collaient bien malgré eux à l'étiquette de losers. En étant le premier club "est-allemand" à devenir champion de l'Allemagne réunifiée, les Eisbären sont donc à la croisée des chemins. Il leur faut préserver leur identité, sans que celle-ci soit trop liée à l'image de club "de l'est". Eux qui veulent construire une grande patinoire espèrent en effet devenir le club de toute la ville. Le contexte s'y prête car ils n'ont plus vraiment de concurrence après le ridicule troisième dépôt de bilan en quatre ans des BSC Preussen, le club de Berlin-ouest qui n'arrive toujours pas à redémarrer sans caler aussitôt. Repartir complètement du bas de l'échelle, sans aucune dette à traîner, semble la seule solution pour qu'il puisse avoir un avenir. En attendant, les Eisbären veulent occuper la place.

 

Deuxième : Mannheim. Pendant les premières semaines, seules les performances du gardien français Cristobal Huet avaient entretenu l'illusion et permis l'accumulation des victoires. Mais personne n'était dupe : Mannheim ne pourrait pas être champion en concédant quarante tirs par match. Bien vite, les lacunes défensives ne purent plus être masquées. La crise amorcée s'est prolongée toute la saison régulière. L'entraîneur Helmut de Raaf a remis sa démission en constatant qu'il n'avait plus le soutien de l'équipe, révélant un problème de la DEL, où les joueurs canadiens ont parfois du mal à accepter l'autorité d'un Allemand. Un des leurs, le récemment retraité Stéphane Richer, a donc pris la suite, mais il n'a pas réussi non plus à donner une assise suffisamment solide à son équipe.

La saison d'adieu à la vielle patinoire du Friedrichspark a donc été ratée. Les play-offs ont failli racheter tout ce qui s'était passé avant, mais cela aurait été un hold-up. Seuls Huet et la ligne offensive Hecht-Edgerton-Corbet ont joué au niveau attendu, pendant que le jeune Christoph Ullmann poursuivait sa progression au poste de centre, habituellement faible en Allemagne. Le reste de l'effectif a terriblement déçu les supporters. Symbole de l'égarement des Adler, Steve Kelly a continué sur la lancée de ses frasques en pré-saison en Suisse, au point qu'on lui a retiré le capitanat en cours de route. Il s'est adjugé le record toutes catégories de pénalités du championnat (272 minutes !), et c'est la seule "distinction" qu'aura remportée un joueur de Mannheim cette saison.

 

Troisième : Francfort. Même l'arrivée de joueurs de NHL n'a rien changé à la domination de Patrick Lebeau sur la DEL. Le petit ailier a défendu son titre de joueur de l'année, et il a remporté le classement des marqueurs avec une trentaine de points d'avance sur Mike York. Il a même failli atteindre la barre mythique des cent points, que seul Robert Reichel avait réussi à franchir. Et pourtant, il avait perdu son centre complice Jesse Bélanger... Autant dire que, quand on lui a adjugé un pourvoyeur de palets de classe mondiale avec le vétéran américain Doug Weight, les adversaires avaient de quoi se faire du souci. Surtout que ce n'est pas à l'arrière qu'il fallait chercher un point faible. Peter Ratchuk, le défenseur offensif révélé l'an dernier, a été éclipsé par encore plus fort, le renfort de NHL Stéphane Robidas, un marathonien de la glace qui jouait plus de la moitié d'un match.

Et pourtant, cette grosse équipe n'a pas pu répéter l'exploit de sa devancière. Déjà, elle ne s'était pas montrée capable de hausser son niveau de jeu lors de la Coupe d'Europe des champions, où elle avait livré une triste prestation. Et elle a échoué en play-offs. Qualifiée en quart de finale sur un but très controversé de Doug Weight, elle a été éliminée en demi-finale par Mannheim, club détesté par les supporters, notamment depuis qu'il piquait les stars de l'Eintracht Francfort il y a une quinzaine d'années. Elle avait pourtant réussi à remonter à deux manches partout après avoir perdu les deux premières, mais n'a pas réussi à battre Huet dans le match décisif. L'élève a dépassé le maître, puisque l'entraîneur Rick Chernomaz s'est incliné devant Stéphane Richer, qui était son adjoint la saison passée.

 

Quatrième : Ingolstadt. S'il est un club qui a joué à fond la carte du lock-out, c'est bien celui-là. La star allemande Marco Sturm et l'autre attaquant Jamie MacDonald constituaient une grande attraction. Cette stratégie a longtemps paru payante, avec un premier titre au palmarès, la victoire en Coupe d'Allemagne. Quand il fut annoncé que la saison NHL serait définitivement annulée, Ingolstadt, qui avait gardé des places en réserve, en attribua donc deux de plus à Jamie Langenbrunner et Aaron Ward, ce qui lui faisait quatre joueurs de NHL dans son effectif. Mais ces deux renforts tardifs ne s'adaptèrent jamais au jeu de la DEL. Quant à l'ultime joker Mike Harder, il avait été recruté sur la base de sa participation à la conquête du titre de Francfort l'an passé. Mais il n'a pas confirmé sa réputation d'homme des play-offs, et son réveil du printemps passé n'est donc plus interprété que comme une coïncidence.

