Bilan du Mondial 2002 de division I (groupe A)

 

Le Belarus a finalement retrouvé sa place dans l'élite mondiale, dont il n'aurait jamais dû descendre. Sur le jeu pratiqué au cours de cette semaine, ce n'est que justice, car la qualité de la maîtrise et de la circulation du palet est digne du très haut niveau mondial. Le Belarus s'appuie sur un collectif particulièrement impressionnant, qui prend toute son ampleur dans les phases de supériorité numérique, où des adversaires plus faibles comme ceux rencontrés pendant ces championnats sont littéralement dépassés. A 33 ans, Vladimir Tsyplakov, revenu à Kazan après cinq saisons de NHL, a été le meneur attendu, point d'ancrage du système aussi bien défensivement qu'offensivement. Crédité de neuf buts et neuf assists, il a été élu meilleur attaquant du tournoi mais a été devancé au classement des marqueurs par son centre Alekseï Kalyuzhny (six buts et treize assists), qui a par ailleurs été le meilleur du tournoi sur le plan des mises au jeu puisqu'il en a gagné 71 %. C'est en fait l'ensemble de la première ligne qui a fait la différence et a été un danger permanent capable à tout instant de porter l'accélération décisive. Son arrière gauche Oleg Khmyl complète la liste des honneurs avec le titre de meilleur défenseur de la compétition. 

Il n'a pas manqué grand-chose à la France pour contester la victoire finale, mais le seul point faible véritablement criant dans ses premiers matches, à savoir son jeu de puissance tâtonnant, a été un handicap trop lourd lors de la "finale". Au moins les Bleus auront-ils montré que, malgré les départs de Bozon et Perez, ils ont toujours le niveau du groupe A. Si ils continuent dans cette voie, ils ont les moyens de remplir leurs deux prochains objectifs, la remontée dans l'élite dès l'an prochain et une nouvelle qualification aux Jeux dans quatre ans. C'est en fin de compte la deuxième ligne qui a pris la responsabilité de la relève, avec un François Rozenthal particulièrement à l'aise avec son patinage, un Jonathan Zwikel appliqué et décisif, et un Richard Aimonetto volontaire et combatif aux quatre coins de la glace. Même si Treille a pesé physiquement sur les défenses adverses, l'efficacité offensive (deux buts en vingt-trois tirs) lui fait toujours défaut et sa ligne qu'on attendait au tournant a souvent semblé se chercher offensivement. On aurait néanmoins tort de dire qu'elle a raté son championnat du monde, d'autant qu'elle a le mérite de n'avoir encaissé aucun but. Les quatre blocs ont en effet eu un temps de jeu proche et un apport équilibré, ce qui est l'enseignement le plus rassurant de ce tournoi. Pour le reste, Cristobal Huet a tenu son rôle et a empoché au passage le titre de meilleur gardien de la compétition. Il a été le dernier rempart de lignes arrières particulièrement imperméables et solides, ce qui constitue une satisfaction appréciable. Benoît Pourtanel a été particulièrement utile (une fiche de +9, la meilleure des Bleus, en témoigne) aussi bien par son travail défensif que par ses tirs de la bleue qui, face à des défenses peu expérimentées, assuraient toujours des rebonds intéressants. Le principal souci a en fait résidé dans les blessures de Dewolf et Bonnard qui ont failli placer la défense tricolore en situation de carence. Si elle a su parfaitement faire face à la situation, il n'en aurait peut-être pas été de même face à des adversaires plus cotés. Peut-être cela incitera-t-il Heikki Leime à revenir à une sélection comprenant huit défenseurs et douze attaquants. La position de treizième homme n'est en effet pas des plus confortables, et Yven Sadoun, compte tenu de son apport décisif au titre rémois, aurait sans doute rêvé d'une meilleure situation tant il a dû ronger son frein sur le banc.

