Mai 2004 : anecdotes

 

Les sifflets de Fasel

Pourquoi le président de l'IIHF, René Fasel, a-t-il été sifflé par une partie du public lors de la cérémonie remise des médailles des championnats du monde de Prague ? Ces lazzi peuvent surprendre. Le but litigieux accordé au Canada en demi-finale de ce Mondial face aux voisins slovaques n'y est pas étranger car il a conforté la suspicion envers la fédération internationale, via l'arbitrage. Mais celle-ci a des origines bien plus lointaines.

Si Fasel a été plus particulièrement visé, c'est en fait pour un contentieux datant des Jeux Olympiques de Nagano. À l'époque, la NHL participait pour la première fois aux JO, et la fédération internationale, soumise, était prête à toutes les concessions pour qu'elle reste à l'avenir. Cet état d'esprit, esclave des exigences des Nord-Américains qui conditionnaient le succès du tournoi olympique à la présence de leurs équipes en finale, avait contaminé René Fasel, qui laissa échapper un "yes" rageur lorsque le Canada égalisa à la dernière minute lors de la demi-finale contre la République Tchèque. Problème, cette manifestation de joie n'avait pas échappé aux caméras, et elle a induit les soupçons d'un traitement différent de la fédération internationale "selon que vous soyez puissant ou misérable" (ce que les Slovaques ont aussi vécu à leurs dépens aux JO 2002). Les Tchèques ne l'ont toujours pas pardonné, et le Suisse suscite chez eux la méfiance.

Resquilleur

Le hockeyeur américain Blake Sloan a été arrêté par la police dans le métro de Prague alors qu'il n'avait pas de billet. Il a donc dû payer une amende de 400 couronnes. Rassurez-vous, il ne sera ruiné pour autant, cela représente environ douze dollars à comparer à son salaire annuel de 905000 dollars. De plus, qui connaît le métro de Prague trouvera des circonstances atténuantes au resquilleur, car comprendre le fonctionnement de la tarification des guichets automatiques est difficile si l'on ne demande pas l'aide d'un autochtone.

L'affaire Mike Danton

La saga du mois de mai concerne l'attaquant des Blues de Saint-Louis, Mike Danton. Le sulfureux joueur de quatrième ligne a en effet été arrêté par le FBI le 15 avril dernier, soupçonné d'avoir ourdi un complot visant à l'assassinat d'une personne non identifiée.

Le joueur traîne une réputation de trublion, qui commença dès son adolescence. Joueur vedette de la ligue de l'Ontario, celui qui s'appelle alors Mike Jefferson débute sa carrière professionnelle avec les Devils du New Jersey. Il y entre en conflit avec le directeur général Lou Lamoriello, passant même un an loin de la glace, pour une obscure histoire d'ordonnance médicale non remboursée... S'étant racheté une conduite, Jefferson prend le nom de Danton en 2002 pour s'éloigner de sa famille, revient aux Devils, avant de claquer la porte de l'équipe et de refuser de jouer pour l'équipe réserve. Finalement transféré en juin 2003 à Saint-Louis, Danton réalise une bonne saison sur le plan sportif. Mais l'histoire ne fait en réalité que débuter.

Une jeune femme de 19 ans, Katie Wolfmeyer, est en effet arrêtée dans le Missouri, peu de temps après avoir tenté de recruter un tueur, qui s'est avéré être un contact du FBI. Elle est considérée comme une fan et amante occasionnelle de Danton, et plaide l'innocence. La justice met la main sur Danton le lendemain, c'est-à-dire dès l'élimination de son équipe, alors qu'il est à San José et qu'il tente de partir par la porte arrière d'un aéroport... dans le but, selon son avocat, "de se rendre à Saint-Louis pour se défendre".

Danton aurait choisi l'assassinat - mais il est aux yeux du procureur trop peureux pour le faire lui-même - pour se débarrasser d'une personne non identifiée à la suite d'une dispute à propos de son usage immodéré d'alcool et d'antidépresseurs, et d'une proximité étouffante. Il aurait alors craint que cette connaissance n'en parle avec le manager des Blues et ruine sa carrière. Sauf que l'attaquant nie les faits. Emprisonné, il voit alors la justice s'intéresser de très près à l'évolution de sa carrière, et plus particulièrement à ses relations avec son agent, Dave Frost. Ce personnage controversé n'a pas une très bonne considération de la part de ses pairs, qui jugent ses méthodes proches de celles d'un gourou. Son attitude envers deux jeunes espoirs, Danton - dont il gère la carrière depuis ses onze ans - et Sheldon Keefe, fut il est vrai fort contestable, tant ces deux attaquants si prometteurs ont connu des difficultés relationnelles dans leurs équipes respectives... Le complot pour meurtre aurait été prémédité depuis au moins six mois et l'attaquant aurait déjà contacté des tueurs à trois reprises.