Dès février, tout s'est mal enchaîné. Jimmy Waite, qui a été le premier à être élu meilleur gardien de DEL deux années de suite, a dû être opéré du genou, et on ne l'a pas senti à son niveau optimal après son retour. Michael Hackert, la jeune révélation allemande, s'est ensuite brisé le tibia à la toute fin de la saison régulière. Les renforts initiaux de NHL n'étaient pas mieux lotis. MacDonald est resté absent plus d'un mois en raison d'une commotion cérébrale, et Marco Sturm a accumulé les pépins de santé, jouant la plupart du temps en surmontant la douleur. En demi-finale, les suspensions de MacDonald et surtout de la recrue-vedette de la saison précédente Cameron Mann, pour des gestes de représailles stupides, ont achevé l'ERCI, qui avait une occasion en or de réaliser une saison historique.

 

Cinquième : Nuremberg. Pendant la première moitié du championnat, l'équipe de Nuremberg, débordante d'entrain, a plané en tête du classement avec son jeu frais et offensif. Le symbole de cette jeunesse insouciante est Yan Stastny, qui a progressé à vitesse grand V et a été le seul joueur n'ayant jamais évolué en NHL à être sélectionné dans l'équipe américaine pour le championnat du monde. Le fils de Peter s'est fait un prénom, et lorsque la famille Stastny a fait la couverture de The Hockey News en fin de saison, une autre première a eu lieu : comme Yan posait avec sa tenue de Nuremberg, c'était la première fois que le maillot d'un club allemand figurant en couv' de l'hebdomadaire canadien de référence. Le quart d'heure de gloire pour les Ice Tigers, qui ont aussi flairé le meilleur recrutement de la saison : Pascal Trépanier sortait d'une année noire en AHL à Hershey, et vu qu'il avait fini avec une fiche de -32 (ce qui serait un bon score... en golf), ses coéquipiers lui avaient offert pour la plaisanterie une veste verte semblable à celle offerte aux golfeurs qui remportent le Masters d'Augusta. Mais en Allemagne, on n'allait plus rire de Trépanier... Personne ne prêtait attention à lui à son arrivée, mais malgré son gabarit quelconque, il s'imposa rapidement grâce à la précision de son maniement du palet et à la coordination parfaite de sa prise de décision. Élu meilleur défenseur de DEL, il a fait monter sa cote en une saison en Europe, et il a donc été alpagué par Berne.

Malheureusement, Trépanier était un peu seul en défense. Grâce à ses nombreux espoirs, dont Stefan Schauer qui a repris un peu confiance en sa relance en retrouvant le temps de jeu qu'il n'avait pas à Cologne et en gagnant ses galons d'international, Nuremberg n'avait que trois étrangers à l'arrière, mais les deux autres, qui avaient tous deux un passé en NHL, n'ont pas été aussi convaincants. L'international slovaque Lubomir Sekeras a été solide derrière mais a trop peu apporté offensivement, alors que Drew Bannister a déçu sur toute la ligne. En play-offs, ce furent les portiers qui craquèrent. Le troisième gardien de l'équipe nationale tchèque Adam Svoboda a failli, si bien que le tout jeune Lukas Lang lui a même été préféré par moments. Nuremberg a donc repris ses bonnes vieilles habitudes en étant éliminé dès les quarts de finale. C'est sur ce revers que l'entraîneur Greg Poss quittait son poste, puisqu'il avait décidé de se consacrer entièrement à ses nouvelles fonctions de sélectionneur national. Il ne savait pas encore qu'il connaîtrait un échec encore plus cuisant avec la relégation de l'Allemagne.

 

Sixième : Cologne. Hans Zach est quelqu'un d'assez buté. Rarement on le verra se dédire ou accepter une autocritique. Comme il avait annoncé dès le départ qu'il ne recruterait pas de joueurs libérés par le lock-out, il s'y est donc tenu. Pendant un temps, il a pu faire le fier-à-bras, quand son équipe d'anonymes dominait le championnat à l'automne. Mais quand les autres clubs ont commencé à se renforcer encore plus sérieusement, cela a été trop difficile. Et Zach a poussé le bouchon un peu trop loin en donnant la dernière licence disponible à un joueur venu de LNAH (l'ancien semi-pro québécois), Marquis Mathieu, comme s'il le faisait exprès juste pour ne pas faire comme tout le monde et suivre la ligne qu'il avait édictée. Le sort a désigné Ingolstadt comme l'adversaire en quart de finale, soit l'équipe qui avait le plus de joueurs de NHL. Deux stratégies complètement opposées s'affrontaient, et le credo de Zach était en jeu... D'où l'amertume de la défaite, consommée à la septième manche décisive.

En conséquence, les dirigeants de Cologne ont rogné les prérogatives de Zach sur le recrutement. Avoir une équipe sans stars aide certainement le Bavarois à appliquer sa tactique défensive qui ne tolère pas le moindre écart, mais est-ce vraiment ce qu'il faut à un club comme le KEC ? Quand on dispose d'une "salle de spectacles" aussi spacieuse et fonctionnelle que la Kölnarena, on se doit de proposer un jeu attractif. Avec le recul des affluences enregistré cette année, Cologne s'est maintenant éloigné du leader européen Berne, qui a su changer son fusil d'épaule en cours de saison pour ajouter un peu de piment avec Heatley et Brière. Et il est peu probable de pouvoir récupérer cette pole position à la moyenne de spectateurs avec une équipe dont le meilleur marqueur est un défenseur (Stéphane Julien) et dont la vedette, même si elle est adulée des supporters, est un joueur de 38 ans (Dave McLlwain). Ce n'est pas cela qui suscite l'envie.