Le Kazakhstan, est désormais entre deux eaux, condamné à végéter dans le ventre mou de la division I par la formule à deux poules désormais en vigueur pour l'antichambre du hockey mondial (et qui a de quoi être contestée au vu des déséquilibres constatés une fois de plus). Le quart de finale de Nagano appartient désormais au passé. Les Kazakhs ne peuvent plus compter sur leur colonie évoluant à Magnitogorsk, qui côtoyaient les sommets européens. Les joueurs évoluant dans l'élite russe ne sont plus qu'une poignée, et l'équipe nationale est constituée aux trois quarts par l'effectif d'Ust-Kamenogorsk, le champion national, toujours délicat à affronter en Coupe Continentale, mais qui n'évolue qu'au deuxième niveau russe. Cette jeune formation a moins l'expérience du haut niveau, et, s'il y a toujours un monde d'écart entre elle et des nations comme la Corée ou la Croatie, elle est également beaucoup trop tendre pour prétendre sérieusement à la montée. Elle aura néanmoins eu la satisfaction de voir se révéler, Viktor Alexandrov, rapide et doté d'une excellente vision du jeu, qui a terminé meilleur marqueur de son équipe avec deux buts et huit assists. Le fils de l'entraîneur national Boris Alexandrov est sans doute promis à un brillant avenir puisqu'il n'a que seize ans. 

Les Pays-Bas ont connu un Mondial assez frustrant puisqu'ils n'ont jamais éveillé l'intérêt du public. Leurs supporters ont été d'une discrétion rare et la principale animation est venue des groupes scolaires qui ont rempli un peu les gradins grâce à des places gratuites. De plus, l'équipe néerlandaise, privée de Hartogs blessé à l'aine, a reçu une correction de la part du Belarus qui lui a infligé quinze buts. Elle est toujours aussi dépendante de ses vétérans, notamment de Dave Livingston, qui a montré qu'il pouvait encore évoluer à un haut niveau l'espace d'une semaine, même si son corps n'a plus l'endurance d'autrefois et qu'il se contente de jouer en amateur et de se reconvertir comme entraîneur durant la saison. Sa vitesse n'a jamais été son point fort, et son instinct de buteur n'a rien perdu avec l'âge. Mais ne pas pouvoir se passer d'un presque quarantenaire n'est tout de même pas un bon signe pour une équipe qui attend la relève et ne voit toujours rien venir. L'essentiel a quand même été assuré avec une quatrième place logique.

La Croatie n'a pas souffert du boycott initial de certains joueurs du KHL Zagreb, peut-être mécontents de n'être pas plus représentés en sélection. Finalement, sans son habituel buteur d'origine russe Maksim Viktorov, elle a formé un groupe soudé de joueurs ayant une véritable envie de mouiller leur maillot national. Malgré ses limites techniques, sa volonté a été saluée de tous et elle a parfaitement rempli son objectif en obtenant le maintien. Elle a même eu l'agréable surprise de voir ses trois derniers matches diffusés à la télévision nationale HTV. Cela fait maintenant trois années de suite que les Croates repartent avec le sourire de leur rendez-vous mondial, et ils sont passés de la rubrique "surprises" à la rubrique "confirmations".

La Corée du Sud est évidemment la grande déçue de ce tournoi mondial. Ses gardiens n'ont pas réussi à faire de miracles, et le cœur n'a pas suffi. Leur agilité et leur vitesse de patinage sont de bons atouts, mais ils n'ont pas été appuyés par un jeu collectif suffisamment sûr. Trop de passes manquées et trop d'erreurs défensives coûtent cher dans un tournoi de ce niveau. La bonne satisfaction aura été la troisième ligne, qui mêlait jeunesse et expérience avec Han-Song Seo, le grand espoir Han-Sung Kim, pisté par un club japonais, et l'habile vétéran Woo-Sam Shin, toujours présent dans les grands rendez-vous. Mais le fossé était trop grand, et le manager de l'équipe, Woon-Ik Chung, en tire les conclusions : "Quand la Croatie ou nous jouons contre le Belarus ou le Kazakhstan, le résultat est déjà connu d'avance. Cela serait bien mieux pour tous les participants si on réunissait les groupes horizontalement et non plus verticalement. Les résultats d'Eindhoven et de la poule hongroise ont bien montré que la formule actuelle a pour conséquence une compétition à deux vitesses."

Marc Branchu

 

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