Danton reste incarcéré jusqu'au procès, en juillet, car la justice craint que le Canadien ne profite d'une libération pour franchir la frontière, et l'estime potentiellement dangereux. L'affaire prend un tour rocambolesque lorsque l'agent du joueur, Dave Frost, considéré par beaucoup comme la victime potentielle du complot, ne ménage pas sa peine pour défendre son poulain, au risque de faire obstruction à l'enquête en tentant, aux yeux des juges, de manipuler les déclarations de Danton... Une relation joueur-agent étouffante, comme en témoigne Ryan Johnson, coéquipier des Blues, qui parle de conversations téléphoniques ou de messages incessants, parfois même pendant les interruptions de match !

Frost réclame la libération de Danton pour une aide psychologique et une opération à l'épaule. Plus surprenant, au cours d'une conférence de presse téléphonique, le joueur remercie son agent et met en cause sa famille, l'accusant d'avoir abusé de lui, ce que confirme Frost et explique selon ce dernier son attitude "paternelle" envers le joueur. De son côté, la famille accuse Frost d'un lavage de cerveau en règle de leur fils, aboutissant à un éloignement de plus important, jusqu'à la rupture complète.

Pourtant, les preuves sont nombreuses. De multiples conversations téléphoniques enregistrées tendent à prouver le complot, et la cible du meurtre semble bien avoir été Frost. Celui-ci aurait par ailleurs contacté par téléphone Danton, emprisonné en Californie, à plus de 75 reprises ! Les discussions, plus ou moins codées, paraissent confirmer l'étrange relation des deux hommes. La vie privée de Danton apparaît sur la place publique, et les causes de la tentative de complot pourraient être pêle-mêle une dette, les relations sexuelles du joueur avec des fans, son abus d'antidépresseurs, ses penchants alcooliques, son enfance malheureuse... Bref, difficile de démêler le vrai du faux dans cette "saga" du printemps, où chacun dissimule son rôle. Jugement des accusés en juillet.

 

 

Les citations du mois

 

"Honnêtement, l'an dernier, j'étais très confiant. Je sentais que l'équipe progressait, mais aujourd'hui j'ai peur que nous allions directement vers la dernière place... Nous n'avons pas les moyens de préparer correctement ce mondial. [...] Je suis sous contrat avec la fédération jusqu'en 2006. Mais devant le manque de passion des dirigeants, je me pose des questions. Ce n'est pas une question d'argent, plutôt une dynamique qui n'existe plus. Je ne veux pas rester simplement pour toucher mon salaire à la fin du mois."

Heikki Leime, entraîneur de l'équipe de France, dans une interview publiée dans le mensuel suisse Top Hockey daté de mai 2004 et réalisée (par Laurent Bellet) AVANT les championnats du monde.

"Si l'entraîneur de l'équipe d'Allemagne de football Rudi Völler était aussi susceptible que Hans Zach, il devrait démissionner au moins une fois par semaine."

Le Kölner Stadtanzeiger raille Zach qui a fait porter le chapeau de son retrait du poste de sélectionneur national à la presse qui avait pour une fois osé le remettre en doute.

"Silence ! Dieu va parler !"

C'est par ces mots que le chroniqueur-polémiste suisse Klaus Zaugg demanda à ses confrères journalistes de se taire pour mieux stigmatiser sa cible favorite, le sélectionneur national Ralph Krueger, qui venait de faire son entrée en conférence de presse après un match du championnat du monde. Hé oui, si Krueger était aussi susceptible que Zach, il n'y a pas un jour où il ne devrait pas démissionner.

- Lorsque vous jouiez au CSKA Moscou, vous aviez commandé en Tchéquie deux masques de gardien, l'un avec le logo du club et l'autre avec la silhouette du Kremlin. Ferez-vous de même au Severstal ?

- Oui, j'ai passé commande d'un masque bleu et jaune avec l'emblème du club. Par contre, le symbole de Cherepovets, à ma connaissance, ce sont les cheminées du complexe métallurgique. Les mettre sur le masque, ce n'est peut-être pas la meilleure idée qui soit.

Le gardien tchèque Dušan Salfický, transféré du CSKA Moscou au Severstal Cherepovets, dans une interview au quotidien Sport-Express.

 

 

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