 

Septième : Augsbourg. Drôle de saison dans la Souabe. Elle avait commencé difficilement en raison du recrutement très tardif, et puis un mois de novembre exceptionnel a fait d'Augsbourg un prétendant aux play-offs. Le centre canadien François Méthot s'est imposé comme un leader de grande classe, lui qui a pris autant de pénalités durant toute sa carrière que son entraîneur Benoît Laporte le faisait en une saison quand il était joueur à Rouen... Une telle réussite avec un si petit budget a d'ailleurs attiré l'attention sur Laporte, dont Nuremberg a officiellement annoncé la venue pour la saison prochaine dès le mois de décembre. Une annonce qui a coïncidé avec une crise sportive car Augsbourg s'est soudainement mis à collectionner les défaites. Entre déclarations aux accents populistes visant à caresser le public dans le sens du poil et propos beaucoup moins diplomatiques envers les spectateurs qui le conspuaient, Benoît Laporte ne savait plus comment gérer les remous provoqués par son départ programmé.

Lorsqu'Augsbourg, déjà lourdement retombé au classement, a perdu aux tirs au but la demi-finale de coupe contre Ingolstadt, laissant filer une occasion idéale de rentrer dans l'histoire du club, tout le monde s'est dit que cette saison s'apparenterait à un véritable gâchis. Et puis, le miracle s'est produit. Alors que tout le monde pariait sur un duel rhénan Krefeld-Düsseldorf pour le dernier strapontin, les Panther ont fini en trombe, en terminant la saison régulière par six victoires consécutives. Ils ont même atteint la septième place, la meilleure depuis plus de trente ans ! Une position qu'Augsbourg ne devrait sans doute pas revoir de sitôt, car tout le monde s'en va : Laporte bien sûr, les meilleurs jeunes (le rapide Ronny Arendt et le néo-international Björn Barta), et surtout Karl-Heinz Fliegauf, le manager-gérant-communicant-responsable-de-tout, qui sera le plus difficile à remplacer.

 

Huitième : Hambourg. L'ancien sélectionneur canadien Dave King était sans doute l'entraîneur le plus prestigieux de la DEL, mais pas le moins contesté au sein de son équipe. Ses méthodes dures et exigeantes devenaient insupportables aux joueurs, en particulier de Brad Purdie, l'ancien meilleur marqueur du championnat à Krefeld, qui avait été complètement dégoûté du hockey et traînait ses savates jusqu'à finir la saison régulière avec une fiche de -22, catastrophique chez un club de milieu de tableau. Les tensions dans le vestiaire allèrent jusqu'au clash, puisque l'attaquant américain Jim Dowd décida carrément de faire ses valises en décembre, excédé. Quand on sait qu'une licence de joueur étranger perdue ne peut être remplacée en DEL, on comprend que ces dissensions avaient coûté cher à Hambourg. Les dirigeants tardèrent pourtant à réagir, et ils ne se séparèrent de King qu'à quatre journées de la fin, quand ils se rendirent compte que la qualification en play-offs était en train d'être compromise. Les Freezers filaient un mauvais coton, et l'adjoint Mike Schmidt ne put pas redresser la barre tout de suite, en commençant par deux défaites. Finalement, Hambourg remporta deux victoires le dernier week-end pour sauver in extremis sa place en quart de finale.

Il n'y avait alors plus rien à perdre. C'est vrai en particulier pour le gardien Boris Rousson, le joueur le plus ancien dans la franchise d'Anschutz, et qui dut pourtant subir l'arrivée d'un concurrent célèbre, Jean-Sébastien Giguère. On pensait pourtant que la dernière licence serait accordée à un joueur de champ, surtout avec la "malédiction des capitaines" : après la blessure au genou de Jürgen Rumrich (saison terminée), tous ceux qui portèrent le C sur leur maillot connurent des malheurs, Smazal au pied, Tomlinson au poignet, et Martinovic coupé près de l'œil gauche. Autant dire que les hockeyeurs superstitieux - c'est-à-dire tous les hockeyeurs - voulaient à tout prix éviter le capitanat... A posteriori, c'est en attaque que les Freezers auraient dû investir pour leur joker, car ils n'ont pas marqué une seule fois pendant les deux dernières manches de leur quart de finale. Rousson, lui, a réussi le tour de force de récupérer sa place de titulaire perdue au profit de Giguère. Mais sa saison s'acheva sur un but éliminatoire malheureux en prolongation contre Francfort, alors que le palet avait heurté son masque sans que l'arbitre ne siffle.

 

Neuvième : Krefeld. L'originalité et l'exotisme n'ont pas payé. Le recrutement d'un entraîneur venu du championnat danois, Mario Simioni, avait été critiqué, et effectivement, il n'a tenu que dix journées, avant qu'une humiliation à domicile dans le derby contre Düsseldorf ne lui soit fatale. Quant au Coréen formé à Krefeld, Martin Hyun, son retour n'a rien donné non plus, avec un temps de jeu de plus en plus faible qui l'a finalement conduit à sortir de l'effectif. Son parcours atypique l'a néanmoins rendu intéressant pour de hauts dignitaires coréens : il a été nommé au sein d'un important groupe de travail sur la réunification des Corées, car on souhaite profiter de sa connaissance de la réunification allemande !

En cours de saison, Krefeld a donc plutôt opté pour des valeurs sûres. Après un intérim bien assuré par Franz Fritzmeier, l'entraîneur canadien Bob Leslie a pris les rênes de l'équipe. L'international ukrainien Vadim Slivchenko et le joueur de NHL Thomas Preissing devaient être des renforts de gros calibre. Leslie avait même dit au premier entraînement de Preissing qu'il "patinait mieux que (la célèbre ancienne patineuse allemande) Katarina Witt". Pourtant, à l'usage, il n'a convaincu ni sur la note technique ni sur la note artistique... Les Pinguine ont attendu longtemps avant de donner leur dernière licence, afin d'être sûr de faire le bon choix. Ils ont finalement jeté leur dévolu sur Krys Kolanos, qui n'avait pas franchement enthousiasmé dans sa précédente escale pendant le lock-out à Espoo, et qui n'a pas pu aider à raccrocher in extremis le wagon des play-offs. Le KEV a eu le mérite d'y croire jusqu'au bout mais n'aurait pas franchement mérité une qualification.

 

Dixième : Düsseldorf. Sur la sellette avant même que la saison ne commence, l'entraîneur Michael Komma n'a tenu que l'espace de six rencontres avant de céder face à une opposition frontale. Les supporters s'étaient lassés de lui, et les joueurs n'avaient pas spécialement envie de le soutenir. Son successeur Butch Goring, qui avait conduit le rival Krefeld au titre en 2003, a pu calmer la grogne, mais pas amener l'équipe en play-offs. L'escapade vaudevillesque du capitaine Trond Magnussen avec la femme de son ex-ami Tore Vikingstad a montré que partager un appartement entre compatriotes ne présente pas que des avantages. Magnussen a dû quitter l'équipe (une licence de perdue... et, non, pas dix de retrouvées) alors que Vikingstad vivait une saison noire entre mononucléose, blessures et cornes. Il ne restait donc plus qu'un Norvégien valide, le toujours impeccable défenseur Tommy Jakobsen.

Bref, c'est une année de plus à oublier pour le DEG. Heureusement, il y a eu la résurrection de Klaus Kathan. Après deux années de totale disette offensive à Mannheim, il a subitement retrouvé aux côtés de Kreutzer son sens du but qu'on croyait définitivement perdu, jusqu'à devenir le buteur le plus prolifique du club. Et puis les jeunes se sont affirmés. Après le défenseur Alexander Sulzer, devenu international, un autre joueur formé à Kaufbeuren s'est révélé : l'énergique et précis Patrick Reimer, élu espoir de l'année. Le problème, c'est que tous les Nord-Américains de l'effectif ont déçu, notamment les recrues Schneider, Herr et Davidson. Et en DEL, généralement, c'est rédhibitoire...

 

Onzième : Iserlohn. Le centre Mike York a parfaitement rempli sa fonction en apportant sa notoriété à une équipe habituellement constituée de parfaits inconnus. Avec le défenseur John-Michael Liles, dont la venue à Kassel avait été annulée en début d'année, Iserlohn a même engagé un second international américain en cours de route. Et il a failli en récupérer un troisième, la petite pépite Brian Gionta, mais celui-ci n'est resté que trois jours avant de reprendre l'avion pour rejoindre sa femme enceinte. Avec un maître à jouer comme York, doté d'un coup d'œil exceptionnel, les Roosters ont naturellement présenté un visage plus attrayant. Sur le plan du classement, néanmoins, ils n'ont pas bougé par rapport aux saisons précédentes. Ils ont navigué dans les eaux calmes du tableau, à distance suffisante des récifs dangereux de la relégation, mais sans grand espoir de franchir le cap des play-offs.

Plus que la satisfaction d'avoir vu passer un joueur de la trempe de Mike York, le plus intéressant pour Iserlohn est que le club semble maintenant capable de conserver ses meilleurs éléments. L'arrière norvégien Martin Knold, très précieux en jeu de puissance, a ainsi prolongé pour deux ans, de même qu'un autre pilier défensif, Erich Goldmann. La révélation Collin Danielsmeier, un attaquant qui s'est découvert des talents de défenseur et que sa polyvalence a même emmené jusqu'en sélection nationale, restera lui aussi. On s'est fait plaisir avec Mike York, mais on s'assure surtout de pouvoir rester compétitif sur le long terme.

 

Douzième : Hanovre. Malgré les promesses de l'intersaison, les Scorpions ont commencé par livrer des prestations catastrophiques sur la glace, bien que la situation se soit apaisée en coulisses. Un palet reçu en pleine tête a facilité la mise à l'écart de l'entraîneur Gunnar Leidborg, remplacé par Kévin Gaudet. Et vu que les Suédois de l'effectif (Frylén et Öberg) marchaient à côté de leurs patins, les reliquats de la période scandinave de Hanovre vont certainement disparaître. La débâcle, encore aggravée par la malchance avec les blessures presque immédiates du buteur slovaque Marian Cisar ou du joker Alexander Serikow (le club s'est un peu fait avoir en troquant Peter Abstreiter à Kassel contre ce joueur vite out à cause de problèmes de dos), semblait irrémédiable après un 0-7 dans un derby à Wolfsburg. Les chances d'éviter le barrage de maintien étaient alors quasi-nulles, puisque les Scorpions comptaient jusqu'à dix-sept points de retard sur le promu.

Et puis, le miracle. La nouvelle génération allemande annoncée à grands coups de tambour pendant l'été prenait enfin les choses en mains, emmenée par les 26 buts d'Andreas Morczinietz. Pendant deux mois, Hanovre enchaînait victoire sur victoire, et repassait devant Wolfsburg sur le fil, à la dernière journée. La nouvelle politique aura mis le temps, mais elle aura porté ses fruits. L'espoir renaît.

 

Treizième : Wolfsburg. Le promu s'est vite adapté au rythme de la DEL. Il a même prouvé qu'on pouvait y réussir en se passant des Nord-Américains, ce dont beaucoup de monde doutait. Il n'y en avait en effet que trois dans l'effectif, qui ont tous été sujets à des baisses de régime. Pour jouer la carte des joueurs européens, il faut en trouver qui représentent un bon compromis entre technique et physique, et le très puissant ailier Ivan Ciernik, qui a fait impression, en est un. Malgré la blessure du très attendu Pavlikovsky, les leaders ont donc été slovaques, y compris en défense avec Petr Smrek, gabarit moyen mais joueur technique au tir puissant. Le maintien paraissait ainsi acquis dès janvier, et Wolfsburg commençait déjà à faire ses emplettes pour la saison prochaine, par exemple avec le défenseur allemand Lasse Kopitz.

Mais les dirigeants ont mis la charrue avant les bœufs. Car ils avaient une dérogation jusqu'au 31 décembre 2005 pour emménager dans une nouvelle patinoire aux normes de la ligue, et le début des travaux était sans cesse reporté. Peut-être attendait-on que le maintien soit mathématiquement confirmé pour donner le feu vert au projet, mais c'était un cercle vicieux car l'incertitude extra-sportive avait des conséquences sur ce qui se passait sur la glace. Plus le temps passait, et plus la livraison à temps d'une patinoire dans des délais aussi courts paraissait impossible. Pendant que l'avenir en DEL de Wolfsburg était remis en question, l'équipe plongeait, dépassée par le retour impossible de Hanovre. Juste avant les barrages de maintien, les joueurs se prononcèrent presque à l'unanimité contre leur entraîneur Marek Mastic, qui avait pourtant re-signé pour deux ans à peine deux mois plus tôt. Bob Leslie, qui avait tout juste terminé sa saison avec Krefeld, arriva alors pour prendre la barre du bateau à la dérive pendant le barrage de relégation. Sportivement, le maintien était finalement assuré.

Mais Wolfsburg n'était pas au bout de ses peines. Malgré quelques coups de truelle des élus pour ouvrir le chantier, les travaux commençaient très timidement. Le projet était ficelé mais la confiance ne régnait qu'en façade. Tout le monde savait qu'il faudrait que les deux tiers des clubs de DEL votent favorablement pour prolonger la dérogation, or la majorité de ceux-ci rêvaient de se faire la peau de Wolfsburg qui avait essayé de leur piquer des joueurs en faisant grimper les salaires. Pour s'établir à haut niveau, l'argent ne suffit pas, il faut aussi un comportement professionnel et une planification intelligente. À Volkswagen-ville, on l'a appris à ses dépens. À Audi-ville (Ingolstadt), on avait su faire les choses dans l'ordre et construire sa patinoire à temps...

 

Quatorzième : Kassel. Sur le papier, les Huskies étaient un outsider sérieux, et ils avaient l'équipe pour retourner en play-offs. Sur la glace, ils ont vécu un véritable cauchemar. L'entraîneur Mike McParland n'a jamais tenu ses joueurs, et le retard pris dans la préparation physique et dans la genèse du groupe n'a jamais pu être rattrapé. L'entraîneur du hockey mineur Milan Mokros, même avec l'adjonction à ses côtés de l'expérimenté Ihnacak, n'a rien pu faire pour redonner vie à des joueurs démotivés. Il est vrai que les blessures sont venues se rajouter sur cette situation déjà compliquée. Dany Bousquet, dont le jeu collectif laissait déjà à désirer, a ainsi vu sa saison s'arrêter avant terme.

Heureusement, Kassel jouit d'une cote de sympathie forte auprès du public et d'une bonne respectabilité auprès de ses confrères. Entre lui et le parvenu Wolfsburg, il n'y a pas eu photo. On peut même dire que la DEL fait tout pour ménager ce club, puisque l'argument majeur utilisé pour supprimer la relégation est de sécuriser les investissements sur le long terme, notamment pour construire des arenas. Le cas épineux qui apparaît en filigrane dans ce discours est justement celui de Kassel. Une nouvelle salle va être construite dans le nord de la Hesse, mais ses particularités techniques ne sont pas encore définies. C'est un club de handball qui est prévu comme utilisateur principal, et on ne sait pas si les Huskies pourront se raccrocher au projet, ce qui impliquerait l'installation d'une glace et une capacité supérieure, donc un coût plus important. La perche tendue pour repêcher Kassel ne lève pas pour autant toutes les interrogations sur son avenir.

 

 

Les clubs de 2e Bundesliga

 

Premier : Duisburg. Plus la saison avançait, et plus l'EVD s'imposait comme le principal favori à la promotion. À l'exception du défenseur suédois au gros slap Carl-Johan Johansson, qui voulait passer en DEL quoi qu'il arrive, toutes les vedettes de l'équipe (l'ex-international Torsten Kienass, le duo offensif canadien Boisvert-McNeil et l'entraîneur Dieter Hegen) avaient pris le pari de re-signer dès le nouvel an, tellement ils étaient confiants de la montée qui se profilait. Non content d'engager un joker vainqueur de la dernière Coupe Stanley (Nolan Pratt), Duisburg s'est donné les moyens de réussir. Exactement comme l'an dernier, on a utilisé le système des "Förderlizenzen", qui autorise le prêt des espoirs aux clubs de division inférieure pour leur donner plus de temps de jeu, pour se faire céder cinq joueurs certes âgés de moins de vingt-trois ans, mais déjà pleinement titulaires en DEL, et libres uniquement parce que leurs clubs étaient éliminés des play-offs, comme l'attaquant Patrick Reimer (Düsseldorf) et le gardien Dimitrij Kotschnew (Iserlohn). Cela fait deux années de suite que Duisburg use de cette ficelle légale qui trahit l'esprit du règlement, et cette fois ça a marché. Mais dans l'élite, il ne pourra compter que sur soi-même et devra prouver sa vraie valeur. Car pour la deuxième année de suite, après Wolfsburg, c'est le club avec la plus faible affluence de la 2e Bundesliga (1496 spectateurs en saison régulière) qui accède à la DEL...

 

Deuxième : Straubing. Voilà un club qui doit se structurer, et pas seulement en changeant encore de logo... Car chaque année, l'équipe progresse, le public suit, et le classement s'améliore. Il y aurait eu de quoi être perturbé par la rupture précoce des ligaments croisés du capitaine Andreas Lupzig (qui ne reviendra au jeu qu'en février), mais un remplaçant expérimenté est arrivé avec Stefan Mann. Alors que les Tigers étaient premiers à l'automne, l'harmonie aurait aussi pu être brisée lorsqu'ils ont été lâchés par leur entraîneur Kévin Gaudet, qui a utilisé une clause de sortie de son contrat pour répondre favorablement à une proposition de Hanovre en DEL. Mais son successeur Daniel Naud a repris le flambeau sans ralentir, et Straubing a pu conclure par une finale la meilleure saison de son histoire.

 

Troisième : Regensburg. Plus de trois mille spectateurs en saison régulière, plus de quatre mille cinq cents en play-offs, le soutien populaire ne cesse de pousser l'EVR vers le haut. À domicile, le club se sent pousser des ailes, emmené par le buteur Jason Miller qui vit une seconde jeunesse. L'entraîneur Erich Kühnhackl est néanmoins là rappeler sans cesse son équipe à ses devoirs défensifs, et cela fonctionne bien avec le meilleur ailier du championnat Mark Woolf, qui marque moins mais reste indispensable, l'attaquant défensif Sven Gerike ou encore l'imposant arrière aux lourdes mises en échec Paul Weismann. À l'extérieur, cependant, ce n'est pas toujours la même musique. C'est ce qui empêche pour l'instant cette équipe, très dépendante de son public, de viser plus haut.

 

Quatrième : Bremerhaven. Simple promu qui avait même resserré son budget, le club de la mer du nord a réalisé une saison exceptionnelle. L'entraîneur Peter Draisaitl - resté dans l'histoire pour son tir au but qui n'avait pas voulu franchir la ligne en quart de finale des JO d'Albertville contre le Canada - a pu travailler dans une ambiance idéale, avec des dirigeants compréhensifs et des joueurs réceptifs. Le petit Italo-Canadien Daniel del Monte, l'ancien joueur de Fribourg qui restait sur deux promotions consécutives puisqu'il a aussi aidé Bremerhaven à se sortir de l'Oberliga l'an passé, s'est imposé comme le meilleur marqueur de la saison régulière. La belle histoire s'est poursuivie en play-offs avec une série extrêmement intense et physique gagnée contre Schwenningen. Et si le gardien Greg Gardner, la pièce maîtresse du club, ne s'était pas blessé, qui sait si la demi-finale contre Straubing n'aurait pas pu aussi sourire ?

 

Cinquième : Schwenningen. Le SERC a travaillé sa faiblesse de la saison précédente, la défense. Le gardien Rostislav Haas, venu du voisin Fribourg-en-Brisgau où il avait contribué à l'expérience de la montée en DEL, a bien sécurisé ses arrières. Schwenningen a ainsi pu atteindre la quatrième place, si importante puisqu'elle assurait de recevoir en quart de finale. Un avantage important quand on connaît l'ambiance chaude du Bauchenbergstadion. Malheureusement, cela n'a pas suffi, car les buteurs attendus comme Ian McNeil ont déçu dans ces play-offs. Cinq mille spectateurs assistèrent à l'élimination aux tirs au but à la septième manche, un dénouement amer. Mais l'entraîneur Mike Bullard n'en a pas perdu son sens de l'humour pour autant. Il a préféré tourner en dérision une lamentation connue : "j'étais toujours notre meilleur tireur de penaltys à l'entraînement, mais le coach ne m'a malheureusement pas laissé tirer...", a-t-il déclaré pour rire.

 

Sixième : Landshut. Après plusieurs saisons réussies, l'EVL semblait devoir poursuivre sur sa lancée. Il abordait la saison en léger favori d'un championnat jugé très serré et incertain, et il confirmait en commençant par six victoires. Mais la suite était moins rose. Si Thomas Daffner, qui était international allemand du temps où Zach l'entraînait à Kassel, a bien réussi son retour, le flop du vétéran Thomas Schinko (Ingolstadt) a prouvé qu'il ne suffit pas de venir de DEL pour amener une valeur ajoutée au niveau inférieur. C'est valable aussi pour les gardiens, et on attendait mieux de Jan Münster, arrivé en novembre après avoir claqué la porte de Kassel qui avait préféré engager Corey Hirsch plutôt que de lui faire confiance pendant la blessure de Gage. Mais Landshut a surtout manqué de leaders étrangers. L'attaquant canadien Bobby Brown, qui tournait à un point par match en ECHL, s'est révélé trop lent, et les Cannibals ont été beaucoup trop faibles offensivement.

 

Septième : Weißwasser. Repêché grâce à la disparition de Bad Nauheim, le club de Lusace est arrivé avec de tout petits moyens et l'unique ambition de ne pas descendre. Il avait osé faire confiance à deux gardiens locaux, Sebastian Elwing et Ronny Glaser. Pas grand-monde n'y croyait. Beaucoup doutaient aussi de Mathias Wikström, le meilleur centre d'Oberliga qui avait signé avant que la montée sur tapis vert ne soit connue. Il se disait que ses feintes élégantes ne passeraient plus au niveau supérieur, mais le Suédois a prouvé le contraire, et il a justifié son élection comme capitaine. Résultat, Weißwasser a atteint les play-offs, alors que personne n'aurait misé une piécette là-dessus.

 

Huitième : Bietigheim-Bissingen. Pour un prétendant au titre, la défense se révéla vite être une passoire, et les résultats désastreux coûtèrent son poste à l'entraîneur Daniel Naud. Le duo offensif qui avait cartonné l'an dernier n'avait plus la même pèche. Craig Teeple a eu du mal à retrouver la forme et a abandonné le capitanat au défenseur Markus Wieland pour mieux se concentrer sur son jeu. Le Biélorusse Andreï Kovalev, excellent technicien, avait quant à lui trop peu de volonté défensive. C'est pourquoi il fut inclus dans la tournante lorsque l'entraîneur débutant Uli Liebsch obtint les renforts réclamés, notamment en défense, ce qui laissait sept étrangers pour six places. À la dernière journée, Bietigheim put revenir in extremis à la huitième place, et affronter ainsi en quart de finale Straubing, qui avait récupéré son ex-entraîneur Naud. Celui-ci put alors prendre sa revanche sur le club qui l'avait licencié, mais la série fut plus serrée que prévu. Si cette huitième position a déçu, la promotion des moins de dix-huit ans en DNL, le principal championnat junior, est très intéressante pour la construction d'un grand club. Il faut dire que les jeunes ont pu se consacrer à leur championnat, car ils n'ont quasiment plus eu de temps de jeu en seniors quand il a fallu cravacher pour remonter au classement.

 

Neuvième : Fribourg-en-Brisgau. Les défenseurs venus d'ECHL étaient à la mode à l'intersaison en deuxième Bundesliga, et le moins qu'on puisse dire est qu'ils n'ont pas tous convaincu. Pour commencer sa carrière d'entraîneur, Pavel Gross fondait ainsi beaucoup d'espoirs en Geno Parrish, qui se révéla être un véritable touriste. Lorsqu'il fut suspendu pour cause de mauvaises performances, il préféra faire ses valises qu'accepter la sanction. Il était prévu pour être le seul renfort étranger de la défense, et même si, en Bundesliga, il est possible de remplacer les joueurs partants, on comprend que Fribourg-en-Brisgau ait vacillé sur ses bases malgré une bonne attaque. Le club pensait remonter immédiatement, et il se retrouva finalement en poule de maintien. Peut-être l'habitude de Gross de laisser sur le banc certains cadres quand ils ne jouaient pas à leur niveau lui a-t-elle valu des inimitiés, en tout cas cet échec lui a fait prendre la porte. Fribourg est redevenu ce qu'il était il y a deux ans, une équipe de milieu de tableau. L'aventure en DEL n'a-t-elle rien changé ? Si, car le public conquis lors de la montée-surprise est resté. Ce qu'il a vu une fois, il veut le revoir, et il y croit (sauf si l'élite ferme ses portes définitivement...). Le club a gagné en visibilité et en confiance en lui, et il est bien plus fort aujourd'hui.

 

Dixième : Bad Tölz. "Les conflits se résolvent par des décisions", avait déclaré l'entraîneur Hans Rothkirch, en froid avec une partie des joueurs, après seulement quatre journées. Le manager Beppo Schlickenreider, ancien gardien international, l'a écouté et a pris une décision, mais peut-être pas celle qu'il envisageait. Il a viré son entraîneur et a assuré lui-même l'intérim avant d'engager Peter Obresa, moins aimé des supporters car plus distant. Au bout du compte, la saison s'est bien terminée avec de bons résultats en poule de maintien, mais entre-temps le public avait boudé. Il a donc fallu que le sponsor principal, la brasserie Hacker-Pschorr, mette la main à la poche pour compenser le manque à gagner aux guichets et éviter que le club ne replonge dans les problèmes financiers.

 

Onzième : Kaufbeuren. La superbe victoire en coupe contre Hambourg a été une belle entrée en matière, mais l'ESVK est vite resté à la traîne de sa division. Il ne lui était pas possible de compenser les départs de ses meilleurs espoirs Michael Waginger (qui a atterri sur la première ligne de Duisburg) et Patrick Reimer. On s'était laissé abuser par les bonnes statistiques en ECHL du défenseur David Cousineau, incapable de les rééditer et renvoyé dès décembre sans qu'on ait les moyens de le remplacer. Heureusement, le lock-out était là, et l'arrière de NHL Alex Henry arriva à point pour stabiliser la défense. Le retour de l'entraîneur Peter Ustorf a aussi redonné confiance à l'équipe. La saison à domicile, qui avait bien commencé, s'est donc aussi achevée de belle manière, devant quatre mille spectateurs, par une victoire 3-0 sur Crimmitschau dans un match décisif pour le maintien.

 

Douzième : Essen. C'était le promu le plus coté, et c'est pourtant lui qui a fini le plus mal classé des trois. La faute à un début de saison catastrophique, avec sept défaites en huit journées. Le buteur d'ECHL Brian McCullough, qui avait annoncé à l'avance vouloir juste se faire connaître car il espérait jouer en DEL dans un an, fut alors viré, car hors de forme. La recrue-vedette de l'intersaison, le très décevant ex-international suédois Petter Rönnqvist, allait bientôt suivre. Car les Moskitos ont fait comme Landshut, ils ont remplacé en cours de saison leur gardien étranger par un espoir allemand, en l'occurrence Leonhard Wild, qui a convaincu et largement fait oublier Rönnqvist. Lentement mais sûrement, Essen s'est donc rapproché des play-offs, ratés de sept points, avant de sauver l'essentiel en poule de relégation. La grande découverte de la saison a été le jeune Michael Wolf, qui a explosé en première ligne aux côtés d'Éric Houde et Philippe Audet. La grande déception a été de voir moins de spectateurs qu'en Oberliga et en Regionalliga, où les derbys remplissaient mieux les gradins.

 

Treizième : Crimmitschau. La situation économique en Saxe ne permettait plus d'entretenir la croissance de ces dernières années, et pour sa quatrième saison en deuxième Bundesliga, Crimmitschau a dû se serrer la ceinture. Il a été obligé de réduire drastiquement son budget et de faire confiance aux jeunes. La nouvelle équipe a fini assez loin des play-offs, mais elle était encore plus éloignée des dernières places. Le problème, c'est que les compteurs sont remis à zéro pour la poule de relégation, où six clubs doivent jouer leur destin en dix journées. Et la jeune formation saxonne n'a pas supporté la pression. Après avoir perdu ses nerfs dans un match capital contre Essen, elle a abordé le match de la dernière chance à Kaufbeuren avec trois joueurs suspendus. Trois grosses erreurs défensives ont alors signifié le déclin que l'on sentait venir pour le club est-allemand qui avait été une des belles progressions de la dernière décennie.

 

Quatorzième : Weiden. Deux miracles de suite, ça aurait fait beaucoup. Weiden retournera en Oberliga, qui sera plus appropriée à ses capacités actuelles. Dans la mesure où personne n'aurait pu empêcher ce dénouement, il est dommage que Leos Sulak ait été la victime de la cette saison. En son temps un des joueurs les plus créatifs d'Allemagne, il était devenu un entraîneur adepte de l'ultra-défense, ce qui était de toute façon la seule solution possible avec les maigres moyens à disposition. En deux ans et demi, il aura marqué son passage à Weiden, car c'est lui qui a fait monter ce club en Bundesliga et qui a réussi le tour de force de l'y maintenir une fois. Mais, pour justifier les défaites qui s'enchaînaient, une partie des joueurs ont réclamé sa tête... et l'ont obtenue. Dégoûté de la gestion humaine de cette affaire, le vice-président chargé du marketing Josef Werner, l'homme qui avait poli l'image du club il y a quelques années, a démissionné. Cela fait beaucoup de gâchis car il ne fallait pas être grand clerc pour se rendre compte que ce sont les joueurs étrangers qui n'avaient pas le niveau. Espérons que Weiden pourra rebondir en Oberliga, s'il garde ses jeunes... et ses supporters.

 

Oberliga

Ce sont deux clubs de grandes villes qui ont été promus en Bundesliga. Mais deux clubs solides, bien gérés, qui misaient sur leur force collective et pas sur des noms ronflants. Bref, il ne s'agit pas des Berliner SC Preussen... Après avoir promis la montée, Munich était sous la pression de médias exigeants mais a su répondre aux attentes. Dresde remplacera quant à lui Crimmitschau dans le rôle du troisième club issu de l'ex-RDA. Le troisième favori Ravensburg a déçu sportivement, même s'il dispose d'un soutien populaire impressionnant avec plus de 2500 spectateurs de moyenne. Le club qui s'était le plus renforcé, Leipzig, a déçu économiquement, puisqu'on a appris son dépôt de bilan juste avant la demi-finale contre Munich, qui a alors perdu de son intérêt. Le club n'avait pas les moyens de se payer des joueurs comme l'ancien meilleur marqueur d'ECHL John Spoltore, les 300 000 euros de déficit le prouvent. La bonne surprise a été le EC Hanovre, qui a mené deux manches à zéro dans sa demi-finale contre Dresde et a pu rêver de la montée avant de perdre les trois manches suivantes. La passion se perpétue quand même. L'Oberliga a aussi permis à des clubs comme Heilbronn et Riessersee de se relancer sur des bases plus saines, même si la viabilité économique et la continuité dans les formules de championnat font toujours défaut dans cette troisième division. Normalement, il aurait fallu se pencher sur son cas cet été, puisque le reste de la hiérarchie fonctionne (fonctionnait ?) bien. Mais comme la décision de la DEL de se muer en ligue fermée a créé le chaos partout ailleurs, le chantier de l'Oberliga passe au second plan...

Marc Branchu

 

 

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